Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 109 IA 81



109 Ia 81

15. Arrêt de la Ire Cour civile du 18 février 1983 dans la cause El Nasr
Export Import & Co. contre Anglo French Steel Corporation S.A. (recours
de droit public) Regeste

    Art. 38 des Konkordats über die Schiedsgerichtsbarkeit, aufschiebende
Wirkung.

    Zulässigkeit einer staatsrechtlichen Beschwerde gegen einen Entscheid
im Sinne von Art. 38 des Konkordats (E. 1).

    Nichtigkeitsbeschwerde gegen einen Zwischenentscheid, der die
Zuständigkeit des Schiedsgerichts bejaht. Verweigerung der aufschiebenden
Wirkung (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Agissant devant des arbitres, Anglo French Steel Corporation
S.A. demande le paiement d'une somme d'argent à El Nasr Export Import &
Co. Celle-ci a excipé de l'incompétence du tribunal arbitral.

    Par décision du 22 juillet 1982, le tribunal arbitral, qui a son siège
à Genève, s'est déclaré compétent et a renvoyé à une audience ultérieure
l'instruction du fond du litige.

    La défenderesse a interjeté un recours en nullité contre cette sentence
auprès de la Cour de justice du canton de Genève, demandant en même temps
que l'effet suspensif fût accordé au recours.

    Statuant le 14 octobre 1982, la Cour de justice a rejeté cette
dernière requête.

    La défenderesse a formé contre cette décision un recours de
droit public fondé sur une violation de l'art. 4 Cst. et du concordat
intercantonal sur l'arbitrage; elle conclut à son annulation et à ce que
le Tribunal fédéral ordonne différentes autres mesures.

    Le Tribunal fédéral rejette le recours dans la mesure où il est
recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, le recours de droit
public ne peut tendre qu'à l'annulation de la décision attaquée; toutes
autres conclusions sont irrecevables (ATF 108 II 71, 107 Ia 129, 106 Ia
54 et les arrêts cités). Le recours est également irrecevable, en tant
que la recourante motive son recours par un renvoi à des écritures en
instance cantonale (ATF 99 Ia 346 consid. 4 et les arrêts cités).

    Le recours fondé sur une violation du concordat intercantonal sur
l'arbitrage (CIA) est soumis aux exigences de l'art. 87 OJ lorsque le
moyen de recours invoqué se confond avec le grief d'arbitraire (ATF 106
Ia 229, 105 Ib 431).

    Il n'est cependant pas nécessaire de décider si ces conditions sont
réalisées car, de jurisprudence constante, le Tribunal fédéral peut
être saisi de manière indépendante d'un recours pour arbitraire contre
une décision de mesures provisionnelles (ATF 108 II 71, 103 II 122 et
les arrêts cités), y compris une décision sur demande d'effet suspensif
(arrêts non publiés du 6 janvier 1982, dans la cause S.I. Soleya S.A.;
du 10 avril 1981, reproduit dans la Revue de droit administratif tessinois
1982 p. 92; du 11 mai 1977, reproduit dans le Repertorio di giurisprudenza
patria 1978 p. 14 ss et dans l'Annuaire suisse de droit international
1980 p. 364); une telle décision - finale ou entraînant un préjudice
irréparable - n'est, en effet, pas susceptible d'être revue dans le cadre
de la procédure en cours. Il ne saurait en être autrement d'une décision
rendue en application de l'art. 38 CIA.

    En tant que le recours a pour objet l'application directe du concordat,
selon l'art. 84 al. 1 lettre b OJ, le Tribunal fédéral dispose d'un plein
pouvoir d'examen, alors que, sinon, il n'examine le recours que dans le
cadre restreint de l'arbitraire (ATF 107 Ia 158, 102 Ia 502). La décision
attaquée résistant aux griefs de la recourante, même dans le cadre d'un
libre examen, il n'est pas nécessaire de définir en l'espèce l'étendue
du pouvoir de l'autorité fédérale de recours.

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 38 CIA, le recours à l'autorité judiciaire n'a
pas d'effet suspensif; l'autorité judiciaire prévue à l'art. 3 CIA peut
toutefois lui accorder cet effet si une des parties le demande.

    Le Tribunal fédéral n'a pas encore eu l'occasion de se prononcer sur la
portée de cette disposition, mais il a considéré que l'autorité cantonale
de recours n'agissait pas arbitrairement en refusant de suspendre la
procédure devant elle, car l'un des buts de l'arbitrage est de permettre
une solution rapide des litiges, de sorte que les parties sont tenues par
les règles de la bonne foi d'éviter tout ce qui pourrait retarder sans
nécessité absolue le déroulement normal de la procédure arbitrale (ATF 108
Ia 201). Ce principe a également inspiré l'art. 38 CIA et doit être pris
en considération dans son application (DUTOIT/KNOEPFLER/LALIVE/MERCIER,
Répertoire de droit international privé suisse, p. 342; cf. aussi
RÜEDE/HADENFELDT, Schweizerisches Schiedsgerichtsrecht, p. 353).

    b) En l'occurrence, la décision des arbitres constatant leur
compétence, incidente (art. 8 et 9 CIA) par rapport à la sentence arbitrale
au fond sur les conclusions qui leur sont soumises (art. 31 ss CIA),
n'est pas susceptible d'exécution forcée, en sa qualité de décision en
constatation de droit; en cela, elle ne met pas directement en péril les
prétentions de la recourante. Elle n'est pas non plus propre à lui créer
indirectement un sérieux préjudice dont elle ne pourrait être couverte;
à supposer que l'instruction de la cause arbitrale se poursuive et porte
sur les conclusions au fond, l'autorité cantonale relève à juste titre que,
si l'incompétence des arbitres était ensuite reconnue, la décision sur
les frais et dépens pourrait en tenir compte en faveur de la recourante.

    c) L'octroi de l'effet suspensif n'était d'ailleurs pas propre
à protéger la prétention de la recourante, car la poursuite de
l'instruction ne saurait être tenue pour la conséquence du refus de
l'effet suspensif. En effet, si l'on se réfère aux motifs invoqués par
la recourante, on s'aperçoit qu'elle désire uniquement, en réalité, la
suspension de la procédure arbitrale pendant la durée de la procédure de
recours devant l'autorité cantonale. Or elle se méprend en s'imaginant
que la suspension des effets de la décision arbitrale sur la compétence
(art. 8 CIA) emporterait de plein droit suspension de toute la procédure
arbitrale. Le concordat intercantonal sur l'arbitrage ne prévoit pas
une telle règle. Si l'art. 8 CIA oblige les arbitres à statuer sur leur
propre compétence, il ne les oblige pas à le faire dans une décision
séparée de la sentence au fond, leur laissant à ce sujet le choix
(art. 8 al. 1 CIA: "par une décision incidente ou finale"; PANCHAUD,
La sentence arbitrale partielle, dans Arbitrage commercial; Essais in
memoriam Eugenio Minoli, p. 386; POUDRET/WURZBURGER, CPC vaudois, 2e éd.,
ad art. 9 CIA p. 388). Dès lors, rien ne s'oppose en principe, sous réserve
de l'opportunité, à ce qu'ils instruisent le fond de la cause malgré un
recours contre la décision par laquelle ils se sont reconnus compétents. Il
n'en irait pas autrement si l'effet suspensif était accordé au recours:
la décision admettant la compétence ne déploierait alors certes pas
d'effet, mais cette circonstance ne priverait pas les arbitres de la
faculté de décider d'instruire le fond malgré la procédure en cours en
ce qui concerne leur compétence. Il n'en résulterait pas non plus des
conséquences juridiques intolérables, car, même si les arbitres rendaient
une sentence au fond avant que l'autorité cantonale ait statué sur le
recours, les effets de la sentence pourraient être supprimés ensuite
de l'admission dudit recours. Aussi la décision sur la suspension de
la procédure arbitrale, relevant de considérations tirées de l'économie
de la procédure, donc de l'opportunité, appartient-elle aux arbitres. En
tant que pure décision de procédure, elle ne peut faire l'objet du recours
prévu par les art. 36 ss CIA (POUDRET/REYMOND/WURZBURGER, L'application du
concordat intercantonal sur l'arbitrage par le Tribunal cantonal vaudois,
JdT 1981 III 97; DUTOIT/KNOEPFLER/LALIVE/MERCIER, op.cit., p. 313,
336 s.; RÜEDE/HADENFELDT, op.cit., p. 333; WENGER, Rechtsmittel gegen
schiedsrichterliche Entscheidungen, dans L'arbitrage international privé
et la Suisse, p. 10 s.). La seule voie qui peut être ouverte le cas échéant
est celle du recours prévu par l'art. 17 CIA pour retard injustifié.

    Au demeurant, la recourante ne prétend pas avoir requis des arbitres
une suspension qui lui aurait été refusée.