Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 V 154



115 V 154

24. Arrêt du 14 juin 1989 dans la cause Office fédéral de l'industrie, des
arts et métiers et du travail contre M. & Fils et Tribunal administratif
de la République et canton de Neuchâtel Regeste

    Art. 4 Abs. 1 BV, Art. 65 Abs. 1 und 3 AVIV: Erwerbszweige mit
Anspruch auf Schlechtwetterentschädigung. Es verstösst weder gegen Gesetz
noch Verfassung, dass die Schlechtwetterentschädigung bei reinen Reb-,
Pflanzen-, Obst- und Gemüsebaubetrieben ganz besondere Wetterverhältnisse
(aussergewöhnliche Trockenheit oder Nässe) voraussetzt und nicht bloss
Kälte oder Schnee.

Sachverhalt

    A.- L'entreprise M. & Fils, spécialisée dans l'architecture de jardins
et l'arboriculture, exploite notamment des cultures fruitières. Par
avis d'interruption de travail pour cause d'intempéries daté du 12
janvier 1987, relatif à six de ses employés, elle a annoncé à l'Office
cantonal neuchâtelois du travail que la taille de vergers situés dans
une exploitation au pied du Jura neuchâtelois avait dû être interrompue
dès ce jour en raison du froid excessif et de neige intempestive, compte
tenu des très gros risques d'accidents.

    Par décision du 15 janvier 1987, l'office précité a informé la
requérante que l'indemnité prétendue ne pouvait lui être octroyée,
attendu que les conditions météorologiques telles que le froid et la neige
n'entrent pas en considération dans le cadre de l'art. 65 al. 3 OACI,
cette disposition réglementaire étant par ailleurs seule applicable à
une exploitation fruitière en monoculture.

    B.- L'entreprise M. & Fils a recouru devant le Département de
l'économie publique de la République et canton de Neuchâtel contre cette
décision dont elle demandait implicitement l'annulation, en alléguant que
la température était de l'ordre de quinze à dix-huit degrés au-dessous de
zéro lors de l'interruption de travail et que la neige empêchait de voir
les "yeux et bourgeons" des arbres à tailler, de sorte que l'on se trouvait
en présence d'un froid inhabituel et de neige intempestive, situation
semblable à la sécheresse inhabituelle et aux pluies intempestives.

    Par décision du 18 décembre 1987, le département de l'économie
publique, statuant en qualité d'autorité inférieure de recours, a admis
le recours, annulé la décision administrative litigieuse et renvoyé la
cause à l'office cantonal du travail pour qu'il examine la réalité des
conditions atmosphériques contraignantes dès le 12 janvier 1987 et statue
au sens des considérants, au motif que l'art. 65 al. 3 OACI, en limitant
le versement de l'indemnité aux seuls cas de sécheresse inhabituelle et
de pluies intempestives, introduit une discrimination contraire à la loi,
d'autant moins explicable que les branches énumérées à l'art. 65 al. 1
OACI, telles que les aménagements de jardin, la sylviculture, l'extraction
de la tourbe et les scieries, ont droit aux indemnités en cas d'intempéries
aussi bien en été qu'en hiver, donc également en cas de froid et de neige.

    C.- L'Office fédéral de l'industrie, des arts et métiers et du travail
(OFIAMT) a recouru devant le Tribunal administratif de la République
et canton de Neuchâtel contre cette dernière décision dont il demandait
l'annulation, le rôle de l'assurance-chômage n'étant pas d'indemniser les
branches d'activité énumérées à l'art. 65 al. 3 OACI pour des interruptions
"normales" de travail, celui-ci devant, en règle générale, être interrompu,
au moins temporairement, pendant l'hiver, soit durant la période sans
végétation.

    Par jugement du 24 mai 1988, la juridiction cantonale a admis
partiellement le recours, annulé la décision entreprise et renvoyé le
dossier à l'office cantonal du travail pour instruction complémentaire
et nouvelle décision. Elle a considéré, en bref, que les deux éléments
extérieurs figurant à l'art. 65 al. 3 OACI, à savoir une sécheresse
inhabituelle et des pluies intempestives, paraissent insuffisants;
qu'en effet, d'autres conditions atmosphériques, comme la neige et le
froid, peuvent paraître contraignantes au sens de l'art. 43 al. 1 let. a
LACI et empêcher l'exécution de travaux saisonniers; qu'en l'espèce, la
question se pose de savoir si la taille des vergers en janvier constitue
des travaux saisonniers, mais que, en l'état du dossier, une instruction
complémentaire est nécessaire sur ce point, avec enquête dans les milieux
intéressés; qu'en cas de travaux saisonniers, les indemnités sollicitées
devraient être allouées, pour autant que les conditions atmosphériques
fussent contraignantes les 12, 13 et 14 janvier 1987.

    D.- L'OFIAMT interjette recours de droit administratif contre
ce jugement dont il demande l'annulation, le Tribunal fédéral des
assurances étant invité à dire que les indemnités en cas d'intempéries
ne peuvent être versées pour la période du 12 au 14 janvier 1987, motif
pris que le froid et la neige ne sauraient être assimilés aux conditions
mentionnées à l'art. 65 al. 3 OACI, puisque, dans notre pays, la neige et
les températures basses ne peuvent être considérées comme exceptionnelles
au mois de janvier.

    L'entreprise M. & Fils n'a pas répondu au recours, sur lequel le
Département de l'économie publique de la République et canton de Neuchâtel
n'a pas d'observations à formuler.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Selon l'art. 42 al. 1 LACI, les travailleurs qui exercent leur
activité dans les branches où les interruptions de travail sont fréquentes,
en raison des conditions atmosphériques, ont droit à l'indemnité en cas
d'intempéries lorsque leur employeur est tenu de cotiser à l'assurance et
qu'ils subissent une perte de travail à prendre en considération. La perte
de travail est prise en considération lorsque, entre autres conditions,
elle est causée par des conditions atmosphériques contraignantes (art. 43
al. 1 let. a LACI). D'après l'art. 42 al. 2 LACI, le Conseil fédéral
détermine les branches dans lesquelles l'indemnité peut être versée. Il
a fait usage de cette délégation de compétence à l'art. 65 al. 1 OACI,
qui, dans sa version en vigueur depuis le 1er juillet 1985, contient
l'énumération suivante:
   a. Bâtiment et génie civil, charpenterie, taille de pierre et carrières;
   b. Extraction de sable et gravier; c. Construction de voies ferrées
   et de conduites en plein air; d. Aménagements extérieurs (jardins);

    e. Sylviculture et extraction de tourbe, dans la mesure où ces
activités ne sont pas exercées accessoirement à une exploitation agricole;
   f. Extraction de terre glaise et tuilerie; g. Pêche professionnelle;

    h. Transports dans la mesure où les véhicules sont occupés
exclusivement au transport de matériaux d'excavation et de construction
vers ou à partir des chantiers ou au transport de matériaux provenant de
lieux d'extraction de sable et de gravier;
   i. Scierie.

    Aux termes de l'art. 65 al. 3 OACI (dans sa teneur en vigueur depuis le
1er juillet 1985), de surcroît, l'indemnité en cas d'intempéries peut être
versée aux seules exploitations viticoles, plantations et exploitations
fruitières ou maraîchères, lorsque les travaux saisonniers ne peuvent
pas s'effectuer normalement en raison d'une sécheresse inhabituelle ou
de pluies intempestives.

    b) Comme le Tribunal fédéral des assurances l'a exposé dans l'ATF 112
V 141 consid. 3b, le Conseil fédéral jouit dans le cadre de l'art. 42
al. 2 LACI d'une liberté d'appréciation très étendue et notamment de
la compétence, dans les limites de l'interdiction de l'arbitraire,
d'énumérer dans une liste exhaustive les branches d'activité pour
lesquelles l'indemnité en cas d'intempéries peut être versée.

    Aussi, et étant donné que la détermination des branches d'activité
donnant droit à l'indemnité en cas d'intempéries est essentiellement une
affaire d'ordre politique, la Cour de céans use-t-elle de retenue dans
l'examen de la légalité et de la constitutionnalité de l'art. 65 al. 1 OACI
(ATF 112 V 142 consid. 3c). Il en va de même de l'art. 65 al. 3 OACI.

    La genèse de la loi ne donne pas de critères sur lesquels le Conseil
fédéral doit se fonder pour déterminer les branches d'activité avec
droit à l'indemnité en cas d'intempéries (MEYER-BLASER, Zur Aufzählung
der Erwerbszweige mit Anspruch auf Schlechtwetterentschädigung in
Art. 65 Abs. 1 Arbeitslosenversicherungsordnung, RSJ 1986 p. 4),
si ce n'est qu'elles doivent l'être de façon restrictive (ATF 112 V
142 consid. 3c précité). Selon l'art. 42 al. 1 LACI, il s'agit là de
branches où les interruptions de travail sont fréquentes, en raison des
conditions atmosphériques. L'autorité exécutive avait dès lors toute
liberté d'édicter une réglementation propre aux exploitations viticoles,
plantations et exploitations fruitières ou maraîchères, où sont effectués
des travaux saisonniers. C'est ce qu'elle a fait à l'art. 65 al. 3 OACI,
en subordonnant le droit à l'indemnité à des circonstances météorologiques
exceptionnelles par rapport aux conditions atmosphériques normales que
constituent la pluie, la neige et le froid lors d'intempéries (GERHARDS,
Kommentar zum Arbeitslosenversicherungsgesetz, p. 508 ad 25). Il faut,
en effet, que les travaux saisonniers ne puissent pas être effectués
normalement en raison d'une sécheresse inhabituelle ou de pluies
intempestives ("wegen aussergewöhnlicher Trockenheit oder Nässe" selon le
texte allemand, "a causa di siccità o di umidità straordinarie" dans la
version italienne) pour que l'indemnité en cas d'intempéries puisse être
versée aux seules exploitations et plantations mentionnées ci-dessus,
lesquelles, au demeurant, ne doivent plus être axées sur la monoculture
depuis le 1er juillet 1985, date de l'entrée en vigueur de la modification
de l'art. 65 al. 3 OACI par l'ordonnance sur l'assurance-chômage du 25
avril 1985.

    Le fait que les exploitations et plantations énumérées à l'art. 65
al. 3 OACI doivent être touchées spécialement par les circonstances
météorologiques n'est pas contraire à la loi ni à la Constitution. Il
n'est pas arbitraire, en effet, de soumettre le droit aux indemnités aux
seules conditions atmosphériques que sont les pluies intempestives ou une
sécheresse inhabituelle - cette dernière condition étant du reste étrangère
à une situation de pluie, de neige ou de froid -, sans que soient posées
d'exigences relatives à l'exposition des travailleurs aux conditions
météorologiques (art. 65 al. 2 OACI; cf. sur ce point GERHARDS, op.cit.,
p. 508 ad 24). Que ni le froid ni la neige ne figurent à l'art. 65 al. 3
OACI ne crée aucune inégalité de traitement manifestement injustifiée
par rapport aux branches d'activité mentionnées à l'art. 65 al. 1 OACI,
notamment la sylviculture et l'extraction de tourbe. Cette restriction
s'explique par le caractère saisonnier des travaux dont l'interruption
peut donner lieu au versement d'indemnités en cas d'intempéries, ceux-ci
variant, par définition, en fonction des saisons, ce qui signifie aussi
qu'ils s'effectuent normalement de façon différente selon qu'il s'agit de
l'hiver, où sévissent en règle générale la pluie, la neige et le froid,
ou d'une autre période de l'année. Certes existe-t-il des cas à la limite,
par ex., de la sylviculture (art. 65 al. 1 let. e OACI) et des plantations
et exploitations fruitières (art. 65 al. 3 OACI). On ne saurait pour autant
en conclure que la réglementation instituée par le Conseil fédéral viole
l'art. 4 al. 1 Cst.

Erwägung 2

    2.- Il est constant que seul l'art. 65 al. 3 OACI s'applique en
l'espèce. Pour les raisons exposées au considérant 1 du présent arrêt, la
Cour de céans ne saurait se ranger à l'avis des premiers juges, le fait
que ni le froid ni la neige ne figurent à l'art. 65 al. 3 OACI n'étant,
ainsi qu'on l'a vu, pas arbitraire.

    Que le froid fût excessif parce que la température était tombée
à quinze, voire dix-huit degrés au-dessous de zéro, ne change rien au
fait que ni le froid ni la neige ne sont des circonstances climatiques
exceptionnelles un 12 janvier, voire les jours suivants. Cela n'a rien
d'extraordinaire, en effet, compte tenu des variations saisonnières -
les écarts de température à pareille époque de l'année ne sont pas rares
- et de la situation géographique des cultures fruitières concernées,
lesquelles se trouvent à 450 mètres d'altitude. Par ailleurs, que la
neige fût abondante le mardi 13 janvier ne l'assimile pas pour autant à
des pluies intempestives. A cet égard, on relèvera que, dans le langage
courant, le terme intempestif est utilisé pour qualifier ce qui se produit
à contretemps (Dictionnaire de la langue française PETIT ROBERT). C'est
du reste dans ce sens qu'il faut comprendre ce terme dans le cadre de
l'art. 65 al. 3 OACI (arrêt non publié W. du 12 février 1988). Or, si
abondantes qu'ont pu être les chutes de neige à ce moment-là, elles ne
sauraient être considérées comme s'étant produites à contretemps. A cela
s'ajoute le fait que la neige n'est pas exceptionnelle à pareille époque
de l'année.

    Cela étant, c'est à juste titre que l'office cantonal du travail
s'est opposé à l'allocation des indemnités litigieuses.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

    Le recours est admis et le jugement du Tribunal administratif de la
République et canton de Neuchâtel, du 24 mai 1988, ainsi que la décision du
Département de l'économie publique de la République et canton de Neuchâtel,
du 18 décembre 1987, sont annulés.