Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 114 IA 8



114 Ia 8

2. Extraits de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 6 mai 1988
dans la cause Guerino Gaioni contre Conseil d'Etat du canton du Valais
(recours de droit public) Regeste

    Art. 4 BV: Unterschiedliche, von der Staatsangehörigkeit abhängige
Höhe der Gebühren für Jagdpatente.

    1. Gesetzliche Grundlage des Walliser Staatsratsbeschlusses, mit
dem alljährlich die Gebühren für die Jagdpatente festgelegt werden;
Kostendeckungsprinzip (E. 2).

    2. In Anbetracht der territorialen Natur des Jagdregals geht es nicht
an, von im Kanton niedergelassenen Ausländern eine höhere Gebühr für die
Jagdpatente zu verlangen als von Schweizer Bürgern mit Wohnsitz im Kanton
Wallis; eine solche rechtsungleiche Behandlung lässt sich objetiv nicht
mit der unterschiedlichen Staatszugehörigkeit begründen und verstösst
somit gegen Art. 4 BV (E. 3).

Sachverhalt

    A.- Le décret cantonal valaisan d'exécution du 13 mai 1964 de la
loi fédérale sur la chasse et la protection des oiseaux du 10 juin 1925
règle le régime de la chasse (chasse à permis) et le droit de chasser
dans le canton, ainsi que les compétences des autorités en la matière;
l'art. 11 al. 2 lettre a du décret attribue au Conseil d'Etat le pouvoir
de fixer chaque année le prix des permis de chasse "en tenant compte
notamment des dépenses occasionnées par la surveillance de la chasse,
le repeuplement et les dommages causés par le gibier".

    Par arrêté quinquennal du 9 juillet 1986, le Conseil d'Etat a édicté
une ordonnance sur l'exercice de la chasse en Valais. Chaque année, cet
arrêté est complété par un avenant qui contient les prescriptions fixant
les périodes de chasse et le prix des permis. Selon l'art. 2 de l'avenant
du 8 juillet 1987 (publié dans le Bulletin officiel des 17 et 24 juillet
1987), le prix d'un permis général en 1987 s'élevait à 900 francs pour les
citoyens suisses domiciliés dans le canton; il coûtait 1'550 francs aux
Valaisans et Confédérés ayant été domiciliés pendant dix ans ainsi qu'aux
étrangers établis dans le canton; il revenait enfin à 2'200 francs aux
Confédérés non domiciliés et aux étrangers établis dans un autre canton.

    De nationalité italienne, Guerino Gaioni habite en Valais depuis 1959;
il a épousé une ressortissante suisse et est au bénéfice d'un permis
d'établissement depuis plus de 20 ans. Il s'adonne à la chasse depuis
1971. A plusieurs reprises - notamment en septembre 1986 -, il s'est
adressé, sans succès, au Service cantonal de la chasse et de la pêche en se
prévalant de l'égalité de traitement pour obtenir son permis de chasse au
même prix que celui exigé des citoyens suisses domiciliés dans le canton.

    Le 5 août 1987, Guerino Gaioni a interjeté un recours de droit public
contre l'avenant du 8 juillet 1987 en concluant, sous suite de frais et
dépens, à l'annulation de l'art. 2 de cet arrêté. Subsidiairement, il
demande l'annulation de l'art. 2 précité en tant qu'il prévoit un tarif
différencié pour les citoyens étrangers établis dans le canton et les
citoyens suisses qui y sont domiciliés. A l'appui de ses conclusions, le
recourant invoque une violation du principe de l'égalité de traitement;
il soutient également que le prix des permis de chasse ainsi que les
discriminations qui en découlent ne reposent sur aucune base légale.

    Dans ses observations, le Conseil d'Etat conclut au rejet du recours,
avec suite de frais.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extraits des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) A l'art. 37 du décret du 13 mai 1964, le Grand Conseil valaisan
a estimé qu'il avait légiféré en exécution de la loi fédérale du 10 juin
1925 et que, par conséquent, il pouvait renoncer à soumettre son arrêté
à la votation populaire conformément à l'art. 30 ch. 3 lettre b de la
constitution cantonale.

    En l'absence de loi votée par le peuple, le recourant prétend que tout
le droit valaisan sur la chasse ne reposerait sur aucune base légale dès
lors que les normes contenues dans le décret dépassent largement le cadre
de simples dispositions d'exécution et qu'il aurait fallu les soumettre
au référendum.

    Sur le principe, la démarche suivie par le Grand Conseil respecte
pleinement la constitution cantonale qui prévoit de soustraire à
la votation populaire "les dispositions législatives nécessaires pour
assurer l'exécution des lois fédérales"; du moment que le décret considéré
a effectivement été rendu en exécution d'une loi fédérale, on ne peut
considérer que le droit valaisan sur la chasse devait, dans son ensemble,
être soumis à une votation populaire et qu'à défaut, sa base légale est
inexistante. Formellement, le décret du 13 mai 1964 satisfait donc à la
condition posée par l'art. 30 ch. 3 lettre b de la constitution valaisanne.

    Autre serait la question de savoir si une disposition déterminée du
décret s'inscrit dans le cadre de la stricte exécution de la loi fédérale
ou si elle constitue par elle-même une norme primaire qui aurait dû être
soumise au référendum obligatoire. Le recourant n'indique pas, cependant,
en quoi l'art. 11 al. 2 lettre a du décret, seule disposition directement
relative au prix des permis édictée par le Grand Conseil, ne serait pas
nécessaire à l'exécution de la loi fédérale et aurait dû, par conséquent,
faire l'objet d'une votation populaire. Faute de motivation sur ce point
précis dans le recours, le Tribunal fédéral n'a pas à trancher la question
(art. 90 al. 1 lettre b OJ).

    b) L'intéressé conteste par ailleurs, sous l'angle du principe de
la légalité, que la délégation de compétence figurant à l'art. 11 al. 2
lettre a du décret soit suffisamment précise pour autoriser le Conseil
d'Etat à édicter un règlement fixant le tarif des permis dès lors qu'aucune
indication n'est donnée sur le prix maximum des permis ou sur la base de
calcul permettant à l'administré d'évaluer ce montant.

    Dans les limites de la Constitution, le législateur cantonal est
libre d'organiser comme il l'entend les taxes de régale qu'il est en
droit de prélever (ATF 95 I 502). S'il désire utiliser le droit régalien
cantonal sur la chasse à des fins fiscales (cf. ATF 109 Ib 314, 95 I
501), une éventuelle délégation de compétence de sa part à une autorité
exécutive devra respecter pleinement la jurisprudence relative à la
légalité des contributions publiques; il devra notamment fixer dans une
loi au sens formel la manière de calculer la redevance (ATF 112 Ia 43,
109 Ib 315, 106 Ia 203, 105 Ia 4). En revanche, si la taxe prélevée
auprès des chasseurs ne présente pas le caractère d'un impôt spécial,
le principe de la légalité pourra être considéré comme respecté si, de
manière reconnaissable, la délégation de compétence implique le respect
de principes particuliers tels que celui de la couverture des frais ou
de l'équivalence, qui ont pour effet de déterminer le montant des taxes
perçues par l'administration en fonction de critères connus. Dans ces
cas, la délégation de compétence n'aura pas forcément à être formulée
dans une loi au sens formel (ATF 112 Ia 44, 106 Ia 203, 105 Ia 145;
arrêt non publié du 30 janvier 1987 en la cause Andermatt consid. 2a).

    En l'occurrence, dans son décret du 13 mai 1964, le Grand Conseil a
conféré au gouvernement cantonal la compétence de fixer le prix des permis
en assortissant sa délégation de certaines directives. Selon l'art. 11
al. 2 lettre a du décret, il incombe à l'autorité exécutive de déterminer
les prix des permis "en tenant compte notamment de dépenses occasionnées
par la surveillance de la chasse, le repeuplement et les dommages causés
par le gibier". En eux-mêmes, les critères mentionnés - à titre d'exemples
- dans cette disposition n'imposent pas au Conseil d'Etat de fixer le
prix des permis en fonction du principe de la couverture des frais. Ils
visent surtout à s'assurer que le prix des permis couvre au minimum
les frais occasionnés par la chasse; le montant maximum perçu n'est en
revanche pas directement limité. La teneur de l'art. 11 al. 2 lettre
a du décret ne permet donc pas de déterminer d'emblée si la délégation
de compétence satisfait au principe de la légalité. Il faut pour cela
examiner la manière dont l'autorité délégataire a interprété et utilisé
la compétence qui lui a été attribuée.

    A cet égard, le Conseil d'Etat a toujours interprété la délégation de
l'art. 11 al. 2 lettre a du décret comme lui imposant un strict respect
du principe de la couverture des frais; cela implique pour lui de fixer
le prix des permis de chasse de manière à ce que le total des montants
perçus à cette occasion ne dépasse pas celui des frais entraînés par
l'exercice de la chasse (cf. ATF 109 II 480, 106 Ia 243, 104 Ia 116). Or,
il ressort du bilan du Service de la chasse pour les années 1982 à 1986 que
les recettes tirées de l'octroi des permis ne couvrent pas les dépenses
consenties pour la chasse dans le canton. Ces comptes établissent dès
lors à suffisance de droit qu'en fixant le prix des permis de chasse,
le délégataire ne poursuit pas un but fiscal, mais obéit aux exigences du
principe de la couverture des frais, quand bien même les taxes de régale
n'y sont normalement pas soumises (cf. ATF 109 Ib 314).

    Ainsi, bien que l'obligation de respecter ce principe ne découle pas
directement du texte de la norme de délégation, l'interprétation pondérée
qu'en a faite le Conseil d'Etat en s'attachant à limiter la redevance
réclamée aux chasseurs en fonction des frais entraînés par leur activité
impose d'appliquer la jurisprudence mentionnée précédemment; la délégation
de compétence dont il bénéficie n'avait donc pas à figurer dans une loi
soumise au référendum.

    c) Dans la mesure où la délégation de compétence échappe à la critique,
le contrôle de la légalité suppose d'examiner encore si la discrimination
établie à l'encontre des étrangers domiciliés dans le canton par l'art. 2
de l'avenant est conforme à la délégation prévue à l'art. 11 al. 2 lettre
a du décret tel qu'il a été interprété ci-dessus. Considérant, toutefois,
que la différence de traitement en cause s'avère en elle-même contraire
au droit à l'égalité du recourant (cf. consid. 3), il est superflu de se
prononcer sur la base légale de la discrimination; la constatation d'un
éventuel défaut sur ce point ne pourrait en effet qu'entraîner l'annulation
de la différence de traitement, déjà sanctionnée ci-après pour violation
de l'art. 4 Cst.

Erwägung 3

    3.- a) Selon la jurisprudence, le droit à l'égalité de traitement est
violé notamment lorsque la disposition contestée établit des distinctions
qui ne trouvent aucune justification objective dans la situation à
réglementer (ATF 110 Ia 13, 106 Ib 188 et les arrêts cités). Dans cette
mesure, le grief d'inégalité de traitement se confond, pour l'essentiel,
avec celui d'arbitraire (ATF 110 Ia 13 et les références).

    b) La faune étant un bien inhérent au territoire cantonal (arrêt non
publié du 20 mars 1987 en la cause Pochon, consid. 4), le droit régalien
sur la chasse présente un caractère essentiellement territorial. Pour
cette raison, un canton peut établir une certaine discrimination entre les
usagers locaux, qui ne jouissent en principe que de la faune présente dans
leur environnement, et les personnes établies à l'extérieur du canton,
même si ces dernières en sont originaires, puisque celles-ci bénéficient
en premier lieu de la faune de leur propre domicile (ATF 101 Ia 196;
arrêt non publié du 20 mars 1987, déjà cité). Le statut personnel du
chasseur domicilié hors du canton, qu'il soit ressortissant étranger ou
citoyen suisse, ne déploie ainsi aucune influence sur l'admissibilité
d'une différence de traitement à son égard. Inversement, et pour les mêmes
motifs, la nature territoriale du droit de chasse n'autorise à établir
aucune discrimination entre les justiciables établis régulièrement dans
le canton.

    Certes, la jurisprudence et la doctrine ancienne (SALIS-BURCKHARDT,
Schweizerisches Bundesrecht, Frauenfeld 1931, No 1895, 1896; KURMANN,
Geschichte und System des luzernischen Jagdrechts, Fribourg 1944, p. 69/70;
HÄMMERLI, Das zürcherische Jagdrecht unter besonderer Berücksichtigung
der Jagdgesetzgebung des Bundes und der übrigen Kantone, Zurich 1940,
p. 145; BAUR, Zürcherisches Jagdrecht, 2e éd., Zurich 1967, p. 55)
admettaient - sans longues explications - une différence de traitement
en ce qui concerne les étrangers établis au motif que les cantons
étaient libres de leur ouvrir ou non l'accès à la régale cantonale sur
la chasse. Toutefois, l'existence du droit régalien n'autorise pas un
canton à fixer les conditions de l'exercice de la chasse par les étrangers
domiciliés d'une manière contraire à la Constitution, en établissant à
leur préjudice des discriminations que rien ne justifie. Compte tenu de la
nature territoriale du droit de chasse, une différence de traitement ne
saurait résider dans la seule différence de nationalité. Dès lors, dans
la mesure où la législation cantonale prévoit que les étrangers et les
Suisses domiciliés peuvent chasser d'une manière identique, la redevance
plus élevée exigée des chasseurs de nationalité étrangère établis en Valais
ne trouve aucune justification objective et raisonnable. D'ailleurs, dans
ses observations, l'autorité intimée n'a pas été en mesure de présenter
une motivation sérieuse à l'appui de la distinction qu'elle défend;
ses arguments visent exclusivement à justifier sa pratique à l'encontre
de personnes domiciliées hors du canton, mais ne permettent en aucun
cas de déterminer sur quel motif raisonnable s'appuie la différence de
prix des permis entre Suisses et étrangers établis dans le canton. La
nationalité des chasseurs étant sans rapport soutenable avec le droit
concédé lors de la délivrance du permis, la discrimination figurant à
l'art. 2 de l'avenant du 8 juillet 1987 viole l'art. 4 Cst. Il y a donc
lieu d'annuler, dans cette mesure, la disposition attaquée.