Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 108 IV 10



108 IV 10

3. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 19 janvier 1982
dans la cause C. contre Ministère public du canton de Vaud (pourvoi en
nullité) Regeste

    Art. 122 Ziff. 2 StGB; schwere Körperverletzung mit Todesfolge.

    a) Dieses Delikt besteht aus einer vorsätzlichen Haupttat (der
Körperverletzung), die durch eine zusätzliche Fahrlässigkeit (das
Nichterkennen der voraussehbaren Todesfolge) qualifiziert wird; der
Tatbestand ist also nicht nur dann erfüllt, wenn der Täter die Möglichkeit
des Todeseintritts ausschliesst, sondern auch wenn er diese überhaupt
nicht in Betracht zieht.

    b) Nach dem gewöhnlichen Lauf der Dinge ist es voraussehbar,
dass für einen Menschen, der von einem mit 85 km/h fahrenden Auto
hinuntergeschleudert wird, eine grosse Todesgefahr besteht.

Sachverhalt

    A.- Le 23 décembre 1979, dans le cadre de l'activité délictueuse
qu'il déployait en compagnie du nommé S., C. s'est arrêté à Founex près
d'une villa. S. a pénétré dans l'immeuble mais dut prendre la fuite. C.,
qui l'attendait dans sa voiture, inquiet de ne pas le voir revenir, s'est
approché de la maison où il a entendu une voix qu'il n'a pu identifier. Il
est alors retourné à sa voiture stationnée sur la place de parc, il a
mis le moteur en marche et il a démarré. Alors qu'il n'avait parcouru
que quelques mètres sans quitter la place de parc, il fut rejoint par
une voiture occupée par deux gendarmes alertés par la propriétaire de la
villa. Le gendarme F. gara sa voiture de façon à empêcher C. de s'engager
sur la route, tandis que l'appointé qui l'accompagnait sortait son
pistolet et interpellait C. en l'invitant à le suivre au poste. C. ayant
refusé d'obtempérer, l'appointé le saisit par le col de sa veste pour
l'extraire du véhicule. C. savait qu'il n'avait pas le droit de résider
en Suisse et voulait absolument éviter de se faire arrêter. Il prit
la décision de s'échapper. Tout en faisant mine de céder, il enclencha
le sélecteur de vitesse sur la marche avant et démarra. L'appointé de
gendarmerie s'accrocha à la portière ou au porte-skis de la voiture; de
toute manière il est établi qu'après une dizaine de mètres, la portière
était rabattue et que l'appointé s'accrochait au porte-skis. Après
avoir parcouru une cinquantaine de mètres en accélérant à plein gaz,
C. jeta un coup d'oeil en arrière et vit que l'appointé était toujours
là. Il continua à rouler à plein gaz, puis donna un violent coup de
volant à droite alors qu'il roulait à environ 85 km/h. La partie avant
du porte-skis se rompit. L'appointé fut projeté sur la chaussée, où,
après avoir glissé sur environ 6 m, il buta de la tête contre l'angle
d'un mur. Il décéda peu après son arrivée à l'hôpital. C., qui n'avait pas
perdu la maîtrise de son véhicule, se retourna pour constater qu'il s'était
débarrassé du gendarme. Les autorités cantonales ont admis que C. n'avait
pas eu l'intention délibérée de tuer l'appointé de gendarmerie et elles
ont considéré qu'il n'était pas établi que, sachant l'appointé accroché
à son véhicule et risquant la mort en tombant, il se soit accommodé de
cette issue prévisible, ni qu'il ait voulu créer un risque mortel qui
s'est réalisé. Elles ont en revanche retenu que l'intention de C. était
de fuir, quelles qu'en soient les conséquences. C'est pourquoi il a été
reconnu coupable de lésions corporelles graves par dol éventuel.

    B.- Pour ces faits, le Tribunal criminel du district de Nyon a
notamment condamné C., le 1er mai 1981, pour lésions corporelles graves
ayant entraîné la mort, vols en bande et par métier, tentative de vols
en bande et par métier, rupture de ban, crimes manqués de vol en bande
et par métier, à la peine de 12 ans de réclusion sous déduction de 523
jours de détention préventive. Il a en outre ordonné son expulsion du
territoire suisse pour une durée de 15 ans.

    C. ayant recouru, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois l'a débouté et a confirmé le jugement attaqué.

    C.- C. se pourvoit en nullité à la Cour de cassation pénale du
Tribunal fédéral. Il se plaint de la fausse application de l'art. 122
CP, en ce sens que, selon lui, seules les lésions corporelles graves
de l'art. 122 ch. 1 CP doivent être retenues à l'exclusion des lésions
corporelles graves ayant entraîné la mort au sens de l'art. 122 ch. 2
CP. Il demande également à être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Dans un arrêt de principe qui revient partiellement sur la
jurisprudence plus ancienne (ATF 97 IV 84, plus particulièrement 89/90
consid. 4), le Tribunal fédéral a précisé les éléments constitutifs
de l'infraction réprimée à l'art. 122 ch. 2 CP. Celle-ci, de même que
celles réprimées aux art. 119 ch. 3 al. 3, 123 ch. 3, 134 ch. 1 al. 3,
139 ch. 2 al. 5, apparaît comme un acte intentionnel principal compliqué
d'une négligence: l'auteur voulait l'acte principal et, contrairement
à son devoir, n'a pas envisagé, alors qu'il aurait pu le faire, que son
comportement pouvait avoir pour conséquence le décès de la victime. Peu
importe que l'auteur ait prévu effectivement ou non la possibilité de la
mort. Il suffit qu'il eût pu la prévoir en usant de l'attention commandée
par les circonstances ainsi que par sa situation personnelle. La négligence
inconsciente suffit (cf. jurisprudence citée).

    In casu, il a été retenu en fait - et il n'y a pas à y revenir -
(art. 277bis al. 1 PPF) que le recourant "s'est accommodé des lésions
corporelles graves que le gendarme devait normalement subir dans une chute
sur le goudron à 85 km/h". C'est donc à juste titre que le recourant a
été reconnu coupable de lésions corporelles graves par dol éventuel. Il ne
le conteste d'ailleurs pas. L'application de l'art. 122 ch. 2 CP dépend
dès lors uniquement du point de savoir si, la victime étant décédée, le
recourant pouvait le prévoir. Il s'agit bien là d'une question juridique
relevant de l'expérience de la vie, donc de droit, qui peut être soumise
au Tribunal fédéral au regard de l'art. 269 al. 1 PPF (ATF 74 IV 85
consid. 3).

    Le recourant relève que, dans de telles circonstances, la victime
aurait pu ne pas être blessée du tout, ou n'être atteinte que de lésions
corporelles simples, voire graves, qu'il n'est nullement établi qu'il
existait objectivement un danger concret présentant une probabilité
suffisante de risque mortel et que, partant, la situation serait toute
différente de celle de l'arrêt cité aux ATF 97 IV 84.

    Une telle argumentation ne résiste pas à l'examen au vu des faits de
la cause et du fait qu'une négligence inconsciente suffit. Chacun sait en
effet ou sent confusément qu'un corps humain non protégé lancé à plus de
20 m/s sans que sa direction puisse être contrôlée sur une route risque
de se briser s'il rencontre un obstacle immobile ou un véhicule. Une issue
mortelle est alors probable, surtout si c'est la tête qui est touchée. On
ne saurait assimiler la situation de la victime in casu à celle des
cyclistes ou des skieurs. Certes ceux-ci atteignent-ils couramment des
vitesses de 85 km/h, mais ils le font volontairement en contrôlant leur
direction et en adaptant leur vitesse aux conditions du lieu. Ils sont au
surplus casqués lorsqu'ils se déplacent à cette vitesse, le plus souvent
lors de compétitions sur des routes ou pistes préparées pour cela (absence
de circulation parasite, bottes de paille aux endroits dangereux, etc.).

    Il s'ensuit que, selon le cours ordinaire des choses, la probabilité
de léser le bien juridique protégé, à savoir non seulement l'intégrité
corporelle, mais bien la vie du gendarme, existait d'une manière
évidente, selon un degré de probabilité qui dépassait en tout cas le
50%. Dans de telles circonstances, une telle mise en danger devenait
quasi imminente. C'est donc à bon droit que le recourant a été reconnu
coupable de l'infraction réprimée à l'art. 122 ch. 2 CP.