Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 113 V 321



113 V 321

52. Extrait de l'arrêt du 30 novembre 1987 dans la cause A. contre Caisse
nationale suisse d'assurance en cas d'accidents et Tribunal des assurances
du canton de Vaud Regeste

    Art. 67 und 91 KUVG, 6 und 36 UVG: Adäquater
Kausalzusammenhang. Anwendung der in BGE 113 V 307 präzisierten Grundsätze
der Rechtsprechung im Falle einer Versicherten, die posttraumatisch an
einem Schädel-Hirn- sowie an einem Psychosyndrom leidet.

Sachverhalt

    A.- Antonietta A., née en 1936, a été victime d'un accident de la
circulation le 29 novembre 1981. Passagère du véhicule conduit par son
mari, elle a été blessée au-dessus de l'arcade sourcilière gauche. Elle
souffre principalement d'un syndrome cervico-crânien et d'un syndrome
psychologique post-traumatique. La Caisse nationale suisse d'assurance
en cas d'accidents a accordé à la prénommée ses prestations légales pour
les suites de cet accident.

    Par décision du 17 août 1983, la Caisse nationale a alloué à Antonietta
A. une rente d'invalidité de 40 fr. par mois à partir du 5 janvier
1982. Cette rente est fondée sur le degré d'incapacité de travail de 10%.

    B.- L'assurée a recouru contre cette décision devant le Tribunal des
assurances du canton de Vaud, en alléguant que son incapacité de travail
était de 50%.

    Après qu'elle eut ordonné deux expertises médicales (rapport du
prof. C., neurologue à Lausanne, du 27 septembre 1984, et rapport de la
Policlinique psychiatrique universitaire de Lausanne, du 5 mars 1985),
la juridiction cantonale a rejeté le recours de l'assurée par jugement du
24 juillet 1985. Elle a considéré en résumé que, en ce qui concerne les
séquelles organiques de l'accident, le degré d'invalidité de 10% retenu
par la Caisse nationale n'était pas critiquable et qu'il n'existait pas
de lien de causalité adéquate entre l'accident et les troubles psychiques
présentés par l'assurée.

    C.- Antonietta A. interjette recours de droit administratif contre ce
jugement. Elle demande que sa rente d'invalidité soit "portée de 10 à 50%",
subsidiairement qu'elle soit augmentée dans la proportion que justice dira,
ou encore que la rente soit "portée à 50% et ce jusqu'au 5 mars 1987". Ses
motifs seront repris, autant que besoin, dans les considérants ci-dessous.

    La Caisse nationale conclut au rejet du recours en toutes ses
conclusions.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 67 al. 1 LAMA, la Caisse nationale assure contre
les risques d'accidents professionnels ou non professionnels suivis de
maladie, d'invalidité ou de mort.

    Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré au sens
de cette disposition suppose d'abord, entre l'événement dommageable
de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité
naturelle. Cette exigence est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que,
sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout,
ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire,
en revanche, que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte
à la santé; il faut et il suffit qu'il se présente comme la condition
sine qua non de celle-ci. Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la
santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de
fait, que l'administration - ou, le cas échéant, le juge - examine en se
fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qu'il
s'agit de trancher en se conformant à la règle du degré de vraisemblance
prépondérant, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans
l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause
à effet entre l'accident et le dommage semble possible, sans présenter
toutefois un tel degré de vraisemblance, le droit à des prestations à
raison de l'accident assuré doit être nié (ATF 112 V 32 consid. 1a,
111 V 188 consid. 2b, ainsi que la jurisprudence et la doctrine citées
dans ces arrêts).

    b) La responsabilité de la Caisse nationale n'est engagée, en outre,
que s'il existe un lien de causalité adéquate entre l'accident et le
dommage subi, question de droit qu'il appartient à l'administration et,
en cas de recours, au juge de trancher (ATF 112 V 33 consid. 1b et les
références).

    La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses
et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un
effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat
paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF
112 V 33 consid. 1b, 109 V 152 consid. 3a, 107 V 176 et les arrêts cités).

    Pour qu'un événement puisse être considéré comme propre à provoquer,
d'une manière générale, les effets qui se sont produits, il n'est
pas nécessaire qu'il ait régulièrement ou fréquemment de pareils
effets. L'exigence de la causalité adéquate ne signifie pas que seules
peuvent être prises en considération les conséquences auxquelles il faut
habituellement s'attendre, eu égard aux circonstances de l'accident et aux
lésions subies. Il s'agit bien plutôt d'examiner les suites que l'accident
a effectivement entraînées, et de déterminer rétrospectivement si et
dans quelle mesure celui-ci apparaît encore comme la cause essentielle de
celles-là. Si un fait est en soi propre à provoquer un effet du genre de
celui qui s'est produit, même des conséquences singulières, c'est-à-dire
extraordinaires - au sens quantitatif et non pas qualitatif du terme -
peuvent constituer des conséquences adéquates de l'accident. Par ailleurs,
selon la nouvelle jurisprudence de la Cour de céans, le point de savoir
si l'accident considéré est propre à provoquer, d'une manière générale,
l'atteinte à la santé qu'il a entraînée ne doit pas être tranché en se
référant aux effets probables d'un pareil accident dans le cas d'un
assuré jouissant d'une constitution physique et psychique normale,
comme le prévoyait la jurisprudence antérieure. Car exclure du cercle
des bénéficiaires de la protection contre les risques économiques
d'un accident ou d'une maladie professionnelle, les personnes dont il
apparaît - à la suite de l'événement assuré - que l'état de santé recèle
certaines prédispositions morbides, n'est guère compatible avec le but
de l'assurance-accidents sociale (ATF 112 V 30 ss).

    Dans son récent arrêt C. du 19 octobre 1987 (ATF 113 V 307), la Cour
de céans a complété les principes exposés ci-dessus par les précisions
suivantes:

    Pour se prononcer sur le caractère adéquat du lien de causalité,
il convient d'apprécier l'ensemble des circonstances, en particulier
la gravité de l'accident, son caractère plus ou moins impressionnant,
les circonstances concomitantes, la gravité des lésions somatiques et
leurs caractéristiques, la durée du traitement médical et les douleurs
qu'il a entraînées, la diminution de la capacité de travail et la
durée de cette incapacité, ainsi que la personnalité que l'assuré
présentait avant l'accident. En outre, il s'agit d'évaluer la manière
dont l'assuré a assumé l'accident sur le plan psychique, la pression
psychique qu'il a subie, laquelle suppose toujours un événement marquant
ou une influence prolongée qui se situent en dehors de l'expérience de
tous les jours. L'évolution après l'accident doit donc être appréciée
par comparaison avec la personnalité de l'assuré avant l'accident,
c'est-à-dire au regard de son psychisme antérieur, des maladies
subies (notamment d'ordre psychosomatique) ainsi que de la capacité
de travail et de gain qu'il présentait précédemment. Le résultat de
cette comparaison doit permettre à l'administration et au juge de se
prononcer sur le caractère adéquat du lien de causalité. A cet effet,
la règle suivante peut servir de ligne directrice: plus la personnalité
de l'assuré antérieure à l'accident l'emporte et relègue au second plan
l'événement accidentel et les circonstances concomitantes, moins le lien
de causalité peut être qualifié d'adéquat; si, en revanche, il résulte de
cette comparaison que l'accident, considéré dans son ensemble, ne saurait
être qualifié d'insignifiant, le caractère adéquat du lien de causalité
pourra difficilement être nié.

    En raison de la complexité du problème, l'administration et le juge
doivent évidemment disposer - pour se prononcer sur le lien de causalité
adéquate entre l'accident et les troubles psychiques qui l'ont suivi -
de renseignements particulièrement fiables, fournis en règle générale
par un spécialiste en psychiatrie. Le fait qu'il s'agit d'une question
de droit n'y change rien. Ce n'est que si les constatations de l'expert
psychiatre permettent, d'une part, d'exclure l'existence de tendances de
l'assuré à la revendication, et d'autre part d'attribuer à l'accident -
au regard de l'ensemble des circonstances antérieures et postérieures à
prendre en considération - une influence déterminante, que l'on pourra
admettre le caractère adéquat du rapport de causalité. Au demeurant,
un incident tout à fait banal ne sera pas considéré, sauf vérifications
ultérieures, comme propre à provoquer une névrose assurée; il s'agit en
effet d'éviter d'ouvrir le champ de l'assurance-accidents à des risques
difficilement supportables. A cet égard, le critère de la gravité de
l'accident ne saurait être négligé.

Erwägung 3

    3.- a) En l'espèce, la recourante se plaint d'un ensemble de troubles
(douleurs cervico-crâniennes et réactions neuro-végétatives) qu'elle impute
à son accident du 29 novembre 1981, et qui représentent les conséquences
naturelles de ce dernier. Sont litigieux, en premier lieu, le point de
savoir si ces troubles sont liés à l'accident par un rapport de causalité
adéquate, ainsi que le degré d'invalidité qu'ils entraînent.

    b) La juridiction cantonale a ordonné deux expertises médicales, qui
résument et complètent les divers examens subis par la recourante avant la
décision de rente de la Caisse nationale. De l'expertise du docteur C. du
27 septembre 1984, il résulte, d'une part, que "sur le plan organique
les motifs post-traumatiques justifiant une incapacité de travail sont
de l'ordre de 15% environ (syndrome cervico-crânien principalement, qui
pourrait entraîner une incapacité un peu plus importante dans l'activité
de repassage)", mais que l'assurée présente une surcharge psychogène. De
l'expertise psychiatrique de la Policlinique psychiatrique universitaire
de Lausanne, du 5 mars 1985, il résulte d'autre part que la recourante
présente une évolution régressive avec de nombreuses somatisations
(céphalées, cervicalgies, asthénie) qui correspondent à une hystérie
décompensée. Selon l'expert, l'on peut admettre que cette évolution,
déclenchée par l'accident, n'a été possible que compte tenu de la
personnalité hystérique de l'intéressée mais qu'elle a été aggravée par
la découverte tardive d'une fracture du rocher un an après l'accident.
L'expert conclut en ces termes: "Nous proposons de lui reconnaître une
incapacité de travail de 50% pour une durée de 2 ans encore à partir de
maintenant. Nous faisons cette proposition dans l'optique que l'accident
a provoqué un syndrome psychologique post-traumatique qui a été en
partie prolongé par les difficultés diagnostiques qui ont engendré une
multiplication des investigations. Toutefois, ainsi que nous l'avons
mentionné dans notre discussion, le conflit conjugal chronique et la
structure de personnalité de l'expertisée contribuent à fixer cette
dernière sur ses symptômes et si les troubles devaient persister au-delà
de 2 ans à partir de maintenant ils ne devraient plus être considérés
comme encore en relation de causalité avec l'accident."

    c) Au vu de ce qui précède, l'existence d'un lien de causalité
adéquate entre l'accident et les troubles psychiques doit être niée en
l'espèce. Comparé à tous les éléments qui caractérisent la situation
personnelle de la recourante avant l'accident, l'événement accidentel
lui-même prend, en effet, une importance très secondaire quant aux troubles
psychiques considérés. Car il apparaît que - même si l'on tient compte des
traits particuliers de la personnalité de l'assurée - un tel accident, qui
doit être qualifié de relativement bénin à tous égards et qui n'a entraîné
que de légères séquelles organiques, n'est d'une manière générale pas
propre à entraîner, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience
de la vie, l'évolution régressive et l'incapacité de travail très
importante relevées par le psychiatre. On peut d'autant moins l'admettre
qu'un conflit conjugal, soit un facteur étranger à l'accident et aux
prédispositions d'ordre psychique de l'assurée, influe dans le cas présent
sur l'état général de celle-ci. Il convient de relever, par ailleurs,
que la découverte tardive de la fracture du rocher est un événement
anodin sur le plan médical, puisque sa découverte en temps utile n'aurait
probablement rien changé au traitement effectué. Cette circonstance n'est
donc pas de nature à modifier la conclusion qui précède. Il n'importe à
cet égard que la recourante en ait pris psychologiquement prétexte pour
justifier des plaintes sans rapport avec cet événement.

    Sur le plan somatique, en revanche, il n'est pas contesté que la
gêne fonctionnelle de la recourante est une conséquence adéquate de
l'accident. La juridiction cantonale a correctement exposé les principes
applicables en l'occurrence à l'évaluation de l'invalidité, en relevant
à juste titre que, s'agissant d'une assurée qui n'utilise pas toute
sa capacité résiduelle de travail, il y avait lieu de se fonder sur
l'estimation médicale du taux de l'incapacité de travail. Or, ce dernier
a été fixé à 15% par l'expert judiciaire, de sorte que le taux retenu par
la Caisse nationale - en l'absence d'indications médicales précises à cet
égard - se révèle trop modeste. Il se justifie donc de porter le degré
d'invalidité de l'assurée à 15%, ce qui entraîne l'admission partielle
du recours.