Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 108 IA 197



108 Ia 197

35. Arrêt de la Ire Cour civile du 10 mai 1982 dans la cause Edok S.A. et
consorts c. Hydromechaniki S.à r.l. et Eupalinos S.A., et Chambre des
recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud (recours de droit public)
Regeste

    Schiedsgerichtliches Verfahren; Konkordat über die
Schiedsgerichtsbarkeit.

    1. Ist das schiedsgerichtliche Verfahren einzustellen, wenn die
Ernennung eines Schiedsrichters beim ordentlichen Richter angefochten wird?

    2. Die Parteien haben alles zu unterlassen, was ohne zwingende
Notwendigkeit den normalen Ablauf des schiedsgerichtlichen Verfahrens
verzögern könnte.

Sachverhalt

    A.- Par contrat du 28 octobre 1968, l'Etat hellénique confia la
réalisation d'un travail public à la société Mac Donald Construction
Company, à Saint-Louis, Missouri. L'entrepreneuse sous-traita diverses
études techniques aux sociétés grecques Hydromechaniki S.à r.l. et
Eupalinos S.A. En 1972, avec l'accord de l'Etat hellénique, elle céda
son contrat à Edok S.A. et consorts.

    Le 30 novembre 1972, la société Mac Donald, partie défenderesse, et les
sociétés Hydromechaniki S.à r.l. et Eupalinos S.A., parties demanderesses,
conclurent un compromis et désignèrent un tribunal arbitral qui devait
siéger à Lausanne et était composé de MM. André Panchaud, Georges Vlachos
et Takis Economopoulos. Par avenants des 20 et 23 juin 1973, Edok S.A. et
consorts intervinrent dans l'instance aux côtés de la société défenderesse
Mac Donald.

    M. André Panchaud, président, est mort le 10 mars 1976. Par décision
prise le 29 mai 1976 sur requête des demanderesses, le Président de la
Cour de cassation grecque désigna M. Rolando Forni pour lui succéder en
qualité de surarbitre.

    Lors d'une audience du 29 avril 1977, la défenderesse et les
intervenants requirent le tribunal arbitral de surseoir à statuer et de
suspendre la procédure jusqu'à droit connu sur l'action déclaratoire qu'ils
avaient ouverte en juillet 1976 devant le Tribunal de première instance
d'Athènes. Cette action tendait à faire constater l'irrégularité de la
désignation du surarbitre subrogé, décision qui avait été prise sans que
la défenderesse et les intervenants fussent entendus. Par jugement avant
dire droit du même jour, intitulé sentence arbitrale, le tribunal arbitral
rejeta la requête, considérant que la décision du 29 mai 1976 était entrée
en force et que l'instance introduite à Athènes n'en suspendait pas les
effets. Le tribunal précisa que sa décision pouvait faire l'objet d'un
recours selon les art. 32 et 36 du concordat sur l'arbitrage. La décision
ne fut pas attaquée.

    Les arbitres rendirent une sentence partielle le 8 mai 1979, par
laquelle ils écartèrent l'application des dispositions d'un décret-loi
des 30 avril et 21 mai 1926 et déclarèrent que les prétentions
des demanderesses seraient fixées selon l'art. 700 du code civil
hellénique. Cette sentence ne fut pas attaquée.

    Par sentence du 28 octobre 1980, le tribunal arbitral condamna
solidairement la société Mac Donald et Edok S.A. et consorts à payer
46.197.025 drachmes à Hydromechaniki S.à r.l. et Eupalinos S.A., avec
intérêt. Il rejeta l'action reconventionnelle de la société Mac Donald.

    B.- Edok S.A. et consorts ont recouru contre la sentence du 28 octobre
1980. Outre divers griefs fondés sur l'art. 36 lettre f du concordat
et tirés d'une constatation arbitraire des faits ou d'une violation
manifeste du droit, les recourants ont invoqué une irrégularité dans la
constitution du tribunal arbitral, au sens de l'art. 36 lettre a. Tout en
reconnaissant qu'il appartenait aux autorités grecques de statuer sur la
régularité de la désignation du surarbitre subrogé, ils ont soutenu que
la sentence attaquée devrait être mise à néant au cas où l'action qu'ils
avaient ouverte à Athènes serait admise. Ils ont en conséquence requis la
suspension de la procédure de recours jusqu'à droit connu sur cette action.

    Par prononcé du 17 février 1981, la Chambre des recours du Tribunal
cantonal du canton de Vaud a rejeté la demande de suspension de l'instance
de recours.

    Par arrêt du 8 septembre 1981, la Chambre des recours a rejeté le
recours et mis les frais et dépens à la charge d'Edok S.A. et consorts.

    C.- Edok S.A. et consorts ont interjeté un recours de droit public
pour violation de l'art. 4 Cst. et de l'art. 36 lettre a du concordat sur
l'arbitrage. Ils concluent à l'annulation du prononcé du 17 février 1981
et de l'arrêt du 8 septembre 1981. Ils demandent au Tribunal fédéral de
renvoyer la cause au tribunal cantonal pour suspension de la procédure
cantonale de recours jusqu'à droit connu sur l'action déclaratoire qu'ils
ont ouverte à Athènes en juillet 1976.

    Les sociétés intimées, Hydromechaniki S.à r.l. et Eupalinos S.A.,
proposent le rejet du recours, avec suite de frais et dépens.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, le recours
de droit public n'est qu'une voie de cassation. Sont donc irrecevables
les conclusions des recourants qui, au-delà de l'annulation des actes
attaqués, tendent à faire renvoyer la cause à l'autorité cantonale avec
des injonctions (ATF 106 Ia 54, 106 Ia 359 et les arrêts cités).

Erwägung 2

    2.- a) Les recourants soutiennent que l'autorité cantonale a violé
l'art. 36 lettre a du concordat sur l'arbitrage dans son arrêt du 8
septembre 1981, pour avoir rejeté à tort un recours fondé sur cette
disposition. Or ils ont expressément admis en procédure cantonale qu'il
n'appartenait pas aux autorités suisses mais aux tribunaux helléniques
de statuer sur la régularité de la désignation du surarbitre subrogé,
et ils ne reprochent pas à la cour cantonale de s'être ralliée à leur
point de vue. Leur recours ne saurait donc être fondé sur l'art. 36
lettre a précité, car ils ne peuvent faire grief à l'autorité cantonale
d'avoir refusé d'examiner un moyen qui, de leur propre aveu, échappait
à sa connaissance.

    Autant qu'on peut comprendre leur pensée, les recourants reprochent
à la cour cantonale d'avoir, en statuant, rendu définitive une sentence
émanant d'un tribunal dont la composition était contestée et sera reconnue
irrégulière en cas d'admission de l'action pendante sur ce point devant
les juridictions helléniques. Cette situation, à leur avis, obligeait
tant le tribunal arbitral que l'autorité cantonale de recours à suspendre
la procédure et à surseoir à statuer jusqu'à droit connu sur l'action
susmentionnée. Il apparaît dès lors que les recourants ne se prévalent pas,
en l'état, d'une irrégularité dans la constitution du tribunal arbitral,
mais de la violation d'une règle de procédure régissant la conduite de
l'instance, au sens de l'art. 36 lettre d du concordat.

    b) L'art. 36 lettre d du concordat sur l'arbitrage permet aux parties
d'obtenir l'annulation de la sentence arbitrale lorsque le tribunal a
violé une règle impérative de procédure, au sens de l'art. 25.

    Le concordat sur l'arbitrage ne contient aucune disposition
obligeant les arbitres qui siègent en Suisse à suspendre l'instance si la
désignation de l'un d'eux fait l'objet d'une contestation pendante devant
une autorité étrangère. Les recourants n'invoquent même pas l'existence
d'une telle règle, de sorte que l'on peut se demander si leur moyen n'est
pas irrecevable, faute de toute motivation. Ils ne soutiennent pas plus
avoir passé une convention de procédure sur ce point, lequel relevait
dès lors de la décision des arbitres. Est donc manifestement dénué de
tout fondement le grief que les recourants semblent faire à l'autorité
cantonale d'avoir violé l'art. 36 du concordat en refusant d'annuler une
sentence rendue par un tribunal arbitral qui aurait dû surseoir à statuer.

    L'art. 45 du concordat laisse aux hautes parties contractantes la
compétence de régler chacune la procédure du recours en nullité et de la
demande de révision. Aucune de ses dispositions ne prévoit pour l'autorité
de recours l'obligation de surseoir à statuer jusqu'à droit connu sur une
contestation pendante devant une autorité étrangère et qui porte sur la
régularité de l'instance arbitrale. La cour cantonale n'a donc pas violé
le concordat en refusant de suspendre l'instance de recours.

Erwägung 3

    3.- Les recourants reprochent à l'autorité cantonale d'avoir appliqué
de manière insoutenable l'art. 123 du code de procédure civile vaudois et
d'être tombée dans l'arbitraire en refusant la suspension de l'instance de
recours. L'article précité dispose que le juge peut suspendre l'instruction
du procès pour un temps déterminé en cas de nécessité. Se référant à sa
jurisprudence, la cour cantonale l'a jugé inapplicable aux instances de
recours qui ne portent que sur des points de droit. Elle a considéré au
surplus que les conditions posées par la loi pour une suspension n'étaient
pas réunies en l'espèce.

    Selon la jurisprudence de la cour cantonale, la suspension de
l'instance est un acte grave et exceptionnel que ne peuvent justifier
que des motifs impérieux, la réalisation effective d'un état de nécessité
(JdT 1944 III 70, 1944 III 81). Cette pratique, qui est conforme au texte
de la loi, ne saurait être qualifiée d'arbitraire. Et la Cour pouvait
légitimement nier en l'espèce l'existence des conditions d'une suspension.

    L'un des buts de l'arbitrage est de permettre une solution rapide des
litiges qui y sont soumis (ATF 103 Ia 360). Les parties qui compromettent
sont dès lors tenues par les règles de la bonne foi d'éviter tout ce
qui pourrait retarder sans nécessité absolue le déroulement normal de
la procédure arbitrale. Il s'ensuit que les intérêts de la partie qui
s'oppose à une demande de suspension doivent en principe l'emporter sur
ceux du requérant, si ce dernier ne démontre avoir entrepris ce qui
était en son pouvoir pour prévenir ou limiter les retards inhérents
à sa démarche. Les recourants ont en l'espèce invoqué, à l'appui de
leur requête, une procédure pendante en Grèce depuis environ cinq ans,
dont l'objet apparaissait relativement limité en fait et en droit. Ils
se devaient d'établir que ce retard considérable et même insolite ne
leur était pas imputable, qu'ils avaient conduit l'instance de manière
diligente et avaient donc fait ce qu'ils pouvaient pour éviter une
suspension de la procédure arbitrale ou en limiter la durée. Or ils
n'ont fourni aucune explication ou justification sur ce point. La cour
cantonale pouvait donc, sans arbitraire, donner la priorité à l'intérêt
des intimées à faire liquider sans plus tarder un arbitrage qui avait
déjà duré plus de huit ans. Et les recourants ne démontrent pas que la
Cour ait ainsi sacrifié un intérêt public prépondérant ou méconnu les
principes fondamentaux d'une bonne administration de la justice.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours dans la mesure où il est recevable.