Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 108 IB 513



108 Ib 513

89. Arrêt de la Ire Cour civile du 9 août 1982 dans la cause Banque
commerciale S.A. contre Commission fédérale des banques (recours de droit
administratif) Regeste

    Aufsicht über die Banken.

    Art. 12 Abs. 2 BankV. Der Begriff der Beherrschung im Sinne dieser
Bestimmung entspricht jenem in Art. 3bis Abs. 3 BankG. Ausüben eines
beherrschenden Einflusses "in anderer Weise" im vorliegenden Fall bejaht
(E. 1).

    Art. 23bis Abs. 2 BankG, 21 BankV. Befugnis der Bankenkommission, von
den Banken Auskünfte nicht nur über ihre eigenen Verpflichtungen, sondern
auch über jene der von ihnen beherrschten Banken und Finanzgesellschaften
zu verlangen (E. 2).

    Art. 23ter Abs. 1 BankG. Eine Verfügung im Sinne dieser Bestimmung
kann in der Androhung des Bewilligungsentzugs nach Art. 23 quinquies
BankG bestehen. Überprüfungsbefugnis des Bundesgerichts im Rahmen einer
Verwaltungsgerichtsbeschwerde, insbesondere hinsichtlich der Auflagen,
die mit der Androhung verbunden sind (Auflage der Erzielung eines Gewinns
binnen einer verhältnismässig kurzen Frist, damit sich die Bank eine
gewinnbringende Struktur schaffe) (E. 5).

Sachverhalt

    A.- Banque commerciale S.A. exploite une banque commerciale à
Genève. Elle a un capital social de 9'000'000 de francs et comme seul
actionnaire P., citoyen israélien, avocat d'affaires, domicilié en Suisse
avec un permis d'établissement C. La banque est de ce fait considérée
comme suisse. Son conseil d'administration était formé de X., avocat
à Genève, Y., expert-comptable à Genève (décédé depuis lors), et P.,
administrateur délégué; sa direction était assurée par N., directeur
principal, et le fils de P., directeur.

    Banque commerciale (Cayman) Ltd, à George Town, Grand Cayman, Cayman
Islands, BWI, créée en 1973, a pour but l'exploitation d'une banque. Elle
a un capital autorisé de 9'000'000 de francs suisses, dont 6'000'000 de
francs suisses ont été libérés. Ses actionnaires sont, pour les deux tiers
du capital autorisé, P., et pour un tiers Banque commerciale S.A. à Genève;
les deux actionnaires ont libéré chacun la moitié du capital libéré. Le
conseil d'administration se compose de trois membres, soit P., "chairman
chief executive officer", N., "director and treasurer", et le fils de P.,
"director and secretary". Cette banque a un organe de revision conforme
à la loi du pays.

    Les deux banques entretiennent de très étroites relations d'affaires;
l'activité de la banque étrangère est dirigée pour une large part depuis
Genève.

    B.- Le 17 mars 1978, pour la première fois, la Commission fédérale
des banques (ci-après: Commission des banques, ou Commission) a édicté
des directives de consolidation qui ont fait l'objet d'une circulaire
adressée aux banques.

    Après une intervention de la Commission, Banque commerciale
S.A. s'est déclarée disposée, par lettre du 3 janvier 1979, à "réaliser
la consolidation totale de notre participation et de celle de M. P.,
ainsi que vous nous le recommandez dans votre lettre du 23 novembre 1978".

    Le 22 juin 1981, la Commission des banques proposa notamment à la
banque de soumettre les engagements consolidés du groupe au plafond
de l'art. 21 OB (répartition des risques), de lui annoncer jusqu'au
20 août 1981 les dépassements de crédits en résultant, conformément à
l'art. 21 al. 1 OB, de comptabiliser les versements de P. à la banque pour
commissions reçues par lui de ses propres clients et reversées à la banque,
sous 1.7 "Divers" du compte P.P., et de prendre les mesures nécessaires
jusqu'au 31 décembre 1982 pour que la banque ait une activité bénéficiaire.

    La banque refusa d'accéder à cette demande.

    C.- Le 4 décembre 1981, la Commission des banques a rendu la décision
suivante:

    "1. La Banque commerciale S.A., Genève, procédera au 31 décembre de
   chaque année à la consolidation globale de son bilan et de celui de la

    Banque commerciale (Cayman) Ltd.

    2. La Banque commerciale S.A., Genève, est tenue dorénavant d'observer
   l'annonce obligatoire de l'art. 21 al. 1 OB non seulement pour
   elle-même mais aussi, et ce en vertu de ce qui a été disposé sous
   chiffre 1 ci-dessus et par application analogique des directives de
   consolidation du 17 mars

    1978, pour le groupe consolidé qu'elle forme avec la Banque commerciale
   (Cayman) Ltd.

    3. OFOR S.A., Genève, est chargé de procéder à la revision des comptes
   annuels du comptoir genevois de la Banque commerciale (Cayman) Ltd
   et de vérifier si la Banque commerciale S.A., Genève, se conforme
   strictement au chiffre 2 ci-dessus de la présente décision.

    4. Une procédure de retrait de l'autorisation d'exercer une activité
   bancaire en Suisse sera ouverte contre la Banque commerciale S.A.,
   Genève, si d'ici au 31 décembre 1982 au plus tard elle ne réalise pas
   un bénéfice qui devra provenir uniquement de sa propre activité et ne
   plus résulter d'apports de fonds privés effectués par son actionnaire
   unique, P., ou d'opérations extraordinaires.

    5. La Banque commerciale S.A., Genève, comptabilisera dorénavant dans
   la rubrique 1.7 "Divers" de son compte pertes et profits les commissions
   et autres revenus que son actionnaire unique, P., lui rétrocède
   régulièrement et qui proviennent des activités que ce dernier exerce
   à titre privé."

    D.- Banque commerciale S.A. forme un recours de droit administratif
contre cette décision, dont elle demande l'annulation.

    La Commission des banques propose le rejet du recours.

    L'effet suspensif a été accordé aux chefs 1, 2 et 3 de la décision
attaquée, ainsi qu'au prononcé sur les frais.

    Le Tribunal fédéral rejette le recours et confirme la décision attaquée
dans le sens des considérants.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) aa) L'art. 12 al. 2 OB impose aux banques, aux conditions
prévues, l'obligation d'établir un bilan consolidé. La recourante conteste
à tort la légalité de cette disposition, introduite par le Conseil fédéral
le 1er décembre 1980 (ROLF 1980, p. 1814). Le Tribunal fédéral a en effet
jugé récemment (ATF 108 Ib 80 ss consid. 3) que l'art 12 al. 2 OB repose
sur une base légale suffisante (art. 4 al. 2 LB). Il n'y a pas lieu de
revenir sur cette jurisprudence.

    bb) L'art. 12 al. 2 OB impose aux banques un bilan consolidé des
sociétés exerçant une activité bancaire ou financière et des sociétés
immobilières "qu'elles dominent directement ou indirectement".

    Cette notion juridique imprécise peut être définie de façon plus
précise par l'administration, à laquelle la jurisprudence laisse une
certaine marge de décision (ATF 106 Ib 120 et les arrêts cités), dont elle
peut faire usage dans le cadre de circulaires (cf. en général ATF 103
Ia 501 et, spécialement pour la Commission des banques, ATF 103 Ib 355,
99 Ib 310).

    La loi évoque toutefois elle-même la notion de domination d'une
société à l'art 3 bis al. 3 LB, à propos de la domination étrangère d'une
banque organisée selon le droit suisse; cette disposition admet qu'il y
a domination directe ou indirecte 1o en cas de détention de plus de la
moitié du capital social, 2o en cas de détention de plus de la moitié
des voix et 3o en cas de domination d'une autre manière. Or il n'y a
pas de raison d'appliquer à ces deux dispositions une notion différente
de la domination. La définition de l'art. 3bis al. 3 LB doit donc aussi
être utilisée pour définir quand il y a domination au sens de l'art. 12
al. 2 OB.

    Dans la mesure où elles concernent le cas d'espèce, les directives de
consolidation édictées par la circulaire du 17 mars 1978 de la Commission
des banques prévoient ce qui suit:

    "Domination

    3.2.1 1) La participation est dominante dès qu'elle s'élève à plus de
   la moitié du capital social ou des voix.

    2) Dans le cas de participations indirectes, il y a domination lorsque
   la société mère détient en totalité plus de 50%, directement et/ou
   indirectement.

    3.2.2 1) Une participation est également dominante lorsque les taux
   de participation mentionnés au chiffre 3.2.1 ne sont pas atteints,
   mais que la maison mère a une influence dominante d'une autre manière.

    2) C'est par exemple le cas lorsque:

    - la maison mère par une convention (options, etc.) s'est assuré
   l'acquisition des actions manquantes pour exercer une domination,

    - la direction de la maison mère décide de la politique de la société
   fille dont elle n'a pas la majorité du capital ou des voix, ou qu'elle
   adapte les grandes questions de direction à ses impératifs."

    Ces directives tiennent compte de la définition de l'art. 3bis al. 3
LB et n'excèdent pas le pouvoir laissé sur ce point à l'administration.

    cc) L'art. 12 al. 2 OB ne précise pas non plus comment doit s'effectuer
la consolidation en cas de participation minoritaire.

    Les directives de consolidation établies par la Commission des banques
prévoient ce qui suit (chiffre 4.7):

    "Les participations minoritaires sont à traiter dans le bilan
   consolidé de telle manière que n'apparaisse que la part des actifs et
   passifs correspondant au pourcentage de la participation."

    Sur ce point non plus, la Commission n'a pas excédé sa marge de
décision, la règle adoptée n'apparaissant pas contraire au système et au
but de la consolidation.

    b) aa) En l'espèce, selon le critère des voix, Banque commerciale
S.A. et Banque commerciale (Cayman) Ltd sont l'une et l'autre directement
dominées par leur actionnaire majoritaire P., sans que la première domine
la seconde.

    Selon le critère du capital social - que l'on se fonde sur le capital
libéré ou le capital autorisé - Banque commerciale S.A. ne dominerait pas
non plus Banque commerciale (Cayman) Ltd, puisque la première ne détient
pas plus de 50% du capital de la seconde.

    Compte tenu de la marge de décision laissée à l'administration
pour préciser la notion d'influence dominante d'une autre manière et
du but poursuivi par la consolidation du bilan et des fonds propres,
on ne saurait reprocher à la Commission des banques d'avoir abusé de ce
pouvoir en admettant ici l'existence d'une influence dominante. C'est
ainsi que Banque commerciale S.A. détient déjà 50% du capital libéré
de l'autre banque, sans qu'on sache si le montant correspondant à la
différence entre le capital libéré et le capital autorisé sera jamais
appelé à contribution. Au demeurant, la dépendance de la banque de
Cayman à l'égard de la banque genevoise réside dans le fait que, pour
une large part en tout cas, la première est gérée depuis Genève, que
les organes de gestion sont pratiquement formés des mêmes personnes dans
l'une et l'autre et que les deux établissements entretiennent des liens
commerciaux très étroits. La Commission des banques pouvait considérer,
dans ces conditions, que la recourante domine l'autre société.

    bb) Le mode de consolidation demandé par la Commission des banques
n'est pas litigieux. Le 3 janvier 1979, la recourante s'était déclarée
d'accord avec une "consolidation totale" et ce point n'est pas non plus
contesté dans le recours.

    Le Tribunal fédéral peut dès lors se dispenser d'examiner si une
participation de 50% doit être tenue pour minoritaire ou majoritaire et
si, pour fixer le taux déterminant à cet égard, il faut se fonder sur le
capital libéré ou le capital autorisé.

    Le chef No 1 de la décision attaquée doit dès lors être confirmé.

Erwägung 2

    2.- a) Selon une jurisprudence récente, l'art. 21 al. 1 OB relatif à
la répartition des risques dans la banque s'applique seulement à la banque
elle-même et ne saurait, faute de base légale, être appliqué au groupe
de sociétés sur la base du bilan consolidé; en revanche, l'art. 23 bis
al. 2 LB autorise la Commission à requérir des banques des renseignements
relatifs non seulement à leurs propres engagements mais aussi à ceux des
banques et sociétés financières qu'elles contrôlent, et à demander d'être
informée lorsque les taux prévus par l'art. 21 al. 1 OB appliqués au
bilan consolidé sont atteints (ATF 108 Ib 82 ss consid. 4-5). Le Tribunal
fédéral n'a pas de raison de modifier cette jurisprudence.

    Le chef No 2 du dispositif de la décision attaquée n'est pas contraire
à cette jurisprudence et la décision attaquée doit être comprise dans
ce sens.

    b) La recourante fait valoir que la décision attaquée obligerait
la Banque commerciale (Cayman) Ltd à violer le secret bancaire qui
lui est imposé par la loi des îles Cayman, ce qui serait contraire à
la souveraineté internationale de ce pays et exposerait les organes de
ladite banque à des sanctions pénales.

    Cette objection est mal fondée. Dans la mesure où la Banque commerciale
(Cayman) Ltd exerce une activité en Suisse, elle est soumise à la
souveraineté suisse, également selon les principes du droit des gens,
et l'exercice régulier de la souveraineté suisse ne saurait violer la
souveraineté étrangère.

    Au demeurant, il appartient à une banque suisse qui choisit de diriger
un groupe de sociétés d'organiser ce groupe d'une manière lui permettant de
respecter elle-même ses obligations selon la loi suisse, en particulier
de donner à l'autorité suisse de surveillance les renseignements que
celle-ci est en droit de requérir. Cela peut impliquer qu'elle obtienne
de clients importants les autorisations nécessaires.

    La recourante ne prétend pas que, sur ce point, les délais qui lui ont
été accordés pour s'adapter aux nouvelles exigences seraient insuffisants.

    Le chef No 2 de la décision attaquée doit donc aussi être confirmé.

Erwägung 3

    3.- a) La Commission des banques et la recourante admettent, de façon
concordante, que le chef No 3 du dispositif de la décision attaquée n'est
pas limité à OFOR S.A. et que la banque pourrait choisir un autre organe
de revision bancaire. C'est donc dans ce sens que doit être comprise
cette partie de la décision attaquée.

    b) La compétence de la Commission des banques de charger un organe de
revision bancaire de reviser Banque commerciale (Cayman) Ltd et de vérifier
que la recourante exécute ses obligations se fonde sur l'art. 23bis al. 2
LB. La Commission n'a pas abusé de ce pouvoir en l'espèce.

    Le chef No 3 du dispositif de la décision attaquée doit ainsi également
être confirmé, dans le sens des considérants.

Erwägung 4

    4.- La Commission des banques motive les chefs Nos 4 et 5 du dispositif
de la décision attaquée par la considération que le compte de profits
et pertes de Banque commerciale S.A. n'a été équilibré et n'a pu être
positif, ces dernières années, que par des versements personnels à fonds
perdus de P., actionnaire unique.

    Les comptes de la banque, pour les exercices 1977 à 1980, révèlent
les montants suivants:
                               1977      1978      1979          1980
                                       (en milliers de fr.s.)
                           -------------------------------------------------
Bénéfice d'entreprise 1893 1645 1380 1409
Commissions perçues par P. et transférées à la banque -3675 -3123
-2304 -2734 Perte d'entreprise sans les commissions versées par P.
-1782 -1478 -924 -1325

    Tout en admettant ces chiffres, la recourante conteste que
les versements de P. représentent des versements à bien plaire d'un
actionnaire. Elle affirme que ces versements sont dus à la banque par
son administrateur, en vertu des liens contractuels l'unissant à elle,
parce que ces commissions auraient été réalisées par lui dans le cadre
d'une activité exercée en son propre nom mais pour le compte de la banque,
forme choisie pour des raisons de discrétion.

    A la suite de l'audience du 19 mai 1982, P. et la banque ont conclu
un contrat le 14 juin 1982 aux termes duquel, sous l'autorité et la
surveillance du conseil d'administration, P. est autorisé à conclure avec
des tiers, en son nom mais pour le compte de la banque, des affaires de
banque, de gérance et de conseil conformes au but social de la banque;
il peut à cette fin utiliser les services et les moyens techniques de
la banque; le produit de ces opérations doit revenir intégralement à
la banque.

    La Commission estime que cette convention ne supprime pas le danger
résultant du fait qu'il y a identité économique entre la banque et son
actionnaire unique et que la banque est elle-même à la merci de l'activité
de son actionnaire unique; cette situation serait malsaine pour la banque
et exposerait ses créanciers au risque d'avoir à supporter les conséquences
d'une suppression brutale de ces ressources.

Erwägung 5

    5.- La menace d'entamer ultérieurement une procédure de retrait
de l'autorisation d'exploiter une banque, pour le cas où ne seraient
pas respectées certaines charges imposées à la banque, est considérée
par la jurisprudence (ATF 103 Ib 352 s.) comme une décision ou mesure
assimilable à une décision, susceptible de faire l'objet d'un recours de
droit administratif. Il y a donc lieu d'examiner si la commination prévue
au chiffre 4 du dispositif de la décision attaquée est conforme à la loi.

    Selon l'art. 23ter al. 1 LB, lorsque la Commission des banques
a connaissance d'infractions aux prescriptions légales ou d'autres
irrégularités, elle prend les mesures nécessaires au rétablissement de
l'ordre légal. Parmi ces mesures peut figurer la menace de retirer une
autorisation (ATF 103 Ib 352 ss), notamment en application de l'art. 23
quinquies LB. Le Tribunal fédéral examine alors librement, comme une
question de droit (art. 104 lettre a OJ), s'il y a eu infraction ou
autre irrégularité, tout en laissant à la Commission une certaine marge
de décision en ce qui concerne les questions techniques qu'elle est
mieux à même d'appréhender, tandis qu'il n'examine le choix de la mesure
que dans le cadre de la violation de la loi, y compris de l'excès ou de
l'abus du pouvoir d'appréciation, mais non pas de l'erreur d'appréciation
(ATF 105 Ib 408, 103 Ib 354). Lorsque la mesure en cause menace la banque
de l'ouverture d'une procédure de retrait d'autorisation si certaines
charges ne sont pas remplies, le Tribunal fédéral doit également s'imposer
une certaine retenue, lui permettant de réserver sa décision éventuelle
ultérieure, au cas où ladite procédure serait entamée et conduirait au
retrait de l'autorisation, sur le point de savoir s'il y a violation de
la charge et si le retrait de l'autorisation se justifie au regard de
tous les éléments.

    a) Avec raison, la recourante ne conteste pas que la Commission des
banques ait eu en l'espèce un motif suffisant pour intervenir.

    En effet, une banque qui apparaît structurellement déficitaire et ne
peut subsister que par des versements supplémentaires, à fonds perdus, de
ses actionnaires présente, quant à sa fonction, une irrégularité propre
à mettre en péril les intérêts des créanciers. Il est dès lors légitime
que la Commission des banques intervienne pour tenter de mettre un terme
à cette irrégularité.

    Même si l'on suit la version des faits proposée par la banque
dans le cadre du présent recours, la présentation des comptes et des
documents donnait à tout le moins l'apparence que la banque n'avait pas
une activité bénéficiaire et ne survivait que grâce aux apports de fonds
de son actionnaire unique; on pouvait y voir une irrégularité justifiant
une mesure de la Commission des banques destinée à y porter remède.

    b) Il y a dès lors lieu d'examiner si les charges imposées à la banque
sont conformes à la loi.

    aa) La disposition litigieuse exige d'abord que la banque réalise un
bénéfice. Hormis l'exception réservée par l'art. 620 al. 3 CO, le but de
la société anonyme est économique et tend en principe à la réalisation de
bénéfices. Ces bénéfices sont propres à renforcer la situation financière
de la société, notamment en lui permettant de former des réserves légales
et volontaires. Dès lors que la loi sur les banques tend à assurer la
stabilité de celles-ci dans l'intérêt des créanciers (cf. art. 3 LB,
ATF 108 Ib 81, 106 Ib 363 et les arrêts cités), l'exigence qu'une banque
organisée en société anonyme réalise en principe des bénéfices est en
soi légitime.

    Comme toute autre entreprise économique, une banque est cependant
exposée à essuyer des pertes, pouvant se traduire par un déficit
d'exercice. Le seul fait qu'une banque (sans remplir les conditions
de l'art. 725 CO) essuie une perte - par exemple pour des raisons
conjoncturelles ou liées à de mauvaises affaires durant l'exercice - ne
saurait donc autoriser la Commission des banques à entamer une procédure
de retrait d'autorisation, s'il n'y a pas de raisons de penser que les
intérêts des créanciers en seraient anormalement mis en péril.

    La situation peut être différente si le déficit d'exercice a des causes
structurelles, propres à produire à l'avenir les mêmes effets. Dans ce
cas, ces structures déficientes peuvent, en elles-mêmes, mettre en péril
les droits des créanciers et justifier dans leur intérêt une intervention
de la Commission dans l'intérêt de ceux-ci.

    bb) La décision attaquée exige ensuite de la banque que son bénéfice
provienne "uniquement de sa propre activité". Le sens de cette disposition
apparaît surtout à la lumière des conditions suivantes, soit la non-prise
en considération d'apports de l'actionnaire unique et du fruit d'opérations
extraordinaires. On doit donc raisonnablement comprendre l'expression de
"propre activité" comme visant le fruit d'une activité bancaire exercée
dans le cadre du but statutaire de la société, sans exclure les revenus
acquis à la banque par des contrats ou par le fruit de participations
dans d'autres sociétés.

    L'exigence est en elle-même légitime, car elle tend à obtenir que la
banque ait une structure rentable.

    cc) La disposition précise encore que, pour déterminer s'il y a
bénéfice de la banque, il ne faudra pas prendre en considération des
"apports de fonds privés effectués par son actionnaire unique". Tant la
lettre de cette disposition que son contexte (cf. chiffre 5 du dispositif)
et les motifs de la décision ("versements à fonds perdus de l'actionnaire
unique") montrent que la Commission des banques vise ainsi les versements
supplémentaires d'un actionnaire à la société anonyme, justifiés par sa
qualité de sociétaire.

    Dans ce sens, cette exigence n'est qu'une précision de la précédente
et elle est tout aussi justifiée. Elle tend en effet à éviter que des
déficits réguliers d'exercice dus à une structure bancaire déficiente
ne soient masqués par des apports de fonds nouveaux de la part de
l'actionnaire unique.

    dd) Selon la décision attaquée, l'existence d'un bénéfice devrait se
déterminer en laissant de côté le fruit "d'opérations extraordinaires";
les motifs précisent: "opérations extraordinaires, qui de par leur nature
ne se répéteront pas."

    L'exigence n'apparaît justifiée que pour autant qu'elle ne soit pas
interprétée extensivement, car l'activité normale d'une banque (surtout
d'une banque d'affaires) peut également comprendre certaines opérations
commerciales sortant de l'ordinaire ou ne se répétant pas, et leur fruit
doit aussi normalement être inclus dans le compte de pertes et profits; la
règle se justifie en tant qu'elle vise des opérations anormales destinées
ou propres à masquer un déficit de la banque.

    c) Dans le choix de la mesure, la Commission des banques n'a pas
excédé son pouvoir d'appréciation ni n'en a abusé.

    Le délai au 31 décembre 1982 pour réaliser un bénéfice, imparti à la
banque par la décision du 4 décembre 1981, peut peut-être paraître court -
si les structures de la banque étaient déficientes à la base - compte tenu
du temps nécessaire pour mettre en place de nouvelles structures et du
fait que l'existence d'un bénéfice dépendra de l'activité de 1982. Mais la
Commission exige seulement "un bénéfice" sans limite quantitative, de sorte
que même un très léger bénéfice pourrait remplir cette condition. En outre,
l'expression peu précise "un bénéfice réalisé d'ici au 31 décembre 1982
au plus tard" pourra au besoin être interprétée en faveur de la banque
destinataire. Enfin, s'il devait se révéler après coup que le délai n'a
pas été suffisant, la Commission des banques pourrait en tenir compte
soit avant d'entamer la procédure de retrait, soit dans sa décision à ce
sujet. Dans ces conditions, on ne saurait admettre en l'état actuel que
le délai considéré viole le principe de la proportionnalité ou procède
d'un abus du pouvoir d'appréciation.

Erwägung 6

    6.- L'obligation imposée par le chiffre 5 à la banque de comptabiliser
sous la rubrique 1.7 "Divers" des apports à fonds perdus d'un actionnaire,
destinés à couvrir des pertes de la banque, est conforme à la loi (art. 6
LB, 23 à 65 OB) et à une jurisprudence récente (ATF 105 Ib 409 ss) qui
n'est pas contestée et qu'il n'y a pas lieu de remettre en question.

    Vu le but et les motifs de la décision, les revenus de P. provenant
"des activités que ce dernier exerce à titre privé" doivent raisonnablement
être compris comme visant effectivement des apports à fonds perdus d'un
actionnaire pour une activité exercée par lui en son nom et pour son
compte, à l'exclusion de revenus dus à la banque à raison d'une activité
exercée pour le compte de celle-ci.

    Il n'est donc pas nécessaire de décider sous quelle rubrique du compte
de pertes et profits (art. 25 OB) devraient être comptabilisés les revenus
provenant d'une activité fiduciaire de P. pour le compte de la banque.

    Le ch. 5 de la décision attaquée doit donc lui aussi être confirmé.