Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 112 II 450



112 II 450

73. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 18 novembre 1986 dans la
cause Banque X. contre B. (recours en réforme) Regeste

    Verantwortlichkeit einer Bank, die ihr von einem Bankkunden anvertraute
Gelder einem nicht ermächtigten Dritten auszahlt. Überwälzung des Risikos
auf den Kunden. Geschäftsführung ohne Auftrag.

    1. Rechtsnatur der Ansprüche des Kunden gegenüber der Bank und der
Klausel, mit der die Bank das Risiko der nicht befreienden Erfüllung auf
ihre Kunden überwälzt (E. 3).

    2. Der Betrieb einer Bank ist der Ausübung eines obrigkeitlich
konzessionierten Gewerbes im Sinne von Art. 100 Abs. 2 OR gleichzusetzen
(E. 3).

    3. Gründe für einen Ausschluss oder eine Herabsetzung der Ansprüche
des Bankkunden (E. 4).

    4. Geschäftsführung des Bankkunden im Interesse zweier Banken:
Abweichung von der Regel, nach der für die Bestimmung des anwendbaren
Rechts anzuknüpfen ist (E. 1a); Vorgehen bei der Anrechnung der vom
Bankkunden zurückerhaltenen Beträge auf dessen Forderung gegenüber den
beiden Banken (E. 5a und b).

Sachverhalt

    A.- Par acte du 30 novembre 1967, B., ressortissant vietnamien,
domicilié à Saigon, avait conféré à son fils H., établi à Lille (France),
une procuration générale pour lui permettre d'opérer la vente de biens
immobiliers qu'il possédait dans le département de la Drôme.

    Le 14 octobre 1968, la Banque X., à Genève, ouvrit à B. un compte
courant en francs suisses. B., qui était déjà titulaire de comptes de
dépôt à terme renouvelable dans cet établissement bancaire, désigna son
épouse comme son représentant à l'égard de la Banque X., avec signature
individuelle.

    Du 15 octobre 1968 au 19 février 1975, la Banque X. resta en relations
épistolaires avec son client.

    B., demeuré au Viêt-nam, vécut, dès 1975, avec son épouse, les
événements politiques qui précédèrent directement et suivirent la chute
de Saigon.

    En automne 1975, ses deux fils, H. et K., se rendirent à Genève pour
solliciter la Banque X., ainsi qu'une autre banque, de leur délivrer les
fonds qu'elle(s) détenait(aient) au nom de B., afin, prétendaient-ils, que
celui-ci n'ait pas à craindre les investigations du nouveau gouvernement
vietnamien et, partant, une obligation de rapatrier ses fonds. Dans un
premier temps, la Banque X. leur opposa un refus et les invita à produire,
outre la procuration précitée du 30 novembre 1967, une nouvelle lettre
d'instructions signée par leur père. Par la suite, cependant, elle fit
droit à leur requête, en raison, notamment, des liens privilégiés qu'elle
entretenait avec leur mandataire et après qu'ils lui eurent transmis une
carte de voeux que B. avait adressée à H. en mars 1977. K., agissant
tant pour lui-même que pour son frère H., fit alors transférer le solde
des comptes aux Etats-Unis.

    En novembre 1978, B., revenu en Europe, apprit que ses comptes avaient
été soldés le 19 juillet 1977. Il protesta en affirmant qu'il n'avait
jamais conféré à quiconque le pouvoir de le remplacer auprès des banques
suisses et françaises.

    B.- B. a assigné la Banque X. en paiement d'un montant total de
425'588 fr. 55 plus intérêts.

    La défenderesse a conclu au rejet de la demande en invoquant, entre
autres, le fait que K. avait remboursé à son père 153'000 US $.

    Par arrêt du 25 avril 1986, la Cour de justice du canton de Genève,
après avoir mis à néant le jugement de première instance, a admis la
demande.

    C.- Contre cet arrêt, la défenderesse interjette un recours en réforme
en concluant, principalement, au rejet de la demande, et, subsidiairement,
à ce qu'il soit dit qu'elle sera subrogée aux droits du demandeur envers K.

    Le demandeur propose le rejet du recours, dans la mesure où il est
recevable.

    Admettant partiellement le recours, le Tribunal fédéral déduit du
montant alloué par la cour cantonale au demandeur une partie de la somme
que ce dernier s'est vu remettre par son fils K.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- a) Si le droit suisse est, sans conteste, applicable au contrat de
prêt ou de dépôt conclu par B. avec la Banque, il n'en va pas forcément
de même en ce qui concerne les démarches entreprises par le demandeur
en vue de recouvrer chez son fils K. des biens qui devaient être remis
aux banques suisses dans l'hypothèse où celles-ci seraient condamnées
à lui restituer les fonds qu'il leur avait confiés. Selon la lex fori,
une telle activité relève non pas du prêt ou du dépôt, mais de la
gestion d'affaires (art. 419 ss CO). Or, dans le pseudo-contrat qu'est
la gestion d'affaires, tout comme dans le mandat en la forme duquel
ladite gestion peut se transformer en cas de ratification, la prestation
caractéristique est celle du gérant, comme celle du mandataire; la gestion
d'affaires est donc soumise en principe au droit du domicile du gérant
(ATF 31 II 665; SCHOENENBERGER/JAEGGI, introduction aux art. 1er ss
CO, No 302; VISCHER/VON PLANTA, Internationales Privatrecht, 2e éd.,
p. 181). Toutefois, il convient, exceptionnellement, de déroger à la
règle de rattachement habituelle lorsque les circonstances particulières
d'un contrat (ou quasi-contrat) rattachent davantage celui-ci à un autre
ordre juridique, ce qui peut être le cas lorsqu'il est étroitement lié à
un autre contrat (ATF 94 II 360/361 consid. 3 et les références). Il en
va ainsi en l'occurrence. En effet, le centre des relations litigieuses
réside dans le contrat conclu avec la Banque, soit un contrat soumis au
droit suisse; c'est en Suisse que le falsus procurator a agi à l'encontre
de la Banque suisse et son éventuelle responsabilité délictuelle serait
aussi soumise au droit suisse, en tant que lex delicti commissi; en outre,
dans la mesure où le demandeur a agi comme gérant (pour l'hypothèse où
il gagnerait ses procès), il l'a fait pour diminuer le dommage subi par
son cocontractant - dans un contrat soumis au droit suisse - et décharger
la responsabilité délictuelle de son ou ses fils à l'égard de la Banque
suisse, responsabilité également soumise au droit suisse; enfin, dès lors
que le demandeur faisait valoir sa créance en restitution contre la Banque
suisse, il pouvait s'attendre à une objection de compensation tendant
à ce qu'il restituât pour sa part ce qu'il avait touché comme gérant,
de sorte que ces deux causes juridiques sont étroitement connexes. Dans
ces conditions particulières, la gestion d'affaires litigieuse présente
avec la Suisse un lien prépondérant et il s'impose, exceptionnellement,
de la soumettre aussi au droit suisse.

    A cet égard, le recours en réforme est ainsi recevable (art. 43 OJ).

Erwägung 2

    2.- (N'ayant pas prêté l'attention qui eût été nécessaire pour qu'elle
puisse se prévaloir de sa bonne foi, la défenderesse doit se laisser
opposer l'absence de pouvoirs du falsus procurator. Aussi ne s'est-elle
pas valablement libérée de son obligation de restituer, en remettant à
un tiers - le fils du demandeur - l'équivalent des biens que son client
lui avait confiés.)

Erwägung 3

    3.- A l'appui de ses conclusions libératoires, la défenderesse invoque
les deux clauses suivantes, qui figurent dans ses conditions générales:

    "4. Vérifications en matière de signature et de légitimation. Le
   dommage résultant de défauts de légitimation ou de faux non décelés
   est à la charge du client, sauf en cas de faute grave de la banque.

    (...)

    6. Erreurs de transmission. Le dommage provenant de l'emploi de la
   poste, du télégraphe, du téléphone, du télex, de tout autre moyen de
   transmission ou d'une entreprise de transport, en particulier par suite
   de retards, pertes, malentendus, mutilations ou doubles expéditions,
   est à la charge du client, sauf en cas de faute grave de la banque."

    a) En l'occurrence, le demandeur réclame à la défenderesse la
restitution de la somme déposée (art. 475 et 481 CO) ou prêtée (art. 312,
315 et 318 CO). Il ne conclut donc pas à l'allocation de dommages-intérêts
(art. 97 al. 1 CO), mais bien à l'exécution du contrat; cette action en
exécution n'est pas subordonnée à l'existence d'une faute de la banque,
qui doit payer une seconde fois si, comme ce fut le cas en l'espèce,
elle a offert sa prestation à un tiers non autorisé (cf. ATF 111 II 265
consid. 1a et b et les références citées). Ainsi, en pareille situation, ce
n'est pas le client qui subit un dommage, mais la banque, tenue qu'elle est
de s'exécuter derechef. Du point de vue juridique, les clauses précitées
n'ont dès lors pas pour effet d'exclure ou de limiter la responsabilité
contractuelle de l'établissement bancaire, laquelle n'est pas en cause dans
cette hypothèse (cf., à ce sujet: GAUTSCHI, n. 36a à c ad art. 398 CO;
WEBER, Haftung für Schäden bei Ausführung gefälschter Zahlungsaufträge,
in: RSJ 1985 (81), p. 85 ss, 87; BUCHER, Wer haftet wem? Zum Problem
der Tragung des Risikos betrügerisch veranlasster Bankvergütungen, in:
Recht 1984, p. 97 ss, 99/100; GUGGENHEIM, Die Verträge der schweizerischen
Bankpraxis, 3e éd., p. 248, ad No 78). En réalité, elles entraînent un
transfert sur la tête du client du risque que la banque doit en principe
supporter en cas d'exécution en main d'une personne non autorisée (dans
ce sens, cf. ATF 111 II 265 précité, consid. 1 b); en d'autres termes,
elles mettent préventivement à la charge du client le dommage subi par la
banque ("Schadensabwälzung"; cf. WEBER, op. cit., p. 90) et instituent,
par conséquent, une responsabilité du premier envers la seconde, qui
s'étend même aux cas fortuits ("Zufallshaftung"; cf. BUCHER, op.cit.,
p. 100/101; GUGGENHEIM, ibid.).

    Dans le dernier arrêt cité (ibid.), le Tribunal fédéral a laissé
indécise la question de savoir si - et, dans l'affirmative, jusqu'à quel
point - le risque d'une exécution dépourvue d'effet libératoire peut être
reporté sur le client par le biais d'une clause topique, incluse dans
les conditions générales des banques. Il n'est pas possible de trancher
cette question une fois pour toutes, dans un sens ou dans l'autre,
eu égard à la diversité des situations envisageables. La solution du
problème réside donc dans l'examen de la clause incriminée au regard de
l'ensemble des circonstances du cas concret. De lege lata, l'art. 100
al. 2 CO peut être retenu comme fondement de ce contrôle judiciaire. Il
n'est certes pas directement applicable à la stipulation tendant à libérer
la banque de son obligation contractuelle de restituer la chose déposée
(clause de transfert), car il figure parmi les dispositions relatives aux
conséquences de l'inexécution des obligations (art. 97 ss CO). Toutefois,
la similitude des situations, qui apparaît de manière évidente si l'on
compare l'obligation de restituer dans le dépôt régulier (art. 475 CO) et
irrégulier (art. 481 CO), commande ici l'application analogique de cette
disposition. En effet, on ne voit pas pour quelle raison le dépositaire
pourrait se soustraire librement, au moyen d'une clause de transfert, à son
devoir de restituer des fongibles (cas du dépôt irrégulier), alors qu'il
ne pourrait exclure que dans les limites de l'art. 100 CO sa responsabilité
découlant de l'impossibilité fautive de restituer une chose individualisée
(cas du dépôt régulier). Telle est d'ailleurs la considération implicite
sur laquelle s'est fondée la Cour de céans dans l'arrêt ATF 109 II 116
où elle a laissé indécise la question de l'applicabilité de l'art. 100
al. 2 CO aux banques. Pour les motifs énoncés dans cet arrêt, et en
accord avec la doctrine quasi unanime sur ce point, il sied de répondre
affirmativement à cette question, partant d'assimiler l'exploitation
d'une banque à l'exercice d'une industrie concédée par l'autorité, au
sens de la disposition précitée.

    Ainsi, en vertu de son pouvoir d'appréciation - c'est-à-dire en
appliquant les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC) -, le juge
pourra tenir pour nulle une clause mettant d'emblée à la charge du
client, en cas de faute légère de la banque, le risque de l'exécution
en main d'une personne non autorisée à recevoir la prestation. Dans
l'exercice de son pouvoir d'appréciation, il lui appartiendra d'examiner
la clause litigieuse en tenant compte des autres stipulations du
contrat et de l'ensemble des circonstances du cas particulier (pour
des exemples de circonstances pouvant influer sur la décision du juge,
cf. WEBER, Allgemeine Geschäftsbedingungen der Banken - zum Problem einer
Grenzziehung, in: La Société anonyme suisse, 56 (1984), p. 158). A cet
égard, il y aura lieu de prendre en considération, d'une part, le besoin
de protection des clients contre les clauses préformulées - pratiquement
non susceptibles d'être discutées -, telles qu'elles figurent dans les
conditions générales (cf., à ce sujet: WESSNER, Les contrats d'adhésion:
quelle protection pour la partie réputée la plus faible?, in: RDS 105
(1986), I, p. 161 ss), et, d'autre part, l'intérêt que peut avoir la
banque à se prémunir contre certains risques dont la réalisation peut
difficilement être évitée. Cette pesée des intérêts antagonistes, pour
laquelle il est impossible de poser des règles absolues, doit conduire,
en définitive, à une répartition équitable du risque entre la banque et
ses clients, sur le vu de la situation propre à l'affaire considérée.

    Certains auteurs font remarquer - à juste titre - que l'application
de l'art. 100 al. 2 CO aux banques ne permet pas toujours d'assurer une
protection efficace des clients, puisqu'elle est exclue dans l'hypothèse
où le dommage résulte d'un cas fortuit (p.ex. un virement erroné à la
suite d'un mauvais fonctionnement du système électronique) et que, d'autre
part, la banque peut s'exonérer conventionnellement de la responsabilité
découlant d'une faute légère de ses auxiliaires (art. 101 al. 3 CO;
cf. p.ex. GUGGENHEIM, op.cit., p. 46; BUCHER, op.cit., p. 101/102). Selon
eux, le juge devrait alors veiller à une répartition équitable de ce
genre de risque en examinant le contenu des clauses litigieuses au
regard des normes générales du droit civil (art. 2 et 27 CC, 19 à 21,
23 ss CO). Dans le cas particulier, il n'est cependant pas nécessaire de
traiter plus avant cette question, étant donné l'existence d'une faute
des organes de la Banque.

    b) Force est de constater, en l'occurrence, que la faute commise par
la défenderesse est de celles qui pourraient et devraient être évitées
par toute banque prudente placée dans les mêmes circonstances. En effet,
la Banque disposait du temps nécessaire à la réflexion avant de prendre
sa décision. Or, sans raison valable, elle a fait taire ses doutes et a
permis que le plus clair de la fortune de son client soit remis aux fils
de ce dernier et, conséquemment, exposé au danger de disparition, alors
que le risque que courait le demandeur, aux dires de ses fils, pouvait
facilement être écarté autrement et sans péril pour l'intéressé. Dans ces
conditions, il serait inéquitable de faire supporter au client, par le
biais de la première des clauses précitées (la seconde vise une situation
de fait étrangère au cas particulier), le dommage subi par la Banque du
fait de l'exécution irrégulière de son obligation de restituer la somme
déposée ou prêtée. Ladite clause doit dès lors être tenue pour nulle, en
vertu de l'art. 100 al. 2 CO appliqué par analogie. Quoi qu'il en soit,
la défenderesse ne pourrait de toute manière pas en invoquer le bénéfice,
eu égard à la gravité de la faute qu'elle a commise en négligeant de
prendre les précautions élémentaires que son client pouvait attendre
d'elle pour la sauvegarde de l'argent qu'il lui avait confié.

Erwägung 4

    4.- La défenderesse reproche à la cour cantonale de n'avoir pas retenu
une faute concomitante à la charge du demandeur.

    On observe, à titre préliminaire, que l'action ouverte par le
client tend à l'exécution du contrat, soit à la restitution de la somme
déposée ou prêtée. L'obligation de restitution n'étant pas une dette en
dommages-intérêts, les règles sur la réduction de la réparation (art. 99
al. 3 et 44 al. 1 CO) ne sont dès lors pas directement applicables
in casu. Il ne s'ensuit pas pour autant qu'une éventuelle faute du
créancier, fût-elle grave, demeurerait sans incidence sur le sort de
ses prétentions. Celles-ci devraient, au contraire, être réduites (voir
rejetées) de ce chef, comme le Tribunal fédéral l'a fait dans l'arrêt
invoqué par la défenderesse (ATF 111 II 265 ss consid. 1c et 2 et les
références citées; voir aussi: VON TUHR/ESCHER, II, p. 22). Quant
au fondement juridique d'une telle réduction (ou d'un rejet) des
prétentions du créancier - question laissée indécise dans ledit arrêt -,
il peut résider soit dans une faute contractuelle (art. 97 al. 1 CO;
cf. p.ex. l'art. 1132 CO concernant la faute du tireur), soit dans un
acte illicite du client (art. 41 CO; p.ex. collusion entre le titulaire du
compte et le tiers qui émet un ordre falsifié), que la banque peut invoquer
pour faire valoir une prétention en dommages-intérêts à l'encontre de
son cocontractant (cf. GAUTSCHI, n. 36d ad art. 398 CO; WEBER, article
précité, in: RSJ 81 (1985), p. 88 in limine; BUCHER, op.cit., p. 100,
au sujet de l'arrêt ATF 109 II 116).

    Dans le cas particulier, l'hypothèse d'un acte illicite commis par
le client peut être écartée d'emblée. Reste donc à examiner uniquement si
une violation fautive de ses obligations contractuelles peut être imputée
au demandeur. Or, il n'en est rien. Comme le relève pertinemment la cour
cantonale, on ne saurait, en effet, reprocher à l'intéressé de n'avoir pas
exigé la restitution ou la suppression de la procuration du 30 novembre
1967. De fait, il n'avait apparemment aucune raison de penser que son fils
en mésuserait; il la lui avait du reste délivrée en vue d'une opération
spécifique - la vente de biens immobiliers sis en France - et il avait au
surplus désigné ultérieurement son épouse comme son représentant à l'égard
de la Banque, de sorte qu'il ne pouvait imaginer que la défenderesse
remette un jour ses avoirs au titulaire de cette ancienne procuration. De
même, il est exclu de considérer l'envoi de la carte de voeux, en mars
1977, comme une négligence du demandeur, attendu que cette carte était,
au contraire, propre à faire douter que son auteur autorisait son fils
à disposer en sa faveur des fonds déposés auprès de la défenderesse.

    En tout état de cause, même s'il fallait imputer une faute au
demandeur, il y aurait lieu, dans ce cas, de prendre en considération la
disproportion manifeste existant entre cette faute légère et la grave
négligence commise par la défenderesse, ce qui conduirait à refuser à
cette dernière l'allocation de dommages-intérêts, conformément à l'art. 44
al. 1 CO applicable en vertu de l'art. 99 al. 3 CO.

Erwägung 5

    5.- Le demandeur a entrepris des démarches pour obliger son fils
K. à lui remettre les biens que ce dernier avait indûment utilisés et
retenus. En agissant de la sorte, il entendait être couvert pour le cas où
les actions judiciaires dirigées contre les banques ne lui permettraient
pas de récupérer sa fortune; en revanche, s'il devait obtenir gain de
cause, il ferait bénéficier les banques des sommes recouvrées.

    Dès lors, au moins à titre éventuel, le demandeur a, sans mandat, géré
l'affaire des deux banques (art. 419 CO). Tel le mandataire (art. 400 CO),
il est tenu de rendre compte de sa gestion et de remettre au maître ce
qu'il a reçu pour lui (art. 419 et 420 CO; ATF 34 II 700; cf. GAUTSCHI,
n. 9a ad art. 419; OSER/SCHOENENBERGER, n. 26 ad art. 419).

    a) Aussi la cour cantonale a-t-elle considéré à juste titre que le
demandeur devait remettre à la défenderesse et à l'autre établissement
bancaire la somme de 111'000 US $ qu'il avait touchée en raison des
prélèvements sur les montants provenant de ces deux banques.

    En revanche, son opinion ne saurait être suivie lorsqu'elle estime
qu'il n'est pas possible de savoir comment doit se faire la répartition
entre les deux banques, du fait qu'on ignore quelles étaient les intentions
de K. à ce sujet. En effet, un partage de cette somme proportionnellement
aux deux créances s'impose, si l'on applique par analogie l'art. 87 al. 2
CO et si l'on se fonde sur la considération que, tel le mandataire chargé
de plusieurs mandats d'encaissement auprès du même débiteur (arrêt du
Tribunal fédéral du 22 octobre 1985 en la cause G. c. G. et F.), celui qui
gère l'affaire de plusieurs maîtres à l'égard d'un débiteur unique doit
les traiter de manière égale sans avantager l'un par rapport à l'autre,
soit répartir les fonds encaissés et non affectés spécialement à une dette,
en l'absence de privilège, proportionnellement aux différentes créances.

    L'annexe à la commission rogatoire de K., à laquelle se réfère la
cour cantonale, fait état d'un paiement de 111'000 US $ en date du 14
juin 1982. Si l'on tient compte des sommes dues à cette date, en capital
et intérêts, par la défenderesse (514'015 fr. 15) et par la seconde banque
(194'926 fr. 35), selon les chiffres donnés par l'arrêt du Tribunal fédéral
du 1er avril 1985 concernant cette autre banque et par l'arrêt attaqué -
ces derniers chiffres n'étant pas contestés comme tels -, il était dû à
la défenderesse le 71,87 % du total dû à ces deux banques, de sorte que
la part lui revenant se monte à 79'775,7 US $, soit, au cours moyen du
14 juin 1982, à 164'138 fr. 50. Cette somme sera imputée sur le montant
de la créance du demandeur.

    Les arguments invoqués par la défenderesse pour obtenir en sa faveur
la totalité de la somme de 111'000 US $ ne sont pas pertinents. En effet,
l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt précité du Tribunal
fédéral concernant l'autre banque ne vise que ce qui était l'objet du
procès, non point en l'espèce l'obligation du demandeur fondée sur la
gestion d'affaires. En outre, les principes relatifs au calcul du dommage
sont inapplicables en l'occurrence, dès lors qu'il n'est pas alloué de
dommages-intérêts.

    b) Dans le cadre de la gestion d'affaires, il se peut que le
demandeur ait encaissé des montants supérieurs pour la défenderesse. Le
cas échéant, il devra lui en rendre compte (art. 400 CO par analogie;
ATF 34 II 699; cf. GAUTSCHI, n. 8a ad art. 419; OSER/SCHOENENBERGER,
n. 24/25 ad art. 419). De même, il lui appartiendra de faire bénéficier
la défenderesse des droits acquis pour elle en sa qualité de gérant
(art. 401 CO par analogie; GAUTSCHI, n. 9b ad art. 419) ...