Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 114 IB 108



114 Ib 108

16. Arrêt de la Ire Cour de droit public du 16 février 1988 dans la
cause commune de Commugny et canton de Vaud contre R. (recours de droit
administratif) Regeste

    Art. 5 Abs. 2 RPG. Von einer formellen Enteignung gefolgte materielle
Enteignung; massgebender Zeitpunkt für die Schätzung.

    1. Die für beide Enteignungsarten geschuldete Entschädigung bemisst
sich nach den für jede geltenden Grundsätzen, selbst wenn nur ein
Schätzungsverfahren durchgeführt wird. Anwendbare Grundsätze für die
Bestimmung der für die Entschädigungsermittlung massgebenden Zeitpunkte
(E. 2a).

    2. Das kantonale Recht kann dem Eigentümer nicht über Art. 5 Abs. 2
RPG hinausgehende Ansprüche gewähren (E. 2b).

Sachverhalt

    A.- R. est propriétaire de la parcelle No 712 du cadastre de la
commune de Commugny. Située d'abord en zone de villas, cette parcelle a
été classée en zone agricole et viticole protégée par le nouveau plan de
zones de la commune de Commugny, entré en vigueur le 1er avril 1981. Le 3
août 1981, R. a ouvert action à la commune en paiement d'une indemnité
pour expropriation matérielle. L'Etat de Vaud est intervenu au procès
pour résister à cette demande. Celle-ci a été rejetée par le Tribunal
d'expropriation du district de Nyon, puis par la Chambre des recours
du Tribunal cantonal vaudois qui a, par arrêt du 6 mars 1985, exclu la
réalisation d'une expropriation matérielle. Saisi d'un recours de droit
administratif formé par R., le Tribunal fédéral, statuant le 23 avril
1986, a considéré que la restriction qui touche la parcelle concernée
est constitutive d'une expropriation matérielle et justifie l'allocation
d'une indemnité sur la base de l'art. 5 al. 2 LAT. Il a admis le recours
et annulé l'arrêt attaqué dans la mesure où il s'agissait du principe
de l'expropriation et de l'indemnité due au recourant; il a renvoyé la
cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.

    Par la suite, les parties ont conclu à l'extension de l'expropriation
et au transfert de l'immeuble à la commune de Commugny. Par arrêt du 24
juin 1987, la Chambre des recours du Tribunal cantonal a renvoyé la cause
au Tribunal d'expropriation du district de Nyon pour nouvelle décision
dans le sens des considérants, en application de la législation cantonale
sur l'expropriation. La Chambre des recours a retenu qu'il appartient
au Tribunal d'expropriation de statuer sur le droit au transfert de la
propriété et sur la valeur de l'immeuble à transférer. Elle a précisé
que l'indemnité due pour l'expropriation ne doit pas être calculée au
jour où la restriction du droit de propriété a pris effet, mais à celui
du jugement à intervenir.

    Agissant par la voie du recours de droit administratif, la commune
de Commugny et le canton de Vaud ont requis le Tribunal fédéral,
principalement, d'annuler l'arrêt du 24 juin 1987 de la Chambre des recours
du Tribunal cantonal et de renvoyer la cause au Tribunal d'expropriation
du district de Nyon pour que cette juridiction statue sur l'indemnité à
verser à R., en fixant le dies aestimandi au jour de l'entrée en vigueur de
la restriction, soit au 1er avril 1981. Cette date aurait été déterminante
pour estimer aussi bien la moins-value consécutive à la restriction que la
valeur résiduelle du bien-fonds comme parcelle viticole. Subsidiairement,
les recourants ont demandé que le dies aestimandi soit fixé au 1er avril
1981 pour la moins-value, et au jour du jugement à intervenir pour la
valeur résiduelle du bien-fonds comme parcelle viticole. Le Tribunal
fédéral a rejeté les conclusions principales du recours et admis les
conclusions subsidiaires; il a renvoyé la cause à la Chambre des recours
du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) La décision de renvoyer la cause au Tribunal d'expropriation
du district de Nyon pour statuer sur les points encore litigieux n'est
pas critiquée. Le recours conteste l'arrêt attaqué uniquement dans la
mesure où celui-ci règle la question du dies aestimandi.

    b) A teneur de l'art. 34 al. 1 LAT, le recours de droit administratif
est recevable contre les décisions prises en dernière instance cantonale et
fondées sur l'art. 5 al. 2 LAT. Cette disposition concerne l'indemnisation
consécutive à des restrictions apportées au droit de propriété par des
mesures d'aménagement du territoire. Le nouveau plan de zones de la
commune de Commugny a établi une zone agricole et viticole en principe
inconstructible, ce qui est à l'évidence une mesure d'aménagement. Il
est établi que l'application de ce plan constitue une expropriation
matérielle. Dans la mesure où l'arrêt attaqué détermine, dans le cadre
de cette expropriation, le dies aestimandi de manière obligatoire pour
la juridiction inférieure à laquelle il renvoie la cause pour nouvelle
décision, il porte sur une prétention régie par l'art. 5 al. 2 LAT. Il
peut dès lors, contrairement à l'opinion de l'intimé, faire l'objet d'un
recours de droit administratif même si, par ailleurs, il met en oeuvre
des règles cantonales d'organisation et de procédure.

    c) L'intimé fait valoir en vain que le recours de droit administratif
n'est recevable contre une décision incidente que si celle-ci entraîne un
dommage irréparable (ATF 109 Ib 132 consid. 1a, 108 Ib 381 consid. b). En
effet, pour ce type de recours, un arrêt de renvoi qui contient des
instructions impératives destinées à l'autorité inférieure met fin à la
procédure sur les points tranchés dans les considérants; il ne s'agit
pas, en ce qui concerne ces points, d'une décision incidente, mais au
contraire d'une décision finale (ATF 107 Ib 221/222, 343 consid. 1,
103 Ib 45 consid. b). En l'espèce, l'arrêt attaqué exprime une décision
finale quant au dies aestimandi.

Erwägung 2

    2.- L'autorité intimée a retenu que l'expropriation de la parcelle
No 712 a le caractère d'une expropriation formelle, cela en raison
de son extension qui implique le transfert de la propriété de cet
immeuble à la commune concernée. Elle a fixé le moment déterminant pour
l'estimation de l'indemnité d'après les règles cantonales relatives à ce
type d'expropriation.

    a) Le Tribunal fédéral a cependant jugé qu'un immeuble peut être
atteint d'abord par une expropriation matérielle, puis, ensuite, par
une expropriation formelle; en pareille situation, le préjudice causé au
propriétaire par chacune de ces mesures doit être évalué conformément aux
principes qui les concernent respectivement, même s'il n'y a qu'une seule
procédure d'estimation. Cette solution a d'abord été admise au regard
de l'art. 22ter Cst. (ATF 97 I 814 consid. b, 93 I 149 consid. cc,
153 consid. b); elle correspond aussi au principe de la juste indemnité
consacré par l'art. 5 al. 2 LAT (ATF 109 Ib 262 consid. 2, 108 Ib 338
consid. b et c).

    Selon la jurisprudence relative à cette disposition légale, l'indemnité
consécutive à l'expropriation matérielle doit être estimée en fonction des
circonstances existant au moment où l'atteinte au droit de propriété est
entrée en vigueur et a entraîné la moins-value de l'immeuble. Cette règle
s'applique aussi lorsque le propriétaire a été empêché sans sa faute de
faire valoir immédiatement ses prétentions; un tel retard donne lieu au
paiement d'intérêts (ATF 111 Ib 83 consid. b). En revanche, l'estimation
de l'indemnité relative à l'expropriation formelle, qui intervient
généralement avant la perte du droit de propriété par l'exproprié, doit
tenir compte des circonstances du moment où l'autorité se prononce. Il
n'est admissible de faire abstraction de cette différence que si, entre
les deux expropriations, aucune modification notable des prix n'est
intervenue (ATF 108 Ib 338 consid. c). Ces principes se justifient parce
que l'immeuble touché perd sa valeur de terrain à bâtir dès l'entrée en
vigueur de la restriction constitutive d'expropriation matérielle; il
cesse alors de subir l'évolution du marché des terrains constructibles. Il
ne conserve qu'une valeur résiduelle; celle-ci correspond en général à
la valeur d'un terrain agricole et participe à l'évolution des prix de
ce genre de biens, jusqu'à ce que la collectivité acquière le fonds par
l'expropriation formelle (ATF 109 Ib 262 consid. a, 108 Ib 338 consid. c,
97 I 814 consid. b).

    b) Les principes rappelés ci-dessus ne sont pas seulement destinés à
assurer la juste indemnisation du propriétaire. Ils tendent aussi à éviter
que des indemnités excessives ne soient mises à la charge des collectivités
publiques et que les objectifs de la législation fédérale sur l'aménagement
du territoire ne soient ainsi compromis. L'intimé soutient donc à tort
qu'ils ne sont applicables que lorsque les modalités de l'estimation ne
sont pas réglées par la législation cantonale. Au contraire, celle-ci ne
peut pas accorder au propriétaire des prestations plus importantes que
ce qui est dû à raison de l'art. 5 al. 2 LAT (ATF 113 Ib 33 consid. c,
110 Ib 31 consid. 3, 109 Ib 115).

    Il est constant que le prix des terrains a sensiblement augmenté depuis
l'entrée en vigueur du nouveau plan de zones de Commugny en 1981. Il est
donc indispensable de distinguer le dies aestimandi de l'expropriation
matérielle, en 1981, de celui de l'expropriation formelle qui n'est pas
encore intervenue. Dans la mesure où il retient le jour de l'expropriation
formelle comme déterminant pour toute l'indemnisation due à l'intimé,
l'arrêt attaqué s'avère contraire au droit fédéral et doit être annulé. Les
collectivités recourantes demandent, à titre principal, que la valeur
résiduelle du fonds soit aussi estimée selon les prix de 1981. Cette
prétention ne correspond pas non plus au droit fédéral et doit dès lors
être rejetée. L'indemnité due pour l'expropriation matérielle doit être
fixée au jour de l'entrée en vigueur du plan de zones, soit au 1er avril
1981; celle due pour l'extension de l'expropriation (l'expropriation
formelle) doit être estimée à la date de la décision à intervenir,
conformément aux conclusions subsidiaires du recours.