Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 113 IB 67



113 Ib 67

12. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 30 juin 1987
dans la cause U. S.A. contre Chambre d'accusation du canton de Genève
(recours de droit administratif) Regeste

    Rechtshilfe in Strafsachen. Art. 63 Abs. 5 und 64 Abs. 2
IRSG. Beidseitige Strafbarkeit.

    Art. 63 Abs. 5 und 64 Abs. 2 IRSG sind nur anwendbar, wenn die
Rechtshilfe und die Zwangsmassnahmen den Verfolgten entlasten sollen. Die
Tatsache, dass diese Massnahmen eine solche Folge haben könnten, genügt
nicht (E. 4a).

    Das zu beurteilende Insidergeschäft ist nach französischem Recht und
nach schweizerischem Recht gestützt auf Art. 162 StGB strafbar (E. 4b).

Sachverhalt

    A.- Le 23 mai 1984, le Premier Juge d'instruction au Tribunal de
Grande Instance de Paris a adressé au Président du Collège des juges
d'instruction à Genève une commission rogatoire internationale qu'il avait
établie le 18 mai 1984 pour les besoins d'une information suivie contre
inconnu du chef d'infraction à l'art. 10-I al. 1 de l'ordonnance No 67-833
du 28 septembre 1967 instituant une Commission des opérations de bourse
et relative à l'information des porteurs de valeurs mobilières et à la
publicité de certaines opérations de bourse (cf. DALLOZ, Code des sociétés,
7e éd., 1986 p. 654 à 662). Il exposait que la Commission des opérations de
bourse avait constaté, au cours des mois de juin à août 1983, une animation
insolite sur le marché boursier des actions de deux sociétés françaises. En
particulier, un grand nombre d'actions de l'une de ces sociétés avaient
été acquises puis revendues quelques jours après sur ordre d'U. S.A.,
dont le siège est à Genève et qui aurait réalisé ainsi un substantiel
bénéfice. Environ un mois plus tard, une opération de vente puis de rachat
portant sur un paquet d'actions d'une autre société aurait été effectuée,
avec profit, sur ordre d'U. S.A. Les circonstances entourant l'émission
et l'exécution de ces ordres ont amené la Commission à soupçonner
qu'U. S.A. avait bénéficié de renseignements livrés par une personne
disposant d'informations privilégiées. Le nom de cette personne était
indiqué ainsi que ses liens avec les sociétés et les banques concernées
et son mode de procéder pour permettre la réalisation des transactions
boursières litigieuses. La commission rogatoire tendait pour l'essentiel
à la recherche de tous renseignements sur la source des informations
ayant décidé U. S.A. à passer ses ordres de bourse, sur les modalités
de l'exécution de ceux-ci ainsi que sur l'affectation et le transfert
éventuel à des tiers des bénéfices en résultant. L'autorité requise
était invitée à procéder à toutes auditions de témoins, réquisitions,
perquisitions et saisies utiles, au vu des éléments recueillis, à la
découverte de la vérité.

    Le Juge d'instruction genevois a entendu l'administrateur-délégué et un
collaborateur d'U. S.A. qui, tout en contestant l'existence d'une opération
d'initiés, lui ont remis divers documents relatifs aux faits mentionnés
dans la commission rogatoire internationale. Par ordonnance du 4 novembre
1986, il a décidé de clore la procédure d'entraide et de transmettre
aux autorités françaises le procès-verbal de l'audition des témoins et
quatre pièces qu'ils avaient produites. Après avoir constaté la régularité
formelle de la demande d'entraide, il a considéré principalement que les
faits qui y sont allégués tomberaient, s'ils avaient été commis en Suisse,
sous le coup de l'art. 162 CP. Il a admis, à titre subsidiaire, que les
renseignements obtenus déchargeaient la ou les personnes poursuivies et
que, partant, l'entraide devait être de toute façon accordée en application
de l'art. 63 ch. 5 EIMP. Il a enfin rappelé avec précision la portée de
la règle de la spécialité.

    Par ordonnance du 4 février 1987, la Chambre d'accusation du canton de
Genève a rejeté le recours formé par U. S.A. contre cette décision. Elle
a simplement rectifié la motivation subsidiaire de l'autorité inférieure
en affirmant qu'on se trouvait en présence d'un cas d'application, non
pas de l'art. 63 al. 5, mais de l'art. 64 al. 2 EIMP, aux termes duquel
les mesures de contrainte sont aussi admises en cas d'impunité de l'acte
en Suisse si elles tendent à disculper la personne poursuivie.

    Le recours de droit administratif interjeté par U. S.A. contre cette
ordonnance a été rejeté par le Tribunal fédéral.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 4

    4.- La question fondamentale soulevée en l'espèce est celle de la
double incrimination des faits relatés dans la commission rogatoire du
18 mai 1984. En ratifiant la Convention européenne d'entraide judiciaire
en matière pénale (RS 0.351.1), la Suisse a en effet émis une réserve au
sens de ses art. 5 al. 1 et 23 al. 1, en déclarant qu'elle subordonnait
l'exécution de toute commission rogatoire exigeant l'application d'une
mesure coercitive quelconque à la condition que l'infraction motivant la
demande soit punissable à la fois selon le droit de la Partie requérante
et selon le droit de la Partie requise (RS 0.351.1, p. 28). Avant de
vérifier si cette condition est remplie en l'espèce, il convient toutefois
d'examiner si l'on se trouve en présence d'un cas où l'entraide vise à
décharger la personne poursuivie. C'est ce qu'ont admis tant l'autorité
cantonale inférieure - qui, suivie en cela par l'Office fédéral de la
police dans ses observations sur le présent recours, a fait application
de l'art. 63 ch. 5 EIMP - que l'autorité intimée - qui s'est fondée sur
l'art. 64 al. 2 EIMP.

    a) Selon l'art. 63 al. 5 EIMP, l'entraide visant à décharger la
personne poursuivie peut être accordée nonobstant l'existence de motifs
d'irrecevabilité au sens des art. 3 à 5 de cette loi. Aux termes de
l'art. 64 al. 2 EIMP, les mesures de contrainte sont aussi admises en cas
d'impunité de l'acte en Suisse, si elles tendent à disculper la personne
poursuivie. Cette dernière disposition, qui n'existait pas dans le projet
du Conseil fédéral (art. 60; FF 1976 II p. 494), a été introduite par la
Commission du Conseil des Etats. Il résulte des délibérations de cette
Chambre que l'entraide visant à décharger la personne poursuivie ne devrait
être accordée, lorsque les faits poursuivis ne sont pas punissables en
Suisse ou lorsqu'il existe des motifs d'irrecevabilité de la demande,
qu'à deux conditions: l'intéressé doit avoir confirmé par son accord que
la mesure requise est bel et bien ordonnée dans son propre intérêt et non
pas dans un intérêt quelconque de l'Etat requérant; cette mesure ne doit
pas être susceptible de léser les intérêts dignes de protection de tiers,
impliqués ou non (Bulletin officiel de l'Assemblée fédérale (BO) CE 1977
p. 617, 1re colonne in fine, et p. 632, 1re colonne). Cette question n'a
pas fait l'objet de discussions particulières au sein du Conseil national
(BO/CN 1979 vol. 1 p. 852). Saisie d'une demande d'entraide qui vise à
décharger la personne poursuivie, l'autorité administrative fédérale est
elle-même prudente. Elle exige chaque fois que la personne poursuivie donne
son accord à l'application des mesures exigées par la voie de l'entraide
judiciaire, que cet accord soit consigné dans un procès-verbal et qu'une
copie de ce procès-verbal lui soit envoyée. Cette prudence s'explique par
l'idée que l'administration d'une preuve requise, à sa propre décharge,
par la personne poursuivie dans la procédure étrangère peut, dans certaines
circonstances, lui être très défavorable et aboutir à un résultat contraire
à celui recherché (cf. JAAC 46/IV, No 68, p. 405, lettre b).

    Cette application limitée des art. 63 al. 5 et 64 al. 2 EIMP est
justifiée. Il n'est en effet guère aisé pour les autorités de l'Etat
requis de déterminer si les renseignements sollicités par un Etat étranger
pour décharger la personne poursuivie seront utilisés exclusivement dans
ce but, ou s'ils ne le seront pas aussi à des fins contraires à celles
que tend à réaliser la coopération internationale de la Suisse en matière
pénale. On comprend dès lors mal le raisonnement tenu en l'espèce par les
autorités cantonales, repris par l'Office fédéral de la police. Alors même
que la commission rogatoire du 18 mai 1984 ne vise manifestement pas à
décharger la personne poursuivie, elles ont constaté que le résultat de
l'enquête menée par le Juge d'instruction genevois déchargeait celle-ci;
elles en ont tiré la conclusion que la Suisse pouvait renoncer à la
condition de double incrimination, sur la base soit de l'art. 63 al. 5 soit
de l'art. 64 al. 2 EIMP. Ce faisant, elles se sont livrées, en quelque
sorte, à une appréciation anticipée des preuves recueillies à Genève,
ce qui n'est pas du ressort de l'autorité chargée de se prononcer sur
une demande d'entraide, de la même manière qu'il ne lui incombe pas, en
principe, de se prononcer sur l'opportunité des mesures d'instruction pour
l'administration desquelles l'entraide est requise (cf. ATF 111 Ib 131).

    Quoi qu'il en soit, il n'y a pas lieu de s'attarder plus avant sur
l'application éventuelle de ces deux dispositions particulières. La
condition de la double incrimination des faits tels qu'ils sont exposés
dans la demande d'entraide est en effet de toute évidence réalisée.

    b) Il n'existe pas en droit pénal suisse de disposition topique
sanctionnant comme telles les opérations d'initiés. Pour que celles-ci
soient punissables, il faut qu'elles tombent sous le coup de l'art. 162
CP qui réprime la violation du secret commercial. Tel est le cas si la
personne au bénéfice d'une information privilégiée, qu'elle devait garder
secrète, l'a transmise à un tiers qui a tiré parti de cette révélation pour
procéder à des opérations boursières. Tel n'est pas le cas, en revanche,
si l'initié met à profit pour son propre compte les renseignements qu'il
a obtenus dans l'exercice de ses activités confidentielles (ATF 109 Ib
57 consid. 5c; arrêt non publié X. du 16 mai 1984).

    L'opération d'initiés ainsi punissable en droit suisse l'est également
en droit français sur la base de l'art. 10-I al. 1 de l'ordonnance déjà
citée du 28 septembre 1967. Cette disposition punit de l'emprisonnement et
de l'amende notamment les personnes disposant, à l'occasion de l'exercice
de leur profession ou de leurs fonctions, d'informations privilégiées
sur les perspectives ou la situation d'un émetteur de titres ou sur les
perspectives d'évolution d'une valeur mobilière, et qui auront réalisé
ou sciemment permis de réaliser sur le marché boursier une ou plusieurs
opérations sur le fondement de ces informations, avant que le public en
ait connaissance.

    C'est bien ce que soupçonne l'autorité requérante. La personne
mentionnée dans sa demande aurait en effet transmis à la recourante des
informations obtenues confidentiellement dans l'exercice de ses fonctions
auprès d'un établissement bancaire, pour permettre à celle-ci d'intervenir
dans des conditions optimales sur le marché boursier, soit pour son propre
compte, soit pour le compte d'un de ses clients. Les explications de la
recourante se résument en réalité à une contestation de ces faits. Elles
ne suffisent pas à démontrer que l'exposé détaillé qu'en donne la demande
est manifestement erroné, contradictoire ou lacunaire (ATF 107 Ib 267
consid. 3a, 105 Ib 425/6 consid. 4b). C'est donc au juge du fond qu'elles
devront êtres soumises, le juge de l'entraide ne pouvant se fonder sur
elles pour refuser de donner suite à la demande qui lui est soumise.