Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 107 IA 171



107 Ia 171

34. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 1er octobre 1981 dans
la cause Universal Oil Trade Inc. contre République islamique d'Iran
(recours de droit public) Regeste

    Arrest.

    1. Wann ist eine staatsrechtliche Beschwerde wegen Verletzung von
Art. 4 BV gegen einen Arrestbefehl zulässig (E. 2)?

    2. Wenn ein Staat als Arrestgläubiger (oder als Kläger) vor den
Gerichten eines andern Staates auftritt, verzichtet er stillschweigend auf
seine Immunität: Der schweizerische Richter, der auf ein Arrestbegehren
eines ausländischen Staates eintritt, verkennt die gerichtliche Immunität
dieses Staates demnach nicht (E. 4).

Sachverhalt

    A.- Par ordonnance du 12 mai 1981, le président de la 3e Chambre
du Tribunal de première instance de Genève a ordonné, en faveur de la
République islamique d'Iran, le séquestre de "tous titres, valeurs,
espèces, devises, accréditifs, créances, papiers-valeurs, actions,
obligations, métaux précieux, avoirs de toute nature appartenant à
Universal Oil Trade Inc., en dépôt, compte personnel, compte numéro, en
dossier ou dans un safe, ou au compte de tiers, notamment au nom ou au
chiffre de Ahmad Heidari et/ou de Ahmad Sarakbi, auprès de la Compagnie
financière méditerranéenne COFIMED S.A., 3, rue du Mont-Blanc, à Genève",
pour une créance de 106'538'736 fr., avec intérêt à 5% du 19 février 1981,
contre-valeur de 53'269'368 US $. Il s'est fondé sur l'art. 271 al. 4 LP.

    Universal Oil Trade Inc. a formé un recours de droit public, pour
arbitraire, contre cette ordonnance, dont elle demandait l'annulation. Le
Tribunal fédéral a rejeté ce recours dans la mesure où il était recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- L'intimée conclut à l'irrecevabilité du recours faute d'épuisement
des voies cantonales. Elle fait valoir que la recourante a ouvert en temps
utile une action en contestation du cas de séquestre, qu'elle a déposé
plainte à l'autorité de surveillance en matière de poursuite contre
l'exécution du séquestre par l'Office des poursuites et que les tiers
Sarakbi et Heidari ont revendiqué la propriété d'une partie des biens
séquestrés, ce qui a amené l'intimée à ouvrir contre eux des actions
en contestation de revendication au sens de l'art. 109 LP. Elle relève
encore qu'elle a intenté une poursuite en validation du séquestre et que,
devant l'opposition dont cette poursuite a été frappée, son intention est
d'ouvrir action en reconnaissance de dette dès que la suspension découlant
de l'art. 279 al. 2 in fine LP aura pris fin. Toutes ces procédures,
dit-elle, et notamment l'action en contestation du cas de séquestre,
constituent des moyens de droit cantonal qui rendent irrecevable le
recours de droit public au regard de l'art. 86 al. 2 principio OJ, seule
une violation de l'art. 4 Cst. étant invoquée par la recourante.

    a) Selon la jurisprudence, constitue une voie de droit cantonale,
avant l'épuisement de laquelle le recours de droit public pour violation de
l'art. 4 Cst. contre une ordonnance de séquestre est irrecevable au regard
des art. 86 al. 2 et 87 OJ, l'action en contestation du cas de séquestre,
mais non pas la procédure de validation du séquestre. Il en découle que,
lorsqu'il estime que le premier juge a violé l'art. 4 Cst. en admettant
arbitrairement que le créancier avait rendu vraisemblable qu'il était
au bénéfice d'une créance exigible, le débiteur est recevable à déposer
immédiatement un recours de droit public pour ce motif (ATF 97 I 683 a
et b; cf. ATF 103 Ia 496).

    En l'espèce, la recourante fait valoir trois moyens auxquels elle donne
les titres de "légitimation de la prétendue créancière", "désignation des
biens séquestrés" et "absence de créance". Ce dernier moyen consiste à
soutenir que le juge du séquestre a admis arbitrairement la vraisemblance
de la créance invoquée par l'intimée pour obtenir un séquestre. Il est
recevable selon la jurisprudence rappelée ci-dessus.

    b) Le moyen intitulé "légitimation de la prétendue créancière"
consiste à dire que l'intimée n'a pas qualité pour ester en justice devant
l'autorité genevoise, ou suisse, en raison de son immunité. Un tel moyen
se caractérise comme étant tiré de l'art. 84 lettres c et d OJ (ATF 106
Ia 145/146 consid. 2). or on peut former un recours de droit public
fondé sur l'une de ces dispositions légales sans épuisement préalable des
instances cantonales (art. 86 al. 2 et 3 OJ; ATF 106 Ia 146 consid. b
et les références; cf. ATF 82 I 82/83).

    c) Enfin, dans le moyen intitulé "désignation des biens séquestrés",
la recourante reproche au juge du séquestre d'avoir ordonné le séquestre
de biens appartenant aux tiers Sarakbi et Heidari. Un tel grief peut
faire l'objet d'une plainte à l'autorité de surveillance en matière de
poursuite contre les actes de l'office exécutant le séquestre (cf. ATF 106
III 88 et les références). Il s'agit donc de savoir si la procédure de
plainte visant l'exécution du séquestre est une voie de droit cantonale
qui doit être épuisée préalablement au recours de droit public au sens
de l'art. 87 OJ, ou si elle constitue un autre moyen de droit quelconque
permettant de soumettre la prétendue violation au Tribunal fédéral, dans
le cadre des art. 19 LP et 75 ss OJ, ce qui fermerait la voie du recours
de droit public en vertu de l'art. 84 al. 2 OJ.

    Pour trancher cette question, il faut déterminer si les deux
procédures envisagées sont indépendantes quant à leur objet, de sorte
qu'on ne saurait les considérer comme une unité au sein de laquelle une
décision ne représenterait qu'une étape sur la voie qui conduit à la
décision finale (ATF 97 I 681/682, 95 I 256 consid. 3, 94 I 368 consid. 3).

    A la lumière de ce critère, on voit que l'ordonnance de séquestre et
son exécution par l'office ont le même objet, qui est de constituer une
garantie au créancier poursuivant. Elles forment une unité, la seconde
étant l'exécution de la première. Aussi la décision de l'autorité de
surveillance qui annule l'exécution d'un séquestre enlève-t-elle par-là
même toute force exécutoire au prononcé de séquestre.

    Dès lors, le grief concernant la désignation des biens à séquestrer
dans l'ordonnance de séquestre peut être soumis au Tribunal fédéral par la
voie de la plainte à l'autorité de surveillance en matière de poursuite,
puis par la voie du recours au sens des art. 19 LP et 75 ss OJ. Le recours
de droit public soulevant un tel grief est donc irrecevable en raison de
la subsidiarité de cette voie de droit, statuée par l'art. 84 al. 2 OJ,
et non pas, comme le soutient l'intimée, en application du principe de
l'épuisement préalable des instances cantonales.

Erwägung 4

    4.- Sous le chapitre de la qualité pour agir de la prétendue
créancière, la recourante fait valoir que celle-ci est au bénéfice de
l'immunité de juridiction, de sorte qu'elle ne relève pas des tribunaux
suisses, et qu'en admettant la requête de séquestre sans examiner ce
point le premier juge a violé le principe de l'immunité de juridiction
des Etats étrangers, tombant dans l'arbitraire.

    La recourante ne démontre nullement comment la méconnaissance de
l'immunité de juridiction constituerait l'arbitraire au sens de l'art. 4
Cst. En réalité, en faisant état de l'immunité de juridiction, elle invoque
implicitement la violation de traités internationaux au sens de l'art. 84
al. 1 lettre c OJ. Il est en effet de jurisprudence que l'immunité de
juridiction des Etats étrangers constitue une règle du droit des gens
assimilable à un traité (ATF 106 Ia 146 b et les références). Le recours
de droit public fondé sur l'immunité de juridiction des Etats étrangers
est également recevable sur la base de l'art. 84 al. 1 lettre d OJ, car,
en se prévalant de son immunité, l'Etat étranger conteste la compétence
de l'autorité suisse (ATF 106 Ia 146 b et les références). Peu importe
que la recourante n'invoque pas expressément l'art. 84 al. 1 lettres c
et d OJ, dès lors que son argumentation s'y rattache.

    Toutefois, le moyen est mal fondé. En effet, contrairement aux
précédents cités, l'Etat étranger n'est, en la présente espèce,
ni le recourant ni le débiteur séquestré, mais bien le créancier
séquestrant. Sa qualité d'Etat ne le prive pas du droit d'agir en
justice comme demandeur, alors même qu'elle pourrait, le cas échéant,
le dispenser d'ester en qualité de défendeur. S'agissant de mesures de
procédure ou d'exécution dirigées contre un Etat étranger, le principe de
la territorialité et celui de la souveraineté entrent en conflit. Selon
le principe de la territorialité, tout ce qui se trouve dans l'espace
de la puissance publique de l'Etat relève de sa juridiction. Selon le
principe de la souveraineté, la puissance publique de l'un des Etats ne
peut être restreinte par celle de l'autre (ATF 104 Ia 369 b). Lorsqu'un
Etat este spontanément devant la juridiction d'un autre Etat, il se
soumet au principe de la territorialité de celui-ci par le fait même
qu'il recourt à sa juridiction. Il s'abstient par là de faire valoir sa
propre souveraineté à l'encontre de la puissance publique de l'Etat à
la juridiction duquel il recourt, renonçant implicitement à son immunité
(cf. LÉMONON, FJS 934 p. 4). Il en va ainsi notamment quand l'Etat étranger
agit comme demandeur devant les tribunaux locaux; il se soumet alors ipso
facto aux demandes reconventionnelles connexes à la demande principale
et ne peut dès lors soulever à leur encontre l'immunité de juridiction
(LÉMONON, ibidem, avec les citations de doctrine et de jurisprudence).

    Comme, en l'espèce, l'Etat iranien a lui-même saisi la juridiction
suisse en demandant le séquestre objet du présent recours, la question de
son immunité ne se posait donc pas: le juge du séquestre n'a ainsi pas
méconnu un traité ou un principe du droit des gens, ni admis à tort sa
compétence, lorsqu'il a fait droit à la demande du créancier séquestrant
qui se plaçait spontanément sous sa juridiction. Le moyen soulevé doit
donc être rejeté.