Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 111 II 291



111 II 291

58. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 8 octobre 1985 dans la
cause dame R. contre Higyne S.A. (recours en réforme) Regeste

   Übertragung einer Marke.

    Schweigt sich der Vertrag darüber aus, so wird vermutet, dass die
Übertragung des Unternehmens die Übertragung der Marke miteinschliesst. Im
vorliegenden Fall Vermutung bestätigt durch die Gesamtheit der Umstände.

Sachverhalt

    A.- Dame R., qui exploitait sous une raison individuelle la fabrique
Higyne, à Fiaugères, a obtenu en sa faveur l'inscription des marques Higyne
et Higynodor. Le 19 août 1977, une société anonyme a été créée sous la
raison Higyne S.A. Dame R. en était l'une des actionnaires. Selon l'art. 3
al. 1 des statuts, la société avait notamment pour but "la diffusion
des procédés de la marque Higyne et Higynodor déposée auprès du Service
fédéral de l'hygiène publique et la propriété intellectuelle à Berne par
dame R.". Selon l'al. 2 du même article, la société reprenait "l'actif
et le passif de la raison individuelle (...) Fabrique Higyne, à F., selon
bilan établi ...". Toutefois, les marques précitées ne figuraient pas comme
actifs dans le bilan. Ce problème des marques a été évoqué à l'époque du
transfert de l'entreprise, mais il n'a pas été réglé expressément.

    Dame R. a été administratrice unique de la société jusqu'en 1981;
elle se comportait comme si les marques en question avaient été cédées
à cette dernière. Après avoir cessé ses fonctions d'administratrice,
elle a vendu ses actions et quitté définitivement la société. Higyne
S.A. a alors requis et obtenu l'inscription à son nom des marques Higyne
et Higynodor. Les époux R. ont continué, de leur côté, à exercer une
activité liée à la distribution de produits fabriqués notamment sous
ces deux marques; dame R. a prétendu, à cet égard, qu'elle n'avait pas
transféré les marques en question à la société Higyne S.A.

    B.- Higyne S.A. a ouvert action contre les époux R., concluant
notamment à ce qu'il soit constaté qu'Higyne S.A. est le seul ayant droit
aux marques Higyne et Higynodor et à ce que les époux R. soient condamnés
solidairement à lui verser, à titre de dommages-intérêts, 252'261 francs
"plus la somme déterminée par expertise".

    La Cour civile du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg a décidé de
limiter les débats à la question du transfert des marques. Par arrêt du
17 avril 1985, elle a, en bref, constaté la titularité de la demanderesse
sur les marques litigieuses; elle a en outre interdit aux défendeurs
d'utiliser lesdites marques et les a condamnés tous deux à détruire les
documents et emballages sur lesquels figuraient celles-ci.

    C.- Dame R. interjette un recours en réforme contre cet arrêt. Elle
demande qu'il soit prononcé qu'elle est le seul ayant droit aux marques
Higyne et Higynodor.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Extrait des motifs:

Erwägung 2

    2.- a) La cour cantonale a, en bref, considéré que, lors du transfert
de l'entreprise, le transfert des marques avait été évoqué, sans faire
l'objet d'un accord exprès; l'attitude ultérieure des parties permet
cependant de retenir que les marques ont effectivement été cédées à la
demanderesse; à supposer cependant qu'il n'y ait pas eu de transfert
et à défaut de contrat de licence, dame R. serait déchue du droit aux
marques litigieuses, faute d'en avoir fait usage pendant plus de trois ans
(art. 9 al. 1 LMF).

    b) Comme l'indique à juste titre la cour cantonale, étant donné que
la marque n'est pas séparable de l'entreprise (art. 11 LMF), on présume,
dans le silence du contrat, que le transfert de l'entreprise comprend
le transfert de la marque (cf. arrêt non publié K. V. S.A. et cons. du
24 septembre 1982; cf. également DAVID, Markenschutzgesetz, 2e éd., n. 4
ad art. 11; MARTIN-ACHARD, La cession libre de la marque, p. 79; MATTER,
Kommentar, n. III 3 ad art. 11, p. 158; TROLLER, Immaterialgüterrecht,
I, p. 930).

    Faute de constatation quant à la volonté interne des parties, leur
contrat doit être interprété selon les règles de la bonne foi (ATF 109 II
329 et les arrêts cités). La manière peu précise dont elles ont évoqué
le problème du transfert des marques ne permet pas, en l'occurrence,
d'y voir une clause contractuelle aux termes de laquelle elles seraient
convenues de réserver à un accord ultérieur le règlement de ce point tenu
pour secondaire (art. 2 CO); il n'y a donc pas lieu de compléter le contrat
en application de l'art. 2 al. 2 CO, mais seulement de l'interpréter.

    Il ressort de l'ensemble des circonstances que, pour que l'objectif
des parties fût atteint, il était nécessaire que les marques Higyne
et Higynodor puissent être utilisées par la nouvelle société, puisque
celle-ci reprenait la "Fabrique Higyne", qu'elle adoptait comme raison
sociale Higyne S.A. et que son but social était notamment "la diffusion
des procédés de la marque Higyne et Higynodor". Cette utilisation
supposait un transfert de la marque ou, à tout le moins, une licence
en autorisant l'usage. Or, du moment que l'entreprise personnelle de la
défenderesse cessait d'exister, qu'il n'était prévu aucune limitation dans
le temps quant à l'activité de la nouvelle société - en particulier pour
l'exploitation des marques - et qu'il ne ressort pas des constatations
de l'arrêt cantonal qu'on aurait envisagé un usage quelconque des
marques litigieuses par des tiers, on doit raisonnablement comprendre
l'accord des parties comme impliquant une autorisation sans limite et
définitive d'utiliser les marques litigieuses, soit comme un transfert de
celles-ci. Dans l'arrêt susmentionné du 24 septembre 1982, le Tribunal
fédéral en a jugé de même, à propos de faits presque semblables. Les
éléments invoqués en sens contraire par la recourante n'apparaissent point
déterminants. Si les marques ne figuraient pas à l'actif du bilan, avec
une estimation pécuniaire, cela peut fort bien s'expliquer par le fait
que les parties n'ont pas pensé à lui attribuer une valeur séparée; cela
n'empêche toutefois point que l'opération commerciale désirée impliquait le
transfert des marques. De même, si les statuts mentionnent que les marques
avaient été "déposée(s...) par dame R.", cette mention a trait uniquement
à l'inscription, mais n'implique nullement que dame R. aurait dû en rester
l'ayant droit. Enfin, si le problème du transfert des marques a seulement
été évoqué, sans faire l'objet d'une clause expresse du contrat, au moment
du transfert de l'entreprise, cette circonstance peut éventuellement
s'expliquer par le fait que la défenderesse devenait administratrice de la
nouvelle société et que les formalités d'enregistrement étaient remises
à plus tard; une telle circonstance ne saurait cependant faire obstacle
à un transfert qu'exigeait le but choisi par les parties. Loin d'être
infirmée, la présomption susmentionnée est donc confirmée. Au demeurant,
l'attitude ultérieure des parties montre qu'elles ne devaient sans doute
pas comprendre le contrat différemment.

    c) Vu ce qui précède, il n'est point nécessaire d'examiner le
bien-fondé de la motivation subsidiaire retenue par la cour cantonale.