Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 114 II 74



114 II 74

13. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 23 février 1988 dans la
cause G. contre Société immobilière T. (recours en réforme) Regeste

    Art. 17 BMM. Anfechtung des Mietzinses nach Abschluss des Mietvertrags.

    Die den Mieter zum Vertragsabschluss zwingende Notlage im Sinne von
Art. 17 BMM kann auf Wohnungsnot, aber auch auf Schwierigkeiten in den
persönlichen Verhältnissen des Mieters zurückzuführen sein. Ob diese
Voraussetzungen erfüllt sind, beurteilt sich nach den gesamten Umständen
des konkreten Falls (E. 3). Voraussetzungen vorliegend bejaht (E. 4).

Sachverhalt

    A.- Selon contrat de bail du 29 mars 1985, la société immobilière
T. a remis à bail à G. un appartement de trois pièces, soit deux pièces
et cuisine, pour un loyer annuel de 9'600 francs, sans les charges.

    Au début d'avril 1985, G. a demandé que des travaux de rafraîchissement
et des modifications soient entrepris dans les locaux. Le 29 avril 1985,
il a saisi la Commission de conciliation en matière de baux et loyers
d'une requête tendant à ce que la bailleresse fût condamnée à procéder à
une réfection complète de l'appartement et à un nouvel agencement de la
cuisine, et que son loyer annuel fût réduit à 6'000 francs.

    Statuant par jugement partiel du 24 avril 1986, le Tribunal des baux
et loyers du canton de Genève a débouté le demandeur de sa requête en
diminution de loyer.

    Par arrêt du 1er juin 1987, la Chambre d'appel en matière de baux
et loyers du canton de Genève a confirmé ce jugement en tant qu'il
avait débouté le demandeur de sa demande de réduction de loyer fondée
sur l'art. 17 AMSL. Elle a ordonné pour le surplus le renvoi du dossier
aux premiers juges, afin qu'ils statuent sur la demande d'exécution de
travaux et de réduction de loyer formée par le demandeur.

    Le Tribunal fédéral admet le recours en réforme interjeté par le
demandeur, annule l'arrêt attaqué et renvoie la cause à la cour cantonale
pour nouveau jugement dans le sens des considérants.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.- a) La cour cantonale considère que l'art. 17 AMSL, constituant
une dérogation importante au principe général "pacta sunt servanda",
doit être interprété de manière extrêmement restrictive. Pour juger si la
situation du locataire était ou non difficile au moment de la conclusion
du bail, il y a lieu de prendre en considération l'urgence du changement
d'appartement, la situation financière du locataire, ainsi que le nombre
et la durée des démarches faites en vue du changement; le seul fait
d'invoquer la pénurie de logements n'est pas suffisant. En l'espèce,
la Chambre d'appel reconnaît la nécessité, mais non pas l'urgence du
changement d'appartement. Elle ne peut admettre que le recourant ne lui
apporte qu'un ou deux documents écrits attestant la réalité des démarches
qu'il aurait entreprises et estime que s'il avait réellement fait des
recherches sérieuses, il aurait certainement pu, compte tenu de ses
revenus, envisager la conclusion d'autres contrats que le bail en cause.

    b) Invoquant les travaux préparatoires de l'art. 17 AMSL, le demandeur
conteste l'interprétation de l'arrêt attaqué. Il soutient qu'il remplissait
les deux conditions alternatives de la "situation difficile" au sens
de cette disposition, ayant conclu le bail en cause à la fois dans une
situation de grave pénurie, notoire à Genève, et dans une situation de
gêne personnelle qui l'obligeait à louer un appartement plus grand et
plus décent.

    c) Aux termes de l'art. 17 AMSL, le locataire d'un logement peut
contester le montant du loyer qu'il estime abusif ... dans les trente
jours qui suivent la conclusion du bail, "si la situation difficile dans
laquelle il se trouve l'a contraint à conclure le bail" ("... wenn er sich
wegen einer Notlage zum Vertragsabschluss gezwungen sah"). Cette condition
a été ajoutée au texte légal en 1977. L'art. 17 antérieur permettait à
tout nouveau locataire d'un logement de contester le montant du loyer
qu'il estimait abusif dans les trente jours suivant la conclusion du bail
(cf. ROLF 1972 p. 1535). Dans son message concernant la prorogation et
la modification de l'AMSL, du 4 octobre 1976 (FF 1976 III p. 866 ss),
le Conseil fédéral proposait de maintenir tel quel l'art. 17, bien que
"vivement critiqué de tout temps" par les bailleurs, en relevant ce
qui suit:

    "... D'autre part, l'expérience a prouvé que les plus grosses
majorations
   de loyer ont lieu à l'occasion d'un changement de locataire. Si
   l'on biffait l'article 17, il n'y aurait plus aucune voie de droit
   pour attaquer les augmentations, qu'elles soient abusives ou non. On
   ne pourrait pas non plus les attaquer lors d'une hausse ultérieure
   du loyer.

    Il est vrai que l'article 17 n'a pas une grande importance pratique.

    Toutefois, le biffer créerait dans le système de l'arrêté contre
les abus
   dans le secteur locatif une lacune grâce à laquelle le bailleur
   pourrait, à la faveur de la situation du marché, lors d'un changement
   de locataire, imposer des augmentations abusives (FF 1976 III p. 877)."

    La nouvelle disposition est le fruit d'un compromis entre les points de
vue opposés de ceux qui voulaient supprimer l'art. 17 et ceux qui voulaient
le maintenir. Alors que le terme de "Notlage" avait d'abord été traduit
par "gêne", le législateur a introduit l'expression "situation difficile"
à dessein, afin d'atténuer la portée de cette nouvelle exigence légale et
pour qu'elle ne soit pas assimilée aux notions de "gêne" ou de "besoin",
plus sévères, des art. 328 CC, 21 et 44 CO. Ce qui était visé initialement
par le terme de "Notlage", c'est la situation de pénurie dans laquelle
pouvait se trouver le locataire (cf. Bull.stén. CN 1976, p. 165, où le
texte français proposé traduit "Notlage" par "situation de pénurie"). Au
lieu de permettre au locataire de contester le loyer dans les trente jours
dans n'importe quelle situation, le législateur a voulu n'accorder cette
possibilité qu'aux locataires qui devaient conclure dans une situation de
pénurie de logement; en effet, l'arrêté fédéral était alors applicable sur
tout le territoire suisse; ce n'est qu'en 1979 que son application a été
limitée aux communes où sévit la pénurie. Si le législateur a finalement
décidé de traduire "Notlage" par "situation difficile", ce n'est pas
pour restreindre encore l'application de la nouvelle disposition, mais
pour l'étendre à d'autres cas de difficultés que pourrait rencontrer le
locataire; cela ressort clairement des interventions des rapporteurs de la
commission du Conseil national à propos d'une divergence rédactionnelle
par rapport au texte proposé par le Conseil des Etats (Bull.stén. CN
1977, p. 500 et 501; cf. aussi BARBEY, L'arrêté fédéral instituant des
mesures contre les abus dans le secteur locatif, p. 26 s.; HAURI, Der
missbräuchliche Mietzins, thèse Zurich 1979, p. 140 s.). L'intention du
législateur était de permettre au locataire d'invoquer l'art. 17 AMSL
non seulement lorsqu'il a conclu le bail dans une situation de pénurie de
logement, mais aussi dans des cas où, indépendamment d'une telle situation,
il a dû conclure le bail en raison d'autres difficultés personnelles.

    L'examen de la ratio legis et des travaux préparatoires de la
disposition en cause conduit ainsi à admettre que le preneur jouit de
la faculté de contester un loyer abusif, selon l'art. 17 AMSL, lorsqu'il
a été contraint de conclure un nouveau bail, que ce soit en raison de la
pénurie de logements ou de difficultés liées à sa situation personnelle. La
contrainte dont dépend l'application de cette disposition ne suppose
pas une annihilation de la volonté. Il suffit que le locataire ait de
bonnes raisons de changer de logement et que l'on ne puisse attendre de
lui qu'il renonce à une occasion qui se présente, et cela parce que la
situation du marché, ou encore ses difficultés personnelles sont telles
qu'une renonciation de sa part serait déraisonnable. Pour juger si les
conditions de la situation difficile du preneur et de la contrainte qui en
résulte sont réalisées, on tiendra compte de l'ensemble des circonstances
du cas particulier (cf. dans ce sens, parmi la jurisprudence cantonale,
les jugements genevois des 12 novembre 1984, 5 juin 1981 et 13 mars 1980,
in Communications de l'Office fédéral du logement 18, No 10, p. 26 s.;
13, No 2 p. 6 ss (également publié in RSJ 79/1983 p. 46 s.); 12, No 5
p. 15 ss; parmi la doctrine, BARBEY, op.cit., p. 24 ss; HAURI, op.cit.,
p. 140 s.; TERCIER, La partie spéciale du CO, p. 177 n. 1387-1389).

    d) Les trois critères sur lesquels se fonde la cour cantonale
pour juger si les conditions de l'art. 17 AMSL sont réalisées, à
savoir l'urgence du changement de logement, la situation financière du
locataire, et le nombre et la durée des démarches entreprises, ne sont pas
déterminants pour l'application de cette disposition. On peut avoir des
raisons sérieuses de changer de logement, telles que l'agrandissement
de la famille, le déplacement du lieu de travail, sans qu'il y ait
caractère d'urgence. Le locataire pourra alors être appelé, en cas de
pénurie, à saisir une occasion qui se présente à lui, indépendamment de
sa situation financière et sans que l'on puisse exiger une multiplication
des démarches à seule fin de rechercher si une occasion encore meilleure
- d'autant plus aléatoire que la pénurie est plus marquée - pourrait se
présenter. Contrairement à ce que considère le Tribunal des baux et loyers,
la situation n'est pas comparable à celle du preneur dont le bail a été
valablement résilié et qui en sollicite une seconde prolongation. D'une
part, la loi subordonne expressément la seconde prolongation à la condition
de vaines démarches entreprises par le locataire (art. 267a, al. 2 CO;
cf. pour la première prolongation ATF 102 II 256). D'autre part, la
prolongation touche à l'existence des rapports contractuels, alors que
la réduction d'un loyer abusif selon l'art. 17 AMSL n'en affecte que
les modalités.

Erwägung 4

    4.- La cour cantonale reconnaît à juste titre la nécessité d'un
changement d'appartement pour le demandeur. Indépendamment même du problème
de l'exercice du droit de visite sur son fils, on devrait admettre que
le demandeur avait de bonnes raisons de quitter un logement d'une seule
pièce, sans cuisine, ne disposant que de toilettes et douche communes
sur le palier.

    Il est par ailleurs notoire que Genève, ville et canton, souffre d'une
grave pénurie de logements. Il ne s'agit pas seulement de la pénurie qui,
depuis 1979, est une condition d'application de l'AMSL dans l'espace,
mais d'une pénurie particulièrement aiguë (cf. La vie économique, chiffres
des logements vacants: 1985, p. 604 ss; 1986, p. 620 ss; 1987, p. 651 ss).

    Dans de telles conditions, on ne saurait refuser la protection
de l'art. 17 AMSL au locataire qui accepte de signer un bail, même
après des démarches essentiellement verbales, lorsqu'il a la chance de
trouver un appartement plus convenable que le précédent, adapté à sa
situation financière modeste. Compte tenu de l'ensemble des circonstances
caractérisant la situation du demandeur, celui-ci doit être considéré
comme ayant été contraint de conclure le bail, au sens de l'art. 17 AMSL,
puisqu'une autre attitude aurait pu être qualifiée de déraisonnable.

    Les conditions de l'art. 17 AMSL étant ainsi remplies, la cour
cantonale a dénié à tort au demandeur le droit de contester le loyer
qu'il estime abusif. La cause doit dès lors lui être renvoyée pour
qu'elle entre en matière et statue sur la demande de baisse présentée
par le demandeur, en jugeant si le loyer en cause est abusif ou non,
au sens des art. 14-15 AMSL.