Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 114 II 301



114 II 301

54. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 22 décembre 1988 dans la
cause J. contre J. (recours en réforme) Regeste

    Art. 163 Abs. 2 und Art. 164 ZGB.

    1. Im Falle der Abänderung der Aufgabenteilung zwischen den
Ehegatten, namentlich bei einer Aufhebung des gemeinsamen Haushaltes,
bei einer Trennung oder Scheidung, kann derjenige Ehegatte, der bisher
überhaupt nicht oder nur in beschränktem Masse einer Erwerbstätigkeit
nachgegangen ist, sich unter Umständen gezwungen sehen, eine solche
Tätigkeit aufzunehmen oder diese auszuweiten (E. 3).

    2. Gesetzliche Voraussetzungen des Anspruchs auf einen angemessenen
Betrag zur freien Verfügung gemäss Art. 164 ZGB (E. 4).

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.- La recourante se plaint d'une mauvaise application de l'art. 163
CC.

    a) Comparativement à l'ancien droit, le nouvel art. 163 CC a apporté
d'importantes modifications. Alors que, selon l'ancien art. 160 al. 2 CC,
il appartenait essentiellement au mari de pourvoir à l'entretien de la
famille, cette tâche incombe aujourd'hui aux deux époux en commun. Il y
a néanmoins lieu de relever que, déjà sous l'ancien droit, l'épouse était
tenue d'apporter sa contribution, notamment par son travail au ménage et
les soins aux enfants. Ainsi, sous l'ancien droit déjà, la femme n'avait
pas de prétention unilatérale et inconditionnelle à l'entretien par son
mari. Le nouveau droit a cependant apporté une modification en ce sens
qu'il ne prévoit plus une répartition déterminée des tâches entre les
époux, mais leur laisse expressément le soin de convenir de la répartition
des rôles ainsi que du mode et du contenu de la contribution de chacun
d'eux (art. 163 al. 2 CC). L'épouse n'a dès lors plus de prétention
légale à apporter sa contribution par les soins du ménage exclusivement et
à être en principe dispensée d'exercer une activité lucrative. Cela vaut
également chaque fois qu'intervient une modification de la répartition des
tâches, qu'elle résulte d'une entente tacite ou expresse entre les époux,
d'autres circonstances (maladie grave, perte d'emploi, etc.) ou encore de
la suspension de la vie commune, du divorce ou de la séparation. Celui des
époux qui, jusque-là, n'avait pas - ou seulement dans une mesure restreinte
- exercé d'activité lucrative pourra alors, selon les circonstances, se
voir contraint de le faire ou d'étendre son activité. En cas de suspension
de la vie commune, de séparation ou de divorce, une telle obligation pourra
notamment résulter du fait que les revenus du mari ne suffiront plus à
couvrir les frais supplémentaires qu'entraînera désormais l'existence de
deux ménages. Il y aura cependant lieu d'examiner dans chaque cas concret
si et dans quelle mesure on pourra exiger de l'épouse qu'elle exerce
dorénavant une activité lucrative, compte tenu de son âge, de son état
de santé, de sa formation et, cas échéant, du temps plus ou moins long
pendant lequel elle aura été éloignée de la vie professionnelle (ATF 114
II 15 ss consid. 3 à 5, 29 ss consid. 5 et 6; HAUSHEER, REUSSER ET GEISER,
Kommentar zum Eherecht, n. 40 ss ad art. 163 CC, n. 17 ss ad art. 176 CC).

    b) L'autorité cantonale a considéré que, séparée de son mari depuis le
départ de celui-ci en avril 1986, la recourante était apparemment apte,
faute d'éléments contraires, à exercer une activité lucrative à temps
partiel, même si la charge constante de son fils cadet et la nécessité
d'être disponible pour accueillir son fils aîné un week-end sur deux
limitaient cette capacité. Elle a constaté que l'on ignorait la formation
de l'épouse, mais que l'on savait incidemment qu'elle avait travaillé à
A., puisqu'elle s'y rendait en voiture, à une époque indéterminée. Elle a
dès lors estimé qu'il se justifiait de lui allouer une pension mensuelle,
indexée et non limitée dans le temps, de 700 francs.

    c) La recourante reproche à l'autorité cantonale d'avoir surestimé
sa capacité de gain, en méconnaissant que, sans formation et absente de
la vie active depuis de nombreuses années, elle pourrait tout au plus
espérer, à P., effectuer des heures de ménage ou garder des enfants; or,
exercée à temps partiel, une telle activité ne rapporterait pas 1'000
francs par mois. Elle fait en outre valoir que le mari doit généralement
consacrer un tiers de son salaire à son épouse, ce qui, en l'espèce,
représenterait environ 1'300 francs; la pension de 700 francs qui lui
a été allouée serait ainsi nettement insuffisante. Enfin, l'autorité
cantonale n'aurait pas suffisamment tenu compte, dans la fixation de la
rente qu'elle lui a allouée, de la répartition des tâches entre les époux,
en particulier du fait qu'elle a la tâche délicate de s'occuper des deux
enfants dont l'un est anormal.

    d) On ne saurait suivre la recourante lorsqu'elle soutient que
l'autorité cantonale n'a pas suffisamment tenu compte de la répartition
des tâches entre les époux, notamment du fait qu'elle doit s'occuper des
deux enfants, dont l'un est anormal. D'une part, l'autorité cantonale
n'a pas méconnu cet élément, puisqu'elle n'a reconnu à la recourante que
l'aptitude à exercer une activité lucrative à temps partiel. D'autre part,
les revenus du mari ne lui permettent manifestement plus de faire face aux
frais supplémentaires consécutifs à la nouvelle situation résultant de la
séparation, à savoir l'existence de deux ménages. De son côté, l'épouse
est âgée de 39 ans et, le contraire n'ayant été ni établi ni même allégué,
on doit admettre qu'elle est en bonne santé. A cela s'ajoute que le fils
cadet a actuellement 11 ans et n'est donc plus en bas âge. Quant au fils
aîné, même s'il requiert une présence constante, il ne rentre chez sa mère
qu'un week-end sur deux. Dans ces circonstances, on est en droit d'exiger
de l'épouse qu'elle contribue dans une majeure mesure à l'entretien de la
famille par l'exercice d'une activité lucrative, ce d'autant qu'ensuite de
la séparation elle se trouve partiellement libérée des tâches ménagères. Ce
moyen, infondé, doit donc être rejeté.

    S'agissant de la capacité de gain de la recourante, il est vrai
que l'on ignore sa formation. L'autorité cantonale a cependant constaté
qu'elle était apte à exercer une activité lucrative à temps partiel. Il
est en revanche pour le moins douteux que celle-ci ne soit pas en mesure
de travailler le samedi, ce qui réduirait ses possibilités de trouver un
emploi. En effet, la recourante n'accueille son fils aîné qu'un week-end
sur deux et le fait qu'elle n'exercera une activité lucrative qu'à temps
partiel ne la contraindra pas nécessairement à travailler le samedi ou, du
moins, lui permettra de trouver un arrangement pour être libre un samedi
sur deux. Pour le surplus, la recourante admet elle-même qu'elle serait
en mesure de gagner environ 1'000 francs par mois. Ainsi qu'on l'a vu, les
revenus mensuels de l'intimé, y compris le treizième salaire et déduction
faite des allocations familiales, s'élèvent à 3'610 francs. Après versement
des pensions dues pour son épouse et ses enfants, il disposera donc de
2'100 francs par mois. Ce montant, bien que peu élevé, apparaît cependant
suffisant. La recourante, quant à elle, disposera, pour elle-même et ses
deux enfants, de quelque 2'730 francs, compte tenu d'une incapacité de
gain de 1'000 francs environ (700 francs + 500 francs + 310 francs + 220
francs + 1'000 francs). On ignore en revanche ce que chaque partie doit
débourser mensuellement pour le loyer. Toutefois, le minimum vital de la
recourante, augmenté du 20% pris en compte par la jurisprudence relative
à l'art. 152 CC (cf. HAUSHEER, Neuere Tendenzen der bundesgerichtlichen
Rechtsprechung im Bereiche der Ehescheidung, in ZBJV 122/1986, p. 62/63,
avec référence à l'arrêt non publié du 16 juin 1982 en la cause E. et
à l'arrêt du 7 février 1980, publié in BJM 1980, p. 91 ss), s'élève,
loyer non compris, à 1'716 francs (805 francs min. vit. adulte seul + 220
francs min. vit. enfant de 11 ans + 300 francs min. vit. enfant de 16 ans +
env. 45 francs ass. mal. épouse + env. 60 francs ass. mal. deux enfants =
1'430 francs + 20% de 1'430 francs, soit 286 francs = 1'716 francs). Quant
au minimum vital de l'intimé, également augmenté de 20% il s'élève, loyer
non compris, à 1'020 francs (805 francs min. vit. adulte seul + env. 45
francs ass. mal. = 850 francs + 20% de 850 francs, soit 170 francs =
1'020 francs). Si l'on déduit du montant à disposition de chaque partie
celui du minimum vital lui revenant, le solde, loyer non payé, s'établit
à 1'024 francs en faveur de la recourante (2'730 francs - 1'716 francs)
et à 1'080 francs en faveur de l'intimé (2'100 francs - 1'020 francs). Par
ailleurs, il convient de rappeler que le fils aîné coûte, en l'espèce, un
peu moins cher qu'un enfant vivant chez ses parents et à l'entière charge
de ceux-ci. Il apparaît ainsi que la situation matérielle de chacune des
parties est sensiblement la même. Dans ces circonstances, même si l'on
admet avec la recourante que sa capacité de gain ne sera pas supérieure
à 1'000 francs, l'autorité cantonale n'a pas violé l'art. 163 CC en lui
allouant une pension de 700 francs. Le moyen doit dès lors être rejeté.

    Enfin, on ne saurait suivre la recourante lorsqu'elle soutient que
la rente qui lui a été allouée serait insuffisante parce que nettement
inférieure au tiers du salaire de son mari. En effet, la recourante perd
de vue que les revenus qu'elle retirera ou pourrait retirer avec de la
bonne volonté de son activité lucrative doivent être pris en considération
dans la fixation du montant de la rente. Or, même si l'on admet avec la
recourante qu'elle aurait tout au plus la possibilité de compter avec
un salaire mensuel de 1'000 francs, elle disposera, avec la pension de
700 francs qui lui a été allouée, de 1'700 francs par mois, alors que
l'intimé disposera, lui, après versement des pensions dues pour les siens,
de 2'100 francs par mois. Sur ce point également, l'autorité cantonale
n'a pas violé le droit fédéral. Conséquemment, le moyen doit être rejeté.

Erwägung 4

    4.- La recourante fait grief à l'autorité cantonale d'avoir fixé le
montant de la pension qu'elle lui a allouée en se fondant exclusivement
sur l'art. 163 CC, sans tenir compte du montant équitable auquel elle
peut prétendre en vertu de l'art. 164 CC.

    a) Aux termes de l'art. 164 al. 1 CC, l'époux qui voue ses soins
au ménage ou aux enfants ou qui aide l'autre dans sa profession ou
son entreprise a le droit de recevoir régulièrement de son conjoint
un montant équitable dont il puisse disposer librement. Selon l'al. 2
de cette disposition, dans la détermination de ce montant, il faut
considérer les revenus propres à l'époux créancier ainsi que le devoir
du débiteur d'assurer l'avenir de la famille et de pourvoir aux besoins
de sa profession ou de son entreprise.

    La ratio legis de cette disposition repose sur le postulat de l'égalité
entre époux comme principe fondamental du nouveau droit du mariage. Elle
a ainsi pour but d'établir une égalité entre l'époux au foyer, qui, dans
la mesure où il n'a pas de revenus propres, dépend entièrement de son
conjoint économiquement, et l'autre époux, qui, en revanche, dispose
pratiquement d'une grande liberté dans l'affectation de ses gains,
notamment pour la satisfaction de ses besoins personnels. L'indemnité
équitable de l'art. 164 CC ne constitue donc pas un salaire, qui serait
une simple rémunération pour des prestations ménagères. En effet, la
contrepartie de ces prestations réside avant tout dans l'entretien dû par
l'autre époux. Il s'agit en réalité d'une autre manière de s'acquitter de
son devoir de contribuer aux charges du ménage. L'indemnité de l'art. 164
CC doit permettre d'assurer à l'époux au foyer la liberté de disposer
lui-même de certaines sommes pour faire face à des dépenses de son choix
(cf. MESSAGE, ch. 214.2, al. 1 à 4; DESCHENAUX/STEINAUER, Le nouveau droit
matrimonial, p. 61; C. HEGNAUER, Die allgemeinen vermögensrechtlichen
Wirkungen der Ehe, in H. HAUSHEER, Vom alten zum neuen Eherecht, p. 18
et 21).

    Le droit à une indemnité équitable au sens de l'art. 164 CC est
subordonné à la réalisation de diverses conditions. S'agissant de
l'époux au foyer, il faut que les tâches prévues par l'art. 164 al. 1 CC
constituent son activité essentielle; en outre, s'il dispose de revenus
propres - que ce soit par son travail d'appoint hors du ménage ou les
revenus de sa fortune -, il faut que ceux-ci soient insuffisants à lui
assurer une indépendance financière équivalente à celle de son conjoint. En
ce qui concerne l'autre époux, il faut que son revenu ne soit pas
entièrement absorbé par l'entretien de la famille (dépenses indispensables
pour le gîte et le couvert, le vêtement, la santé, les loisirs communs,
les impôts, les devoirs de prévoyance, etc.) (cf. DESCHENAUX/STEINAUER,
op.cit., p. 62/63; HEGNAUER, in op.cit., p. 19/20). Lorsque le revenu
de la famille est juste suffisant pour couvrir les besoins communs et
les besoins personnels élémentaires des époux, il n'y a plus place pour
une prétention fondée sur l'art. 164 CC (cf. HAUSHEER/REUSSER/GEISER,
op.cit., n. 9 ad art. 164 CC). En revanche, lorsque, ces besoins couverts,
il reste un montant à disposition, chacun des époux aura droit à un montant
équitable équivalent à celui de son conjoint (cf. HAUSHEER/REUSSER/GEISER,
op.cit., n. 20 ss ad art. 164 CC).

    L'art. 164 CC est applicable en cas de suspension de la vie commune au
sens des art. 175 ss CC, après l'introduction d'une demande en divorce ou
en séparation ainsi qu'en cas de divorce ou de séparation (cf. MESSAGE,
ch. 219.223.2, al. 3; DESCHENAUX/STEINAUER, op.cit., p. 140; HEGNAUER,
in op.cit., p. 16/17 et 20/21; V. BRÄM, Auswirkungen von Art. 163-165
n. ZGB auf Renten bei Scheidung und Getrenntleben, in RSJ 1988 p. 57 ss,
not. p. 60-63; HAUSHEER/REUSSER/GEISER, op.cit., n. 23 ad art. 176 CC). En
d'autres termes, le juge appelé à fixer le montant de la contribution due
par un époux pour l'entretien de l'autre, en application de l'art. 176
al. 1 ch. 1, 145 al. 2, 151 al. 1 ou 163 CC, devra en principe également
prendre en considération le montant équitable au sens de l'art. 164
CC. Il y aura également lieu de tenir compte, cas échéant, du temps accru
dont disposera l'époux créancier, du fait de sa libération partielle
des tâches du ménage, des soins aux enfants ou de la collaboration à
l'activité lucrative de son conjoint, pour exercer une activité lucrative
totale ou partielle et, donc, des revenus qu'il en tirera ou serait en
mesure d'en tirer. En particulier, si ces revenus sont propres à lui
assurer une indépendance financière équivalente à celle de son conjoint,
il ne saurait prétendre à une indemnité fondée sur l'art. 164 CC (cf.
HAUSHEER/REUSSER/GEISER op.cit. n. 23 ad art. 176 CC et les références).

    b) L'autorité cantonale s'est fondée sur les art. 159 al. 3 et 163
CC. Elle n'a en revanche pas examiné si la recourante pouvait prétendre
à un montant équitable, en vertu de l'art. 164 CC, ce qui, cas échéant,
aurait été de nature à entraîner une augmentation de la pension. Il y
a donc lieu de rechercher si la recourante peut prétendre à une telle
indemnité et, partant, si l'omission de l'autorité cantonale à cet égard
lui a porté préjudice.

    En l'espèce, alors même que la pension en faveur de l'épouse n'est
fixée qu'à 700 francs, le montant à la disposition du mari pour vivre,
après versement des pensions dues pour l'épouse et les enfants, est de
2'100 francs environ, loyer non payé. Dans ces circonstances, même si l'on
ignore la capacité de gain de l'épouse, qui, au demeurant, ne pourra, selon
les constatations de l'autorité cantonale, exercer une activité lucrative
qu'à temps partiel, il est manifeste que les revenus des époux seront
juste suffisants pour leur permettre de couvrir les frais nécessaires
à l'entretien de la famille. Or, dans un tel cas, ainsi qu'on l'a vu
(cf. supra, lit. a), il n'y a plus place pour une prétention fondée sur
l'art. 164 CC. L'omission de l'autorité cantonale n'a dès lors pas entraîné
de préjudice pour la recourante. Le moyen doit en conséquence être rejeté.