Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 111 IB 294



111 Ib 294

54. Arrêt de la IIe Cour de droit public du 13 décembre 1985 en la cause
Gaon contre Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de
radio-télévision et Société Suisse de Radiodiffusion et de Télévision
(recours de droit administratif) Regeste

    Bundesbeschluss über die unabhängige Beschwerdeinstanz für Radio
und Fernsehen.

    1. Zur Verwaltungsgerichtsbeschwerde gegen einen Entscheid der
unabhängigen Beschwerdeinstanz sind nur legitimiert der Veranstalter der
Sendung sowie wer nach Art. 14 lit. b Bundesbeschluss durch den Gegenstand
der Sendung unmittelbar betroffen ist (Erw. 1).

    2. Nach dem Grundsatz der Einheit des Verfahrens stehen dem
Beschwerdeführer vor der unabhängigen Beschwerdeinstanz aus Art. 4 BV
fliessende oder andere vor Bundesgericht gewährleistete Parteirechte
zu. Die vom Veranstalter eingereichten Akten, bei denen Inhalt und Quellen
der Informationen des Veranstalters nicht in Frage stehen, hätten daher
dem Beschwerdeführer zur Kenntnis gebracht werden müssen (Erw. 2).

Sachverhalt

    A.- Lors de l'émission "Téléjournal" diffusée le 23 mai 1984 à 19 h 30,
la Télévision suisse romande a fait état de rumeurs au sujet de la vente
éventuelle de l'Hôtel Noga Hilton à Genève. Estimant que l'émission n'était
pas objective et qu'elle le discréditait dans ses activités, Nessim Gaon
a, par lettre du 8 juin 1984, saisi l'Autorité indépendante d'examen des
plaintes en matière de radio-télévision (ci-après: l'Autorité de plainte)
et lui a notamment demandé de constater la violation des art. 11 al. 1
et 13 al. 1 de la concession accordée par la Confédération à la Société
Suisse de Radiodiffusion et de Télévision.

    Par décision du 14 septembre 1984, l'Autorité de plainte a constaté
que l'émission diffusée sur le canal romand le 23 mai 1984 n'avait pas
violé la concession de la Société Suisse de Radiodiffusion.

    Nessim Gaon a formé auprès du Tribunal fédéral un recours de droit
administratif contre cette décision.

    Le recourant se plaint de ne pas avoir eu connaissance des
observations de la Société Suisse de Radiodiffusion et des pièces qu'elle a
produites. Il demande l'annulation de la décision attaquée et le renvoi de
la cause à l'Autorité de plainte, pour qu'il puisse prendre connaissance
du dossier et se déterminer avant que l'Autorité de plainte ne rende une
nouvelle décision. Subsidiairement, il demande à avoir connaissance des
observations et des pièces et à pouvoir se déterminer dans le cadre de
la procédure devant le Tribunal fédéral.

    Au fond, le recourant reprend les arguments présentés devant
l'Autorité de plainte et conclut à ce qu'il soit constaté, avec suite de
frais et dépens, que l'émission viole les art. 11 al. 1 et 13 al. 1 de
la concession.

    Le Tribunal fédéral est entré en matière sur le recours et l'a admis
pour violation du droit d'être entendu.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) L'arrêté fédéral du 7 octobre 1983 sur l'Autorité indépendante
d'examen des plaintes en matière de radio-télévision (ci-après:
l'arrêté fédéral; RS 784.45) est entré en vigueur le 1er février 1984.
L'Autorité de plainte instituée par cet arrêté est chargée de statuer
sur les réclamations concernant des émissions de radio et de télévision
transmises par des diffuseurs suisses (art. 1er), en examinant si
ces émissions ont violé les dispositions de la concession relatives
aux programmes (art. 17). L'Autorité de plainte doit donc uniquement
constater si la concession a ou non été violée; elle n'est pas habilitée
à prendre des mesures en cas de violation de la concession, mais doit
faire part de ses constatations au diffuseur et, si celui-ci ne remédie
pas à la situation, s'adresser au Département fédéral des transports, des
communications et de l'énergie (art. 22); le Département reste d'ailleurs
compétent pour contrôler si les émissions compromettent la sécurité,
l'ordre constitutionnel ou les relations internationales de la Suisse
(art. 2 al. 1); enfin, l'Autorité de plainte n'a pas à se prononcer sur
les litiges où le droit d'accès aux médias est en cause: dans un tel
cas, la décision de refus du diffuseur est toujours susceptible d'être
attaquée par la voie du recours administratif et, en dernière instance,
par celle du recours de droit administratif (ATF 97 I 731).

    b) L'Autorité de plainte doit obligatoirement être saisie par une
réclamation, dont le législateur a voulu conserver le caractère de
plainte populaire (voir aussi Message du Conseil fédéral du 8 juillet
1981 in FF 1981 III p. 113). Il a ainsi accordé la faculté de présenter
une réclamation à tout citoyen suisse ou ressortissant étranger titulaire
d'un permis d'établissement ou de séjour, âgé de 18 ans révolus, lorsqu'il
est appuyé par au moins 20 personnes remplissant les mêmes conditions
(art. 14 lettre a). En outre, un particulier a qualité pour agir seul,
lorsqu'il peut prouver qu'il est personnellement concerné par l'objet de
l'émission ou des émissions incriminées (art. 14 lettre b). Il en va de
même pour les autorités ou les associations (art. 14 lettre c).

    La différence entre la plainte populaire et la réclamation individuelle
ne se limite cependant pas au fait que la première est collective et la
deuxième formée par un seul intéressé. Il résulte en effet clairement des
débats parlementaires que le législateur a expressément refusé d'ouvrir
la voie du recours de droit administratif contre la décision rejetant une
plainte populaire (BO CE 1983 p. 217/218 et 497; BO CN 1983 p. 1094 à 1096
et 1335). En revanche, il a voulu que les diffuseurs et les particuliers
disposent d'armes égales et leur a donc ouvert la voie du recours de
droit administratif (BO CE 1982 p. 467). Cette décision ne ressort pas
directement du texte de l'arrêté fédéral, mais des débats au Parlement,
au cours desquels le texte allemand de l'art. 25 du projet du Conseil
fédéral a été modifié, le terme "Verfügungen" ayant été remplacé par
"Entscheide". La qualité pour recourir se détermine d'après l'art. 103
lettre a OJ, c'est-à-dire qu'elle appartient à quiconque est atteint par
la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à ce qu'elle
soit annulée ou modifiée. Or, en ce qui concerne les décisions prises
par l'Autorité de plainte, ces conditions ne sont remplies que par le
diffuseur, d'une part, et l'auteur de la réclamation directement touché
par l'émission, d'autre part (art. 14 lettres b et c); eux seuls sont
donc habilités à agir par la voie du recours de droit administratif.

    c) Avant l'entrée en vigueur de l'arrêté, le Tribunal fédéral avait
refusé d'entrer en matière sur le recours de droit administratif d'un
auditeur - qui reprochait à une émission de radio d'être immorale -
contre une décision de l'autorité de surveillance (ATF 104 Ib 239 ss);
il avait alors estimé que la diffusion d'une émission de radio ne saurait
être considérée comme une décision susceptible d'être attaquée par la voie
du recours de droit administratif. Cette motivation n'est plus valable
depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté fédéral, car les décisions de
l'Autorité de plainte sont des décisions de constatation - positives ou
négatives - qui, comme telles, peuvent faire l'objet d'un recours. L'issue
de la procédure ne serait cependant pas modifiée pour l'auditeur qui
contesterait aujourd'hui la moralité d'une émission: il n'aurait en
effet pas qualité pour recourir, dans la mesure où il ne possède pas de
liens étroits avec le contenu de l'émission, donc pas d'intérêt digne de
protection à l'annulation de la décision de l'autorité de surveillance.

    Au demeurant, l'interprétation de la qualité pour agir, telle qu'elle
découle de l'art. 14 lettre b de l'arrêté fédéral, n'est pas nouvelle. Le
Tribunal fédéral a en effet déjà reconnu que, dans certains cas, des tiers
possèdent un droit à saisir l'autorité de surveillance et peuvent ensuite
former un recours de droit administratif contre les décisions de cette
autorité (voir ATF 98 Ib 53, au sujet de la surveillance des banques;
ATF 107 II 385, au sujet de la surveillance des fondations).

    d) En l'espèce, le recourant a présenté une réclamation sur la base de
l'art. 14 lettre b de l'arrêté fédéral, qui lui reconnaissait une position
de partie devant l'Autorité de plainte et lui donnait le droit d'obtenir
une décision de constatation. Dès lors que l'émission incriminée le
touchait personnellement dans ses activités d'homme d'affaires, il possède
un intérêt spécial et direct, tel qu'il a été défini par la jurisprudence
(ATF 111 Ib 63, 110 Ib 101, 109 Ib 200), à faire constater devant le
Tribunal fédéral la violation de la concession par la Société Suisse de
Radiodiffusion. Tant que cette violation n'a pas été admise, l'intérêt
du recourant doit en outre être considéré comme actuel, indépendamment
du fait que le sujet traité par l'émission n'a plus d'impact sur le public.

    Il en résulte que le recourant a un intérêt digne de protection, au
sens de l'art. 103 lettre a OJ, pour agir par la voie du recours de droit
administratif. Il y a lieu dès lors d'entrer en matière sur le présent
recours, qui remplit par ailleurs les autres conditions de recevabilité
des art. 97 ss OJ.

Erwägung 2

    2.- a) Le recourant reproche tout d'abord à l'Autorité de plainte
d'avoir violé son droit d'être entendu en ne lui communiquant pas la
réponse de la Société Suisse de Radiodiffusion, ni les pièces déposées
avec cette réponse. Du moment qu'il n'existait, en l'espèce, aucun motif
d'intérêt public permettant de justifier cette absence de communication,
l'Autorité de plainte aurait violé les art. 4 Cst. et 29 PA.

    De son côté, la Société Suisse de Radiodiffusion relève que le rôle de
l'Autorité de plainte consiste uniquement à examiner "si une ou plusieurs
émissions ont violé les dispositions de la concession relatives aux
programmes" (art. 17 de l'arrêté fédéral). Compte tenu de cette finalité,
les exigences formulées par le recourant donneraient à la procédure un
caractère que le législateur n'a pas voulu et mettraient en cause la
protection de ses sources.

    b) L'arrêté fédéral a pour but de régler la procédure de dénonciation
qui, jusqu'ici, n'était pas assujettie à des exigences formelles (voir
Message du Conseil fédéral du 8 juillet 1981, FF 1981 III p. 116). Le
législateur a voulu clarifier la situation en adoptant l'art. 3 lettre
ebis PA, lequel prévoit expressément que la procédure devant l'Autorité de
plainte n'est pas régie par la loi fédérale sur la procédure administrative
(art. 26 de l'arrêté fédéral). Dans sa réponse au présent recours,
l'Autorité de plainte constate dès lors à juste titre que le plaignant
ne peut se prévaloir des droits conférés aux parties par les art. 26 à 29
PA. Toutefois, selon le principe de l'unité de la procédure, la position
de partie que le recourant a devant le Tribunal fédéral lorsqu'il agit
par la voie du recours de droit administratif, n'est pas sans influence
sur ses droits de partie devant l'autorité inférieure (ATF 108 Ib 250,
104 Ib 248, 103 Ib 147). Ainsi, celui qui a qualité pour interjeter un
recours de droit administratif peut en principe invoquer devant l'Autorité
de plainte les droits découlant directement de l'art. 4 Cst. ou d'autres
droits de procédure qui lui sont reconnus devant le Tribunal fédéral.

    En l'espèce, il est constant que le recourant n'a pas eu connaissance
de la réponse de la Société Suisse de Radiodiffusion, ni des pièces
produites à l'appui de cette réponse, bien que l'Autorité de plainte
les ait considérées comme des éléments essentiels pour la solution du
litige. Or, le droit de prendre connaissance de la réponse de l'autorité
intimée correspond à un droit qui est généralement reconnu au recourant
devant le Tribunal fédéral. La protection du droit d'être entendu,
telle qu'elle découle de l'art. 4 Cst., exige aussi que le plaignant
ait connaissance de l'essentiel de l'argumentation présentée par le
diffuseur et ait la possibilité de s'expliquer à son sujet. Lui refuser
cette faculté pourrait, suivant les circonstances, rendre illusoire le
droit de plainte que le législateur a voulu lui accorder ou, à tout le
moins, diminuer considérablement ses chances de succès devant l'Autorité
de plainte. Enfin, on ne saurait déduire de l'omission du recourant de
réclamer la communication du dossier, qu'il avait renoncé à s'expliquer
(ATF 101 Ia 313).

    c) La Société Suisse de Radiodiffusion insiste particulièrement
sur le fait que la communication des pièces produites devant l'Autorité
de plainte serait contraire à l'art 20 al. 3 de l'arrêté fédéral. Cette
disposition se borne à renvoyer à l'art. 16 PA, qui permet aux rédacteurs,
collaborateurs et responsables des programmes de refuser leur témoignage
sur le contenu et les sources de leurs informations. L'art. 16 PA ne peut
pas être invoqué pour refuser de produire les documents et les observations
figurant déjà au dossier, qui ne mettent nullement en cause le contenu
et les sources d'information de la Société Suisse de Radiodiffusion.

    d) Dans ces conditions, l'Autorité de plainte a commis une violation
du droit d'être entendu, prohibée par l'art. 4 Cst., en ne communiquant
pas le dossier au recourant.

    Le recours doit donc être admis et la décision attaquée annulée,
sans qu'il soit nécessaire de se demander si le déni de justice formel
constaté a joué un rôle décisif (ATF 109 Ia 5). Il y a lieu dès lors de
renvoyer la cause à l'Autorité de plainte afin que le recourant puisse
avoir connaissance de la réponse de la Société Suisse de Radiodiffusion,
ainsi que des pièces qui l'accompagnaient, et se détermine à leur propos
avant que cette autorité rende une nouvelle décision.