Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 IV 81



115 IV 81

17. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 20 mars 1989
dans la cause Procureur général du canton du Jura c. C. (pourvoi en
nullité) Regeste

    Art. 41 Ziff. 1 Abs. 1 StGB; bedingter Strafvollzug.

    Die Gewährung des bedingten Strafvollzugs bei Fahren in angetrunkenem
Zustand ist gegenüber einem einschlägig vorbestraften Fahrzeuglenker
nicht notwendigerweise ausgeschlossen.

Sachverhalt

    A.- Le 1er avril 1988, vers 23 h 50, C., garagiste né en 1962,
circulait à Porrentruy au volant d'une voiture. Il a ralenti mais ne s'est
pas arrêté à un stop (il l'a "coulé"), ce qui a attiré l'attention de la
police. L'analyse de son sang a révélé un taux d'alcoolémie de 1,18g 0/00.

    Il est admis que C., qui n'avait pas consommé d'alcool au cours de la
journée, s'est rendu vers 18 heures dans un établissement public où il a
rencontré des clients. Il y a consommé six bières - de 2 dl selon ses dires
- puis une autre dans un second café. Vers 23 h 30, il a repris le volant
afin de regagner son domicile de Courtedoux distant de moins de 2 km.

    En 1987, C. avait été condamné à une amende de 650 francs, notamment
pour conduite sous l'influence de l'alcool.

    B.- Le tribunal de première instance a condamné C. à une peine de dix
jours d'emprisonnement avec sursis pendant trois ans et à une amende de
300 francs pour avoir circulé au volant d'un véhicule automobile en étant
pris de boisson, utilisé illicitement des plaques de contrôle et circulé
alors qu'il n'était pas couvert par une assurance responsabilité civile.

    Le Procureur général du canton du Jura ayant interjeté un appel limité
à la question de l'octroi du sursis, la Cour pénale du Tribunal cantonal
jurassien a maintenu la condamnation à dix jours d'emprisonnement,
ainsi que le sursis, mais a porté le délai d'épreuve de trois à cinq
ans. L'amende de 300 francs a aussi été confirmée.

    C.- Le Procureur général du canton du Jura a formé un pourvoi en
nullité limité à la question du sursis.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Aux termes de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP, le sursis pourra
être octroyé si la peine n'excède pas 18 mois et si les antécédents et
le caractère du condamné font prévoir que cette mesure le détournera de
commettre d'autres crimes ou délits.

    Dans cette matière, comme dans celle de la fixation de la peine,
un large pouvoir d'appréciation est laissé aux autorités cantonales. Le
Tribunal fédéral annule leurs décisions sur ces points seulement si elles
reposent sur des considérations étrangères à la disposition appliquée ou
si elles apparaissent comme insoutenables (ATF 105 IV 292 consid. 3 et
jurisprudence citée, 96 IV 103).

    Importent avant tout pour l'octroi du sursis les perspectives
d'amendement durable du condamné, telles qu'on peut les déduire de ses
antécédents et de son caractère. Le pronostic doit être posé sur la base
des éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé (ATF
101 IV 330 lettre d et les arrêts cités). De vagues espoirs quant à la
conduite future du délinquant ne suffisent pas pour poser un pronostic
favorable. Une nouvelle infraction commise dans le même domaine qu'une
précédente infraction, alors sanctionnée par une peine assortie du sursis,
constitue à elle seule un motif de prévision défavorable (voir ATF 105
IV 228 consid. b; LOGOZ/SANDOZ partie générale p. 233).

    b) La jurisprudence relative à l'octroi du sursis en matière d'ivresse
au volant a été modifiée dans deux arrêts de principe (ATF 95 IV 49 et 55).
Antérieurement, il était donné plus d'importance aux circonstances de
l'acte avec cette conséquence que les antécédents les plus favorables
et les plus propres à écarter le reproche d'absence d'égards n'étaient
plus pris en considération. Une appréciation d'ensemble, comprenant
la situation personnelle de l'auteur d'une part et les circonstances
particulières de l'acte d'autre part, est de nature à y remédier. En
d'autres termes, la prévision dont il est question à l'art. 41 ch. 1
CP n'est pas divisible. Pour que l'on puisse admettre qu'une peine avec
sursis provoquera une amélioration durable, il faut que le pronostic soit
favorable tant d'après la situation personnelle de l'auteur que d'après
les circonstances. Lorsque la prévision est favorable sous l'angle des
antécédents, mais non sous celui de l'acte, il faut donner la préférence
à une appréciation générale.

    Dans l'arrêt publié aux ATF 105 IV 291, il est indiqué que celui
qui, par insouciance, prend le volant sous l'influence de l'alcool et
accepte le risque d'exposer la vie et la sécurité d'autrui à un sérieux
danger, montre ainsi, en général, un manque du sens des responsabilités
dénotant un défaut de caractère. Toutefois, cela ne doit pas conduire à
un refus systématique du sursis, lequel a été institué pour des raisons
qui tiennent avant tout de la prévention spéciale. Au contraire, à côté des
circonstances de l'acte, il y a lieu de tenir compte des antécédents et de
toutes les autres circonstances permettant de tirer des conclusions sur
le caractère de l'auteur ainsi que sur ses chances de faire ses preuves;
fondé sur ces éléments, qui feront l'objet d'une appréciation d'ensemble,
on décidera si un pronostic favorable ou non peut être posé.

    En général, la consommation exagérée de boissons alcooliques par un
conducteur, qui sait qu'il va reprendre le volant, aggrave nettement
son cas. Certes, des circonstances imprévues et contraignantes ou
un état qui ne lui permettait pas d'apprécier la portée de ses actes,
lorsqu'il s'est décidé à reprendre le volant, peuvent être invoqués à
sa décharge; cependant, il n'en ira pas ainsi lorsque - par exemple - il
y a des circonstances qui, même dans son état, auraient dû le détourner
de conduire.

    Le taux d'alcoolémie peut également jouer un rôle sur ce plan; en
effet, plus il est élevé plus on se montrera sévère dans l'appréciation
de l'absence de scrupules, donc du pronostic favorable (ATF 100 IV 134
consid. 1 et jurisprudence citée).

    Saisie d'un pourvoi relatif à l'octroi du sursis en matière d'ivresse
au volant, la cour de céans examine si l'autorité cantonale a tenu compte
des principes jurisprudentiels précités et si elle n'a pas abusé du large
pouvoir d'appréciation qui lui est reconnu.

Erwägung 3

    3.- a) Sur le plan de la faute de circulation reprochée à l'accusé,
soit d'avoir seulement ralenti à un stop, on doit admettre qu'elle
est bénigne. Le conducteur n'a pas causé d'accident ni même de risque
d'accident. Quant à la gravité, cette faute n'a rien de comparable avec
une inattention manifeste ou avec une perte de maîtrise du véhicule due à
un important excès de vitesse. L'alcoolémie de 1,18 g 0/00, relevée dans
le sang de l'intimé n'a donc pas eu pour conséquence une mise en danger
concrète de la sécurité des usagers de la route.

    b) Concernant les antécédents et la situation personnelle de
l'auteur, il est vrai que l'amende de 650 francs prononcée en mai 1987,
notamment pour conduite sous l'influence de l'alcool, aggrave le cas de
l'intimé. Cependant, on l'a vu, la récidive ne doit pas automatiquement
exclure l'octroi du sursis. Au demeurant, on peut admettre qu'une première
sanction, sous forme d'amende, ne constitue pas un avertissement du même
poids qu'un antécédent puni par une peine privative de liberté (voir
art. 38 ch. 4 CP en matière de libération conditionnelle par exemple).

    Sans être exceptionnelles, les circonstances qui ont entraîné l'intimé
à boire exagérément ne dénotent pas un mépris de la sécurité d'autrui dû
au seul égoisme. Il s'est trouvé avec des clients qu'il avait rencontrés
au café; il a été quelque peu poussé à consommer de la bière avec eux.

    L'accusé a également fait preuve d'insouciance en circulant avec les
plaques de contrôle de son employé, ce qui le privait de la couverture
de l'assurance responsabilité civile. Cela ne constitue cependant pas
une faute compromettant directement la sécurité d'autrui.

    Le refus du sursis à cause de ces deux éléments aggravants équivaudrait
presque à en exclure l'octroi dès qu'il existe une récidive, quelle
qu'en soit la gravité. Ce serait diminuer la portée du changement de
jurisprudence précité (ATF 95 IV 49 et 55).

    c) L'autorité cantonale s'est conformée à l'interprétation
jurisprudentielle de l'art. 41 ch. 1 al. 1 CP en se fondant sur une
appréciation d'ensemble des facteurs pertinents. Après avoir entendu
l'accusé, elle a considéré que les bons renseignements recueillis sur son
compte, le fait qu'il n'a jamais causé d'accident malgré le kilométrage
important parcouru en raison de son métier, la distance peu élevée qui
le séparait de son domicile et le taux d'alcoolémie relativement bas ne
justifiaient pas une appréciation sévère des circonstances particulières
influant sur la question du sursis. Cependant, le délai d'épreuve a été
fixé à 5 ans, soit au maximum légal.

    Dans ces circonstances, compte tenu avant tout du large pouvoir
d'appréciation laissé à l'autorité cantonale, l'on ne saurait admettre
que celle-ci a violé le droit fédéral. Le pourvoi doit être rejeté.