Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 112 V 248



112 V 248

43. Arrêt du 5 septembre 1986 dans la cause Office fédéral de l'industrie,
des arts et métiers et du travail contre Office cantonal neuchâtelois
du travail et Tribunal administratif du canton de Neuchâtel concernant
Ackermann Regeste

    Art. 65 ff. AVIG, Art. 90 Abs. 1 AVIV: Einarbeitungszuschüsse.

    - Hat der Bundesrat den Bereich des Art. 65 AVIG übermässig
eingeschränkt, indem er die Fälle der Versicherten, deren Vermittlung
im Sinne dieser gesetzlichen Bestimmung schwierig ist, erschöpfend
aufzählt? Frage in casu offengelassen.

    - Begriff der "schlechten beruflichen Voraussetzungen" im Sinne des
Art. 90 Abs. 1 lit. c AVIV. Solche Voraussetzungen können auch jungen
Arbeitnehmern zuerkannt werden, insbesondere jenen unter ihnen, die einen
Beruf erlernt oder ausgeübt haben, der den Bedürfnissen des Arbeitsmarktes
nicht oder nicht mehr entspricht.

Sachverhalt

    A.- Patricia Ackermann, née en 1960, domiciliée au Locle, a obtenu en
1981 un certificat fédéral de capacité de dessinatrice d'intérieur. Elle
n'a jamais pu exercer cette profession, faute d'avoir trouvé un emploi. De
1981 à 1984, elle a travaillé comme dessinatrice en bâtiments. A la
recherche d'un emploi depuis le mois de mai 1985, elle a présenté,
le 5 juin suivant, une demande d'allocations d'initiation au travail
en précisant que cette mesure comprendrait le dessin, la vente et le
secrétariat pour l'agence- ment de cuisines. Selon l'employeur concerné,
l'entreprise M. à La Chaux-de-Fonds, l'initiation au travail devait
débuter le 1er septembre 1985 et durer six mois; le salaire effectif
convenu serait de 1'200 fr. pour les deux premiers mois, 1'800 fr. pour
chacun des deux mois suivants et 2'400 fr. pour les deux derniers, soit,
conformément à l'art. 66 LACI, respectivement 40%, 60% et 80% du salaire
normal prévu dès le 1er mars 1986 (3'000 fr. par mois).

    Sur la base de ces renseignements, l'Office cantonal neuchâtelois
du travail a rendu une décision, le 9 septembre 1985, par laquelle il a
accordé à l'assurée les allocations prétendues, considérant, notamment,
que cette dernière se trouvait "dans des conditions professionnelles
défavorables par sa formation dans une branche très touchée par la
récession.

    B.- Saisis de recours successifs de l'Office fédéral de l'industrie,
des arts et métiers et du travail (OFIAMT), le Département cantonal
neuchâtelois de l'économie publique (décision du 22 novembre 1985), puis
le Tribunal administratif du canton de Neuchâtel (jugement du 5 février
1986), les ont rejetés.

    C.- L'OFIAMT interjette recours de droit administratif
contre le prononcé cantonal de dernière instance, dont il demande
l'annulation. L'Office cantonal neuchâtelois du travail conclut au rejet
du recours. Quant à Patricia Ackermann, elle n'a pas fait usage de la
faculté qui lui était offerte de se déterminer à son sujet.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit

Erwägung 1

    1.- (Pouvoir d'examen: art. 132 OJ.)

Erwägung 2

    2.- Aux termes de l'art. 65 LACI, des allocations peuvent être versées
aux assurés dont le placement est difficile, qui sont mis au courant dans
une entreprise et reçoivent, de ce fait, un salaire réduit lorsque:
   a. Ils remplissent la condition fixée à l'art. 60 al. 1 let. b LACI;

    b. Le salaire réduit durant la mise au courant correspond au moins
au travail fourni et

    c. Qu'au terme de cette période, l'assuré peut escompter un engagement
aux conditions usuelles dans la branche et la région, compte tenu, le
cas échéant, d'une capacité de travail durablement restreinte.

    Selon l'art. 66 LACI, les allocations d'initiation au travail
couvrent la différence entre le salaire effectif et le salaire normal
que l'assuré peut prétendre au terme de sa mise au courant compte tenu de
sa capacité de travail, mais tout au plus 60 pour cent du salaire normal
(al. 1). Elles sont versées pour six mois au maximum et réduites tous les
deux mois d'un tiers du montant initial (al. 2). L'art. 67 LACI prévoit
d'autre part que la demande d'allocations doit être présentée à l'autorité
cantonale (al. 1) et que la caisse choisie par l'assuré ne peut verser
les prestations qu'avec l'assentiment de cette autorité (al. 2).

    Le Conseil fédéral a précisé ce qu'il fallait entendre par "assurés
dont le placement est difficile", à l'art. 90 al. 1 OACI, dont la teneur
est la suivante:

    "Un assuré est réputé difficile à placer lorsque, compte tenu de la
   situation du marché du travail, il a de grandes difficultés à trouver
   un emploi en raison de:

    a. Son âge avancé;

    b. Son handicap physique ou mental ou

    c. Ses mauvais antécédents professionnels."

Erwägung 3

    3.- a) La seule question litigieuse est de savoir si l'on est en
l'espèce en présence d'une assurée dont le placement est difficile au
sens des art. 65 LACI et 90 al. 1 OACI. En effet, le recourant ne conteste
pas, et cela avec raison, que l'intéressée remplit les autres conditions
d'octroi d'allocations d'initiation au travail, définies sous let. a à
c de l'art. 65 LACI. En outre, il est constant que ni l'âge avancé ni un
quelconque handicap physique ou mental ne peuvent être invoqués dans le
cas particulier. Aussi l'OFIAMT soutient-il, à l'appui de son recours
de droit administratif, que l'assurée ne peut se prévaloir de "mauvais
antécédents professionnels" au sens de l'art. 90 al. 1 let. c OACI,
contrairement à l'opinion de l'Office cantonal neuchâtelois du travail
et des autorités cantonales de recours.

    Selon le recourant, cette notion vise une catégorie bien particulière
d'assurés. Il s'agit, notamment, des personnes qui ont appris et (ou)
exercé une profession qui, pour une raison ou une autre (par exemple
l'introduction de nouvelles technologies, de nouveaux procédés de
production ou de gestion) a pratiquement disparu, est en voie de
disparition, a perdu de son importance ou a subi (ou est en train de
subir) des transformations. Tel est le cas, par exemple, des personnes
au chômage qui, pendant de nombreuses années, ont été affectées à des
tâches spécialisées au sein de la même entreprise et qui, de ce fait,
rencontrent de graves difficultés à trouver un emploi. En revanche, de
"mauvais antécédents professionnels" ne sauraient, par principe, être
reconnus à des assurés qui sont au bénéfice d'une formation professionnelle
achevée et qui éprouvent des difficultés à s'insérer dans le monde du
travail en raison de leur manque d'expérience pratique ou de difficultés
conjoncturelles ou structurelles que connaît leur région de domicile. A
défaut, les allocations en cause se transformeraient en un instrument
de promotion industrielle et commerciale, ce que le législateur n'a
précisément pas voulu; une telle opération doit bien plutôt être réalisée,
non par l'assurance-chômage, mais par le biais de la loi sur l'aide en
matière d'investissements dans les régions de montagne ou de l'arrêté
fédéral instituant une aide financière en faveur des régions dont
l'économie est menacée.

    b) Les art. 65 à 67 LACI font partie du chapitre 6 de la loi dont
l'art. 59 al. 1 pose le principe selon lequel l'assurance encourage
par des prestations en espèces la reconversion, le perfectionnement et
l'intégration professionnels des assurés dont le placement est impossible
ou très difficile pour des raisons inhérentes au marché de l'emploi. A
propos de l'art. 63 (qui est devenu l'art. 65 LACI dans la version
définitive adoptée par les Chambres fédérales), le Conseil fédéral a
exposé ce qui suit dans son message concernant une nouvelle loi fédérale
sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité
(FF 1980 III 622):

    "En octroyant des allocations d'initiation au travail à des assurés
   dont le placement est difficile, et qui sont mis au courant dans
   une entreprise en vue d'un engagement définitif et reçoivent, par
   conséquent, un salaire réduit, on vise à améliorer les chances de ces
   personnes sur le marché de l'emploi. On escompte que ces allocations
   d'initiation au travail constitueront un moyen efficace pour atténuer
   l'un des problèmes les plus difficiles du placement, qui entraîne
   également des frais considérables pour l'assurance-chômage. Toutefois,
   de telles prestations doivent être liées à des conditions sévères et
   rester limitées, afin d'éviter une sous-enchère sur les salaires ainsi
   qu'un subventionnement d'employeurs.

    On a également renoncé à définir dans la loi la notion de difficile
   à placer. Il s'agit, en effet, d'une notion composite comprenant
   des critères subjectifs et objectifs. Ce qui importe, d'une part,
   c'est la situation personnelle de l'assuré, c'est-à-dire l'ampleur
   des difficultés qu'il connaît.

    Mais, d'autre part, il y a lieu de définir aussi la difficulté au
   placement d'après la situation du marché de l'emploi. Afin de conserver
   dans ce domaine toute la souplesse requise, seule l'ordonnance pourra
   apporter des précisions."

    Ainsi donc, il y a lieu de considérer que les allocations d'initiation
au travail peuvent être accordées si le placement de l'assuré est fortement
entravé et pour autant qu'il existe une indication en rapport avec le
marché du travail: cette double condition doit permettre d'éviter que des
prestations soient fournies à des fins qui n'auraient aucun rapport avec
l'assurance-chômage, dont le but n'est pas d'assumer, de manière générale,
les frais occasionnés par la mise au courant de salariés et qui incombent
normalement à tout employeur.

    c) La loi ne contient pas de norme de délégation spéciale du
législateur qui autoriserait expressément le Conseil fédéral à fixer
les conditions dont dépend le droit aux allocations d'initiation au
travail. Aussi l'art. 90 al. 1 OACI se fonde-t-il sur la délégation
générale de compétence figurant à l'art. 109 LACI et qui charge l'autorité
exécutive d'édicter les dispositions nécessaires à l'exécution de la
loi. De telles dispositions ne sauraient donc poser de nouvelles règles
qui restreindraient les droits des assurés ou leur imposeraient des
obligations, même si ces règles sont conformes au but de la loi (ATF 98
Ia 287 et les références citées; GRISEL, Traité de droit administratif,
p. 83; AUBERT, Traité de droit constitutionnel suisse, supplément 1967-1982
No 1520; cf. également ATF 109 V 247). On peut dès lors se demander si,
en énumérant exhaustivement les cas d'assurés difficiles à placer, le
Conseil fédéral n'a pas restreint à l'excès la portée de l'art. 65 LACI.

    Cette question peut toutefois demeurer indécise en l'espèce,
car l'interprétation que donne l'office recourant de la disposition
réglementaire en cause apparaît de toute façon, quant à elle, trop
restrictive. En effet, s'il est vrai que, par définition, les termes
"mauvais antécédents professionnels" ne sauraient guère s'appliquer à
de jeunes travailleurs à la recherche d'un premier emploi et qui sont
souvent victimes de leur inexpérience, rien ne permet de soutenir que
cette notion exclut d'emblée d'autres catégories de jeunes salariés, en
particulier ceux qui ont appris - ou exercé - une profession qui ne répond
pas - ou plus - aux nécessités du marché de l'emploi. Cette interprétation
est d'ailleurs confirmée par le texte allemand de l'art. 90 al. 1 let. c
OACI qui utilise l'expression "schlechte berufliche Voraussetzungen",
termes qui sont à l'évidence plus larges que ceux de la version française
de l'ordonnance. En tout cas, l'examen des travaux préparatoires, en
particulier du message précité, ne démontre pas que le législateur ait
envisagé une telle exclusion, quand bien même il a voulu lier l'octroi
des allocations litigieuses à des conditions sévères.

    D'autre part, contrairement à l'opinion du recourant, on ne saurait
faire abstraction, le cas échéant, des difficultés conjoncturelles et
structurelles propres à une région déterminée. Admettre une solution
différente conduirait, le plus souvent, à renoncer à la mise en oeuvre
de mesures préventives au profit de l'exigence d'un changement de
domicile. Or, la mobilité géographique est un objectif qui peut aller
à l'encontre des aspirations légitimes d'un assuré, pour des raisons
familiales par exemple (ATF 111 V 400). En outre, elle peut entrer en
conflit avec les objectifs de la politique régionale, en accélérant
le dépeuplement de certaines régions du pays et en renforçant la
concentration démographique et économique déjà excessive dans d'autres
régions, objectifs dont le législateur a tenu compte lors de l'élaboration
de la loi (FF 1980 III 536).

    d) En l'occurrence, il y a lieu d'admettre que l'assurée peut prétendre
le versement d'allocations d'initiation au travail. Selon les indications
fournies par l'Office cantonal neuchâtelois du travail, les débouchés dans
la profession - apprise par l'intéressée - de dessinatrice d'intérieur
sont "rares voire inexistants"; en outre, l'assurée a de faibles chances
de retrouver un emploi en qualité de dessinatrice en bâtiments, compte
tenu de la crise que connaît l'industrie du bâtiment dans la région
du Jura neuchâtelois. On doit dès lors considérer, sur la base de ces
renseignements, que le placement de l'assurée dans l'une ou l'autre des
professions susmentionnées était, en mai 1985, difficile, voire impossible
à plus ou moins brève échéance, cela pour des raisons inhérentes au
marché de l'emploi. De plus, on peut affirmer que ces difficultés avaient
aussi pour origine de "mauvais antécédents professionnels" au sens de
l'art. 90 al. 1 let. c OACI: d'une part, l'assurée a appris un métier
pour lequel il n'existe pratiquement pas d'offres d'emploi; d'autre part,
après l'obtention d'un certificat fédéral de capacité, elle a travaillé
dans une profession qui ne correspondait pas exactement à sa formation,
de sorte qu'elle se trouve d'emblée disqualifiée, en tant que dessinatrice
en bâtiments, sur un marché du travail qui est déjà fortement resserré.

    Enfin, l'autorité cantonale inférieure de recours a procédé à
diverses mesures d'instruction d'où il ressort qu'il n'y a eu en l'espèce
ni sous-enchère sur le salaire, ni subventionnement de l'employeur. Le
risque d'abus, qui préoccupe à juste titre l'office recourant, peut donc
être considéré comme écarté en l'espèce.

    e) En conclusion, l'Office cantonal neuchâtelois du travail n'a pas
excédé son pouvoir d'appréciation en statuant comme il l'a fait; considérée
sous l'angle de l'opportunité, la décision administrative en cause était
justifiée et le recours de droit administratif se révèle ainsi mal fondé.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

    Le recours est rejeté.