Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 111 IB 312



111 Ib 312

57. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 25 septembre
1985 dans la cause C. contre Office fédéral de la police (recours de
droit administratif) Regeste

    Auslieferung. Staatsvertrag zwischen der Schweiz und den Vereinigten
Staaten von Amerika. Prinzip der beidseitigen Strafbarkeit; Tragweite
von Art. 36 Abs. 2 IRSG.

    Die Voraussetzung der beidseitigen Strafbarkeit ist im Falle
des Betrugs (Art. II Ziff. 6 des Staatsvertrags) durch Gebrauch
zwischenstaatlicher Kommunikationsmittel erfüllt (E. 3); sie ist
nicht erfüllt beim Delikt der Verschwörung ("conspiracy"), denn
das schweizerische Recht kennt dieses Delikt nicht und bestraft
Vorbereitungshandlungen im Bereich des Betrugs nicht (E. 4).

    Art. 36 Abs. 2 IRSG erlaubt keine Abweichung vom Prinzip der
beidseitigen Strafbarkeit. Es erlaubt die akzessorische Auslieferung bei
mehreren strafbaren Handlungen nur für die auch nach schweizerischem
Recht strafbaren Handlungen, die aber die Bedingung der Minimalstrafe
gemäss Art. 35 Abs. 1 lit. a IRSG nicht erfüllen (E. 5).

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.- Aux termes de l'art. II du Traité d'extradition entre la Suisse et
les Etats-Unis d'Amérique (RS 0.353.933.6), l'extradition sera accordée
pour les crimes et délits qui y sont énumérés, pourvu qu'ils soient
punissables tant d'après la législation du lieu de refuge que d'après
celle de l'Etat requérant. Le principe de la double incrimination,
ainsi énoncé, commande que les faits qui sont l'objet de la demande
d'extradition soient, tels qu'ils y sont exposés, punissables à la fois
par la législation de l'Etat requérant et par celle de l'Etat requis
(HANS SCHULTZ, Das schweizerische Auslieferungsrecht, p. 324 lettre c). Il
n'est pas nécessaire, à cet égard, que les faits incriminés aient, dans
les deux droits concernés, la même qualification juridique, qu'ils soient
soumis aux mêmes conditions de punissabilité ou qu'ils soient passibles
de peines équivalentes. Il suffit qu'ils soient réprimés dans les deux
Etats comme des délits donnant ordinairement lieu à l'extradition de
leur auteur (cf. ATF 101 Ia 595 consid. 5a et les arrêts cités; arrêt
non publié D. du 19 août 1983, consid. 4b p. 10/11).

    a) Selon la demande, le recourant est accusé d'avoir, avec la
complicité d'au moins deux individus de nationalité américaine, obtenu
une somme totale de 3,6 millions de dollars de financiers belges,
devant lesquels il aurait fait miroiter la réalisation d'une affaire
immobilière qu'il n'était manifestement pas en mesure de conclure. De
tels faits constituent une escroquerie d'argent ou d'autres biens au
moyen de fausses allégations, délit mentionné sous ch. 6 de l'art. II
du Traité. S'ils avaient été commis en Suisse, ils tomberaient de toute
évidence sous le coup de l'art. 148 CP qui réprime l'escroquerie.

    Le recourant prétend toutefois, en se fondant sur la qualification
juridique donnée dans la demande à ce chef d'accusation, que l'Etat
requérant ne veut pas le punir pour escroquerie, mais seulement pour
avoir utilisé abusivement les moyens de communication interétatiques
aux fins de commettre ce délit. Ce point de vue est erroné: il ne tient
pas compte des spécificités du droit criminel matériel américain, de
sa structure fédéraliste et de la répartition des compétences entre les
autorités de répression de l'Etat central et celles de chacun des Etats
membres de l'Union.

    b) Si l'on fait abstraction du crime de "conspiracy" dont il sera
question plus loin, le recourant est poursuivi aux Etats-Unis sur la base
des art. 1343 et 2314 du Titre 18 USC. Ces dispositions ont la teneur
suivante, selon la traduction, certifiée conforme, présentée par le Chef
du service de traduction du Département d'Etat américain:

    Article 1343:

    "Quiconque, ayant établi ou ayant l'intention d'établir un
   stratagème ou un subterfuge quelconque aux fins soit d'escroquer,
   soit d'obtenir des fonds ou des biens au moyen de faux-semblants, de
   déclarations ou de promesses fausses ou frauduleuses, transmet ou fait
   transmettre au moyen de communications télégraphiques, de radio ou de
   télévision sur réseaux inter-Etats ou internationaux, tous écrits,
   signes, signaux, images et sons, dans le but de mettre à exécution
   ledit stratagème ou subterfuge, est passible d'une amende ne dépassant
   pas 1'000 dollars ou d'une peine d'emprisonnement ne dépassant pas
   cinq ans, ou des deux."

    Article 2314 (in parte qua):

    "Quiconque, ayant établi ou ayant l'intention d'établir un
   stratagème ou un subterfuge aux fins d'escroquer ou d'obtenir des
   fonds ou des biens au moyen de faux-semblants, de déclarations et de
   promesses fausses ou frauduleuses, transporte ou fait transporter ou
   incite toute personne à emprunter un moyen de transport réglementé par
   la législation inter-Etats aux fins d'exécution ou de dissimulation
   d'un stratagème ou d'un subterfuge afin d'escroquer à cette personne
   des fonds ou des biens d'une valeur de 5'000 dollars au moins, est
   passible d'une amende ne dépassant pas 10'000 dollars ou d'une peine
   d'emprisonnement ne dépassant pas dix ans, ou des deux."

    L'Etat requérant s'est exprimé de manière très claire dans le corps
de la demande sur la portée de ces dispositions:

    "Les clauses auxquelles il est fait référence respectivement en ce
   qui concerne l'utilisation de communications télégraphiques inter-Etats
   et le fait d'inciter la personne victime de la fraude à emprunter
   un moyen de transport réglementé par la législation inter-Etats
   constituent les bases juridictionnelles de ces délits et sont incluses
   dans le seul but d'invoquer la juridiction fédérale aux termes du
   droit constitutionnel des Etats-Unis. L'acte auquel s'applique chacune
   desdites lois est le stratagème aux fins d'escroquerie. En conséquence,
   la nature de chaque délit est le stratagème aux fins d'escroquerie et
   non pas la base juridictionnelle."

    Ainsi, contrairement à l'opinion du recourant, c'est bien à la
répression de l'escroquerie, au sens où l'entend l'art. 148 CP, que tendent
les deux dispositions principales citées dans la demande d'extradition. Le
fait que la personne poursuivie ait utilisé les moyens de communication ou
de transport interétatiques a essentiellement pour conséquence de fonder,
d'une part, l'applicabilité de la législation fédérale et, d'autre part,
la compétence des autorités fédérales. C'est ainsi que si l'escroquerie
avait été commise dans les limites territoriales strictes de l'un des
Etats membres de l'Union, l'auteur serait passible des peines prévues
par la législation de cet Etat et son acte entrerait dans la compétence
des autorités répressives de celui-ci. Il est d'ailleurs significatif,
à cet égard, que l'Etat de la Californie ait renoncé à toute poursuite
pénale. Il s'agit donc uniquement ici des conditions de punissabilité de
l'infraction dans l'Etat requérant, lesquelles sont sans importance au
regard de l'obligation de coopération de l'Etat requis, dès lors que les
faits incriminés sont réprimés par la législation de l'un et de l'autre
Etat dans le sens de l'art. II du Traité (cf. arrêt non publié S. du 12
mai 1982, consid. 5b).

Erwägung 4

    4.- La demande d'entraide se fonde également sur l'art. 371, Titre 18,
USC dont la partie pertinente a la teneur suivante:

    "Si deux ou plusieurs personnes complotent soit pour commettre une
   infraction à l'encontre des Etats-Unis, soit pour commettre un acte de
   fraude à l'encontre des Etats-Unis ou de tout organisme des Etats-Unis
   par un procédé quelconque ou à des fins quelconques, et qu'une ou
   plusieurs desdites personnes commettent effectivement un acte afin de
   parvenir au but du complot, chacune de ces personnes sera passible d'une
   amende d'un maximum de 10'000 dollars ou d'une peine d'emprisonnement
   d'un maximum de cinq ans, ou des deux."

    La demande d'extradition s'exprime aussi sur la portée de cette
disposition:

    "Il ne s'agit pas de complicité. Il y a complot lorsque au moins
   deux personnes conviennent de se livrer à des activités criminelles et
   que lesdites personnes commettent des actes qui aident à la réalisation
   de l'objet dudit accord."

    Le sens de cet art. 371 USC est donc clair: il ne vise pas la
participation à une infraction déterminée, mais considère le complot comme
une infraction en soi. Il s'agit là d'un délit analogue, sinon identique,
à l'association de malfaiteurs, telle qu'elle est réprimée par certains
droits étrangers et en particulier par l'actuel art. 416 du code pénal
italien, qui punit la réunion d'individus en vue de la commission d'un
nombre indéterminé d'infractions indépendamment de la question de savoir
si les infractions projetées ont été commises ou non (cf. ATF 92 I 286
consid. 5d; HANS SCHULTZ, Das schweizerische Auslieferungsrecht, p. 113,
n. 163, et p. 280/281). Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de
constater que le droit suisse ne connaît pas cette notion de complot - ou
encore d'association ou d'entente - du droit anglo-saxon (ATF 97 I 380);
il ne l'appréhende, dans certains cas (cf. notamment art. 137 ch. 2 et
139 ch. 2 CP), que comme une cause d'aggravation de la peine (cf. ATF
95 I 466 consid. 3b), mais non en tant que délit distinct (ATF 78 IV
234). Si aucune infraction n'a été commise, le complot ou l'association
de malfaiteurs ne peut être qu'un acte préparatoire, lequel n'est pas
punissable, en dehors des cas prévus au nouvel art. 260bis CP ainsi qu'à
l'art. 19 al. 1 LStup (RS 812.121; cf. ATF 108 Ib 535/536 consid. 5c, 97
I 380). L'art. 371 du Titre 18 USC traite le complot, concrétisé par la
commission de n'importe quel acte préparatoire, comme un délit punissable
en soi. Il n'a donc manifestement pas son correspondant en droit suisse,
de sorte que la condition de la double incrimination n'est pas réalisée
en ce qui concerne le délit de "conspiracy".

Erwägung 5

    5.- L'autorité intimée ne s'est pas penchée sur la question de la
double incrimination du complot réprimé par l'art. 371, Titre 18, USC.
Elle est en effet partie de l'idée que l'art. 36 al. 2 EIMP lui permettait
d'accorder l'extradition pour tous les faits exposés dans la demande,
dès lors que ceux-ci étaient constitutifs d'au moins une infraction -
l'escroquerie - donnant lieu à extradition.
   a) L'art. 36 al. 2 EIMP a la teneur suivante:

    "L'extradition peut être accordée pour la totalité des infractions,
   si l'une d'entre elles est de nature à y donner lieu (art. 35 al. 1)."

    A première vue, ce texte paraît signifier que lorsqu'une infraction,
objet d'une demande étrangère, donne lieu à l'extradition de la personne
recherchée, celle-ci peut aussi être extradée pour tous les autres
faits qui lui sont imputés dans la demande, même s'ils ne sont pas
punissables selon le droit suisse. L'autorité intimée s'en est tenue
à cette interprétation littérale de l'art. 36 al. 2 EIMP. C'est ce
que le Tribunal fédéral avait fait lui-même dans son arrêt V. du 28
mars 1984, sans toutefois approfondir cette question qui ne revêtait,
en l'occurrence, qu'une importance secondaire (consid. 6 non publié
in ATF 110 Ib 185 ss). L'interprétation littérale de cette disposition
facultative (Kann-Vorschrift) pourrait cependant conduire à des résultats
discutables au regard des principes sur lesquels se fonde le nouveau
droit interne de l'entraide pénale internationale. Elle constituerait
une brèche sérieuse dans le principe de la légalité, en laissant une
latitude de jugement excessive à l'autorité administrative chargée de se
prononcer sur l'opportunité d'une extradition accessoire. Il lui serait
loisible de décider, selon un choix purement arbitraire, de livrer un
individu soupçonné d'avoir commis un acte également puni en Suisse,
pour qu'il réponde d'autres actes punissables dans l'Etat requérant
mais dont la répression pourrait heurter les conceptions suisses. Cela
ne saurait être le sens raisonnable de cette disposition, adoptée à un
moment où le législateur avait fait de la protection de la personne
recherchée, placée momentanément sous la juridiction suisse, l'un de
ses objectifs importants. Cette conclusion résulte d'ailleurs aussi des
travaux préparatoires.

    b) Devenu l'actuel art. 36 EIMP, l'art. 32 du projet du Conseil
fédéral, présenté le 8 mars 1976 à l'Assemblée fédérale, avait la teneur
suivante (FF 1976 II 487):

    "Dérogation à l'art. 31

    1 La personne poursuivie peut être exceptionnellement extradée pour
   des faits qui pourraient être réprimés en Suisse, si des circonstances
   particulières le justifient, notamment la possibilité d'un meilleur
   reclassement social.

    2 L'extradition peut être accordée pour la totalité des infractions,
   si l'une d'entre elles remplit les conditions de l'art. 31, 1er alinéa.

    3 Il est exceptionnellement possible d'extrader aussi pour un fait
   qui n'est pas punissable en Suisse, si ce fait est réprimé à l'étranger
   en raison de circonstances particulières et qu'il paraisse mériter
   une sanction, selon les principes généraux du droit suisse."

    aa) L'al. 3 de cette disposition prévoyait ainsi la faculté de déroger
à la condition de la double incrimination. Il reprenait en effet une règle
ancienne, alors contenue à l'art. 4 de la loi fédérale du 22 janvier 1892
sur l'extradition aux Etats étrangers (LExtr.), qui permettait d'extrader
pour des infractions non punissables selon le droit suisse, si cette
exemption provenait uniquement de circonstances externes, inhérentes
notamment à des différences géographiques entre les deux pays. Comme
cas d'application de l'ancien art. 4 LExtr., on envisageait par exemple
une violation de prescriptions pénales contenues dans des législations
étrangères relatives à la navigation maritime (cf. HANS SCHULTZ, Das
neue Schweizer Recht der internationalen Zusammenarbeit in Strafsachen,
RSJ 77/1981, p. 95). Le Conseil des Etats (BO, CE, 1977 p. 631), suivi
par le Conseil national (BO, CN, 1979 I p. 849), a toutefois décidé de
biffer l'al. 3 de l'art. 32 du projet, pour le motif qu'il visait des
éventualités exceptionnelles de peu d'importance pratique (intervention
du rapporteur Schlumpf, BO, CE, 1977 p. 631).

    bb) Reste donc l'art. 36 al. 2 EIMP, qui reproduit rigoureusement, du
point de vue matériel, l'art. 32 al. 2 du projet. Les travaux préparatoires
démontrent que la réglementation de l'extradition accessoire, régie
par cette disposition, est calquée sur l'art. 2 par. 2 de la Convention
européenne d'extradition conclue à Paris le 13 décembre 1957 et entrée en
vigueur pour la Suisse le 20 mars 1967 (CEExtr.; RS 0.353.1). L'art. 2
par. 2 CEExtr. prescrit en effet que, si la demande d'extradition vise
plusieurs faits distincts punis chacun par la loi de la Partie requérante
et de la Partie requise d'une peine privative de liberté ou d'une mesure
de sûreté privative de liberté, mais dont certains ne remplissent pas
la condition relative aux taux de la peine, la Partie requise aura la
faculté d'accorder également l'extradition pour ces derniers. Le rapport
entre l'art. 36 al. 2 EIMP et l'art. 2 par. 2 CEExtr. a été explicitement
souligné dans le Message du Conseil fédéral du 8 mars 1976: se référant au
Message du 1er mars 1966 relatif notamment à l'approbation de la Convention
européenne d'extradition (FF 1966 I 465 ss, spéc. ch. 3, p. 471 à 473), il
exposait que la réglementation de l'extradition accessoire correspond à la
déclaration faite au sujet de l'art. 2 par. 2 CEExtr. (FF 1976 II 448). Au
demeurant, l'adoption de l'art. 36 al. 2 EIMP a imposé une modification de
la déclaration faite par la Suisse à l'art. 2 par. 2 CEExtr. (cf. FF 1966
I 473; art. 2 de l'AF du 27 septembre 1966: RO 1967, 846). C'est ainsi
que le Conseil fédéral a donné à cette déclaration la teneur suivante:

    "Si une extradition est ou a été accordée pour une infraction à
   raison de laquelle l'extradition est autorisée par le droit suisse, la

    Suisse peut en étendre les effets à tout autre fait punissable
selon une
   disposition de droit commun de la législation suisse (RO 1983 I 165)."

    En adhérant à la Convention européenne d'extradition, la Suisse a donc
bien précisé son attachement à ses propres conceptions de l'extradition
accessoire: cette mesure doit être réservée aux infractions qui sont
elles-mêmes punissables selon la législation pénale suisse de droit commun,
mais qui, prises isolément, ne donneraient pas lieu à extradition, parce
que le droit suisse ne les frappe pas d'une sanction privative de liberté
d'un maximum d'au moins un an ou d'une sanction plus sévère au sens de
l'art. 35 al. 1 lettre a EIMP. Adopté après un rappel de ces conceptions,
l'art. 36 al. 2 EIMP ne saurait avoir la portée étendue qui lui a été
donnée en l'espèce par l'autorité intimée. Calqué sur l'art. 2 par. 2
CEExtr., il ne bat pas en brèche le principe de la double incrimination
(cf. ATF 101 Ia 423 consid. 3d, 95 I 467 consid. 4), auquel la Suisse
n'a jamais songé à renoncer. Il n'autorise l'extradition accessoire pour
la totalité des infractions que lorsqu'il s'agit de délits punissables
selon le droit suisse mais qui ne remplissent pas la condition de la
peine minimum de l'art. 35 al. 1 lettre a EIMP.