Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 III 125



115 III 125

27. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 21 décembre 1989 dans la
cause X. contre Y. (recours de droit public) Regeste

    Art. 4 BV, Art. 273 Abs. 1 SchKG. Sicherheitsleistung beim Arrest.

    Der von der Arrestlegung betroffene Dritte scheint befugt, vom
Gläubiger den Ersatz des ihm aus dem Arrest erwachsenden Schadens und
die Sicherheitsleistung nach Art. 273 Abs. 1 SchKG zu verlangen (E. 2).

    Dennoch ist der kantonale Richter, der die Sicherheitsleistung in
Anlehnung an die bisherige ständige Rechtsprechung nicht bewilligt hat,
nicht in Willkür verfallen (E. 3).

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- Aux termes de l'art. 273 al. 1 LP, le créancier répond du dommage
que le séquestre peut occasionner; il peut être astreint à fournir des
sûretés ("der Gläubiger haftet für den aus einem ungerechtfertigten
(infondato) Arrest erwachsenden Schaden und kann zur Sicherheitsleistung
verhalten werden"). La disposition est placée après deux articles (271 et
272) qui règlent le rapport créancier-débiteur. Mais elle ne définit pas
la qualité pour agir, ni d'ailleurs le dommage et ses éléments. Tout au
plus sa place, ainsi que le fondement de la responsabilité résidant dans
le fait que la mesure est injustifiée (ungerechtfertigt), impliquent-ils
une relation avec les articles précédents. La version allemande suggère
en outre un lien entre l'action et sa garantie (und...).

    a) La jurisprudence est constante. Selon l'ATF 25 II 99 ss consid. 3,
la qualité pour agir n'appartient qu'au débiteur. En effet, la mainmise
officielle est "justifiée" à deux conditions - l'existence d'une créance
et d'un cas de séquestre, visés par l'art. 271 LP - et seul le débiteur
peut les mettre en doute: le second par la voie de l'art. 279 al. 2
LP, la créance dans la procédure de validation de l'art. 278 LP. Dans
ces procédures, seuls apparaissent comme parties le séquestrant et le
séquestré. Certes, la mesure doit être exécutée, comme la saisie, contre
les biens du débiteur uniquement, mais le tiers qui prétend un droit sur
eux est renvoyé à agir par la voie de l'opposition ou revendication des
art. 106 ss LP; un préjudice éventuel est réparé par l'action aquilienne
(art. 50 aCO) (cf., dans le même sens, l'arrêt fédéral publié in Rep. 1912
p. 32/33).

    Dans un arrêt du 27 mars 1941 (ATF 67 III 93 ss), la IIe Cour civile
a tenté de répondre à l'objection qui vient immédiatement à l'esprit
lorsqu'on met en parallèle la situation du débiteur et celle du tiers:
si le premier, pour obtenir la réparation d'un dommage causé par le
séquestre injustifié, n'a qu'à prouver ce dommage, il doit en être de
même, à plus forte raison, du tiers étranger à la poursuite et dont les
intérêts semblent par conséquent plus dignes de considération. Le Tribunal
fédéral insiste d'abord sur le rapport entre les art. 271 et 273 LP -
dont le premier définit précisément la justification du séquestre et le
second la sanction d'une mainmise injustifiée - et rappelle que seul le
débiteur peut agir contre la mesure, dirigée contre lui seul, et bien sûr
pour sauvegarder ses propres intérêts. En outre, un séquestre justifié
"à l'égard du débiteur" peut lui aussi causer un préjudice au tiers
revendiquant; et si l'on considère la cause de ce préjudice - à savoir
l'immobilisation des biens - on chercherait vainement la raison pour
laquelle la même action (et non celle des art. 41 ss CO) n'est pas accordée
en cas de saisie. Enfin, l'art. 273 LP "s'explique tout naturellement":
une responsabilité particulière est la contrepartie des facilités - quant
à la preuve - accordées au créancier qui entend recourir au séquestre,
procédure dont l'efficacité dépend surtout de sa rapidité.

    Sans revenir sur son fondement, le Tribunal fédéral a, en 1986, rappelé
cette jurisprudence (ATF 112 II 114 consid. 2a), qui, de manière générale,
a été suivie par les cantons (ainsi, à Genève: SJ 1984 p. 361 consid. 3c;
à Zurich: ZR 1931 p. 194/195, No 104; à Bâle-Ville: SJ 1959 p. 276/277,
No 108).

    Des auteurs importants, surtout les plus anciens, sont du même avis,
essentiellement pour le motif que seuls le créancier et le débiteur sont
parties à la procédure de l'octroi du séquestre et peuvent donc se fonder
sur les règles de cette institution (ainsi, BLUMENSTEIN, p. 847, et JAEGER,
éd. franç. n. 2 ad art. 273 LP, qui citent REICHEL et KELLER; de même:
FRITZSCHE, Schuldbetreibung und Konkurs, 2e éd., II 243 n. 3, et FAVRE,
Droit des poursuites, 3e éd., p. 370, qui se réfère à la jurisprudence
fédérale; cf. aussi H. BONNARD, Le séquestre d'après la loi fédérale sur
la poursuite pour dettes et la faillite, thèse Lausanne 1914, p. 311;
K. JUD, Die Entwicklung der Rechtsprechung zum Arrestrecht des SchKG,
thèse Zurich 1940, p. 71).

    b) L'opinion du Tribunal fédéral - qui déduit de l'institution
du séquestre et du système de sa réglementation à quel point de vue
et à l'égard de qui la mesure doit être injustifiée pour fonder
l'action de l'art. 273 al. 1 LP et sa garantie - a été critiquée
dans la doctrine. C'est le cas notamment dans des ouvrages récents,
mais sans argument autre que l'intérêt du tiers revendiquant, ni plus
ample explication que "la lettre et l'esprit du texte légal" (GILLIÉRON,
Poursuite pour dettes, faillite et concordat, 2e éd., 1988 p. 386 B; AMONN,
Grundriss des Schuldbetreibungs- und Konkursrechts, 4e éd., 1988 p. 417,
No 91; DALLÈVES, FJS 740 p. 26 E. 1).

    Un auteur s'est livré à une critique poussée (P. ALBRECHT, Die
Haftpflicht des Arrestgläubigers nach schweizerischem Recht, thèse Zurich
1968, p. 30-35, qui suit l'avis de E. OTT, Das Arrestverfahren nach
dem Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, thèse Zurich 1900,
p. 104, et d'un commentateur dans les Monatsblätter für Betreibungs-
und Konkursrecht 1908-1911, 2 No 80, p. 229). Il part de l'idée que
le dommage du tiers doit être réparé comme celui du débiteur, d'autant
que le premier n'a pas tous les moyens du second pour attaquer la
mainmise officielle, alors même qu'il mérite davantage protection.
Outre que le débiteur peut agir sans avoir été obligé de contester le
cas de séquestre, l'auteur objecte que, selon les art. 271 al. 1 et
274 al. 2 ch. 4 LP, déjà l'ordonnance de séquestre doit viser (et non
seulement son exécution atteindre) des biens du seul débiteur, que le
créancier indique dans sa requête: si tel n'est pas le cas, le séquestre
ordonné est aussi "injustifié". En revanche, le créancier ne participe
pas à la saisie. Quand à la preuve atténuée des conditions du séquestre
(leur vraisemblance), sans audition du débiteur, elle concerne aussi la
désignation des objets à séquestre; sur ce point, le créancier n'est
souvent pas moins en peine d'acquérir une certitude que s'agissant de
certains cas de séquestre.

    E. MEIER précise comment le créancier, dans sa requête déjà, se
prononce sur la propriété des biens qu'il veut voir séquestrer (Die
Sicherheitsleistung des Arrestgläubigers [Arrestkaution] gemäss SchKG
273 I, thèse Zurich 1978, p. 20/21; cf. aussi p. 6 et 54).

    B. KLEINER (RSJ 1979, p. 223, et déjà RSJ 1965, p. 39) non seulement
préconise une modification de l'art. 273 LP, mais estime que dans la
teneur actuelle déjà le séquestre peut être "injustifié" parce qu'il
atteint les biens d'un tiers, et non exclusivement ceux du débiteur
(art. 271 al. 1 initio LP).

    c) Des arrêts récents du Tribunal fédéral paraissent imposer une
modification de sa jurisprudence, dont KLEINER et surtout ALBRECHT ont
démontré les faiblesses. En effet, s'agissant de ses droits sur les
biens séquestrés - qui devraient appartenir au débiteur (art. 271 al. 1
initio LP) - le tiers peut certes exercer une revendication, mais il
a en outre qualité pour s'en prendre à l'ordonnance même du séquestre,
ainsi d'ailleurs qu'à son exécution. S'il triomphe, à son endroit aussi
la mesure est "injustifiée", et il participe à son annulation.

    Lorsque, de l'aveu même du créancier, les biens dont il requiert le
séquestre n'appartiennent pas au débiteur, mais à un tiers, celui-ci
peut former une plainte (art. 17 LP) en faisant valoir que l'office
aurait dû refuser d'exécuter la mesure ordonnée par le juge (ATF 109
III 127). Le débiteur est lui aussi admis à prétendre à l'appui d'une
telle plainte que les biens frappés par le séquestre appartiennent, au
dire même du créancier, à un tiers (ATF 113 III 141 consid. 3b). S'il
est seulement invraisemblable que les biens désignés dans l'ordonnance
soient la propriété du débiteur, le tiers agira en revanche par la voie
du recours de droit public et fera valoir que l'autorité de séquestre
a admis de manière insoutenable et contre toute vraisemblance que les
biens sur lesquels porte la mesure appartiennent au débiteur (ATF 109
III 127/128). Bien plus, cette qualité selon l'art. 88 OJ vient d'être
refusée au débiteur, qui n'est pas concerné par la propriété du tiers,
du moins juridiquement (ATF 114 Ia 382 ss).

    Si le tiers revendiquant est désormais partie à la procédure
d'autorisation (et d'exécution) du séquestre pour prétendre - outre
la revendication des art. 106 ss LP - que les biens mis sous main de
justice lui appartiennent, et non pas au débiteur, la mesure peut donc
être injustifiée, à son égard aussi, en raison de l'art. 271 LP. Habilité
à défendre sa propriété contre l'ordonnance, il a aussi qualité pour agir
en application de l'art. 273 al. 1 LP, et donc pour requérir des sûretés
en vue de garantir la réparation de son dommage éventuel.

    d) Enfin, selon le projet de revision de la loi fédérale sur la
poursuite pour dettes et la faillite, le créancier répondra du dommage
qu'un séquestre injustifié peut causer tant au débiteur qu'aux tiers;
le juge pourra l'astreindre à fournir des sûretés.

    Le projet du message du Conseil fédéral, citant seulement AMONN
et KLEINER, estime, sans s'en expliquer davantage, que le texte ainsi
précisé consacre une interprétation qu'imposaient déjà tant la lettre
que l'esprit de la loi.

Erwägung 3

    3.- Il ne découle néanmoins pas pour autant des considérations qui
précèdent que le juge cantonal ait interprété arbitrairement l'art. 273
al. 1 LP en niant la qualité pour agir du tiers revendiquant.

    Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une règle
de droit ou un principe juridique indiscuté, ou lorsqu'elle contredit de
manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 112 Ib
247 consid. 3b et les arrêts cités). Pour qu'elle échappe à ce grief, il
suffit qu'elle soit acceptable: il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une
solution autre que celle de l'autorité cantonale apparaît concevable, voire
même préférable (ATF 113 Ia 168 consid. 3). Or, en l'espèce, la décision
attaquée est conforme à la jurisprudence fédérale constante. Certes,
on l'a vu, en 1983, dans l'ATF 109 III 127/128, le Tribunal fédéral
a donné au tiers la qualité de partie, mais pas dans le cas précis de
l'art. 273 al. 1 LP. Au contraire, en 1986, il a encore confirmé, dans
un arrêt publié, citant notamment l'ATF 67 III 93 ss, que "l'action en
réparation ne compète qu'au débiteur séquestré... et non par exemple au
tiers revendiquant" (ATF 112 III 114 consid. 2a). Dans ces conditions,
on ne saurait reprocher au juge cantonal d'avoir commis arbitraire en ne
s'écartant pas de ce principe faute d'avoir remarqué l'amorce éventuelle
d'un changement de jurisprudence.

    En conclusion, vu les arguments de la doctrine et la tendance générale
de la jurisprudence, il paraît s'imposer d'accorder au tiers la qualité
de partie pour l'action de l'art. 273 al. 1 LP, mais, dans l'optique
très étroite de l'arbitraire, la décision attaquée ne donne pas prise à
la critique. Force est donc de rejeter le recours.