Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 IV 8



115 IV 8

3. Extrait du jugement de la Cour pénale fédérale du 24 février 1989 dans
la cause Ministère public de la Confédération c. Hariri Regeste

    Art. 112 StGB; Mord.

    Ein Fanatismus, der bis zur totalen Missachtung des Lebens anderer
Menschen führt, bildet eines der spezifischen Merkmale des Mordes, indem
er die Geisteshaltung des Täters enthüllt und die besondere und dauernde
Gefahr offenbart, die er für diejenigen darstellt, welche seinen Glauben
nicht teilen.

Sachverhalt

A. L'accusé

    a) Hussein Ali Mohamad est né semble-t-il le 10 mars 1966 dans
le Sud-Liban. Cinquième d'une famille de sept enfants, il a bénéficié
d'un milieu familial harmonieux, respectant son père, âgé maintenant de
55 ans et homme de bien, ennemi de la violence, ainsi que sa mère, qui
encadre bien sa famille, mais redoute les contacts extérieurs. Les valeurs
prédominantes de cette famille sont le soutien mutuel inconditionnel,
la vie collective, la solidarité, la discrétion et la modestie. Hariri
a commencé, à l'âge de trois ou quatre ans, à fréquenter une école
chrétienne. Il a acquis l'écriture vers cinq-six ans et il a toujours
obtenu des notes satisfaisantes, même en dessus de la moyenne,
sans toutefois être un élève brillant. Il n'a pas eu de problèmes
disciplinaires, s'entendant bien tant avec ses camarades qu'avec ses
professeurs. Il a continué sa scolarité jusqu'en 1982, soit jusqu'à seize
ans. Ses branches préférées étaient la géométrie et la géographie, ses
sports favoris le volley-ball et le tennis de table. La fin de la scolarité
d'Hariri a coïncidé avec la période d'occupation du Sud-Liban par l'armée
israélienne. Un grand nombre d'écoles professionnelles ont été fermées
et il y avait très peu de possibilités d'apprentissage, c'est pourquoi
Hariri, ne pouvant comme il le souhaitait acquérir un métier technique
dans le domaine de l'électricité ou de la mécanique, a accepté d'aller
rejoindre son père qui, en 1980, à la suite de conflits intercommunaux
et des interventions israéliennes était parti pour Bangui, en Afrique,
où il tenait un magasin. Hariri est resté 18 mois auprès de son père,
mais il a eu de plus en plus la nostalgie de son pays et du reste de sa
famille resté au Liban. Presque immédiatement après son retour, en 1984,
il a été arrêté par les Israéliens et placé dans un camp. Interné d'abord
dans le camp d'Aman, au Sud-Liban, il a été ensuite transféré dans le
camp Adlid, à proximité d'Haïfa. Il a été libéré dix mois plus tard,
en 1985, dans le cadre de négociations consécutives à un détournement
d'avion. A sa libération, Hariri est retourné à Bangui pour se reposer,
aussi n'a-t-il pas aidé son père au magasin. Cinq mois après, il est
revenu au Liban où il a travaillé avec un de ses beaux-frères, dans un
commerce de voitures d'occasion importées d'Allemagne. Cette période a
été entrecoupée d'un bref et troisième séjour à Bangui au cours duquel il
a fait commerce d'appareils audiovisuels. C'est en 1985, à sa libération
des camps palestiniens, que Hariri a adhéré au Hezbollah. En 1986, il a
fait un stage militaire dans un camp de la Bekaa, où il a appris l'usage
des armes. II. Les faits de la cause

    Après son troisième séjour à Bangui, Hariri est revenu au Liban où il
a reçu des chefs du mouvement Hezbollah la mission de détourner un avion
sur Beyrouth, de façon à disposer d'une monnaie d'échange. Il a reçu à
cet effet un document en langue arabe contenant des instructions sur les
revendications à présenter. Avec un pistolet cal. 7,65 browning, trois
cartouches à blanc, environ 140 cartouches à balle contenues notamment
dans trois paquets de 25, trois détonateurs, deux piles de 9 volts, des
fils électriques et 562 g de trinitrotoluène, il s'est rendu à Bangui
où il est resté environ un mois avant de prendre le 23 juillet un avion
d'Air Afrique dont la destination était Paris via Rome. Ce vol (Air
Afrique RK 056) avait été choisi en raison du grand nombre de Français
se trouvant à bord, dans l'espoir de pouvoir obtenir la libération des
Libanais détenus en France. Il semble que le matériel mentionné plus haut
ait pu être introduit dans l'avion grâce à la complicité d'un employé de
l'aéroport de Bangui. Alors qu'il aurait été probablement plus facile de
détourner l'avion avant l'escale de Rome, Hariri a décidé de ne procéder
au détournement qu'après le départ de cette ville car, devant agir seul,
il espérait que la moitié des passagers descendraient à cette escale. Il
a également pris un billet Bangui-Rome, pour éviter d'avoir à présenter
un visa pour la France.

    A Rome, Hariri est resté dans l'avion sans être interpellé, un autre
passager étant descendu sans s'annoncer et la vérification par comptage
n'ayant pour cette raison pas permis de le repérer. Peu après le départ
en direction de Paris, à la verticale de l'île d'Elbe, vers 7 h, il s'est
rendu aux toilettes avec le sac de sport dans lequel se trouvait son
matériel. Il a pris son pistolet, chargé de trois cartouches à blanc et de
cinq cartouches à balle, ainsi qu'un chargeur de réserve rempli de huit
cartouches à balle, dans la poche de sa chemise, et cinquante cartouches
à balle en vrac, dans les poches de son pantalon. Une demi-heure après, il
a fait irruption en criant dans le compartiment de première classe, tirant
deux coups à blanc, puis dans la cabine de pilotage où il a encore tiré un
coup à blanc et a, après avoir fait sortir le copilote et le mécanicien,
demandé de détourner l'avion sur Beyrouth. Il est ensuite revenu dans le
compartiment de première classe où il a tiré deux balles dans le plancher
et ordonné, sous la menace de son arme, l'évacuation des passagers vers
l'arrière. Il s'est également fait apporter son sac de toile dans lequel il
a pris l'explosif ainsi qu'une pile de 9 volts qu'il a fixés à sa ceinture
par du ruban adhésif. Puis il a introduit un des trois détonateurs dans la
charge explosive et il a attaché les fils électriques de manière à pouvoir
provoquer l'explosion en mettant le contact avec la pile. Il ressort des
explications données par l'expert J. Meier et de l'expertise déposée le
12 février 1988 par l'Institut de recherches scientifiques de la ville
de Zurich que cet explosif était de nature à tuer dans un rayon de 2 m,
à causer des lésions corporelles graves sinon mortelles dans un rayon
de 5 m, à provoquer presque certainement la perte de l'avion en vol et
à le détruire au sol avec tout ou partie de ses passagers, l'explosion
risquant de mettre le feu au carburant. Hariri est alors retourné dans
le poste de pilotage où le commandant de bord lui a expliqué que la
destination de Beyrouth était exclue, faute de carburant et des papiers
nécessaires. Il a accepté que l'avion se pose à Genève d'où, une fois le
plein effectué, il serait possible de prendre l'air pour le Liban. Peu
avant l'atterrissage à Genève-Cointrin, aux environs de 8 h, il a demandé
aux stewards de ramasser les passeports des passagers de race blanche,
puis de les trier par nationalité. A cette occasion, il a fait venir près
de lui un occupant, Peter Schroth, ressortissant des Etats-Unis dont il
semble avoir cru qu'il ne voulait pas remettre son passeport, alors que
celui-ci était seulement resté dans le compartiment de première classe. Il
l'a menacé de son arme, puis l'a conduit dans le compartiment de la classe
touriste, plaçant son pistolet sur la nuque de son prisonnier et disant:
"Regardez cet homme, si quelqu'un bouge, il va mourir." Il lui a ensuite
réclamé à nouveau son passeport et ne l'a relâché qu'après avoir constaté
qu'il avait affaire à un ressortissant américain.

    L'avion a atterri à Genève peu après 8 heures. Après avoir exigé à
plusieurs reprises, en proférant des menaces, que le plein de carburant
soit effectué rapidement, Hariri a fait venir aux environs de 9 h 30
deux passagers français, Xavier Beaulieu et Sébastien Brethes, qu'il a
obligés à s'asseoir côte à côte dans le compartiment de première classe
et il a recouvert la tête de chacun d'eux avec une couverture. Il a lancé
alors plusieurs ultimatums, annonçant qu'il allait exécuter un passager si
satisfaction ne lui était pas donnée. Enfin, après un dernier ultimatum
de trois minutes, à 10 h 50, il s'est placé selon toute vraisemblance
derrière les sièges où se trouvaient les deux Français puis, approchant
son arme par-derrière, à quelques centimètres du crâne de Beaulieu,
tout contre celui-ci, il a tiré, tuant sa victime d'un seul coup. Certes,
Hariri a-t-il soutenu lors du procès une autre version, prétendant avoir
tiré parce que Beaulieu s'était élancé sur lui, tête en avant, alors qu'il
triait les passeports placés devant lui sur un siège de la rangée voisine,
pour retrouver ceux de passagers non Français qu'il voulait libérer,
mais un tel processus est invraisemblable et ne peut être retenu, ne
serait-ce que parce que Beaulieu, souffrant d'une hépatite virale, était
sans doute bien incapable de tenter quoi que ce soit contre son bourreau,
mais aussi et surtout parce que la première version des faits donnée par
Hariri lors de l'instruction correspond mieux aux déclarations du témoin
Bemba, aux observations de l'expert médico-légal quant au trajet de la
balle de haut en bas et d'arrière en avant, dans la boîte crânienne,
et enfin au contenu de la conversation entre Hariri et le représentant
de l'OLP. A cela s'ajoute encore que le voisin de Beaulieu, dont le bras
touchait le sien, n'a perçu aucun mouvement et que le moment du coup de feu
a correspondu exactement à l'échéance du dernier délai de trois minutes.

    Après l'exécution de Beaulieu, Hariri a invité deux stewards à jeter
le corps par-dessus bord, mais, devant leur refus, il les a autorisés à
descendre avec deux autres stewards la victime, dont la tête était toujours
sous la couverture, au bas de la passerelle. Il est ensuite revenu dans la
cabine de pilotage où il a ordonné la transmission d'un nouvel ultimatum
de deux minutes après lesquelles il tuerait à nouveau, et il a passé dans
le compartiment de première classe dans lequel il a interpellé Brethes,
après avoir retiré la couverture masquant son visage et lui avoir montré
le siège ensanglanté de son voisin, en lui disant: "Regarde, ton frère
est mort, ça va être ton tour dans deux minutes"; puis il a replacé la
couverture sur sa tête, répétant plusieurs fois ses menaces. A ce moment,
il a été appelé sur la radio de bord par le représentant de l'OLP à Genève,
Nabil Ramlaoui et, après avoir d'abord refusé, il a eu avec celui-ci une
conversation de près d'une heure à l'issue de laquelle il a accepté de
libérer trois otages, deux Belges et un Canadien. Il a alors fait passer
une annonce par haut-parleur pour faire venir ces personnes et faire
savoir que l'avion allait repartir. Les passagers de l'avion, effrayés,
ont alors réussi à ouvrir certaines portes et à obtenir de l'équipage
qu'il en ouvre d'autres et ils ont commencé à quitter l'appareil, soit en
sautant, soit en utilisant le toboggan lorsque celui-ci s'est déployé.
Entendant du bruit à l'arrière, Hariri s'est précipité son pistolet
à la main, mais il a été intercepté par plusieurs hommes d'équipage,
dont Jean-Pierre Elouma, qui le ceinturait par-derrière et qu'il a blessé
sérieusement en tirant avec son arme, tenue de la main droite. La balle a
pénétré à droite de l'ombilic et elle est ressortie à l'aîne gauche après
avoir perforé l'intestin grêle. La police est alors intervenue et elle a
repris le contrôle de l'avion, aux environs de 11 h 15, mais une trentaine
de passagers s'étaient déjà blessés en sautant au sol. Sébastien Brethes,
qui était toujours sous la couverture, a été libéré à ce moment.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Considérant en droit:

Erwägung

I. Les infractions retenues

    a) Plusieurs qualifications juridiques retenues dans l'acte
d'accusation peuvent être reprises sans grande discussion, tant elles sont
évidentes. Tel est ainsi le cas de la prise d'otage qualifiée au sens de
l'art. 185 ch. 3 CP qui englobe les éléments constitutifs des chiffres 1 et
2 du même article. En effet, ni la prise d'otage ni les menaces de mort,
ni le grand nombre de personnes visées ne sont contestables. Il en va
de même en ce qui concerne l'emploi d'explosifs avec dessein délictueux
au sens de l'art. 224 CP, le trinitrotoluène étant un explosif puissant
et connu, dont l'utilisation dans un but illicite ne peut pas plus être
contestée en l'espèce que le risque couru par les passagers, ainsi que de
l'entrave qualifiée à la circulation publique au sens de l'art. 237 ch. 1
al 2 CP, dont la réalisation résulte sans autre du détournement de l'avion
Air Afrique (cf. ATF 106 IV 122), un tel acte ajouté aux risques de la
circulation aérienne mettant en principe en danger la vie ou l'intégrité
corporelle des passagers. Enfin, tant l'explosif que les détonateurs,
le pistolet et les cartouches utilisés par Hariri sont du matériel de
guerre au sens des art. 1 et 2 de l'ordonnance sur le matériel de guerre
du 10 janvier 1973. Or, en acceptant que l'avion détourné se dirige sur
Genève, Hariri a du même coup accepté d'introduire ce matériel sur le
territoire suisse sans autorisation. Il s'ensuit qu'il a violé l'art. 17
de la loi fédérale sur le matériel de guerre. On relève toutefois que
ladite loi n'a pas pour but d'assurer la sécurité sur le territoire
suisse mais seulement d'assurer le contrôle des transactions portant sur
du matériel de guerre et de la circulation de celui-ci sur et à travers
le territoire suisse. Il s'ensuit que la gravité du cas ne résulte pas de
l'emploi qui est fait du matériel mais de l'importance ou de la quantité
de celui qui est en cause. En l'espèce donc, un pistolet et une quantité
d'explosif comparable à celle que contient une grenade à main ne saurait
constituer un cas grave au sens de l'art. 17 de la loi sur le matériel
de guerre. Aussi l'accusation ne peut-elle être suivie sur ce point.

    b) En ce qui concerne l'homicide commis sur Xavier Beaulieu, il doit
sans hésitation être considéré comme un assassinat, comme dans l'acte
d'accusation, mais il convient de relever que cette qualification ne
résulte pas du seul fait que la victime a été tuée dans le cadre d'une
prise d'otage, mais bien de la référence à une jurisprudence constante
(cf. notamment ATF 104 IV 153 et 106 IV 342). Selon celle-ci, l'assassinat
est réalisé lorsque l'auteur a tué dans des circonstances ou avec une
préméditation dénotant qu'il est particulièrement pervers ou dangereux,
la présence de l'un seul de ces deux caractères étant suffisante. Pour
apprécier si l'auteur est particulièrement pervers ou dangereux, il faut
prendre en considération non seulement les circonstances dans lesquelles
il a agit, mais encore les événements qui ont entouré l'infraction, dans la
mesure où ils révèlent le caractère du délinquant, son comportement général
ainsi que son état ou ses réactions psychiques au moment de l'acte. Dans
ce cadre, l'utilisation de moyens particulièrement condamnables,
un mode d'exécution impliquant cruauté ou perfidie, des mobiles tels
que le plaisir de tuer, la vengeance, l'égoïsme ou enfin l'absence de
repentir sont des éléments particulièrement révélateurs de la mentalité
de l'auteur. Cette mentalité doit apparaître comme une constante de la
personnalité sur laquelle le juge doit se prononcer selon des critères
moraux. Chez l'assassin, l'égoïsme l'emporte en général sur toute autre
considération; il est souvent prêt à sacrifier pour la satisfaction de
besoins égoïstes un être humain dont il n'a pas eu à souffrir et fait
preuve d'un manque complet de scrupules et d'une grande froideur affective.

    En l'espèce, il est vrai qu'à première vue, Hariri n'a pas agi au
premier chef dans un but égoïste, puisque le détournement était notamment
destiné à obtenir la libération de terroristes détenus en France et en
Allemagne et que de toute manière il n'était pas dans les intentions de son
auteur d'en retirer le moindre profit personnel. Cela dit, si l'on examine
le cas de plus près, on doit admettre qu'Hariri a porté de très graves
atteintes à la liberté, à l'intégrité corporelle et même à l'existence de
gens totalement innocents - sous réserve d'une responsabilité collective
qui n'est plus admise dans les pays civilisés - qu'il s'apprêtait à livrer
à Beyrouth, à la merci de militants impitoyables et déterminés. Lui-même,
pour parvenir à ses fins, n'a pas hésité à prendre parmi ses victimes deux
personnes au hasard, dans l'intention de les tuer froidement comme on abat
des bêtes de boucherie, après les avoir cachées sous une couverture pour
éviter soit la perception de leurs regards, soit un mouvement intempestif
à l'approche de l'arme. De tels procédés ne peuvent qu'être jugés très
sévèrement du point de vue moral, tant l'utilisation d'êtres humains
comme de vulgaires objets est condamnée par toute société évoluée. De
toute manière, si l'on hésitait sur l'égoïsme dont Hariri a fait preuve
en faisant primer ses idéaux sur les conceptions communément admises,
on devrait en tout cas reconnaître qu'il a agi au moins par fanatisme,
lequel, lorsqu'il conduit au mépris le plus complet de la vie d'autrui,
doit être considéré comme un des caractères spécifiques de l'assassinat
en ce qu'il découvre la mentalité de l'auteur et constitue le signe
révélateur du danger particulier et constant qu'il représente pour ceux qui
ne partagent pas sa foi. On peut enfin ajouter que si Hariri s'est montré
particulièrement dangereux, il a également fait preuve d'une particulière
perversité en désignant à Sébastien Brethes le siège ensanglanté de son
voisin et en lui promettant une mort imminente, alors que cette cruauté
était totalement gratuite, la victime ne pouvant rien pour satisfaire
aux exigences présentées aux autorités genevoises.

    c) Ce qu'Hariri a fait à Xavier Beaulieu, il avait l'intention
de le faire à l'égard de Sébastien Brethes si ses exigences n'étaient
pas satisfaites. Comme il n'a pas eu le temps de mettre ses menaces à
exécution, on peut, au bénéfice du doute, le libérer de la prévention de
tentative d'assassinat, mais les dispositions systématiques qu'il avait
prises de manière à pouvoir commettre aisément un deuxième assassinat
présentaient une nature et une ampleur justifiant l'application de
l'art. 260bis ch. 1 CP.

    d) Il n'en va pas de même en ce qui concerne le coup de feu tiré sur
Jean-Pierre Elouma. Il est certain qu'en tirant sur sa victime pour lui
faire lâcher prise, Hariri a accepté l'éventualité de la tuer. Il s'est
donc rendu coupable de délit manqué d'homicide par dol éventuel. On ne
saurait toutefois parler ici d'assassinat manqué, dès lors que cette
infraction, tout envisagée qu'elle ait pu être, ne faisait pas partie
du plan de l'auteur, comme la prise d'otage d'un ou plusieurs passagers
et leur exécution pour obtenir satisfaction. Il s'agit donc d'un délit
manqué de meurtre.

Erwägung

II. La fixation de la peine

    a) Hariri a été soumis à une expertise psychiatrique de laquelle
il ressort qu'au moment d'agir il n'était pas atteint d'un trouble dans
sa santé mentale, d'idiotie, d'une grave altération de la conscience ou
d'un développement mental incomplet, qu'il ne compromet pas gravement la
sécurité publique en raison de son état mental et que ce dernier n'exige
pas de traitement médical ou de soins spéciaux susceptibles d'éliminer
ou d'atténuer le danger qu'il commette d'autres actes punissables. Il
s'ensuit qu'Hariri doit être reconnu pleinement responsable, et que
l'atténuation libre de la peine prévue à l'art. 11 CP ne peut entrer
en considération. Il en va de même de l'atténuation simple au sens de
l'art. 65 CP. En effet, aucune des circonstances atténuantes énumérées à
l'art. 64 CP n'est réalisée. Pour ne prendre que celles qui pourraient à
première vue être prises en considération, on relève qu'Hariri ne peut
se réclamer d'un mobile honorable dans la mesure où les circonstances
particulièrement condamnables des infractions retenues rejettent totalement
dans l'ombre l'honorabilité même admise de certains des mobiles politiques
qui l'ont poussé à agir (cf. ATF 101 IV 387, 104 IV 244, 106 IV 339 et
107 IV 29). Il en va de même de la détresse profonde, Hariri n'ayant
en aucun cas respecté la proportionnalité qui convient entre son action
et l'importance des biens qu'il a lésés (ATF 107 IV 97). Par ailleurs,
en s'incorporant volontairement au Hezbollah dont il ne pouvait ignorer
le recours systématique à la violence et au terrorisme, Hariri s'est
privé de la possibilité de se prévaloir de la circonstance d'avoir
agi sous l'ascendant d'autrui. Enfin, on ne saurait considérer comme
une manifestation de repentir sincère les simples regrets exprimés en
audience quant à la mort de Xavier Beaulieu, dès lors que ceux-ci n'ont
été accompagnés d'aucune manifestation permettant d'en juger la profondeur.

    Si Hariri n'est pas assez jeune pour bénéficier de la circonstance
atténuante prévue à l'art. 64 dernier alinéa CP, il est néanmoins un jeune
adulte au sens des art. 100 ss CP. Toutefois ces dispositions ne peuvent
trouver application en l'espèce, puisque les infractions en cause ne sont
pas liées au développement caractériel gravement perturbé ou menacé de
leur auteur, à son état d'abandon, à sa vie dans l'inconduite ou à la
fainéantise, ainsi que cela ressort de l'expertise rappelée plus haut.

    b) Dès lors qu'aucune mesure ou cause d'atténuation de la peine
n'entre en considération, l'art. 112 CP ne laisse aucune latitude au
juge: seule la réclusion à vie peut être prononcée. Cette peine se
justifie d'autant plus que l'assassinat a été commis en concours avec
plusieurs infractions graves dont l'une, la prise d'otage qualifiée, est
aussi passible de la même sanction. Toutefois, Hariri n'a pas laissé une
impression totalement négative et l'on peut espérer que l'évolution de son
caractère et sa conduite en détention autoriseront l'autorité compétente
à lui accorder la libération conditionnelle après quinze ans de détention
(art. 38 ch. 1 al. 2 CP). Dans cette hypothèse, il conviendra de faire
la déduction de la détention préventive qui, au jour du jugement, avait
été subie pendant 582 jours. Enfin, il y a lieu de condamner Hariri à
l'expulsion du territoire suisse pour la plus longue durée possible à
compter du jour de son éventuelle libération. Cette durée, en l'absence
de récidive, est de 15 ans (art. 55 al. 1 CP).

Entscheid:

                     Par ces motifs,
                 La Cour pénale fédérale,

    Vu les art. 22, 55, 58, 68, 69, 111, 112, 185, 224, 237, 260bis du
Code pénal; 17 de la loi fédérale sur le matériel de guerre; 171, 172,
175, 210, 241, 245, 246 PPF et 41 et suivants du Code des obligations,

    1. Reconnaît Hussein Ali Mohamad Hariri coupable d'assassinat (art. 112
CP), d'actes préparatoires d'assassinat (art. 112 et 260bis CP), de meurtre
manqué (art. 111 et 22 al. 1 CP), de prise d'otage qualifiée (art. 185
ch. 3 CP), d'emploi d'explosifs avec dessein délictueux (art. 224 al. 1
CP), d'entrave qualifiée à la circulation publique (art. 237 ch. 1 al. 2
CP), d'infraction à la loi fédérale sur le matériel de guerre (art. 17);

    2. Le condamne à la réclusion à vie et à l'expulsion du territoire
suisse pour une durée de quinze ans;

    3. Dit que la détention préventive, de 582 jours, sera déduite de
la peine en cas de libération conditionnelle au sens de l'art. 38 ch. 1
al. 2 CP; 4. Charge le canton de Genève d'exécuter la peine de réclusion;
5. Ordonne le maintien de l'incarcération (art. 239 al. 2 PPF);

    6. Ordonne la confiscation de l'arme, des munitions, de l'explosif
et du matériel séquestré et sa dévolution au Service scientifique de la
police de Zurich.