Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 II 24



115 II 24

5. Arrêt de la Ire Cour civile du 15 mars 1989 dans la cause Caisse de
pensions de la République et canton du Jura contre Gergen (recours en
réforme) Regeste

    Art. 51 Abs. 2 OR.

    Pensionskassen des privaten und des kantonalen
öffentlichen Rechts unterstehen der Rückgriffsordnung
dieser Gesetzesvorschrift. Unbeachtlichkeit von Statuten- und
Reglementsbestimmungen sowie von kantonalrechtlichen Regelungen über die
Zession oder Subrogation der Ansprüche des Versicherten, wenn damit von
der gesetzlichen Ordnung abgewichen wird.

Sachverhalt

    A.- Le 1er mai 1978, Marc Gergen, au volant de l'automobile appartenant
à son père, Félix Gergen, provoqua un accident de circulation au cours
duquel Francis Monnin fut grièvement blessé. Le véhicule, assuré en
responsabilité civile, avait pour détenteur Félix Gergen.

    Francis Monnin était assuré auprès de la Caisse de pensions de la
République et canton du Jura. Invalide à 50%, il fut mis au bénéfice
d'une pension d'invalidité dès le 1er janvier 1984.

    L'art. 17 du décret sur la Caisse de pensions de la République
et canton du Jura permet à la Caisse de se subroger aux droits de son
assuré lésé contre le tiers responsable du dommage. Du fait que Félix
Gergen n'était assuré qu'à concurrence du minimum légal d'un million
de francs, la caisse ne put récupérer l'intégralité de ses prestations
auprès de l'assurance RC. Elle s'adressa alors, en vain, à Félix Gergen,
en sa qualité de détenteur, pour lui réclamer le solde non récupéré de
ses prestations à Francis Monnin.

    B.- La Caisse ouvrit action contre Félix Gergen en paiement de 158'655
francs 35.

    Par voie d'exception, le défendeur souleva le défaut de qualité pour
défendre, attendu qu'il ne saurait être recherché par une institution
de prévoyance du fait qu'il n'avait commis personnellement aucun acte
illicite, qui lui fût imputable à faute.

    Par jugement du 28 juin 1988, le Tribunal cantonal du Jura débouta
la demanderesse de ses conclusions, faute de qualité pour défendre
Félix Gergen.

    C.- La demanderesse a interjeté un recours en réforme au Tribunal
fédéral. Elle conclut à la réforme du jugement cantonal, en ce sens qu'il
est dit et déclaré que le défendeur a qualité pour défendre à l'action.

    Le défendeur conclut au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- La question litigieuse se résume à l'applicabilité de l'art. 51
al. 2 CO lorsqu'une caisse publique de pensions de droit cantonal entend
rechercher le responsable causal d'un événement dommageable. Il ne s'agit
pas à proprement parler d'un problème de qualité pour défendre, mais de
répartition interne de responsabilités.

Erwägung 2

    2.- L'art. 17 du décret du 12 février 1981 sur la Caisse de pensions
de la République et canton du Jura n'accorde de prestations à l'assuré que
si lui ou ses ayants droit "autorisent la Caisse à se subroger, pour la
valeur des prestations qui lui incombent, à leurs droits contre le tiers
responsable du dommage". La demanderesse soutient que cette disposition
de droit cantonal l'emporte sur l'art. 51 al. 2 CO et permet de modifier
l'ordre des recours internes prévu par le code des obligations.

    a) En vertu d'une jurisprudence déjà ancienne, qui n'a pas à être
remise en cause, le Tribunal fédéral a posé le principe général que
le lésé ne pouvait pas déroger à l'art. 51 CO en décidant laquelle des
personnes responsables supportera en définitive le dommage; dès lors,
une cession des droits du lésé à l'un des responsables est inopérante
(ATF 80 II 252/253, 45 II 645).

    En matière d'assurance contre les dommages, notamment en matière
d'assurance contre l'incendie, le Tribunal fédéral a jugé que le droit
de recours d'un établissement cantonal d'assurance contre l'auteur
du dommage relève du droit fédéral et ne peut pas être étendu par une
disposition cantonale sur la subrogation (ATF 103 II 337 consid. dd, 96
II 175 consid. 1, 77 II 246). L'art. 51 CO s'appliquant, l'établissement
d'assurance, qui répond contractuellement du dommage, ne peut pas se
retourner contre la personne qui n'est tenue qu'"aux termes de la loi"
si une faute ne lui est pas imputable.

    En matière d'assurance-maladie, le Tribunal fédéral a également posé le
principe de l'application de l'art. 51 CO au droit de recours de la caisse
d'assurance, à défaut de disposition légale fédérale différente. Dans
ce domaine, l'assureur ne dispose d'un droit de recours que contre le
responsable qui a commis une faute, mais non pas contre celui qui ne
répond qu'en vertu d'une responsabilité causale, sans avoir commis de faute
(ATF 107 II 495 consid. 5a).

    b) Le rapport entre l'affilié et un fonds de prévoyance est un rapport
d'assurance au sens large (cf. ATF 80 II 129; DESCHENAUX, L'action en
réparation du préjudice contre le responsable et les prétentions du lésé
contre une institution de prévoyance privée, RDS 1971, p. 155). Quant
aux prestations servies par un tel fonds ou une caisse de pensions,
notamment les rentes d'invalidité, elles servent à couvrir un dommage,
qui est en l'espèce la perte de gain subie par Monnin du fait de son
invalidité. Partant, elles doivent être assimilées aux prestations
d'une assurance contre les dommages, et non à celles d'une assurance
"des personnes" ou "de sommes" (cf. ATF 104 II 47 ss).

    Avec la doctrine dominante, il faut admettre que - comme les caisses
d'assurance-incendie et les caisses-maladie pour leurs prestations en
couverture de dommages - les caisses de pensions privées ou dépendant
du droit public cantonal sont soumises à la règle de l'art. 51 al. 2
CO (cf. DESCHENAUX, op.cit., p. 166 s.; SCHAETZLE, Personalvorsorge
und Haftpflichtrecht in Konkurrenz, thèse Zurich 1972, p. 77; STEIN,
Vorteilsanrechnung, in Revue suisse d'assurance 1986, p. 275; OFTINGER,
Haftpflichtrecht, I, p. 445; MAURER, Sozialversicherungsrecht, p. 411;
OSWALD, Regressrecht in der Privat- und Sozialversicherung, in SZS 1972,
p. 44). Conformément à la doctrine et à la jurisprudence, le lésé ne
peut pas déroger à l'ordre des recours prévu par cette disposition. Toute
cession de ses droits à un responsable est en conséquence inopérante. L'est
aussi la cession ou la subrogation prévue par des dispositions statutaires
ou réglementaires ou par la législation cantonale (cf. OFTINGER, op.cit.,
p. 390; THILO, De la subrogation des caisses publiques d'assurance des
fonctionnaires dans les droits de l'assuré contre le tiers responsable du
dommage, tiré à part, p. 8; NEF, Die Leistungen der beruflichen Vorsorge
in Konkurrenz zu anderen Versicherungsträgern sowie haftpflichtigen
Dritten, in Revue suisse des assurances sociales et de la prévoyance
professionnelle 1987, p. 31; MAURER, op.cit., p. 412; OSWALD, op.cit.,
p. 45; BREHM, n. 79 ad art. 45 CO).

    L'introduction de l'art. 26 OPP 2 (RS 831.441.1), qui permet à
l'institution de prévoyance, si son règlement le prévoit, d'exiger
de celui qui lui demande des prestations qu'il lui cède ses droits
contre le tiers responsable du dommage, ne change rien aux principes
ci-dessus. Cette disposition ne place pas les institutions de prévoyance,
quant à leur droit de recours, dans une situation plus favorable que
celle des caisses-maladie (cf. STEIN, loc.cit.). En outre, elle se
fonde uniquement sur l'art. 34 al. 2 LPP (RS 831.40), qui permet au
Conseil fédéral d'édicter des prescriptions afin d'empêcher que le cumul
de prestations ne procure un avantage injustifié à l'assuré ou à ses
survivants. Or, l'application de l'art. 51 al. 2 CO et l'inefficacité
des cessions dans certaines situations sont en elles-mêmes impropres à
procurer à l'assuré des avantages injustifiés; les possibilités de cumul
de prestations sont totalement étrangères à l'art. 51 al. 2 CO et peuvent
être empêchées par l'application d'autres règles et principes.

    c) Il résulte de ce qui précède que la demanderesse ne peut pas
exercer de droit de recours contre le défendeur, lequel ne répond du
dommage qu'en vertu de la loi, en sa seule qualité de détenteur non
fautif - de véhicule automobile. La demanderesse doit être assimilée à
un responsable contractuel, ou considérée comme tel; elle a en effet
reçu une contre-prestation en contrepartie de sa propre prestation
(cf. STEIN, loc.cit.; OSWALD, op.cit., p. 46). Quant à la subrogation
que lui a consentie le lésé en vertu de l'art. 17 du décret, elle est
sans effets en raison de l'application prédominante de l'art. 51 al. 2
CO. La position de la cour cantonale doit ainsi être approuvée, car elle
ne viole pas le droit fédéral.

Erwägung 3

    3.- Certes, la demanderesse observe, non sans pertinence, que
l'admission de l'application de l'art. 51 al. 2 CO n'exclut pas d'emblée
la possibilité d'exercer un droit de recours contre le défendeur, puisque
l'ordre des recours n'est fixé que "dans la règle". Il est exact que
des motifs d'équité permettent d'y déroger lorsque les circonstances
le justifient (arrêt non publié M. du 5 mai 1987, consid. 6). Mais,
en l'espèce, on ne peut discerner aucun élément ni aucune circonstance
qui justifieraient que l'on s'écarte de l'ordre des recours prévu par
l'art. 51 CO. Bien au contraire, maintenir la responsabilité plus avancée
du responsable contractuel, ou assimilé, par rapport à celle du responsable
causal, n'apparaît nullement comme inéquitable.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral

    Rejette le recours et confirme le jugement attaqué.