Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 106 V 219



106 V 219

49. Extrait de l'arrêt du 8 octobre 1980 dans la cause Caisse nationale
suisse d'assurance en cas d'accidents contre Allenspach ainsi que Epars
et Devaud S.A. et Cour de justice du canton de Genève Regeste

    Art. 103 lit. a OG, 48 lit. a VwVG, 120 Abs. 1 lit. a KUVG und 9 Abs. 1
lit. a VO II. Beschwerderecht des Arbeitgebers, der seinem Angestellten
den während der Krankheit zustehenden Lohn vorausbezahlt hat (Erw. 1).

    Art. 61 Abs. 1 KUVG. Zur Weiterführung der Versicherung eines
vorübergehend im Ausland beschäftigten Versicherten; Voraussetzungen
(Erw. 3).

Sachverhalt

    A.- La société Epars et Devaud S.A., qui a son siège à Genève, exploite
un bureau d'ingénieurs civils. Elle fait partie d'un groupe dénommé SEP,
qui a constitué une société FRISA avec siège à Lausanne et apparemment
en Algérie, laquelle s'est associée avec l'Etat algérien pour former en
ce pays la société SOMERI.

    Gilbert Allenspach entra le 1er mars 1972 au service du bureau Epars
et Devaud S.A., en qualité de dessinateur. Dès le 7 janvier 1974, il fut
occupé en Algérie par FRISA et SOMERI, sans cesser d'être lié par contrat
de travail à l'employeur primitif. Cette cession de main-d'oeuvre eut lieu
aux conditions suivantes: Gilbert Allenspach était placé sous la direction
de FRISA et SOMERI; FRISA lui versait en Algérie les 3/5 de son salaire;
Epars et Devaud S.A. lui en versait les 2/5 en Suisse, mais en recevait
remboursement de FRISA; sur ses versements en Suisse, Epars et Devaud
S.A. paya des primes à la Caisse nationale suisse d'assurance en cas
d'accidents; l'activité de Gilbert Allenspach en Algérie devait durer
jusqu'au 31 décembre 1975; elle fut prolongée jusqu'au 31 août 1976,
mais prit fin prématurément le 28 juin 1976. Ce jour-là, la famille
Allenspach fut victime dans son appartement de Misserghin (province
d'Oran) d'une explosion due à une fuite de gaz propane. Les blessures
subies par les quatre victimes nécessitèrent leur rapatriement et leur
hospitalisation. Une fois guéri, le chef de famille demeura au service
du bureau Epars et Devaud S.A.

    FRISA annonça aussitôt le sinistre à son assurance, la Société suisse
d'assurance contre les accidents à Winterthur, qui prit en charge le 80%
de la perte de salaire subie par Gilbert Allenspach en Algérie à partir
du 31e jour d'incapacité de travail. Epars et Devaud S.A. lui versa le
salaire payable en Suisse durant sa maladie, soit ... fr. pour juillet
et août 1976.

    Plusieurs mois plus tard, le bureau Epars et Devaud S.A. s'aperçut
de ce que ce dernier montant était resté à sa charge. Le 13 janvier 1978,
il annonça l'accident à la Caisse nationale, afin qu'elle lui remboursât
le 80% de ... fr. La caisse refusa par décision du 12 mai 1978 pour le
motif que Gilbert Allenspach, travaillant à l'étranger pour un employeur
étranger, n'était pas au bénéfice de l'assurance obligatoire suisse
au moment de l'accident. Cet acte administratif fut notifié à Gilbert
Allenspach, avec copie à Epars et Devaud S.A.

    B.- Agissant au nom de Gilbert Allenspach et du bureau d'ingénieurs
Epars et Devaud S.A., leur avocat recourut contre la décision
précitée. Fondé sur l'art. 61 al. 1 LAMA, il allégua que le sinistré
était demeuré assuré auprès de la Caisse nationale pendant son séjour en
Algérie et conclut à ce que l'intimée fût condamnée à payer aux demandeurs
... fr. avec intérêt à 5% dès le 12 mai 1978.

    La Caisse nationale admit que ses deux adversaires avaient qualité
pour recourir, mais soutint que le premier recourant n'était pas assuré
quand se produisit l'accident non professionnel du 28 juin 1976.

    Par jugement du 8 mars 1979, la Cour de justice de Genève admit le
recours et annula la décision attaquée. Selon la juridiction cantonale,
on se trouverait bien en présence d'un cas d'application de l'art. 61
al. 1 LAMA.

    C.- La Caisse nationale a formé en temps utile un recours de droit
administratif contre le jugement cantonal. Elle conclut au rétablissement
de sa décision de refus du 12 mai 1978.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- La Caisse nationale se demande si elle n'a pas eu tort d'admettre
en première instance que le bureau Epars et Devaud S.A. avait qualité pour
agir en justice contre la décision administrative contestée. Elle s'était
fondée en cela sur l'art. 48 let. a PA, aux termes duquel a qualité pour
recourir quiconque est touché par la décision et a un intérêt digne de
protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. Mais elle a constaté
ensuite, dit-elle, qu'en ce faisant elle s'était écartée de l'opinion
jusque-là reçue, qui refuse la légitimation active à l'employeur. Et de
renvoyer à MAURER (Recht und Praxis der Schweizerischen obligatorischen
Unfallversicherung, 2e édition, p. 374) et à un arrêt publié dans la
RCC 1979 p. 124. Elle ajoute cependant qu'il aurait appartenu à la Cour
de justice de statuer d'office sur la question, et laisse au Tribunal
fédéral des assurances le soin de la trancher.

    MAURER, au passage cité, interprétait l'art. 120 al. 1 let. a LAMA,
à une époque (1963) antérieure à l'entrée en vigueur de la Loi fédérale
sur la procédure administrative (1er octobre 1969). Dans le premier volume
de son "Schweizerisches Sozialversicherungsrecht" (1979), il déclare
(en citant la jurisprudence de la Cour de céans) que l'art. 103 let. a
OJ, qui ouvre la voie du recours de droit administratif à quiconque est
atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à ce
qu'elle soit annulée ou modifiée, est applicable par analogie au procès de
première instance, dans la mesure où nulle disposition du droit fédéral ne
s'en écarte expressément. Il ajoute que l'art. 48 let. a PA correspond mot
pour mot à l'art. 103 let. a OJ et ne s'applique pas non plus directement
au recours au juge de première instance en matière d'assurances sociales,
mais tout au plus par analogie (pp. 489-490 et note 1083).

    Quant à l'arrêt RCC 1979 p. 124, dont la recourante tire
argument, il déclare que l'agent d'exécution d'une mesure refusée par
l'assurance-invalidité n'a pas qualité pour recourir à la juridiction
cantonale contre ce refus. En effet, le Tribunal fédéral des assurances,
qui appliqua par analogie l'art. 103 let. a OJ, nia que ledit agent
eût un intérêt digne d'être protégé. Or on ne saurait guère comparer,
dans l'assurance-accidents, l'employeur qui a payé un salaire à son
collaborateur malade, d'une part, à l'agent d'exécution d'une mesure de
l'assurance-invalidité, d'autre part.

    Si la Caisse nationale est un établissement fédéral autonome, soumis
en principe à la Loi fédérale sur la procédure administrative (art. 41
LAMA et 1er al. 2 let. c PA), seuls les art. 34 à 38 et 61 al. 2 et 3,
concernant la notification, et l'art. 55 al. 2 et 4, concernant le retrait
de l'effet suspensif, de cette dernière s'appliquent à la procédure
devant les autorités cantonales de dernière instance qui ne statuent
pas définitivement en vertu du droit fédéral (sous réserve encore de
l'art. 97 al. 2 LAVS dans sa teneur dès le 1er janvier 1979; art. 1er
al. 3 PA). L'art. 48 let. a PA - ou son homologue l'art. 103 let. a OJ -
ne s'y applique donc que par analogie, si aucune disposition du droit
fédéral ne s'en écarte expressément. Comme les art. 120 al. 1 let. a
LAMA et 9 al. 1 let. a Ord. II sur l'assurance-accidents ne s'écartent
pas expressément des art. 48 let. a PA et 103 let. a OJ, il n'y a pas
lieu d'exclure l'employeur de l'assuré du rôle des personnes habilitées
à recourir contre les décisions de la Caisse nationale, du moins dans
des cas tels que celui qui est déféré aujourd'hui au Tribunal fédéral
des assurances. En effet, l'employeur qui a payé les primes d'assurance
et avancé le salaire d'un employé en cas d'accident est à l'évidence
touché par une décision contestant à ce dernier la qualité d'assuré et
a un intérêt digne de protection à la voir annulée (voir l'art. 324b CO).

    En définitive, la Cour de justice a eu raison d'accorder au bureau
Epars et Devaud S.A. la qualité de recourant.

Erwägung 2

    2.- ...

Erwägung 3

    3.- Aux termes de l'art. 61 al. 1 LAMA, l'assuré passagèrement
occupé à l'étranger reste au bénéfice de l'assurance quand il ne change
pas d'employeur.

    a) Suivant le Guide de l'assurance obligatoire contre les accidents,
à l'usage des chefs d'entreprises et des assurés, qu'elle a publié,
la Caisse nationale admet communément comme passager un séjour qui dure
trois ans ou moins (ch. 27 p. 14/15). En l'espèce, Gilbert Allenspach
devait travailler en Algérie du 7 janvier 1974 au 31 août 1976 mais ne
l'a fait que jusqu'au 28 juin 1976. Le caractère passager de l'occupation
n'est donc pas contestable.

    b) Reste à savoir si l'intimé, en passant de Suisse en Algérie, est
censé avoir ou n'avoir pas changé d'employeur. Les arrêts cités par les
parties ne sont guère utiles pour interpréter la proposition finale de
l'art. 61 al. 1 LAMA au regard des circonstances du cas particulier. La
doctrine ne paraît pas s'être préoccupée de cette question (MAURER,
Recht und Praxis, p. 61 ch. 2; Schweizerisches Sozialversicherungsrecht,
p. 204 let. b).

    En mai 1978, la Caisse nationale émit des "instructions concernant
l'assurance-accidents obligatoire des travailleurs occupés passagèrement à
l'étranger", qui renseignent sur sa pratique dans ce domaine, s'agissant
d'Etats - comme l'Algérie - avec lesquels la Suisse n'a pas conclu de
convention en matière de sécurité sociale. Suivant ladite pratique:

    "1.2.1. L'assurance est prolongée pour tous les séjours à l'étranger si
   les conditions suivantes sont remplies simultanément:

    - Un rapport de travail doit exister entre le travailleur et une
   entreprise soumise à l'assurance. Avant son départ à l'étranger,
   le travailleur doit avoir été occupé dans cette entreprise suisse.

    - Même pendant son activité à l'étranger - par ex. pour l'entreprise
qui
   l'envoie ou pour une de ses succursales ou encore pour un consortium
   auquel il a été "prêté" -, le travailleur doit demeurer dans un rapport
   de travail à l'égard de l'entreprise qui le dépêche et pouvoir toujours
   faire valoir un droit à un salaire envers cette dernière.

    - L'activité à l'étranger doit être de nature passagère: le séjour ne
   doit pas durer plus de 6 ans et, une fois terminée son activité à
   l'étranger, le travailleur doit reprendre en Suisse son emploi dans
   l'entreprise qui l'avait envoyé à l'étranger. Si, avant son envoi à
   l'étranger, le travailleur a son domicile en Suisse ou est frontalier,
   on suppose - pour autant qu'aucun autre arrangement n'a été conclu -
   qu'il reprendra, après son retour, son occupation dans l'entreprise
   qui l'a envoyé à l'étranger; dans les autres cas, cette reprise doit
   être convenue par écrit et être digne de foi."

    Autrement dit, pour la Caisse nationale, les mots "quand il ne change
pas d'employeur" figurant à la fin de l'art. 61 al. 1 LAMA impliquent: a)
que le travailleur ait été assuré en Suisse par un employeur assujetti
dans ce pays à l'assurance obligatoire, avant d'être envoyé par lui à
l'étranger; b) qu'après avoir achevé son stage à l'étranger, le travailleur
doive reprendre son emploi auprès de l'employeur mentionné sous let. a;
c) que, pendant son activité à l'étranger, le travailleur demeure dans un
rapport de travail à l'égard de l'entreprise qui le dépêche et puisse faire
valoir un droit à un salaire envers cette dernière, même s'il exerce cette
activité pour une succursale de l'employeur suisse ou pour un consortium
auquel celui-ci l'a prêté.

    La condition a) est remplie en l'occurrence. La condition b) est elle
aussi réalisée; elle l'eût été également si l'accident avait empêché
l'assuré de reprendre son activité en Suisse, par la suite. Quant à
la condition c), qui tend à ne pas priver de la possibilité de rester
assuré en Suisse les nombreux travailleurs détachés dans des pays dont la
législation - comme c'est le cas de l'Algérie - n'admet pas l'intervention
directe d'entreprises étrangères sur le territoire national, elle ne
saurait être interprétée de telle façon que la Caisse nationale doive
intervenir pour des sinistres intéressant des gens sur lesquels l'employeur
suisse a perdu toute influence et qu'il ne peut plus contrôler. Or, dans
la présente espèce, Gilbert Allenspach ne dépendait plus guère du bureau
Epars et Devaud S.A. pendant son séjour en Afrique du Nord. En effet, le
seul lien qu'il avait conservé avec cet employeur - bien qu'il lui garantît
son emploi pendant son stage à l'étranger - consistait en le paiement dans
notre pays de 2/5 du salaire convenu. Mais les montants payés à ce titre
étaient remboursés à Epars et Devaud S.A. par FRISA, qui apparaît bien
dès lors, avec SOMERI, avoir été l'unique employeur de l'intimé (cf. aussi
MAURER, Recht und Praxis, pp. 52 ss et la jurisprudence citée). Ces deux
dernières entreprises n'étaient pas assujetties à l'assurance-accidents
obligatoire. La troisième des conditions examinées ci-dessus n'était ainsi
pas remplie et c'est donc à tort que la Cour de justice a considéré que
Gilbert Allenspach avait qualité d'assuré le 28 juin 1976, alors qu'il
travaillait en Algérie.

Erwägung 4

    4.- La Caisse nationale paraît avoir remboursé au bureau Epars et
Devaud S.A. les primes d'assurance payées à tort.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

    Le recours est admis, le jugement attaqué étant annulé.