Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 112 IV 66



112 IV 66

19. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 29 mars 1986
dans la cause Nadia X. c. Ministère public du canton de Vaud (pourvoi en
nullité) Regeste

    Art. 22 Abs. 2 StGB; tätige Reue (versuchte vorsätzliche Tötung).

    Tätige Reue muss bejaht werden, wenn der Täter spontan eigene
Massnahmen ergriffen hat, um den Eintritt des Todes zu verhindern, selbst
wenn das Vorgehen des Täters wegen der Geringfügigkeit der zugefügten
Verletzungen schliesslich zur Abwendung des Erfolges nichts beigetragen
hat.

Sachverhalt

    A.- A la suite d'une dispute, Nadia X a décidé de tuer son époux et
de mettre fin à ses jours. Elle a absorbé une cinquantaine de comprimés
de Seresta et une vingtaine de Tolvon. Sous l'effet de ces médicaments et
de l'alcool, elle a saisi un couteau à viande dont la longueur de la lame
dépassait 25 cm, s'est approchée de son conjoint endormi et lui a porté
un coup de couteau à la gorge. Blessé, le mari s'est réveillé, s'est levé
et a mis un linge sur la plaie. Son épouse l'a aidé à s'allonger sur le
lit, a appelé une ambulance équipée en vue d'une transfusion éventuelle
et a cherché le livret de service de la victime, car son groupe sanguin
y figurait.

    A l'hôpital, il a été constaté que les lésions subies n'étaient pas
graves, que la vie du blessé n'avait pas été mise en danger, mais qu'il
aurait pu en résulter une hémorragie mortelle si les vaisseaux importants
du cou avaient été atteints. La victime a été incapable de reprendre son
travail durant deux mois.

    En raison de son état semi-comateux, l'épouse a été hospitalisée; la
prise de sang, effectuée trois heures environ après les faits, a révélé une
alcoolémie de 1,26 à 1,4 g %o. Une expertise psychiatrique a conclu à une
immaturité assimilable à un développement mental incomplet, à un trouble
de la conscience dû à l'alcool et aux médicaments à l'instant où elle a
agi et à une diminution moyenne de la faculté d'apprécier le caractère
illicite de l'acte et de celle de se déterminer d'après cette appréciation.

    La première instance a condamné Nadia X. à une peine de cinq ans de
réclusion, sous déduction de la détention préventive, pour crime manqué
de meurtre.

    La Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté
le recours de la condamnée. Celle-ci se pourvoit en nullité au Tribunal
fédéral.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) L'art. 22 al. 2 CP prévoit la faculté d'atténuer librement
la peine (art. 66 CP) à l'égard de celui qui, de son propre mouvement,
aura empêché ou contribué à empêcher que le résultat ne se produise.

    La question de savoir si l'on doit interpréter les termes "empêcher que
le résultat ne se produise" en se plaçant dans le for intérieur de l'auteur
(interprétation subjective), ou de façon objective, trouve une réponse
nuancée dans la doctrine. Certains auteurs préconisent un point de vue
exclusivement objectif (LOGOZ/SANDOZ, p. 118 n. 3; HAFTER, Allg. Teil,
2e éd., Berne 1946, p. 211 n. 2). Pour O.A. GERMANN, au contraire,
la disposition sur le repentir sincère a pour but d'inciter l'auteur à
empêcher que le résultat de l'acte délicieux ne se produise; il s'ensuit,
à ses yeux, que l'art. 22 al. 2 CP s'applique dans l'hypothèse où l'auteur
agit dans ce sens, ignorant par exemple que l'atteinte au bien protégé ne
pouvait pas se produire en raison de faits qui lui échappent (O.A. GERMANN,
Das Verbrechen im neuen Strafrecht, Zurich 1942, p. 66 et 194 n. 3.2).
WAIBLINGER (FJS 1200 p. 8 ch. 13, p. 10 ch. 14 et 15) expose que si l'on
admet que l'art. 22 al. 2 CP s'applique au délinquant - ce dont on peut
douter - même lorsque le résultat a été empêché en réalité exclusivement
par des circonstances extérieures ou l'intervention de tiers, on devrait
aussi faire bénéficier de cette disposition celui qui, sans savoir que
le délit est manqué, met tout en oeuvre pour empêcher que le résultat ne
se produise. G. STRATENWERTH (Schweiz. Strafrecht, Allg. Teil I, Berne
1982, p. 302 et 303 n. 77) relève que l'art. 22 al. 2 CP ne trouverait pas
d'application lorsque les moyens déployés par l'auteur n'ont effectivement
pas contribué à empêcher le résultat de se produire; selon cet auteur, il
ne faut cependant pas donner trop d'importance aux aspects pragmatiques du
repentir actif; en conclusion, il estime que les conditions de l'art. 22
al. 2 CP sont réunies lorsque l'auteur prend des mesures qui, selon son
propre point de vue, représentent un repentir actif. D'après H. SCHULTZ
(Einführung in den allgemeinen Teil des Strafrechts, vol. 1, 4e éd., Berne
1982, p. 275/6), dans la perspective d'un droit pénal fondé sur la faute,
il serait logique de mettre au bénéfice du repentir actif l'auteur qui
a manifesté l'abandon de sa volonté criminelle sans égard au fait que le
résultat a été réellement empêché par lui. NOLL (NOLL/TRECHSEL, Schweiz.
Strafrecht, Allg. Teil I, 2e éd., Zurich 1986, p. 163 lettre b) est
favorable à une interprétation entièrement subjective.

    Dans le système du CP, le degré de réalisation de l'infraction
se définit aussi en fonction de l'élément subjectif. Il convient dès
lors d'adopter la même interprétation pour le repentir actif, traité
sous le même chiffre comprenant les art. 21 à 23 CP. Cela se justifie
également par le fait que le repentir sincère, prévu à l'art. 64 CP,
permet l'atténuation de la peine (dans les limites de l'art. 65 CP)
même lorsque l'infraction est consommée, le résultat dommageable s'étant
réalisé, si bien que ni l'intervention de l'auteur ni celle d'un tiers
ne peuvent le modifier; or cette même atténuation est prévue pour celui
qui commet un délit manqué, c'est-à-dire pour l'auteur qui a poursuivi
son activité répréhensible jusqu'au bout sans faire preuve ni de repentir
actif ni de repentir sincère, mais qui n'a pas atteint le résultat; il est
dès lors logique de permettre un traitement plus favorable pour l'auteur
qui non seulement n'atteint pas le résultat primitivement voulu, mais
encore marque l'abandon spontané de sa volonté criminelle en s'efforçant
de contribuer à empêcher ce résultat; ainsi, dans un tel cas, la peine peut
être atténuée librement (art. 66 par opposition à l'art. 65 CP) sans égard
à l'efficacité - considérée objectivement - des mesures prises par l'auteur
repentant pour empêcher le résultat; en d'autres termes, malgré le texte
de l'art. 22 al. 2 CP qui semble exiger que les efforts en vue d'éviter
le résultat aient été objectivement efficaces, il convient d'admettre
le repentir actif même si l'absence de résultat est le fruit de faits
extérieurs à l'action du délinquant désavouant sa volonté criminelle. Par
ailleurs, la systématique de l'art. 22 CP correspond à celle de l'art. 21
CP. Enfin, une analogie est concevable entre le délit impossible, où
l'absence de résultat n'est pas due à la volonté de l'auteur, et le cas
du repentir actif sans effet, où le résultat n'est pas réalisé pour des
motifs extérieurs à cette volonté; dans le premier cas, en se fondant sur
la théorie subjective, le législateur a permis la punition du délinquant
dont la volonté criminelle s'est révélée absolument inefficace (art. 23
CP prévoyant l'atténuation libre en application de l'art. 66 CP); de
même faut-il prendre en considération la volonté de celui qui tend à
empêcher le résultat aussi lorsque ce dernier est finalement évité pour
d'autres raisons.

    b) En l'espèce, l'autorité cantonale n'a pas appliqué l'art. 22 al. 2
CP, considérant à tort que si les actes secourables de la recourante
étaient certes louables, ils étaient cependant impropres à éviter
le résultat, car les lésions subies n'étaient pas graves sur le plan
médical. Ce raisonnement va à l'encontre de l'interprétation subjective
décrite au considérant qui précède; en effet, il a été constaté en fait
qu'après avoir blessé son mari, l'épouse l'a aidé à s'allonger sur un
lit, s'est rendue chez une voisine pour appeler une ambulance pourvue du
matériel de transfusion et a cherché le livret de service de la victime
pour connaître son groupe sanguin. Il s'ensuit qu'agissant de son propre
mouvement, elle a pris les mesures tendant à ses yeux à empêcher la
mort de la victime. Ce résultat a été effectivement évité, si bien que
les éléments du repentir actif sont réunis nonobstant le caractère peu
dangereux de l'atteinte causée, ce que l'auteur ignorait.

    Ainsi, l'arrêt attaqué viole le droit fédéral dans la mesure où la
cour cantonale a considéré que l'art. 22 al. 2 CP ne s'appliquait pas. La
recourante a dès lors été privée d'une possibilité supplémentaire (à côté
de l'art. 11 CP) de bénéficier de l'atténuation libre prévue à l'art. 66
CP. Il s'impose en conséquence de renvoyer la cause à l'autorité cantonale
pour qu'elle fixe à nouveau la peine en tenant compte du repentir actif.