Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 110 II 335



110 II 335

67. Arrêt de la Ire Cour civile du 28 mai 1984 dans la cause D. contre L.
(recours en réforme) Regeste

    Verjährung der Klage auf Rückforderung von Leistungen aufgrund
eines nichtigen Rechtsgeschäfts (Art. 67 Abs. 1 OR, Art. 20 Abs. 3 BewB,
Fassung vom 21. März 1973).

    Begriff der Kenntnis vom Bereicherungsanspruch. Leistet eine Partei
zum voraus und aufgrund eines Vertrages, der einer Bewilligung bedarf, auf
deren Erteilung die Parteien hoffen, so hat sie vom Bereicherungsanspruch
Kenntnis, sobald sie weiss, dass die Bewilligung nicht erhältlich ist
oder dass die Parteien verzichtet haben, darum nachzusuchen. Wenn die
Gültigkeit eines Rechtsgeschäfts Gegenstand eines amtlichen Verfahrens
ist, darf der Kläger grundsätzlich den Entscheid der Behörde abwarten,
bevor er den Rückforderungsanspruch geltend macht.

Sachverhalt

    A.- Les époux L., ressortissants des Pays-Bas, sont propriétaires
depuis 1961 d'un bien-fonds bâti d'une superficie de 2821 m2. D.
était propriétaire de l'immeuble voisin, de 1143 m2.

    Par acte de vente et d'échange du 19 juillet 1971, D. vendit aux époux
L. une surface de 895 m2 à détacher de son immeuble; les époux L. devaient
lui céder 32 m2 à détacher de leur bien-fonds; un solde de 23'301 francs
demeurait à payer par les époux L. Ce montant avait déjà été payé le 8
octobre 1970, en vue de l'opération envisagée. L'acte de vente contient
la clause ci-après: "Autorisation: elle est nécessaire en vertu de l'AF
du 23.3.1961. A cet effet une déclaration sur l'honneur est signée en
annexe. L'acte est fait sous cette réserve."

    Une requête tendant à obtenir l'autorisation d'acquérir fut adressée le
28 juillet 1971 par le notaire stipulateur au Service juridique du registre
foncier (SJRF); par simple lettre du 30 juillet 1971, ce service informa
le requérant qu'une autorisation ne pouvait être accordée. Par la suite,
il fut envisagé de faire acquérir la parcelle par un enfant majeur des
époux L.; ces derniers ont alors signé une clause de substitution en sa
faveur. Saisi d'une nouvelle requête du notaire, le SJRF confirma qu'en
l'état actuel de la législation, l'autorisation d'acquérir ne pouvait
être accordée; cela fut répété dans des lettres du 18 février 1977 au
notaire et du 15 décembre 1978 aux époux L. A cette dernière occasion,
le SJRF indiqua qu'une décision formelle pouvait être exigée. Le 23 juin
1979, les époux L. présentèrent une requête dans ce sens, qui fut rejetée
par décision formelle du SJRF du 6 juillet 1979, notifiée le même jour
et qui ne fit pas l'objet de recours.

    Le 15 août 1979, les époux L. demandèrent à D. la restitution de la
somme de 23'301 francs avec intérêt. D. ne donna pas suite à cette demande.

    B.- Par demande du 26 septembre 1980, L. a assigné D. en paiement
de 23'301 francs avec intérêt. Le défendeur a conclu au rejet de la
demande. Au débat final du 19 octobre 1983, L. a demandé que la somme
de 23'301 francs fût attribuée à sa femme et à lui, en qualité de
codemandeurs.

    Dans son jugement des 19 et 27 octobre 1983, le Tribunal cantonal
du Valais a admis de considérer les deux époux L. comme codemandeurs
et condamné le défendeur à leur payer 23'301 francs avec intérêt à 5%
dès le 8 octobre 1970.

    C.- Le défendeur recourt en réforme au Tribunal fédéral en concluant
au rejet de la demande, pour cause de prescription.

    Le Tribunal fédéral rejette le recours et confirme le jugement attaqué.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Les demandeurs ont confié au défendeur une somme de 23'301
francs à titre de paiement anticipé pour le cas où le contrat de vente
et d'échange pourrait entrer en force après son approbation, car les
parties reconnaissaient dans l'acte de vente et d'échange que celui-ci
était soumis à la condition suspensive de l'octroi de l'autorisation
nécessaire selon l'arrêté fédéral instituant le régime de l'autorisation
pour l'acquisition d'immeubles par des personnes domiciliées à l'étranger,
du 23 mars 1961 (ci-après AFAIE, ou arrêté fédéral). Or cette condition
ne s'est pas réalisée. De surcroît, le refus de l'autorisation d'acquérir
entraîne la nullité de l'acte en vertu de l'arrêté fédéral. Le défendeur
se trouve ainsi enrichi sans cause légitime du montant de 23'301 francs
qui lui avait été versé le 8 octobre 1970 à titre de prix de vente,
et il est tenu à restitution selon l'art. 62 CO.

Erwägung 2

    2.- Le seul point qui reste litigieux devant le Tribunal fédéral est
de savoir si l'action en répétition de la somme versée de 23'301 francs
est prescrite. La cour cantonale, appliquant l'art. 20 al. 3 AFAIE,
a résolu cette question par la négative en considérant que le délai
de prescription de cinq ans ne commençait à courir que dès la décision
formelle du 6 juillet 1979. Le défendeur soutient au contraire que le
délai de prescription courait le 12 septembre 1974 en tout cas et que
l'action introduite le 26 septembre 1980 est tardive.

    a) Aux termes de l'art. 67 al. 1 CO, l'action pour cause
d'enrichissement illégitime se prescrit par un an à compter du jour où
la partie lésée a eu connaissance de son droit de répétition, et, dans
tous les cas, par dix ans dès la naissance de ce droit.

    Dans son ancienne teneur, l'arrêté fédéral du 23 mars 1961 ne
renfermait pas de règle spéciale sur la prescription de l'action en
répétition des prestations exécutées sur la base d'un acte juridique ayant
pour objet une acquisition non autorisée. L'art. 20 al. 3 AFAIE, entré
en vigueur le 1er février 1974, dispose en revanche que les prestations
exécutées peuvent être répétées pendant cinq ans et, lorsque des actes
punissables ont été commis, jusqu'à la prescription de l'action pénale.

    Comme il résulte de l'analyse de cette disposition et de l'examen de
la cause (consid. 2c et d ci-après) que l'ancien et le nouveau droit ont
la même notion du dies a quo et que celui-ci se situe en l'espèce à une
date postérieure au 1er février 1974, c'est le délai du nouveau droit
qui est applicable.

    b) Le texte même de l'art. 20 al. 3 AFAIE n'indique pas expressément
quels sont ses rapports avec l'art. 67 CO et avec les dispositions
générales du code des obligations sur la prescription, notamment en ce
qui concerne le point de départ du délai de prescription, le rapport
entre ce délai et le double délai de l'art. 67 al. 1 CO et les règles
sur l'interruption de la prescription.

    Dans son message de 1972, le Conseil fédéral avait proposé le texte
suivant de l'art. 11 al. 3 AFAIE: "Les prestations promises ne peuvent
être exigées; les prestations exécutées peuvent être répétées pendant
cinq ans" (FF 1972 II 1272). Il relevait qu'on avait porté à cinq
ans le délai d'un an, "assez bref", prévu par l'art. 67 CO, "pour le
rapprocher de la prescription de l'action pénale" (FF 1972 II 1260). La
mention de la prescription de l'action pénale a été ajoutée lors des
travaux parlementaires sur proposition du conseiller national Kaufmann,
qui craignait que l'action en répétition ne se prescrivît (par cinq ans)
avant l'action pénale (par sept ans et demi, délai absolu) (Bull.stén. CN
1972, p. 2254 s.).

    Il résulte ainsi clairement de l'origine de l'art. 20 al. 3 AFAIE comme
du sens qu'il faut raisonnablement lui donner qu'il ne déroge aux règles du
droit civil régissant l'action en répétition que sur les points mentionnés
dans cette disposition spéciale. Le délai de cinq ans remplace donc celui
d'un an; le sens de l'adjonction apportée lors des débats parlementaires
était aussi de prolonger ce même délai, en cas d'infraction pénale. En
revanche, le nouveau texte n'a en particulier pas modifié le délai de dix
ans commençant à courir dès la naissance du droit, ni les règles légales
relatives au point de départ et à l'interruption du délai de prescription;
rien ne permet notamment de soutenir que le délai de prescription de
l'action pénale empêcherait que, par suite d'interruption, la prescription
de l'action civile ne se prolonge au-delà de l'expiration de ce délai.

    c) Selon l'art. 67 CO, le délai de prescription de l'action pour cause
d'enrichissement illégitime - porté à cinq ans par l'art. 20 al. 3 AFAIE -
court à partir du jour où la partie lésée a eu connaissance de son droit
de répétition.

    S'agissant d'une prestation effectuée par avance, en exécution d'un
contrat subordonné à une autorisation espérée par les parties, l'auteur
de l'attribution connaît son droit de répétition lorsqu'il sait que cette
autorisation ne pourra être obtenue ou que les parties ont renoncé à la
demander. Or il ressort du jugement attaqué que les parties n'ont pas
renoncé à l'espoir d'obtenir l'autorisation nécessaire, jusqu'au moment
où celle-ci fut refusée. Il s'agit donc uniquement de déterminer le moment
où les demandeurs ont su que l'autorisation espérée ne serait pas accordée.

    Selon la jurisprudence, le délai ne commence à courir que lorsque le
demandeur a une connaissance de son droit suffisante pour lui permettre
d'agir; généralement, lorsque la validité d'un acte fait l'objet d'une
procédure officielle, le demandeur peut attendre la décision de cette
autorité, avant qu'on ne puisse exiger de lui qu'il agisse en justice
en répétition de l'indu (ATF 82 II 428; 63 II 258 ss; arrêt du Tribunal
fédéral du 8 février 1972, publié in SJ 1973 p. 145 ss, consid. 1).

    La cour cantonale, appréciant les preuves administrées, constate
en l'espèce que "les interventions nombreuses des époux L., ou de leur
mandataire, démontrent que l'octroi de l'autorisation sollicitée leur
paraissait toujours possible, en particulier au gré d'un changement de
législation". Elle en déduit que les demandeurs n'ont eu une connaissance
suffisante de leur droit qu'en prenant connaissance de la décision de
refus du 6 juillet 1979.

    Cette appréciation des preuves lie le Tribunal fédéral (art. 63
OJ), et la déduction juridique qu'en a tirée la cour cantonale échappe
à toute critique. Le défendeur soutient en vain que certaines prises de
position antérieures du SJRF pouvaient être considérées comme des décisions
informelles et qu'elles feraient courir le délai de prescription. En effet,
la forme des décisions administratives est régie par les art. 34 à 38 PA
(art. 1er al. 3 PA). Or lesdites prises de position ne répondaient pas
à cette forme et une connaissance suffisante n'a dès lors été donnée
aux demandeurs que par le refus formel d'autorisation prononcé par le
SJRF. Comme le relève la cour cantonale, jusque-là les demandeurs ont pu
espérer l'octroi de l'autorisation désirée, soit en leur faveur soit en
celle d'un de leurs enfants, au gré éventuellement d'un changement de la
pratique administrative ou de la réglementation légale. Aussi le jugement
attaqué admet-il à juste titre que la prescription n'a pas commencé à
courir avant le 6 juillet 1979.

    d) Depuis lors, la prescription quinquennale a été interrompue à
plusieurs reprises (art. 135 ch. 2, 137 al. 1 et 138 CO). Elle n'était
pas acquise lors du jugement cantonal.