Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 109 II 153



109 II 153

35. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 26 avril 1983 dans la
cause Barrier & Cie c. Nicolai (recours en réforme) Regeste

    Art. 28 Abs. 3 BMM.

    Die Schutzfrist von zwei Jahren, während der eine Kündigung des
Vermieters nichtig ist, gilt nur dann, wenn der frühere Streit der Parteien
die Frage betraf, ob der Mietzins oder eine andere Forderung des Vermieters
missbräuchlich im Sinne des BMM sei. Voraussetzung verneint im vorliegenden
Fall (E. 3c und d).

Sachverhalt

    A.- Barrier & Cie, locataire principale de locaux et de terrains
sis au chemin des Mines, au Petit-Saconnex, sous-louait une partie des
locaux à Pierre Nicolai, qui les utilisait dans le cadre de ses activités
professionnelles. Le bail conclu entre Barrier & Cie et Nicolai le 12
octobre 1977 prenait effet le 1er octobre 1977 et venait à échéance le
31 décembre 1980, avec clause de reconduction tacite d'année en année.

    Par lettre du 22 septembre 1980, Barrier & Cie a résilié le contrat
de bail qui la liait à Nicolai pour le 31 décembre 1980. Le 29 septembre
1980, Barrier & Cie a elle-même reçu son congé de la société propriétaire,
également pour le 31 décembre 1980.

    Dans un jugement du 5 août 1980, le Tribunal des baux et loyers du
canton de Genève avait condamné Barrier & Cie, sur la base des art. 254/255
CO et 5 AMSL, à procéder à ses frais à la réfection du toit des entrepôts
loués, et à verser à Sieur Nicolai la somme de 2'100 francs à titre de
dommages-intérêts.

    B.- Le 23 octobre 1980, Nicolai a déposé, devant la Commission de
conciliation, une requête en nullité de congé valant subsidiairement
comme requête en prolongation de bail. Par jugement du 9 février 1982,
le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève a débouté le demandeur
de toutes ses conclusions.

    Par arrêt du 13 septembre 1982, la Cour de justice du canton de
Genève a admis l'appel du demandeur, annulé le jugement du Tribunal des
baux et loyers du 9 février 1982 et déclaré nul le congé donné le 22
septembre 1980.

    C.- Agissant par la voie du recours en réforme, Barrier & Cie
recourt contre l'arrêt de la Cour de justice précité. Elle demande
au Tribunal fédéral de réformer ledit arrêt en ce sens que le congé
donné par Barrier & Cie le 22 septembre 1980 pour le 31 décembre 1980
est valable et que Nicolai ne peut pas bénéficier d'une prolongation du
contrat de sous-location étant donné que le bail principal a été résilié
pour son échéance du 31 décembre 1980, de confirmer par conséquent le
jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 9 février 1982,
et de débouter Nicolai de toutes autres ou contraires conclusions.

    L'intimé conclut au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Le litige porte sur la validité de la résiliation du bail
notifiée le 22 septembre 1980 par la recourante à l'intimé. L'admission
des conclusions du demandeur, principale en annulation de la résiliation ou
subsidiaire en prolongation d'un bail portant sur des locaux commerciaux,
aurait dans l'un et l'autre cas pour effet de prolonger la durée du bail
litigieux de deux ans (cf. art. 28 al. 3 AMSL et 267a al. 1 i.f. CO). Le
loyer annuel étant de 9'000 francs, la valeur litigieuse dépasse le
minimum fixé par la loi (art. 46 OJ; ATF 98 II 107 consid. b, 201). Par
ailleurs, contrairement à ce que prétend l'intimé dans ses observations,
les indications figurant à ce sujet dans le recours satisfont aux exigences
de l'art. 55 al. 1 lettre a OJ.

    b) Est nouvelle, et partant irrecevable (art. 55 al. 1 lettre b
OJ), la conclusion par laquelle la recourante requiert un jugement en
constatation de droit portant sur la validité du congé donné au preneur
et l'impossibilité de prolonger le contrat de sous-location.

    c) Il s'est actuellement écoulé plus de deux ans depuis la date pour
laquelle la résiliation a été donnée, soit le 31 décembre 1980. En outre,
le preneur n'a pas requis une seconde prolongation du bail (art. 267a
al. 3 CO). Si le litige portait uniquement sur la prolongation du bail,
la demande et le recours devraient être déclarés devenus sans objet (ATF
102 II 253/254). Il y a lieu d'examiner s'il doit en aller différemment,
du fait que le demandeur a conclu principalement à la constatation de la
nullité, en invoquant l'art. 28 al. 3 AMSL.

    A supposer que cette disposition soit applicable en l'espèce, toute
déclaration de résiliation intervenue dans la période de deux ans à compter
du 5 août 1980 serait nulle de plein droit, sans aucun effet juridique. Une
telle déclaration ne saurait donc impliquer une résiliation prématurée,
dont les effets seraient reportés à la plus prochaine date à laquelle
le congé pourrait être donné valablement. Dès lors, une résiliation du
bail supposerait, dans ce cas, une nouvelle déclaration de résiliation,
postérieure au 5 août 1982. Or, il ne résulte ni de l'arrêt attaqué ni du
dossier qu'une seconde déclaration ait été formulée. Si donc la résiliation
en cause était nulle, le bail litigieux continuerait à déployer ses effets
en vertu de la clause de reconduction tacite. Sur ce point, le recours
n'est pas devenu sans objet.

    En revanche, pour le motif indiqué plus haut, si la conclusion
principale de la demande n'est pas fondée, il n'y aura pas lieu d'entrer
en matière sur la conclusion subsidiaire.

Erwägung 2

    2.- a) L'autorité cantonale considère que le congé donné par la
recourante à l'intimé est nul au regard de l'art. 28 al. 3 AMSL. Ayant
été signifié dans les deux ans à compter du jour où le bailleur a succombé
dans une procédure judiciaire l'opposant au locataire, il apparaît comme
une mesure de rétorsion à la suite du jugement intervenu. De plus,
il n'a pas été donné en raison de la résiliation du bail principal,
qui n'est que postérieure.

    b) La recourante soutient que seul un bailleur qui a fait valoir
judiciairement des prétentions jugées abusives, qui les a abandonnées ou
qui a accepté de transiger à cet égard dans une procédure de conciliation,
peut se voir opposer la nullité du congé stipulée à l'art. 28 al. 3
AMSL. Elle reproche à l'autorité cantonale d'avoir interprété cette
dernière disposition au-delà de son sens véritable en l'appliquant à
un bailleur qui n'a pas prétendu à une majoration de loyer mais qui,
confronté à des exigences d'un locataire, a seulement été condamné à
effectuer une prestation en faveur de son cocontractant.

    c) Quant à l'intimé, il fait entre autres valoir dans ses observations
qu'il n'y aurait pas eu de résiliation du tout, la lettre de la recourante
du 22 septembre 1980 ne pouvant pas être considérée comme une déclaration
de résiliation.

Erwägung 3

    3.- a) Sur ce dernier point, tout d'abord, l'argument de l'intimé
frise la témérité; les autorités cantonales, aux décisions desquelles
il peut être renvoyé, l'ont réfuté de manière convaincante. En effet,
dans la lettre susmentionnée, la bailleresse manifestait sans ambages sa
volonté de mettre un terme au bail pour le 31 décembre 1980. L'intimé ne
l'a pas compris autrement et il l'a même expressément reconnu en audience
de comparution personnelle devant le premier juge.

    b) Ensuite, l'autorité cantonale a eu raison de se placer, pour juger
de la validité du congé litigieux, au moment où celui-ci a été donné. La
validité de cet acte formateur résolutoire ne saurait en effet dépendre
de circonstances qui lui sont postérieures. Dès lors, la résiliation du
bail principal, survenue quelques jours après celle du bail litigieux,
est-elle sans incidence sur la validité de cette dernière.

    c) Aux termes de l'art. 28 al. 3 AMSL, lorsqu'une entente intervient
devant la commission de conciliation, que le bailleur renonce à porter
l'affaire devant l'autorité judiciaire ou succombe en procédure judiciaire,
que ce soit totalement ou en grande partie, une résiliation de sa part dans
les deux ans est nulle, à moins que l'affaire n'ait été portée abusivement
devant la commission de conciliation. La portée de cette disposition,
sur laquelle est fondée la décision attaquée, doit être recherchée au
regard non seulement de son texte, mais aussi de son emplacement, de son
origine et de son but.

    aa) Le seul texte de l'art. 28 al. 3 AMSL ne précise pas expressément
si la transaction devant la commission de conciliation, la renonciation
du bailleur à saisir le juge ou le jugement donnant tort au bailleur doit
se rapporter à un différend au sujet du montant du loyer ou d'une autre
prétention du bailleur ou au contraire à tout différend entre bailleur
et preneur. Cependant, l'hypothèse de la renonciation du bailleur à
saisir le juge après l'échec d'une tentative de conciliation ne peut
concerner qu'une prétention du bailleur, pour laquelle il se porterait
demandeur. Cela n'exclut toutefois pas formellement que la transaction
devant la commission de conciliation ou la décision du juge puisse aussi
porter sur une prétention du preneur ou un différend autre que celui visé
par l'arrêté.

    bb) Ainsi qu'il ressort de son préambule, l'arrêté tend avant tout
à réaliser le mandat constitutionnel donné au législateur par l'art. 34
septies al. 2 Cst. ("protéger les locataires contre les loyers abusifs
et autres prestations exigées par les propriétaires"). L'art. 1er de
l'arrêté définit lui-même à peu près dans les mêmes termes le but de
cet acte législatif; celui-ci ne restreint la liberté contractuelle
que dans la mesure nécessaire à combattre "les loyers abusifs ou
d'autres prétentions abusives des bailleurs" (cf. à cet égard ATF 107
II 263). L'examen systématique des différentes dispositions de l'arrêté
montre en particulier que si la commission de conciliation peut, certes,
conseiller preneur et bailleur concernant toute question relative au bail
(art. 26 AMSL), son intervention n'est toutefois nécessaire que pour
les contestations découlant de loyers et autres prétentions du bailleur
considérés comme abusifs (cf. art. 17 ss AMSL). C'est en outre uniquement
pour de tels différends que l'arrêté prévoit une intervention judiciaire
(cf. art. 23 et 29). De même, c'est en considération de ces seuls conflits
que l'art. 28 al. 1 AMSL attache des conséquences juridiques au fait qu'une
entente n'intervient pas devant la commission de conciliation. Ainsi,
lorsque l'art. 28 al. 2 AMSL prévoit que "toute partie au litige" peut
saisir le juge dans un délai de 30 jours, le "litige" dont il s'agit est
nécessairement à mettre en relation avec les contestations mentionnées à
l'alinéa précédent, soit celles qui concernent les "loyers ou ... autres
prétentions du bailleur". On ne voit du reste pas ce qui, dans le système
de l'arrêté, pourrait justifier l'introduction d'un délai péremptoire
pour saisir le juge compétent d'autres litiges liés au bail.

    Aussi l'art. 28 al. 3 AMSL ne peut-il, lui également, viser que les
conséquences de ces différends-là. Le but recherché par cette disposition
apparaît, de toute évidence, d'empêcher que le preneur n'ait à craindre
une résiliation de la part du bailleur pour avoir requis, à bon droit,
la protection des autorités contre les "abus" du bailleur. La sanction
de cette règle ne saurait s'appliquer, sans excéder la finalité même de
l'arrêté, à la solution de tout différend entre bailleur et preneur.

    cc) L'examen des travaux préparatoires conduit à la même
conclusion. Tant dans son message du 24 avril 1972 (FF 1972 I 1218,
1223, 1236) que dans celui du 4 octobre 1976 sur la prorogation et la
modification de l'arrêté (FF 1976 III 869, 876, 880), le Conseil fédéral
souligne que la protection apportée par l'arrêté au locataire en matière
de résiliation du bail est liée aux différends faisant l'objet de la
procédure de contestation et portant sur les loyers abusifs et autres
prétentions abusives du bailleur visés par l'arrêté. En particulier,
il n'existe pas de clause générale destinée à empêcher les résiliations
abusives (cf. FF 1976 III 883).

    Les auteurs qui ont étudié la question ne se prononcent pas dans un
sens différent. Ainsi, GMÜR/CAVIEZEL (Mietrecht-Mieterschutz, p. 86/87)
n'envisagent l'application de l'art. 28 al. 3 AMSL qu'en ce qui concerne
la période de deux ans suivant la fin de la procédure de contestation
(Anfechtungsverfahren) relative aux abus visés par l'arrêté. Quant à
R. MÜLLER (Der Bundesbeschluss über Massnahmen gegen Missbräuche im
Mietwesen vom 30. Juni 1972, thèse Zurich 1976, p. 54, en particulier
n. 73), il relève, en se référant sur ce point à un arrêt de la Cour de
justice de Genève du 21 mars 1974, qu'une telle procédure ne concerne pas
des litiges ayant trait à d'autres objets que le loyer abusif ou autres
prétentions abusives du bailleur, même si de tels objets sont réglementés
par l'arrêté.

    dd) Enfin, si l'on considère le but même de l'art. 28 al. 3 AMSL,
il appert que celui-ci consiste à prolonger la durée de protection
instituée par l'art. 24 du même arrêté pour la période de conciliation
et la procédure judiciaire au-delà de la conciliation ou du jugement
intervenu, mais cela seulement en matière de contestation du montant du
loyer ou d'une autre prétention du bailleur.

    d) En l'espèce, le jugement du 5 août 1980 condamnant le bailleur
à réparer la chose louée ainsi qu'à payer des dommages-intérêts n'a
pas été rendu dans le domaine évoqué ci-dessus; il n'emportait donc
pas interdiction de résilier selon l'art. 28 al. 3 AMSL. En appliquant
cette disposition à la résiliation litigieuse, l'autorité cantonale a
par conséquent violé le droit fédéral.

Erwägung 4

    4.- Il reste cependant à examiner si, en résiliant, la bailleresse a
commis un abus de droit. Rien, dans la loi, n'oblige celle des parties à
un contrat de bail qui désire donner congé à l'autre pour le terme prévu
dans le contrat de motiver sa déclaration de résiliation; elle est en
principe maître des motifs pour lesquels elle entend ne pas reconduire le
bail. Une résiliation, dans ces conditions, même si elle intervient à la
suite de difficultés entre parties, n'est en soi pas abusive. Il suffit
de remarquer, en l'espèce, que la recourante n'a fait qu'exercer un droit
qui lui était reconnu par le contrat et qu'elle a, en donnant congé,
respecté tant l'échéance que le préavis contractuellement convenus. A
cela ne change rien le fait que peu auparavant, elle ait été condamnée
à effectuer certaines prestations envers l'intimé ou que par la suite
elle n'ait pas repris les griefs qu'elle avait invoqués à l'égard de
ce dernier dans la lettre de congé qu'elle lui avait adressée. On ne
saurait en tous les cas inférer de ces circonstances que l'institution
même de la résiliation aurait été détournée de sa finalité propre et que
la recourante aurait agi contrairement à l'art. 2 al. 2 CC.

    Le congé donné par la recourante à l'intimé n'étant donc ni nul au
regard de l'art. 28 al. 3 AMSL ni constitutif d'abus de droit, le recours
doit être admis, la décision attaquée annulée et la conclusion principale
de la demande rejetée.