Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 114 IA 179



114 Ia 179

28. Arrêt de la Ire Cour de droit public du 27 mai 1988 en la cause
V. contre Vaud, Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal (recours de
droit public) Regeste

    Art. 87 OG. Zwischenentscheid; Beschwerde wegen Verletzung von Art. 6
Ziff. 3 lit. d EMRK.

    Art. 6 Ziff. 3 lit. d EMRK konkretisiert die in Art. 4 BV enthaltenen
Rechte. Er geht in seiner Tragweite nicht über diese Bestimmung
hinaus. Eine Beschwerde wegen Verletzung von Art. 6 Ziff. 3 lit. d EMRK
ist somit gegen einen Zwischenentscheid nur zulässig, wenn dieser für
den Betroffenen einen nicht wiedergutzumachenden Nachteil zur Folge hat
(Änderung der Rechtsprechung).

Sachverhalt

    A.- Par arrêt du 28 janvier 1988, le Tribunal d'accusation du
Tribunal cantonal du canton de Vaud a confirmé une ordonnance renvoyant V.
devant le Tribunal correctionnel du for compétent. Agissant par la voie
du recours de droit public, V. a requis le Tribunal fédéral d'annuler cet
arrêt pour violation des art. 4 Cst. et 6 ch. 3 lettre d CEDH. Il s'est
plaint d'une application arbitraire des dispositions cantonales relatives
à son droit de faire interroger les témoins par son défenseur avant la
clôture de l'enquête préparatoire. En outre, il a fait valoir que les
témoins sont interrogés à l'appui de l'accusation par le Juge d'instruction
et qu'il est dressé procès-verbal de leurs déclarations, tandis qu'il ne
reste aucune trace écrite de l'interrogatoire effectué par la défense,
si celui-ci n'est possible que devant le Tribunal correctionnel. Cette
situation serait contraire à l'art. 6 ch. 3 lettre d CEDH, les conditions
des interrogatoires à charge et à décharge n'étant pas identiques. Le
Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

    Selon l'art. 87 OJ, le recours de droit public pour violation de
l'art. 4 Cst. n'est recevable que contre une décision finale; il n'est
recevable contre une décision incidente que si celle-ci cause à l'intéressé
un préjudice irréparable. Un prononcé tel que l'arrêt attaqué, par lequel
une autorité confirme le renvoi d'un accusé devant la juridiction de
jugement au terme d'une enquête préparatoire, constitue une décision
incidente. Il s'agit en effet d'une simple étape avant le jugement
relatif à la culpabilité de l'accusé qui doit, plus tard, mettre fin au
procès (ATF 98 Ia 327 consid. 3). La règle précitée n'est cependant pas
applicable aux recours dénonçant, outre une violation de l'art. 4 Cst.,
la violation d'autres droits constitutionnels, à condition que ceux-ci
aient une portée indépendante et que les griefs qui en sont tirés ne soient
pas manifestement irrecevables ou mal fondés (ATF 106 Ia 227 consid. 1,
230 consid. 2a). En l'espèce, il est nécessaire d'examiner si le moyen
tiré de l'art. 6 ch. 3 lettre d CEDH a une portée indépendante de celui
tiré de l'art. 4 Cst. Le recourant n'invoque certes pas les garanties
minimum de procédure qui découlent de cette dernière disposition, mais
le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité du recours.

    a) L'art. 6 ch. 3 lettre d CEDH donne à l'accusé le droit d'interroger
ou de faire interroger les témoins à charge et d'obtenir la convocation et
l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les
témoins à charge. Dans les premières années qui ont suivi la ratification
de la Convention européenne des droits de l'homme par la Suisse, le 28
novembre 1974, le Tribunal fédéral a constaté que, à l'instar de quelques
autres garanties conventionnelles, le principe de l'égalité des armes
ainsi consacré allait au-delà des prétentions que l'accusé pouvait faire
valoir sur la base de l'art. 4 Cst. (ATF 105 Ia 396, 104 Ia 314; LEVI,
Schwerpunkte der strafprozessualen Rechtssprechung des Bundesgerichtes und
der Organe der europäischen Menschenrechtskonvention, RPS 102/1985, p.
346). Cette manière de voir est toutefois sujette à caution. Il faut en
effet examiner si en l'absence de l'art. 6 ch. 3 lettre d CEDH, les droits
de la défense proclamés par cette disposition ne devraient pas être déduits
directement de l'art. 4 Cst. Il en résulterait que la convention n'aurait
pas, sur ce point précis, une portée plus étendue que le droit interne.

    L'art. 4 Cst. est une règle générale qui garantit aux parties à une
procédure étatique un standard minimum, conforme à celui que garantissent
les procédures en vigueur dans les Etats démocratiques de l'Europe
occidentale. Son contenu n'est par conséquent pas figé; cela est démontré
par l'évolution de la jurisprudence qui en a dégagé successivement de
nombreux droits et principes constitutionnels. L'entrée en vigueur de la
convention n'a pas modifié le rôle de l'art. 4 Cst.; les garanties d'un
procès équitable énoncées à l'art. 6 CEDH en présentent simplement un
nouveau champ d'interprétation. Dans le même sens, le Tribunal fédéral a
jugé que l'art. 5 ch. 1 lettre e CEDH ne fait que concrétiser la portée
du droit constitutionnel non écrit à la liberté personnelle (ATF 106 Ia
35 consid. 3). L'art. 6 ch. 3 lettre d CEDH se trouve dans un rapport
analogue relativement à l'art. 4 Cst.; il a pour effet de concrétiser les
garanties conférées par cette dernière disposition. Il n'a donc pas une
portée plus étendue que celle-ci, de sorte que le recours n'est recevable
que si l'arrêt attaqué cause un préjudice irréparable.

    b) Un tel préjudice n'est réalisé que lorsque l'intéressé subit un
dommage qu'une décision favorable sur le fond ne ferait pas disparaître
complètement; il faut en outre un dommage de nature juridique, tandis
qu'un inconvénient seulement matériel, résultant par exemple d'une
prolongation de la procédure, est insuffisant (ATF 108 Ia 204 consid. 1,
106 Ia 233 consid. 3c). Selon la jurisprudence, une décision de renvoi en
jugement ne cause pas de préjudice irréparable (ATF 98 Ia 327 consid. 3 et
4). Contrairement à l'opinion du recourant, il importe peu que l'instance
cantonale de recours soit peut-être, en raison des irrégularités qu'il
dénonce, empêchée d'exercer son pouvoir d'examen. Le recourant pourra
en effet soulever ses griefs dans un recours de droit public dirigé
contre l'arrêt de cette autorité, et l'aboutissement de ce moyen de droit
ferait cesser entièrement le préjudice allégué. Le recours exercé contre
l'arrêt relatif au renvoi en jugement est ainsi irrecevable au regard de
l'art. 87 OJ.