Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 115 IA 134



115 Ia 134

27. Arrêt de la IIe Cour de droit public du 16 juin 1989 dans la cause
Jacques Pelot contre Tribunal cantonal du canton de Vaud (recours de
droit public) Regeste

    Bewilligung zur Berufsausübung als patentierter
Geschäftsagent. Gesetzliche Grundlage für die vom Waadtländer
Kantonsgericht bei der Erteilung der Bewilligung verlangte Unabhängigkeit.

    Ein klarer Gesetzestext ist nur dann gegen seinen Wortlaut auszulegen,
wenn sachliche Gründe für die Annahme sprechen, dieser gebe nicht den
wahren Sinn der Bestimmung wieder. Im vorliegenden Fall gibt es keinen
sachlichen Grund für die Vermutung, der klare Text des Gesetzes - welcher
vom Geschäftsagenten keine Unabhängigkeit verlangt - entspreche nicht
dem Willen des kantonalen Gesetzgebers.

Sachverhalt

    A.- L'art. 22 de la loi vaudoise du 20 mai 1957 sur la profession
d'agent d'affaires breveté (ci-après LAAB) a la teneur suivante:

    "1 Pour être autorisé à pratiquer il faut:

    1. Etre porteur du brevet pour l'exercice de la profession d'agent
   d'affaires breveté;

    2. Avoir l'exercice des droits civils;

    3. Avoir fourni au Tribunal cantonal la garantie exigée par la présente
   loi;

    4. N'avoir été, dans les 5 ans précédant la demande d'autorisation de
   pratiquer, sous le coup d'aucun acte de défaut de biens, provisoire
   ou définitif;

    5. Etre suisse et domicilié dans le canton;

    6. Jouir d'une bonne réputation.

    2 Le Tribunal cantonal peut refuser l'autorisation de pratiquer aux
   candidats qui n'offrent pas des garanties suffisantes de probité ou
   de moralité."

    Quant à la promesse que prêtent les agents d'affaires brevetés en
vertu de l'art. 24 LAAB, elle comporte le passage suivant:

    "Vous promettez de vous acquitter de votre profession avec dignité, en
   agent d'affaires loyal et probe, et de ne jamais employer des moyens
   qui pourraient blesser l'ordre public et les moeurs.

    Vous promettez de ne vous charger d'aucune cause que, d'après vos
   lumières, vous réputez mal fondée.

    ..."

    Titulaire du brevet d'agent d'affaires vaudois depuis le 8 juillet
1965, Jacques Pelot n'a pas requis l'autorisation de pratiquer.

    Devenu directeur de la Régie Guignard S.A., à Lausanne, dès le 1er août
1988, l'intéressé a, le 18 août 1988, présenté une demande en vue d'obtenir
l'autorisation de pratiquer la profession d'agent d'affaires. Il a exposé
vouloir représenter auprès des "instances concernées" tant la société qui
l'emploie que les mandants de celle-ci; il a, en outre, précisé qu'il ne
rechercherait, ni n'accepterait d'autres mandats que ceux découlant des
affaires traitées par son employeur.

    La Cour plénière du Tribunal cantonal a, par décision du 11 octobre
1988, refusé de délivrer l'autorisation de pratiquer. La Cour cantonale
a considéré que la situation de dépendance dans laquelle se trouvait le
requérant à l'égard de son employeur était de nature à l'empêcher d'exercer
la profession d'agent d'affaires breveté sous sa propre responsabilité;
l'intéressé n'offrait pas, en conséquence, des garanties suffisantes de
probité au sens de l'art. 22 al. 2 LAAB.

    Agissant en temps utile par la voie du recours de droit public,
Jacques Pelot demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 11
octobre 1988 et de renvoyer la cause à l'autorité intimée pour l'octroi de
l'autorisation sollicitée. A l'appui de ses conclusions, il fait valoir
que la condition d'indépendance posée par le Tribunal cantonal serait
contraire à l'art. 31 Cst., car elle ne reposerait sur aucune base légale
et serait disproportionnée; par ailleurs, l'autorité cantonale se serait
livrée à une interprétation arbitraire de l'art. 22 al. 2 LAAB.

    Le Tribunal cantonal se réfère à sa décision.

    Le Tribunal fédéral a admis le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Selon l'art. 27 al. 1 LP, les cantons peuvent organiser la
représentation professionnelle des créanciers. Ils sont aussi compétents
pour soumettre à autorisation l'activité de l'agent d'affaires et la
subordonner à la possession d'un certificat de capacité.

    Bien qu'elle ne se réfère pas expressément à cette disposition de
droit fédéral, la loi vaudoise sur les agents d'affaires brevetés marque la
volonté du législateur cantonal de faire usage de la compétence réservée
aux cantons et d'organiser cette profession en subordonnant son exercice
à des conditions de capacité et de moralité (Bulletin des séances du
Grand Conseil 1944 p. 1016; arrêt du 24 janvier 1979 dans la cause M. et
K. publié in JT 1980 II 156 et ss). Le droit cantonal déborde même le cadre
de l'art. 27 LP dans la mesure où il ne limite pas la représentation des
parties par les agents d'affaires brevetés à la seule législation sur
la poursuite pour dettes et la faillite, mais l'étend également à des
procédures judiciaires (art. 2 LAAB; voir aussi ATF 113 Ia 387).

    b) La compétence réservée par l'art. 27 al. 1 LP n'autorise pas les
cantons qui en font usage à ignorer les exigences découlant de la liberté
du commerce et de l'industrie; les conditions pour l'obtention d'une
autorisation de pratiquer la profession d'agent d'affaires ne peuvent dès
lors s'écarter des principes résultant de l'art. 31 Cst. Cela implique,
notamment, que les restrictions au libre exercice de cette activité doivent
reposer sur une base légale suffisante (ATF 114 Ia 36, 113 Ia 40 et les
arrêts cités).

Erwägung 2

    2.- a) Dans le cas d'espèce, aucune disposition légale ne subordonne
expressément l'octroi de l'autorisation d'exercer la profession d'agent
d'affaires à la condition que le requérant soit indépendant. En
particulier, pas plus l'art. 22 al. 2 LAAB qui exige probité et
moralité, que la teneur de la promesse de l'art. 24 LAAB n'interdisent au
titulaire d'un brevet d'agent d'affaires de se trouver dans un rapport de
subordination vis-à-vis d'un employeur. L'opinion de l'autorité intimée
selon laquelle cette obligation serait contenue dans l'exigence de
"probité" découle uniquement d'une interprétation que l'autorité croit
pouvoir tirer de la loi.

    b) Selon la jurisprudence, il n'y a lieu de déroger au sens littéral
d'un texte clair par voie d'interprétation que lorsque des raisons
objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens
véritable de la disposition en cause (ATF 113 Ia 14, 112 II 4, 170,
110 Ib 8). De tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du
but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi
(ATF 113 Ia 14 et les références).

    En l'occurrence, aucune raison objective ne permet d'affirmer que le
texte clair de la loi ne respecterait pas la volonté du législateur. Nulle
part, dans les travaux préparatoires, on ne trouve la préoccupation
d'assurer l'indépendance de l'agent d'affaires. De plus, cette obligation
ne présente pas de rapport avec l'exigence de probité prévue à l'art. 22
al. 2 et à l'art. 24 LAAB; en effet, la probité, comme la moralité
également mentionnée à l'art. 22 al. 2 LAAB, sont des conditions qui
visent la personnalité propre du requérant et qui, à ce titre, s'avèrent
totalement indépendantes de la question de savoir si l'intéressé se
trouve d'une manière ou d'une autre dans un rapport de subordination
avec un employeur. Distincte des exigences tenant à la personnalité de
l'intéressé, l'obligation d'indépendance ne peut pas non plus découler des
règles prévues à l'art. 22 al. 1 ch. 1 à 6 LAAB. Cette disposition établit
la liste des conditions auxquelles doit satisfaire l'agent d'affaires
avant de pouvoir exercer sa profession; aucune des exigences précises
mentionnées par cette norme n'autorise une interprétation extensive
susceptible de constituer une base légale suffisante à l'obligation
litigieuse. Enfin, il faut constater que l'activité d'agent d'affaires -
réglementée uniquement dans quelques rares cantons (ATF 113 Ia 386) -
ne dispose pas d'un corps de règles corporatives et déontologiques qui
permettrait d'admettre, à la rigueur, l'existence d'un usage professionnel
limitant valablement la liberté du commerce et de l'industrie du recourant
nonobstant l'absence de règle cantonale explicite.

    c) Dans la mesure où aucun motif ne justifiait de s'écarter du texte
clair de la loi qui ne prévoit pas l'obligation d'indépendance pour les
agents d'affaires, la décision attaquée s'avère dépourvue de base légale
suffisante et doit être annulée pour violation de l'art. 31 Cst. En outre,
s'agissant d'un recours contre le refus d'une autorisation de police,
il convient de faire exception au principe selon lequel le recours de
droit public n'a qu'un effet cassatoire et d'inviter l'autorité cantonale
à délivrer l'autorisation sollicitée (cf. ATF 101 Ia 174).

    d) Il apparaît, par ailleurs, superflu d'examiner si la décision
attaquée serait également disproportionnée ou arbitraire.