Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 112 II 245



112 II 245

43. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 2 mai 1986 dans la
cause Dame P. contre Fondation de prévoyance collective de la Compagnie
d'assurances X. (recours en réforme) Regeste

    Personalvorsorge durch Gruppenversicherungsvertrag (Art. 331 Abs. 1
OR); Deckung im Todesfall des Arbeitnehmers.

    1. Rechtsbeziehungen zwischen den im vorliegenden Fall an der
Personalvorsorge Beteiligten (E. I).

    2. Doppelte Deckung: Vorläufige Deckungszusage bis zum Höchstbetrag
von Fr. 300'000. - ab Beitritt zur Versicherung, endgültige - höhere
- Deckung erst aufgrund einer ärztlichen Untersuchung. Erleidet der
Versicherte einen tödlichen Unfall, bevor die ärztliche Untersuchung
stattgefunden hat, haben die Begünstigten nur Anspruch auf den Betrag der
vorläufigen Deckung (sowie auf die Rückvergütung der Freizügigkeitsleistung
und der Prämie) (E. II).

Sachverhalt

    A.- En 1966, la compagnie d'assurances X. (ci-après: la Compagnie)
a créé à Genève une fondation (ci-après: la Fondation) dont le but est
la prévoyance en faveur du personnel des entreprises domiciliées dans le
canton de Genève ayant passé convention avec elle. Pour atteindre ce but,
la Fondation conclut avec la fondatrice des contrats d'assurance dont
elle est, en vertu de ses statuts, "preneur et bénéficiaire".

    a) Le 29 avril 1980, la Fondation a signé avec l'entreprise S. une
convention aux termes de laquelle cette dernière, se conformant à
l'art. 331 al. 1 CO, a adhéré à la Fondation afin de procurer à son
personnel les prestations prévues par un règlement de prévoyance qui fait
partie intégrante de la convention.

    Le règlement de l'assurance-vieillesse, décès et invalidité en faveur
du personnel de l'entreprise S. précise que, avant d'être admis dans
l'assurance, le collaborateur à assurer doit remplir un questionnaire de
la Compagnie (déclaration de santé) et que, selon les circonstances ou
le montant des prestations assurées, un examen médical peut être exigé;
l'entreprise notifie au collaborateur son admission en lui remettant
un certificat d'assurance délivré par l'assureur (art. 8). L'art. 13 du
règlement dispose que la Fondation ne répond pas dans une mesure dépassant
le montant des prestations dues par la Compagnie. En cas de décès avant
l'âge de la retraite, la Fondation verse au conjoint le capital prévu
lors de la mise à la retraite, et à chaque enfant de moins de 20 ans une
rente d'orphelin égale à 10% du salaire annuel assuré, au maximum 4'000
fr. (art. 16). Enfin, les cotisations tant des affiliés que patronales sont
versées à la Fondation, qui assume le paiement à la Compagnie (art. 22).

    b) Conformément à la convention du 29 avril 1980, la Fondation,
pour le compte de S., conclut le même jour avec la Compagnie un contrat
d'assurance de groupe, qui prévoit que la première est preneur d'assurance
et la seconde assureur. S. reçut de l'assureur les nouveaux tarifs et
conditions générales des assurances-vie et invalidité collectives (CGA),
ainsi qu'une circulaire relative aux "dispositions d'acceptation" pour
ces assurances, auxquelles renvoie l'art. 4 al. 2 CGA et dont il résulte
que l'assureur accorde une couverture provisoire jusqu'à concurrence d'un
montant global de 300'000 fr. Au-delà, la couverture définitive prend
effet lorsque la confirmation écrite en est donnée ou lorsqu'est remis
un document ayant valeur de confirmation (art. 5 CGA); un examen médical
est exigé (art. 2 des dispositions d'acceptation).

    c) Le 18 avril 1983, S. avisa la Compagnie qu'elle avait engagé dès le
5 avril 1983 P., avec un salaire annuel de 130'000 fr.; elle lui adressa
le même jour la demande, signée par celui-ci, d'affiliation à l'assurance
collective. P. déclarait qu'il était en bonne santé et indiquait qu'il
avait subi antérieurement des maladies infantiles, une fracture des
vertèbres en 1971, sans séquelles, et une opération du genou en 1979.

    L'intéressé ayant quitté une autre entreprise genevoise, la Fondation
demanda à cette entreprise de lui faire parvenir la prestation de
libre-passage.

    Le 26 mai, la Compagnie informa S. qu'elle avait pris note de
l'affiliation de P. dès le 1er avril 1983 et qu'elle lui accordait la
couverture provisoire de 300'000 fr., la décision quant à la couverture
définitive devant intervenir après examen du rapport médical. L'assureur
joignait un certificat d'assurance valable dès le 1er avril 1983, prévoyant
en cas de décès un capital de 986'518 fr.; la mention suivante y figurait,
apposée par un timbre humide:

    "Couverture provisoire

    La couverture définitive sera confirmée par écrit."

    Par lettre du 10 juin, la Compagnie indiqua à S. qu'elle avait reçu
une créance de libre-passage de 14'919 fr. 65, ce qui augmentait les
prestations en cas de décès à 1'020'143 fr., de sorte qu'elle envoyait un
nouveau certificat d'assurance valable dès le 1er mai 1983. Ce certificat
ne reproduisait pas la mention relative aux couvertures provisoire et
définitive.

    B.- Le 11 juin 1983, P. fut victime d'un accident de la circulation,
dans lequel il trouva une mort immédiate.

    S. adressa un certificat de décès à l'assureur, qui répondit
qu'il était en mesure de libérer la somme de 300'000 fr. et demandait
l'adresse de la veuve. L'assureur indiqua à S. que le décompte de
règlement se montait à 320'769 fr. 65, soit la couverture provisoire,
le remboursement de la créance de libre-passage et le remboursement de
la prime à concurrence de 5'850 fr.

    S. contesta ce décompte, faisant valoir que la couverture définitive
avait pris effet lors de la confirmation écrite du 10 juin, ce que
contesta l'assureur. Un échange ultérieur de lettres ne modifia pas les
points de vue.

    La Compagnie versa la somme de 320'769 fr. 65 au conseil de la veuve.

    C.- Dame P. intenta contre la Fondation, sur la base de l'art. 89
al. 5 CC, une action tendant, pour l'essentiel, à

    "Condamner la défenderesse à lui verser la somme de Frs 705.223,35
   plus intérêts à 5% du 14 juillet 1983 et la somme de Frs 4.315,40
   (représentant les intérêts sur Frs 305.850 du 14 juillet au 25 octobre

    1983);

    Condamner la défenderesse à lui verser, en sa qualité de
   représentant légal de ses deux enfants mineurs, Frs 8.000.-- plus
   intérêts au 5% dès le 1er juillet 1983 et Frs 8.000.-- plus intérêts
   au 5% dès le

    1er juillet 1984."

    Le 20 août 1985, statuant comme Tribunal cantonal des assurances,
la Cour de justice du canton de Genève condamna la Fondation à payer,
par 4'526 fr., les intérêts moratoires réclamés du 14 juillet au 25
octobre 1983, déboutant la demanderesse de ses autres conclusions.

    D.- Dame P. a recouru en réforme au Tribunal fédéral, reprenant les
conclusions formulées dans l'instance cantonale. Le Tribunal fédéral a
rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:
I.

    L'ensemble des rapports juridiques issus de la prévoyance
professionnelle instituée dans le cadre de l'entreprise S. se divise en
diverses relations liant des parties différentes (cf. RIEMER, Das Recht der
beruflichen Vorsorge in der Schweiz, 1985, p. 98 ss, cité "Lehrbuch", et le
Commentaire bernois, partie systématique ad art. 89-89bis CC, spéc. n. 336
ss; MAURER, Einführung in das schweizerische Privatversicherungsrecht;
p. 351/352; SUTER, Untersuchungen zur Rechtsstellung des Destinatärs von
Personalvorsorgestiftungen - geltendes und werdendes Recht, in RJB 1973,
spéc. p. 352 ss; ZULAUF, Rechtsgrundsätze des Gruppenversicherungsvertrages
unter besonderer Berücksichtigung der Personalgruppenversicherung, thèse
Zurich 1971; MAUCH, Der Kollektiv-Lebensversicherungsvertrag, seine
Rechtsnatur und seine Funktion in der schweizerischen Privatwirtschaft,
thèse Zurich 1961).

    a) La Fondation intimée est une institution de prévoyance collective
indépendante, qui reçoit les contributions de l'entreprise et de ses
travailleurs affiliés, puis redistribue aux bénéficiaires, sur sa fortune,
les prestations reçues de sa fondatrice, en exécution d'un contrat
d'assurances (art. 6 lettres a, b et d, art. 7 lettre b des statuts).

    Pour respecter la loi (art. 331 al. 1 CO, art. 343bis ancien),
S. a donné mandat à la Fondation de conclure, en qualité de preneur, un
contrat d'assurance de groupe auprès de la Compagnie, conformément à un
règlement de prévoyance qui est partie intégrante de la convention (art.
1er et 2 de ce document).

    En vertu de ses statuts (art. 3 al. 3 et 7 lettre a), ainsi que
de la Convention (art. 6 al. 1) et du règlement (art. 3 al. 2) qui la
lient à l'entreprise, la Fondation est devenue preneur et bénéficiaire,
auprès de la Compagnie, d'une assurance de groupe - un contrat distinct
et réglé par des conditions générales ad hoc (ci-après: CGA). Les membres
du personnel cadre et du personnel stable de S. affiliés à la Fondation
sont les assurés (art. 3 al. 1; cf. ATF 101 Ib 238). Lorsque, comme en
l'espèce, l'assurance inclut le risque décès, elle est une assurance au
décès d'autrui, à laquelle l'assuré doit consentir (art. 74 LCA).

    L'assureur n'est en principe sujet d'aucun lien juridique avec l'assuré
ou son employeur, ou encore avec les bénéficiaires de l'institution de
prévoyance (ATF 101 Ib 238). Les rapports de celle-ci avec l'assureur et
les bénéficiaires de ses prestations sont naturellement ordonnés l'un à
l'autre. C'est ainsi que selon l'art. 13 du règlement, la Fondation ne
répond en aucun cas des obligations découlant pour elle dudit règlement
dans une mesure dépassant le montant des prestations dues par l'assureur;
si l'assuré omet de fournir des renseignements qu'il devait donner,
lui-même et les autres bénéficiaires de son assurance en supportent seuls
les conséquences.

    b) Les employés assurés sont liés à la Fondation par un contrat innommé
(sui generis), distinct des rapports de travail et d'assurance, le contrat
de prévoyance, en l'espèce bilatéral (ATF 101 Ib 238 consid. 3c). Ce
contrat est réglé par la loi (in casu les art. 89bis al. 2, 3, 5 CC,
331a-c, 341 al. 1 et 362 CO) et par des actes juridiques: les statuts et
règlements de la Fondation auxquels l'employé se soumet expressément ou
par actes concluants (ainsi en conservant le règlement reçu, en payant des
cotisations ou en acceptant la déduction correspondante sur son salaire);
le cas échéant, une convention particulière. C'est de ce contrat que
naissent les prestations en faveur des bénéficiaires de la Fondation
(art. 89bis al. 5 CC).

    Le règlement de prévoyance est le contenu préformé du contrat
de prévoyance, à savoir ses conditions générales. Il s'interprète
selon le principe dit de la confiance (RIEMER, Commentaire bernois,
Systematischer Teil n. 86, et Lehrbuch, p. 103 et les références de la
n. 16), avec les particularités propres aux conditions générales. On
peut se référer, le cas échéant, par analogie, à certaines dispositions
du contrat d'assurance (RIEMER, Commentaire bernois, Systematischer Teil
n. 338 in fine). Le règlement détermine les ayants droit (destinataires
ou bénéficiaires) en cas de décès de l'employé assuré (art. 16 al. 2),
lesquels ne reçoivent pas la prestation de la Fondation en vertu d'une
prétention successorale, ni (dans le rapport de prévoyance) en raison de
la clause bénéficiaire des art. 76 ss LCA, mais au titre d'une stipulation
dite "parfaite" pour autrui au sens de l'art. 112 al. 2 CO (cf. ATF 112
II No 8, consid. 3; SZS 27/1983 p. 39 ss et SZS 26/1982 p. 316; ZULAUF,
op.cit., p. 29/30 et 105/106; RIEMER, Lehrbuch, p. 121 n. 36; REYMOND,
Les prestations des fonds de prévoyance en cas de décès prématuré, SZS
26/1982, p. 178 ss; SUTER, op.cit., p. 358 n. 73). Selon les art. 7 al. 1
et 2 de la convention et 11 et 16 du règlement, la Fondation verse les
prestations échues directement aux ayants droit, mais elle peut le faire
par l'intermédiaire de l'entreprise.

    c) S'agissant du contrat d'assurance, la Fondation doit, en sa
qualité de preneur, transmettre à la Compagnie les demandes d'admission
et délivrer les certificats d'assurance (art. 5 de la convention et 41
CGA), qui sont notifiés au collaborateur par l'entreprise (art. 8 al. 2 du
règlement). Selon l'art. 42 CGA, la Compagnie s'engage à assurer toutes
les personnes qui lui sont annoncées et que le contrat d'assurance
prévoit d'assurer, si leur état de santé le permet; le cas échéant,
elle demandera, à ses frais, un examen médical; au besoin, elle fixe des
conditions spéciales d'acceptation qui, pour être valables, doivent être
agréées, en la forme écrite, par le preneur et par l'assuré.

    Ainsi, le preneur et la Compagnie, laquelle applique un tarif de
groupe, se sont obligés par convention, le premier à annoncer tous les
membres du groupe concerné, la seconde à les admettre dans l'assurance si
les conditions contractuelles en sont réalisées, car elle s'est réservé
la faculté d'examiner tel risque individuel déterminé. L'assurance qui
incombe au preneur est une obligation légale, à peine de dommages-intérêts
en cas d'inexécution ou d'exécution imparfaite; de même l'acceptation
de l'assureur, qui doit intervenir dans un délai convenable (cf. ZULAUF,
op. cit., p. 81-87).

    d) Dès la conclusion de la convention du 29 avril 1980, S. et la
Compagnie ont correspondu directement et la première a payé en main
de la seconde les cotisations dues par son personnel assuré. De plus,
celle-ci a versé la couverture provisoire, non à la Fondation, mais au
mandataire de la recourante. La seule intervention de la Fondation paraît
avoir consisté à obtenir de l'ancien employeur du défunt la prestation
de libre-passage. Ce n'est pas avec elle que S. a été en relation pour
la transmission des demandes d'affiliation, le paiement des primes et
le versement des prestations. Mais cela n'a pas modifié les rapports
juridiques entre les intéressés, et pas davantage le fait que la Fondation
peut s'acquitter à l'égard des ayants droit par l'entremise de l'employeur
(art. 7 al. 2 de la convention).

    e) La recourante a donc qualité pour agir, en vertu de la stipulation
pour autrui contenue dans le contrat de prévoyance, contre la Fondation
et non contre l'assureur, vu qu'il n'y a pas clause bénéficiaire et que
l'art. 87 LCA est applicable seulement à l'assurance-accidents (ZULAUF,
op.cit., p. 103-106).

    Le contenu de la prétention déduite en justice peut être double:
d'abord la prestation même de l'assureur au preneur, qui détermine
l'obligation primaire du second envers l'ayant droit (art. 13 al. 1 du
règlement); subsidiairement une indemnité fondée sur la responsabilité de
la Fondation (RIEMER, Lehrbuch, p. 74/75), non pas pour un acte illicite
(art. 55 al. 2 in fine CC, en relation avec les art. 41 ss CO), mais
en raison d'une faute contractuelle, la sienne propre d'abord (art. 55
al. 2 initio CC, en relation avec les art. 97 ss CO et les dispositions
particulières du contrat de prévoyance), le cas échéant celle de l'assureur
"qui l'a relevée", a-t-elle dit, "de toute indemnité qui pourrait être
due à dire d'un tribunal"; les conditions et le contenu de l'obligation
d'indemniser pourraient en soi différer d'une hypothèse à l'autre.

    En l'espèce, il faut rechercher si, à un titre ou à un autre, la
responsabilité de l'intimée s'étend ou non à la couverture définitive. La
couverture provisoire, en effet, a été honorée sans retour. Il s'agissait
d'une couverture provisoire au sens propre ("vorläufige Deckungszusage"),
à raison d'un accord indépendant, plutôt que d'une garantie provisoire
("provisorischer Versicherungsschutz"; cf. ZULAUF, op.cit., p. 67
et 95/96), autant que les deux institutions se distinguent l'une
de l'autre (cf. ROELLI/KELLER, Kommentar zum Bundesgesetz über den
Versicherungsvertrag, p. 177-179, qui ne semblent pas l'admettre). II.

Erwägung 1

    1.- Consensuel, le contrat d'assurance est parfait lorsque les parties
ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté
(art. 1er CO). Mais l'offre et l'acceptation sont soumises à des règles
particulières.

    a) Aux termes de l'art. 1er al. 1, 2 et 4 LCA, celui qui fait à
l'assureur une proposition d'assurance est lié pendant quatorze jours s'il
n'a pas fixé un délai plus court pour l'acceptation; il est lié pendant
quatre semaines si l'assurance exige un examen médical; le proposant
est dégagé si l'acceptation de l'assureur ne lui parvient pas avant
l'expiration du délai. L'assureur qui se tait ne viole donc aucun devoir;
simplement, le proposant n'est plus lié, l'offre n'est plus susceptible
d'acceptation. Si le risque assuré se produit dans le délai légal, l'offre
devient pareillement caduque, autant du moins que l'objet du contrat n'en
est pas seulement réduit (ROELLI/KELLER, p. 44, H).

    S'agissant en revanche des propositions spéciales qui tendent à
prolonger ou à modifier un contrat en force, ou à remettre en vigueur un
contrat suspendu, le silence de l'assureur vaut acceptation (art. 2 LCA),
le second alinéa, relatif à l'éventualité où un examen médical est exigé
par les conditions générales de l'assurance, ne faisant qu'étendre le
délai, en écho à l'art. 1er. Ces situations ne sont pas réalisées en
l'espèce, car la règle ne s'applique pas à la proposition d'augmenter la
somme assurée (al. 3); or c'est cette situation qui pourrait présenter
quelque analogie avec le passage de la couverture provisoire à la
couverture définitive.

    En l'espèce, un contrat indépendant était conclu, pour la somme de
300'000 fr., dès réception par la Compagnie de la demande d'affiliation
(art. 4 al. 1 in fine CGA). C'était là un mode d'acceptation de la part
de l'assureur, sous réserve d'une couverture définitive plus élevée. Au
demeurant, si l'on devait considérer la proposition contenue dans
la demande d'affiliation comme caduque, faute d'acceptation à temps,
la remise du certificat (en guise de police) avec effet au 1er avril
1983 aurait constitué une contre-proposition (une offre) de l'assureur,
acceptée par actes concluants, notamment par la prise d'un rendez-vous
en vue de subir l'examen médical exigé pour la couverture définitive
(KÖNIG, Versicherungsrecht, 2e éd., 1942, p. 37). En effet, aucune forme
spéciale n'est exigée pour l'acceptation, même pas la remise de la police
lorsqu'elle émane de l'assureur (ROELLI/KELLER, p. 47), remise liée en
revanche à l'entrée en vigueur de l'assurance (art. 19 al. 2 LCA).

    b) Selon l'art. 9 LCA, le contrat d'assurance est nul si, au moment
où il a été conclu, le sinistre était déjà survenu. Pour éviter cet effet
au cours de la procédure de la conclusion du contrat, qui peut durer un
certain temps, l'assureur s'engage parfois, comme en l'espèce, à accorder
immédiatement une certaine couverture du risque, quand bien même les
parties ne se sont pas encore entendues sur tous les points essentiels
de la couverture définitive et, notamment, sans examen de la santé de
l'assuré (art. 4 al. 1 CGA). D'ordinaire, la couverture provisoire dure
jusqu'à la décision finale. L'application de l'art. 9 LCA est alors
écartée, car un contrat indépendant a été conclu avant la survenance du
risque (ROELLI/KELLER, p. 177 à 179; KÖNIG, Der Versicherungsvertrag,
in Schweizerisches Privatrecht, VII/2, p. 509/510, et Schweizerisches
Privatversicherungsrecht, 3e éd., p. 74 ss).

    En l'espèce, la couverture définitive était liée à un examen
médical. Ce n'est pas là une condition au sens des art. 151 ss CO
et l'art. 156 CO n'est pas applicable; mais la personne qui propose
l'assurance s'engage à se soumettre à l'examen (KÖNIG, Schweizerisches
Privatversicherungsrecht, p. 73). Cet examen était exigé par les
"dispositions d'acceptation", auxquelles renvoie l'art. 4 al. 2 CGA;
il est prévu tant par les art. 2 al. 2 et 42 al. 1 CGA que par l'art. 8
al. 1 du règlement de prévoyance. La recourante ne conteste pas que son
mari et S. aient eu connaissance du règlement et des conditions générales.

    c) Celui qui veut déduire des droits du contrat d'assurance doit en
prouver l'existence et le contenu. La remise de la police (in casu, le
certificat d'assurance) constitue déjà l'exécution du contrat (art. 11
al. 2 LCA), non pas une forme nécessaire à sa perfection, mais seulement
un moyen de preuve de l'existence et du contenu de l'accord (KÖNIG,
Schweizerisches Privatversicherungsrecht, p. 79; ROELLI/KELLER, p. 194
A). Sa teneur est considérée comme acceptée lorsque, comme en l'espèce,
le preneur ou le destinataire n'en a pas demandé la rectification dans
les quatre semaines dès sa réception (art. 12 al. 1 LCA).

    Les règles générales sur l'interprétation des contrats (art. 2 al. 1
CC, art. 18 CO) s'appliquent dans l'assurance privée (ROELLI/KELLER,
p. 456 par. 2), pour déterminer la volonté des parties dans chaque espèce,
à savoir la portée de leurs déclarations selon le principe dit de la
confiance et les règles de la bonne foi, ce qui relève de l'application du
droit (ATF 90 II 455 en haut). Ces déclarations doivent être interprétées
d'après le sens que le destinataire pouvait raisonnablement leur attribuer
en les considérant comme réellement voulues, vu leur but (ATF 37 II 82/83)
et l'ensemble des circonstances connues des parties ou qui pouvaient
l'être (ATF 107 II 418 consid. 6), notamment en raison de l'attitude
antérieure du déclarant (ATF 90 II 454 consid. 3). Peu importe en l'espèce
la portée exacte de l'adage "in dubio contra assecuratorem", appliqué si
la clarté fait défaut, ou encore le mode d'interprétation des conditions
générales (ATF 92 II 348 et les citations, 97 II 73 ss, 99 II 75/76
consid. 3; cf. KÖNIG, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, p. 83/84;
ROELLI/KELLER, p. 457 ss): en effet, le résultat de l'interprétation est
certain, ainsi qu'on va le voir.

    d) L'objet de l'interprétation consiste en deux certificats apparemment
clairs, auxquels étaient jointes deux lettres d'accompagnement calquées
l'une sur l'autre.

    aa) Le premier certificat attestait la couverture provisoire par
l'apposition d'un timbre humide. Il confirmait l'affiliation, en vigueur
depuis le 1er avril 1983, et fixait primes et prestations de la couverture
définitive. La lettre d'accompagnement du 26 mai était explicite: "Nous
avons pris note de l'affiliation à l'assurance dès le 1er avril 1983 de
M. P. La couverture provisoire d'un montant maximum de Fr. 300.000.-- lui
est accordée. La décision quant à la couverture définitive interviendra
après examen du rapport médical." Ces deux documents n'ont fait l'objet
d'aucune rectification de la part du preneur ou de l'assuré. Ainsi qu'on
l'a vu, l'affiliation pour la couverture provisoire était acquise dès
la réception de la demande (art. 4 al. 1 CGA); si tel n'avait pas été
le cas, la remise du certificat eût constitué une contre-proposition de
l'assureur, manifestement acceptée par la prise d'un rendez-vous pour
l'examen médical exigé.

    bb) Vint ensuite un second certificat, qui ne portait pas de timbre
humide. La recourante l'interprète à tort, pour cette raison, comme
une renonciation à l'examen médical et l'acceptation de la couverture
définitive. En effet, hors l'absence du tampon, le texte même du
certificat ne comporte qu'une modification du capital assuré et de la
date d'entrée en vigueur du nouveau montant. Calquée sur la première
lettre d'accompagnement, la seconde - datée du 10 juin 1983 - n'a qu'un
seul objet, qui est d'expliquer l'augmentation du capital assuré: "Nous
vous signalons que nous avons utilisé la créance de libre-passage de
Fr. 14.919,65, qui nous a été versée par la Banque ..., pour augmenter
les prestations d'assurance de M. P." La réserve de l'examen médical,
rappelée expressément le 26 mai précédent, n'est pas mentionnée parce
que l'objet de la lettre du 10 juin est tout différent et restreint. Bien
plus, le tampon apposé sur le premier certificat ajoutait que la couverture
définitive serait "confirmée par écrit". C'était là une référence manifeste
à l'art. 5 CGA. Cette disposition prévoit en effet deux modes d'acceptation
de la couverture définitive, à savoir la confirmation écrite, précisément,
et la remise d'un document ayant valeur de confirmation: c'est donc le
premier mode que l'assureur avait déclaré adopter; la comparaison montre à
l'évidence que la remise d'un certificat à une autre fin ne constituait pas
la confirmation écrite opposée à la remise d'un document en lieu et place,
sur lequel l'absence d'un tampon aurait représenté un acte concluant à
la renonciation à l'examen médical exigé.

    Tout doute est donc exclu; il n'y a ni erreur de l'assureur ni matière
à interpréter le second certificat "contra assecuratorem". L'arrêt du
Tribunal fédéral des assurances auquel la recourante se réfère (SJ 1985
p. 38 ss) n'y saurait rien changer: il ne faut pas donner la préférence aux
termes d'un certificat d'assurance si, ce qui serait le cas, il contient
manifestement une erreur et que celle-ci soit aisément reconnaissable
par un assuré de bonne foi. Au demeurant, S. - qui d'ailleurs n'était
vraisemblablement qu'un messager - n'a reçu la lettre du vendredi 10 juin
1983 que le lundi 13. Or P. est mort le 11. Postérieure à la réalisation
du risque, dite lettre ne pouvait modifier la couverture afférente à ce
risque (ROELLI/KELLER, p. 44, H. déjà cité).

Erwägung 2

    2.- On a vu que l'art. 156 CO n'est pas applicable. Mais, comme dans
l'instance cantonale, la recourante prétend à la réparation d'un dommage,
s'élevant à la différence entre les couvertures provisoire et définitive;
elle le fait à un double titre: la responsabilité propre de la Fondation;
celle de l'assureur assumée par elle. C'est la première que visait la
demande. Mais peu importe le titre, car dans les faits le point de départ
est identique d'après les moyens présentés, à savoir: l'assureur devait se
prononcer plus tôt; il incombait à la Fondation mandatée par l'employeur et
preneur au contrat d'assurance de veiller à ce que l'assurance s'acquittât
de ce devoir à l'égard de P., son partenaire dans le contrat de prévoyance.

    a) Selon la Cour cantonale, il faut se demander si l'annonce de
l'affiliation doit être suivie d'une réponse de l'assureur; la solution
dépend de ce qui a été convenu; d'une manière générale, l'acceptation
de la Compagnie doit parvenir dans un délai raisonnable et, à défaut de
dispositions contractuelles, il y a lieu d'appliquer les délais de l'art. 1
LCA, un retard injustifié pouvant entraîner réparation du dommage causé
(ZULAUF, op.cit., p. 86; MAUCH, op.cit., p. 71). Cela dit, la Cour se
borne à affirmer que les art. 1 et 2 LCA ne sont pas applicables à titre
supplétif, après avoir admis que les art. 4 al. 2 des statuts de l'intimée
et 2 al. 1 de la convention conclue avec S. se référaient au règlement
de prévoyance, dont l'art. 13 limite précisément la responsabilité de
la Fondation au montant des prestations dues par la Compagnie. Cette
affirmation doit être démontrée; la constatation se limite au fait que
l'intimée a assumé la responsabilité de l'assureur en précisant par les
pièces qu'elle a produites que celui-ci la relèverait de toute indemnité
qui pourrait être due.

    b) Ainsi qu'on l'a vu, l'assureur est en général libre de contracter;
il ne commet pas une culpa in contrahendo s'il ne répond pas à la
proposition ou s'il tarde à le faire et que le sinistre survienne
(ROELLI/KELLER, p. 48/49; KÖNIG, Schweizerisches Privatrecht, VII/2,
p. 508). Mais en l'espèce, l'art. 42 des conditions générales oblige
la Compagnie à assurer les personnes annoncées, si leur état de
santé le permet et, le cas échéant, sur le vu d'un examen médical.
L'affilié à la Fondation a donc droit à l'acceptation de l'assureur,
autant que les conditions en sont réalisées. Aussi bien l'obligation
correspondante doit-elle être exécutée dans un délai convenable, à peine
de dommages-intérêts en cas de retard injustifié (ZULAUF, loc.cit.). La
durée du délai ni son point de départ n'ont été convenus expressément.

    Selon l'art. 4 al. 1 CGA, les employés de S. bénéficient de la
couverture provisoire, à concurrence de 300'000 fr., dès la réception par
l'assureur de la demande d'affiliation. L'acceptation n'était donc pas
nécessaire pour ce premier contenu du contrat: la lettre d'accompagnement
du 26 mai 1983 se bornait à prendre note de l'affiliation pour la
couverture provisoire. Il faut dès lors se demander comment les art. 1
et 2 LCA pourraient s'appliquer en l'espèce, par analogie, pour justifier
une prétention correspondant à la couverture définitive.

    aa) Selon l'art. 2 LCA, l'absence de refus vaut acceptation
lorsque la proposition tend à prolonger ou à modifier un contrat ou
à remettre en vigueur un contrat suspendu. Cette disposition légale
ne saurait s'appliquer à l'espèce, même par analogie. En effet, le
passage de la couverture provisoire à la couverture définitive n'est
que l'augmentation de la somme assurée, qui est exceptée par la loi
(art. 2 al. 3). N'était cette exception, l'analogie pourrait être
envisagée. La couverture provisoire est certes octroyée par un contrat
déjà parfait. Mais elle ne devient pas définitive par l'effet d'un
second contrat distinct; le contrat, unique, reçoit successivement deux
contenus (KÖNIG, Schweizerisches Privatrecht, VII/2 p. 510/511); il est
donc modifié. L'analogie résiderait dans le fait que l'assureur doit se
prononcer dans les quatre semaines, dans un cas de par la loi, dans l'autre
en raison du devoir d'assurer imposé par les conditions générales. Mais
le sort de la cause n'en serait pas changé: s'agissant d'une modification,
le délai courrait dès le 26 mai; or P. est mort le 11 juin.

    bb) Seule demeure donc possible, pour l'acceptation en cas
d'affiliation obligatoire à une fondation de prévoyance en faveur du
personnel, une analogie avec les délais pendant lesquels le proposant
est lié (art. 1 al. 1 et 2 LCA): le contrat serait conclu si l'assureur
n'a pas refusé la proposition dans le délai de quatre semaines, ce qui
équivaudrait à une acceptation. Mais toute analogie ne peut être pratiquée
que dans le cadre et les circonstances où la transposition s'opère.

    Comme le remarque l'intimée, l'art. 1er LCA tend à éviter que le
proposant demeure dans l'incertitude un temps indéterminé (durée fixe
et point de départ des délais); de même, la couverture provisoire est
assurée d'emblée pour qu'il n'ait pas à supporter les aléas des pourparlers
en vue d'obtenir la couverture définitive. Or cette incertitude et ces
aléas n'existaient pas, en l'espèce, à concurrence d'une somme de 300'000
fr. Le besoin ne se faisait donc pas sentir de faire partir les délais de
l'art. 1er LCA dès l'envoi, le 18 avril 1983, de la demande d'affiliation.

    De par le règlement de prévoyance (art. 8 al. 1), l'assuré savait
que "selon [...] le montant des prestations assurées, un examen médical
[...] peut être exigé". L'obligation d'assurer existe si l'état de
santé de l'affilié le permet; c'est pourquoi la Compagnie demandera,
"le cas échéant [...] un examen médical" (art. 42 al. 1 CGA), le rapport
des médecins examinateurs constituant alors une base de l'assurance
(art. 2 al. 2); la couverture provisoire est donnée sans ledit examen;
elle est limitée selon les dispositions d'acceptation (art. 4 al. 1 et 2),
qui exigent l'examen médical lorsque les prestations contractuelles en cas
de décès ou d'incapacité s'élèvent à plus de 300'000 fr. Il suit de là
que l'assureur doit décider s'il exigera un examen médical. Sa décision
a été communiquée le 26 mai 1983. A réception de cet avis, P. n'a pas
protesté ni exercé son droit de rectification pour prétendre que la
couverture définitive était acquise, plus de quatre semaines s'étant
écoulées depuis le 18 avril. Il a au contraire admis implicitement la
procédure suivie en prenant rendez-vous peu après le 9 juin pour le 22.

    Il n'en reste pas moins que l'assureur ne devait pas trop tarder
et respecter un délai convenable tant après le 18 avril qu'après le
26 mai. La durée de quatre semaines fixée à l'art. 1er al. 2 LCA ne
saurait constituer qu'une direction, un indice de ce qui convient
(ZULAUF, op. cit., p. 86). De plus, le système même de la double
couverture implique une réglementation conventionnelle en ce sens que la
couverture provisoire dure, sauf accord contraire, jusqu'à la décision
sur la couverture définitive (ROELLI/KELLER, p. 178), à savoir un temps
indéterminé. Aussi bien les conditions générales peuvent-elles prévoir une
autre durée que celle qui peut être fixée par analogie avec l'art. 1er LCA
(p.ex., un mois: KÖNIG, Schweizerisches Privatversicherungsrecht, p. 75).

    Il suit de là que P. a admis la procédure suivie jusqu'au 26
mai et que d'ailleurs le délai de cinq semaines environ depuis la
demande d'affiliation n'était pas exagéré, vu la couverture provisoire
octroyée. Quant à l'examen médical requis, l'assurance a fait tenir le
questionnaire au médecin dès le 9 juin et rendez-vous a été pris par P. -
donc avec son accord et avant le 10 - pour le 22, à savoir moins de quatre
semaines plus tard. Cela étant, point n'est besoin de se demander si P.,
son employeur ou la Fondation eussent dû, de leur côté, être plus diligents
(rien n'ayant été fait depuis l'engagement le 5 avril jusqu'au 18 avril;
acceptation d'un rendez-vous pour le 22 juin seulement).