Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 111 II 276



111 II 276

55. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 9 juillet 1985 dans la
cause R. contre Société S. (recours en réforme) Regeste

    Internationales Privatrecht. Bürgschaft.

    Anwendbares Recht bei einer Verpflichtung, die als Bürgschaft, Vertrag
zu Lasten eines Dritten oder als kumulative Schuldübernahme qualifiziert
werden kann (E. 1c).

    Bürgschaft oder Vertrag zu Lasten eines Dritten? Der wesentliche
Unterschied zwischen diesen beiden Verträgen liegt in der Abhängigkeit
(Akzessorietät) oder Unabhängigkeit des Sicherungsversprechens. Das
persönliche Interesse des Garanten an der Erfüllung des Hauptvertrags
steht der Qualifikation des akzessorischen Sicherungsversprechens als
einer Bürgschaft nicht entgegen (E. 2).

Sachverhalt

    A.- La société S. a vendu à C., pour lui-même ou son nommable, un
terrain situé en Sardaigne, par contrat sous seing privé du 20 septembre
1974, signé à Milan. Ce contrat prévoyait notamment que l'acte notarié
ne serait établi qu'à condition que le solde des paiements prévus fût
garanti par l'acquéreur, par une caution bancaire ou d'autres formes
de garanties approuvées par le vendeur. Dans un avenant du 3 mars 1976,
signé à Lausanne, les parties ont fixé le prix de vente à 1968 millions
de lires, dont 668 millions de lires ont été payés au 9 mars 1976. Au
pied de cet avenant, R., domicilié à Lausanne, homme d'affaires ayant
participé à des opérations immobilières et administrateur de sociétés,
intéressé à une éventuelle construction sur le terrain vendu, a signé le
même jour et au même lieu la déclaration suivante, sous seing privé:

    "Il sottoscritto R., residente in Losanna, dichiara di intervenir
   nel presente compromesso di compravendita stipulato in data odierna tra
   il Signor C. e la Società S. quale garante de buon fine dei pagamenti
   contrattuali. In fede."

    Le 2 septembre 1976, S. a assigné C. devant le Tribunal civil de Rome,
notamment en paiement de 1300 millions de lires, solde impayé du prix
de vente.

    B.- Le 2 septembre 1976, S. a assigné R. en paiement de 3'822'000
francs, avec intérêt à 18% l'an dès le 20 mars 1976. Elle demandait
l'exécution de la clause de garantie du 3 mars 1976, soit la contre-valeur
du solde impayé du prix de vente.

    Le défendeur a conclu au rejet de la demande. Il a invoqué la nullité
de la garantie, celle-ci n'ayant pas revêtu la forme authentique exigée
pour le cautionnement.

    Le Juge instructeur de la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois
a décidé de soumettre à un jugement séparé la question de la validité
formelle de la clause de garantie.

    Par jugement du 1er février 1985, la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois a prononcé que "l'engagement signé le 3 mars 1976 par R. constitue
un porte-fort, et non un cautionnement".

    C.- Le Tribunal fédéral admet le recours en réforme interjeté par le
défendeur, annule le jugement du 1er février 1985 et rejette la demande.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- ...

    c) La contestation ne peut faire l'objet d'un recours en réforme que
pour violation du droit fédéral, ce qui suppose qu'elle lui soit soumise.

    Qualifiée selon le droit suisse, en tant que loi du juge saisi (lex
fori; ATF 110 II 157, 78, 108 II 444, 107 II 485 et les arrêts cités),
la cause de la demande est un contrat, et les parties ont la faculté
de choisir, expressément ou par actes concluants, le droit auquel elles
entendent soumettre leur accord (ATF 71 II 289 s.). La jurisprudence ne
retient toutefois une élection de droit par actes concluants que si l'on
peut admettre que les parties, conscientes du problème, ont effectivement
voulu soumettre leurs relations juridiques à un droit déterminé (ATF 82 II
552 s.). En l'espèce, bien que le contrat principal soit manifestement
soumis au droit italien, il n'existe pas d'éléments suffisants qui
permettent de retenir que, le 3 mars 1976 à Lausanne, les parties à
l'engagement du défendeur aient pensé au problème du droit applicable et
aient également voulu soumettre cet engagement au droit applicable à la
vente. Une telle thèse n'a pas non plus été soutenue en procédure.

    A défaut d'élection de droit, le contrat qui serait en droit suisse un
cautionnement, une promesse de porte-fort ou éventuellement une reprise
cumulative de dette est soumis au fond au droit du domicile ou de la
résidence habituelle de la personne qui s'engage (ATF 85 II 454, 67 II 219
s., 63 II 308). Quant à la forme de cet acte, il suffit en principe qu'elle
réponde aux exigences soit de la lex causae soit de la lex actus. L'acte
ayant été conclu en l'espèce au domicile de la personne qui s'est engagée,
soit à Lausanne, le droit suisse est ainsi de toute manière applicable.

Erwägung 2

    2.- a) L'engagement litigieux ne présente pas les caractéristiques
d'une reprise de dette cumulative. En effet, il n'exprime pas la volonté
du défendeur de devenir directement et personnellement le débiteur de la
dette en paiement du prix de vente; le défendeur n'intervient que comme
garant de la bonne exécution par l'acheteur de son obligation de payer
le prix. Cet engagement ne peut être qualifié que de cautionnement (art.
492 ss CO) - dont la forme ne serait pas remplie faute de revêtir la forme
authentique (art. 493 CO) - ou de promesse de porte-fort (art. 111 CO)
- qui n'est soumise à aucune forme particulière.

    b) Selon l'art. 111 CO, le porte-fort promet le fait d'autrui, avec
cette conséquence que, si le tiers n'agit pas comme promis, le porte-fort
doit des dommages-intérêts dits positifs. Dans un tel contrat, la validité
de la promesse n'est pas subordonnée à l'existence d'une obligation à la
charge du tiers.

    Selon l'art. 492 CO, au contraire, la caution s'engage, à l'égard du
créancier d'une obligation principale, à garantir le paiement de la dette
par le débiteur de cette obligation. Aussi le cautionnement, engagement
accessoire, ne peut-il sortir d'effets que si un débiteur principal est
tenu d'exécuter une obligation.

    La différence essentielle entre ces deux contrats réside dans
le caractère dépendant (accessoire) ou indépendant de l'obligation du
garant. Seule l'interprétation du contrat permet de définir la nature de
cette obligation. A défaut d'une volonté interne commune aux parties,
différant de leur volonté exprimée (art. 18 CO), on doit s'en tenir
aux déclarations des parties, en les interprétant selon la théorie de la
confiance, soit selon le sens que leur destinataire devait raisonnablement
leur attribuer, les expressions inexactes dont elles ont pu se servir
n'étant pas déterminantes (art. 18 CO). Les principes généraux relatifs à
l'interprétation des manifestations de volonté sont donc applicables. Dans
le doute, le juge doit cependant opter en faveur du cautionnement, en
raison du but protecteur de la législation édictée sur ce contrat (ATF
101 II 328 et les arrêts cités). Il ressort de cet arrêt que le Tribunal
fédéral n'a dû rechercher le sens de l'engagement du tiers, compte tenu
de l'ensemble des circonstances, que parce que les parties ne s'étaient
pas exprimées clairement au sujet du caractère accessoire ou indépendant
dudit engagement (ATF 101 II 325 consid. 1 in initio). Dans l'arrêt
ATF 81 II 525, le Tribunal fédéral considère de même qu'il convient
de s'en tenir, en premier lieu, à la volonté exprimée par les parties;
ce n'est que lorsqu'elles n'ont pas clairement exprimé leur volonté que
celle-ci doit être dégagée de l'ensemble des circonstances. Au demeurant,
les considérations de cet arrêt relatives aux rapports entre la reprise
de dette cumulative et le cautionnement ne peuvent être transposées sans
autre aux relations entre la promesse de porte-fort et le cautionnement.

    La cour cantonale considère que "si le garant a agi essentiellement
dans l'intérêt du débiteur et pour augmenter son crédit, on sera en
principe en présence d'un cautionnement; s'il a vu surtout son intérêt
personnel à l'exécution du contrat garanti, on sera plutôt en présence d'un
contrat de garantie (porte-fort)". En tout cas dans cette forme absolue,
cette considération ne saurait être approuvée. Elle méconnaît le principe
de la liberté des conventions (art. 19 CO); que le garant ait un intérêt
personnel à l'exécution du contrat principal n'empêche nullement les
parties de conclure un cautionnement; les intérêts en présence peuvent en
revanche être pris en considération pour déterminer le sens de l'accord
des parties, lorsque celui-ci n'est pas clairement exprimé.

    c) En l'espèce, le texte de la garantie montre nettement que le
garant promettait l'exécution d'une obligation contractuelle assumée
par C. Cela ressort déjà du fait que la déclaration de garantie était
portée sur le document du contrat principal (avenant) lui-même. Ensuite,
cela résulte des termes utilisés selon lesquels R. "intervenait dans
le présent contrat de vente"; comme il ne reprenait pas la dette de
l'acheteur (consid. 2a ci-dessus), ces termes montrent que le défendeur
"intervenait" pour favoriser l'exécution du contrat, ce qui est déjà un
indice en faveur du caractère accessoire de l'engagement du garant. Et
surtout, le texte même de l'engagement du défendeur, qui se portait
garant de la bonne "exécution des paiements contractuels", indique
sans ambiguïté que l'objet de la garantie n'était pas un paiement en
soi, isolé de toute obligation principale, mais qu'il correspondait
à l'exécution d'obligations contractuelles; le caractère accessoire de
l'engagement ne peut être exprimé avec plus de netteté. La cour cantonale
attache une importance injustifiée au fait que le défendeur ne s'est "pas
porté garant des paiements de C., mais de leur bonne exécution". Cette
distinction n'est pas fondée; elle méconnaît que le législateur lui-même
utilise indifféremment les expressions de "garantir le paiement de la dette
contractée" (art. 492 al. 1 CO), garantir une obligation (art. 492 al. 2,
2e phrase), garantir la dette (art. 492 al. 3, 1re phrase), "garantir
l'exécution d'une dette" (art. 492 al. 3, 2e phrase).

    Aucun des faits relevés par la cour cantonale, auxquels le
Tribunal fédéral doit limiter son examen (art. 63 al. 2 OJ), ne permet
d'admettre que la volonté des parties aurait été mal exprimée dans leur
contrat. Tous les indices qu'elle évoque tendent certes à démontrer que
le défendeur avait un intérêt personnel à ce que le contrat principal
soit exécuté. Mais cette seule circonstance ne permet pas d'interpréter
le contrat contrairement à son texte, du moment que la loi n'empêche
pas qu'un cautionnement puisse être souscrit par une personne ayant un
intérêt personnel à l'exécution du contrat principal. Il est dès lors
vain de rechercher si l'intérêt du défendeur à l'exécution du contrat
devrait être qualifié de direct ou d'indirect. Au demeurant, le sens
économique de la participation du défendeur serait plutôt un indice en
faveur du caractère accessoire de la garantie; en effet, si le défendeur
comptait s'associer pour l'exploitation des terrains achetés, il avait
tout intérêt à ce que le contrat principal soit exécuté, notamment que
les terrains vendus soient transférés à l'acquéreur, alors qu'il n'avait
aucun intérêt à ce que le seul paiement par l'acheteur soit garanti,
indépendamment de l'exécution des obligations de la venderesse.

    d) Les parties ayant ainsi conclu un contrat de cautionnement dont
elles n'ont pas respecté la forme, ce contrat est nul, ce qui entraîne
le rejet de la demande.