Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 106 V 198



106 V 198

45. Arrêt du 23 décembre 1980 dans la cause Pella contre Caisse de
compensation de la Société suisse des entrepreneurs et Tribunal des
assurances du canton de Vaud Regeste

    Art. 25 Abs. 2 AHVG.

    Der Anspruch auf die Waisenrente erlischt nicht mit der Heirat des
Bezügers (Änderung der Rechtsprechung).

Sachverhalt

    A.- Nelly Pella est veuve d'Arthur Pella, décédé le 2 décembre
1963. Suite à ce décès, les trois enfants issus du mariage des prénommés,
soit Josiane, née le 12 décembre 1947, Gérard, né le 20 septembre 1952,
et Christian, né le 5 février 1955, ont été mis au bénéfice d'une rente
d'orphelin.

    Par décision du 18 octobre 1976, la Caisse de compensation de la
Société suisse des entrepreneurs a ordonné à Nelly Pella restitution des
rentes d'orphelin versées à son fils Gérard dès le 1er janvier 1973. La
caisse a exposé qu'elle avait tout récemment appris que Gérard Pella,
lequel avait continué à bénéficier de la rente après l'âge de 18 ans
en raison du fait qu'il poursuivait ses études, s'était marié le 23
décembre 1972. Or ce changement d'état civil justifiait la suppression
de la prestation d'assurance.

    B.- Nelly Pella a recouru contre la décision administrative. Elle a
fait valoir que l'ayant droit à la rente était son fils Gérard, auquel
elle avait toujours transmis intégralement le montant de la prestation. La
restitution de rentes indûment perçues pouvait être exigée seulement de
l'ayant droit, de son représentant légal ou de ses héritiers. Si l'on
pouvait, sous certaines conditions, la demander à des tiers en main
desquels les rentes avaient été versées, aucune de ces exigences n'était
remplie en l'espèce.

    Par jugement du 6 avril 1978, le Tribunal des assurances du canton
de Vaud a rejeté le recours.

    C.- Nelly Pella interjette recours de droit administratif. Elle
soutient que la suppression de la rente est injustifiée en cas de mariage
du bénéficiaire. Elle reprend en outre son argumentation de l'instance
cantonale selon laquelle elle ne saurait être tenue - n'étant pas sujet
passif du droit litigieux - au remboursement de la prestation. Elle
conclut, principalement, à l'annulation pure et simple de la décision de
restitution et, subsidiairement, à ce que le Tribunal réforme la décision
attaquée en disant qu'elle n'est pas personnellement tenue au remboursement
des prestations litigieuses.

    La caisse de compensation et l'Office fédéral des assurances sociales
proposent le rejet du recours.

    En cours de procédure, le Tribunal de céans a interrogé l'Office
fédéral des assurances sociales plus spécialement sur la question
des conséquences et problèmes d'application d'une modification de
la jurisprudence qui tendrait à ne plus faire du mariage une cause
d'extinction des rentes d'orphelin. Dans sa réponse, l'Office fédéral des
assurances sociales exprime l'avis qu'une telle modification de la pratique
en vigueur par voie de jurisprudence serait source de difficultés d'ordre
juridique et administratif; une pareille modification serait d'autant moins
souhaitable que le législateur sera de toute façon appelé prochainement
à se prononcer sur ce point.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Est litigieuse en premier lieu la question de savoir si le
mariage de Gérard Pella devait entraîner la suppression du droit à la
rente d'orphelin dont il bénéficiait.

    Aux termes de l'art. 25 LAVS, ont droit à une rente d'orphelin simple,
sous réserve de l'art. 28 al. 1, les enfants dont le père par le sang est
décédé (al. 1). Le droit à la rente d'orphelin simple prend naissance le
premier jour du mois suivant le décès du père et s'éteint par l'ouverture
du droit à la rente d'orphelin double, par l'accomplissement de la 18e
année, ainsi que par le décès de l'orphelin. Pour les enfants qui font
un apprentissage ou des études, le droit à la rente dure jusqu'à la fin
de l'apprentissage ou des études, mais au plus tard jusqu'à l'âge de 25
ans révolus (al. 2).

    Dans un arrêt de principe, la Cour de céans a toutefois déclaré qu'une
orpheline de plus de 18 ans qui fait des études ou un apprentissage perd
son droit à la rente si elle se marie (ATFA 1965 p. 22). Le Tribunal
a par la suite déclaré cette jurisprudence applicable également en cas
de mariage de l'orphelin (ATF 97 V 178; arrêt non publié Rinaldi du 11
janvier 1974; RCC 1975 p. 532).

Erwägung 2

    2.- Appelée, dans la présente procédure, à se prononcer à nouveau sur
la question de savoir si le mariage peut constituer une cause d'extinction
de la rente d'orphelin, la Cour plénière du Tribunal fédéral des assurances
a estimé que la jurisprudence susmentionnée devait être modifiée.

    L'opinion de la Cour procède principalement de la constatation que
l'art. 25 al. 2 LAVS ne fait pas du mariage une cause d'extinction
de la rente d'orphelin. Si le Tribunal était en droit de penser, à
l'époque où la jurisprudence dont il est question a été instaurée,
qu'au regard des conceptions alors valables le droit édicté était
incomplet et qu'il y avait lieu de retenir une telle cause d'extinction,
la situation a entre-temps évolué à ce point qu'une pareille opinion
n'est aujourd'hui plus soutenable. En effet, si dans un passé encore
relativement récent le mariage impliquait, d'une façon quasi générale, que
le couple fût économiquement indépendant des parents, il en va autrement
à l'heure actuelle. Les mariages d'étudiants, par exemple, ne sont plus
exceptionnels, particulièrement parmi les étudiants issus des milieux
sociaux les moins favorisés, pour qui faire ménage commun peut représenter
une économie appréciable. Cette évolution des moeurs n'a pas échappé
au législateur, lequel, dès le 1er janvier 1978, a ancré dans la loi
(art. 277 al. 2 CC) l'obligation des parents - qui découlait auparavant
de la jurisprudence et de la doctrine - de continuer à subvenir, dans la
mesure où les circonstances permettent de l'exiger d'eux, à l'entretien
des enfants jusqu'à la fin de leur formation, même après la majorité,
que celle-ci soit acquise par l'âge ou par le mariage. Dès lors, si pour
interpréter le droit de l'AVS on s'inspire des règles du droit civil
(ATF 97 V 182), on comprend difficilement pourquoi la rente d'orphelin,
qui remplace en quelque sorte l'obligation d'entretien des parents,
devrait être supprimée en cas de mariage de l'orphelin. De plus, la
jurisprudence actuelle favorise les couples qui renoncent à se marier
pour vivre en union libre, comme l'a relevé, par exemple, la conseillère
nationale Blunschy en développant son postulat du 6 octobre 1976 (RCC
1976 p. 518) concernant la rente AVS d'orphelin (Bull. dél. CN 1976 p.
1706). Or, cela ne concorde pas avec un système juridique tout entier
fondé sur l'institution du mariage et non pas sur d'autres sortes de
communautés maritales (DESCHENAUX/TERCIER, Le mariage et le divorce,
2e éd., Berne 1980, p. 152 ss). Il s'agit, en définitive, d'adapter la
jurisprudence à cette évolution (au demeurant, le Tribunal fédéral a déjà
expressément déclaré que le sens d'une disposition légale peut changer
et justifier une modification de la jurisprudence et de l'interprétation
traditionnelle en fonction de l'évolution des moeurs; v. p.ex. ATF 105
Ib 49 consid. 5a p. 60). Dans ces circonstances, la Cour plénière a admis
qu'il n'y avait pas lieu d'instituer un système différencié tenant compte
de la situation économique des intéressés.

    Il va sans dire que ce qui vient d'être exposé concerne non seulement
la rente d'orphelin simple au sens de l'art. 25 LAVS, mais aussi la rente
d'orphelin double visée par l'art. 26 LAVS.

    La Cour de céans est consciente du fait que ce changement de
jurisprudence risque d'avoir pour conséquence qu'un assuré remplisse
simultanément les conditions mises à l'obtention de deux prestations
différentes. Ainsi, une femme faisant un apprentissage ou des études
pourrait avoir droit en principe à une rente d'orpheline et à une rente
de veuve. C'est à l'administration qu'il incombera de régler pareilles
situations. Pour ce faire, elle s'inspirera des règles sur le cumul de
prestations posées aux art. 28bis LAVS et 43 al. 1 LAI.

Erwägung 3

    3.- Vu ce qui précède, la décision réclamant restitution des rentes
d'orphelin versées après le mariage de Gérard Pella ainsi que le jugement
qui la confirme doivent être annulés. Dans ces conditions, la question
de savoir si les organes de l'assurance étaient fondés à exiger ce
remboursement de la mère du prénommé peut rester indécise.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

    Le recours de droit administratif est admis, le jugement cantonal du 6
avril 1978 et la décision administrative du 18 octobre 1976 étant annulés.