Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 111 II 349



111 II 349

67. Arrêt de la Ire Cour civile du 8 octobre 1985 dans la cause L. contre
C. (recours en réforme) Regeste

    Vergleich, gegründete Furcht.

    Der aussergerichtliche Vergleich unterliegt den Bestimmungen über
die Willensmängel unter bestimmten, aus der Natur des Vertrages selbst
fliessenden Vorbehalten (E. 1 und 3).

    Voraussetzungen der Unverbindlichkeit eines Vergleichs wegen
gegründeter Furcht (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Au début d'août 1979, C., agissant pour son fils, entama des
pourparlers avec L. pour reprendre le commerce de vêtements que ce dernier
exploitait à Genève. Le 6 ou le 7 août 1979, il lui remit de la main à
la main et sans reçu une somme de 67'202 francs en signe de conclusion
du contrat. A la suite d'une dispute survenue peu de temps après, les
pourparlers furent abruptement rompus.

    Requis le lendemain de restituer le montant qu'il avait reçu, L. s'y
refusa d'abord; puis, sous la menace du dépôt d'une plainte pénale,
il revint sur son veto tout en exigeant de conserver une somme de 10'000
francs. Le solde fut restitué à C. et son fils après signature du document
suivant, daté du 7 août 1979:

    "Nous soussignés ... reconnaissons par la présente avoir reçu en
   retour pour règlement définitif la somme 57'202 francs (cinquante-sept
   mille deux cents et deux).

    "Ce montant représente l'acompte versé pour l'achat du magasin
   'Vêtements L.', il en est déduit Fr. 10'000.-- pour frais d'arrhes et
   dédit consécutif à la rupture de l'accord d'achat.

    "Nous soussignés susmentionnés reconnaissons par la signature que
   nous apposons sur la présente n'avoir plus aucune prétention ni exigence
   tant financière que commerciale vis-à-vis de Monsieur L."

    Par lettre du 14 août 1979 de leur avocat, C. et son fils, se plaignant
d'avoir dû signer ce document sous la contrainte, sommèrent L. de leur
restituer le montant de 10'000 francs indûment retenu.

    B.- C. et son fils ont ouvert action contre L. en paiement de 10'000
francs avec intérêt.

    Le 21 décembre 1984, la Cour de justice du canton de Genève, admettant
que le demandeur C. avait contracté sous l'empire d'une crainte fondée,
a confirmé un jugement de première instance du 20 janvier 1983 en tant
qu'il condamnait le défendeur à payer à ce demandeur 10'000 francs avec
intérêt à 5% dès le 15 août 1979.

    Le défendeur recourt en réforme au Tribunal fédéral en reprenant ses
conclusions libératoires.

    Le Tribunal fédéral admet le recours et réforme l'arrêt attaqué en
ce sens que les conclusions de C. sont rejetées.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- La cour cantonale qualifie avec raison l'acte litigieux du 7 août
1979, qui constitue une quittance pour solde de compte après abandon
de 10'000 francs par les demandeurs, de transaction extra-judiciaire,
acte destiné à mettre un terme à l'incertitude touchant un rapport de
droit moyennant des concessions réciproques (ATF 105 II 277, 100 II 145
et les arrêts cités). Un tel contrat est soumis aux dispositions sur
les vices du consentement, notamment aux art. 29 et 30 CO sur la crainte
fondée (ATF 96 II 26 et les références citées), toutefois sous certaines
réserves découlant de la nature même de la transaction (ATF 105 II 277;
cf. aussi ATF 110 II 136 No 27).

Erwägung 2

    2.- De manière générale, un contrat ne peut être invalidé pour cause
de crainte fondée que si les quatre conditions suivantes sont réunies:
une mesure dirigée sans droit contre une partie, la crainte fondée qui en
résulte, l'intention de l'auteur de la menace de déterminer le destinataire
à faire une déclaration de volonté et le lien de causalité entre la crainte
et le consentement (ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, p. 250;
cf. ATF 110 II 132 ss).

    a) En l'espèce, la menace invoquée consiste dans le fait que le
défendeur aurait retenu la totalité de l'acompte versé par le demandeur,
si celui-ci n'avait pas consenti à la transaction en cause. Pour être
déterminante au regard des art. 29 et 30 CO, cette menace devrait être
illicite, c'est-à-dire qu'elle devrait contrevenir à une obligation du
défendeur de restituer le montant de l'enrichissement illégitime consécutif
à la rupture du contrat envisagé.

    Or cette illicéité doit être appréciée en tenant compte du contexte
dans lequel la "menace" est intervenue, soit d'une situation de conflit
à laquelle les parties ont entendu mettre fin en transigeant. Dans ce
contexte, on ne saurait qualifier d'illicite le refus du défendeur de
restituer pendant un bref laps de temps - soit entre la transaction et la
rupture des pourparlers en vue de la conclusion de la vente envisagée - la
somme qui lui avait été remise dans la perspective de cette opération. La
transaction implique par définition des concessions réciproques;
on ne pouvait donc exiger du défendeur qu'il restituât sur-le-champ
l'intégralité de la somme reçue, avant même que le contenu de l'accord eût
été arrêté. L'illicéité de la "menace" de retenir la totalité de l'acompte
versé ne peut pas être déduite de la seule circonstance que le défendeur
se trouvait dans une position de force, du fait que ce versement n'avait
pas été constaté par un reçu.

    b) Ces considérations conduisent également à nier que le demandeur ait
dû se croire menacé d'un danger grave et imminent dans ses biens, au sens
de l'art. 30 al. 1 CO. La non-exécution d'une obligation pendant la durée,
au demeurant brève, de pourparlers transactionnels, et sans qu'un risque
de ruine, de perte ou de fuite ne se manifeste concrètement, ne suffit pas
à remplir cette condition. Il est vrai que l'arrêt attaqué constate que le
demandeur "avait un sérieux motif de craindre ... de perdre le tout s'il
ne passait pas par les exigences" du défendeur. Mais à supposer que cette
crainte ait réellement existé, ce que la cour cantonale ne constate pas,
la condition de l'imminence du danger ne serait pas réalisée pour autant,
le demandeur ne devant pas se croire menacé de la perte du tout dans un
avenir immédiat.

    Les deux premières conditions de l'invalidation d'un contrat pour
cause de crainte fondée n'étant pas réalisées, il n'est pas nécessaire
d'examiner celles qui se rapportent à l'intention de l'auteur de la menace
et au lien de causalité entre la crainte et le consentement.

    Il n'y a pas lieu non plus d'entrer en matière sur les griefs du
recours concernant certains faits constatés par la cour cantonale, ces
griefs se révélant dénués de pertinence au regard de la solution retenue.

Erwägung 3

    3.- On peut certes s'interroger sur la légitimité de la solution
transactionnelle adoptée par les parties, compte tenu des circonstances
de la cause, mais cela ne saurait suffire à son invalidation pour cause de
crainte fondée. En matière de vices du consentement liés à une transaction,
il s'agit de considérer non seulement ce que la partie aurait pu obtenir,
d'un point de vue objectif, en cas de procès, mais aussi du souci des
parties d'éviter les risques d'un procès, cela au prix de concessions qui
peuvent sans doute être excessives, mais qui sont inhérentes à la nature
de la transaction (ATF 110 II 136 in fine).