Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 106 II 180



106 II 180

37. Arrêt de la IIe Cour civile du 30 septembre 1980 dans la cause D. et O.
contre Département de justice et police du canton de Genève (recours de
droit administratif) Regeste

    Art. 58 Abs. 2 BV; Art. 101 ZGB.

    Der Entscheid, mit welchem eine kirchliche Behörde in der Schweiz
eine von spanischen Staatsangehörigen nach kanonischem Recht in Spanien
geschlossene Ehe für ungültig erklärt, wird von den schweizerischen
Behörden nicht anerkannt und erlaubt daher nicht die Eingehung einer
neuen Ehe.

Sachverhalt

    A.- G. et Lorenza D., tous deux de nationalité espagnole, se sont
mariés en Espagne le 15 octobre 1972. Les époux étaient domiciliés à
Genève. Le 19 avril 1978, le Tribunal du diocèse de Lausanne, Genève
et Fribourg a prononcé la nullité de leur mariage. Cette sentence
a été confirmée en seconde instance, le 2 juin 1978, par le Tribunal
ecclésiastique du diocèse de Sion. Le 21 juin 1978, l'official du diocèse
de Lausanne, Genève et Fribourg a déclaré que le mariage des époux
G.-D. était "considéré comme définitivement nul par l'Eglise catholique"
et que les parties en cause étaient "libres de contracter un nouveau
mariage canonique régulier devant l'Eglise catholique". Cette décision
a été annotée, en Espagne, sur l'acte de naissance de Lorenza D.

    B.- Le 2 avril 1980, le Département de justice et police du canton
de Genève, en sa qualité d'autorité de surveillance, a confirmé le
refus du Service cantonal de l'état civil d'autoriser le mariage de O.,
ressortissant suisse, avec Lorenza D. L'autorité cantonale a estimé que
Lorenza D. n'avait pas la capacité de contracter mariage, étant dans
l'impossibilité d'établir, comme l'exige l'art. 101 CC, que son précédent
mariage avait été dissous par le décès, le divorce ou un jugement en
nullité.

    C.- Lorenza D. et O. ont formé un recours de droit administratif
auprès du Tribunal fédéral. Ils demandaient que la décision attaquée fût
annulée et que l'autorisation de se marier leur fût accordée.

    Le recours a été rejeté.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Il est constant que, lorsque, comme en l'espèce, le mariage
a été conclu canoniquement, le droit espagnol prévoit la compétence
exclusive des tribunaux ecclésiastiques en matière de séparation de
corps et de nullité. Dans ces conditions, la voie de l'art. 7h LRDC
n'était pas ouverte aux époux G.-D., puisque cette disposition légale
renvoie à la loi nationale et que la loi espagnole exclut la compétence
des tribunaux civils (cf. VASSALLI, Rechtliche Überlegungen zur Frage der
Trennung bzw. der Scheidung spanischer Staatsangehöriger in der Schweiz,
RSJ 58/1962 p. 280 s.).

    Le problème qui se pose en l'espèce est dès lors de savoir si les
effets de la sentence rendue par les tribunaux ecclésiastiques en Suisse
doivent être reconnus par les autorités civiles suisses et s'ils attribuent
à Lorenza D. la capacité de contracter un nouveau mariage.

Erwägung 2

    2.- L'art. 58 al. 2 Cst. a aboli la juridiction ecclésiastique. Cette
norme constitutionnelle n'empêche pas les fidèles qui reconnaissent
la compétence des tribunaux ecclésiastiques de se soumettre à leur
juridiction, mais les décisions de ces autorités ne sauraient avoir
en Suisse aucun effet de droit civil (BURCKHARDT, Kommentar der
schweizerischen Bundesverfassung vom 29. Mai 1874, 3e éd., p. 537;
FLEINER/GIACOMETTI, Schweizerisches Bundesstaatsrecht, p. 866; JAAC
1968-1969, 34, no 1 p. 6). Notamment, sur le territoire suisse, le
domaine du mariage relève exclusivement des autorités civiles (LAMPERT,
Das schweizerische Bundesstaatsrecht, Zurich 1918, p. 74): une annulation
prononcée en Suisse par une juridiction ecclésiastique ne saurait être
invoquée devant les autorités suisses (cf. SCHNITZER, Handbuch des
internationalen Privatrechts, 4e éd., p. 371; GÖTZ, n. 8 ad art. 118
CC). Etant donné le caractère d'ordre public de l'art. 58 al. 2 Cst., il
n'est pas question d'appliquer cette norme uniquement aux ressortissants
suisses (BECK, n. 66 ad art. 7h LRDC; STAUFFER, Praxis zum NAG, n. 3 ad
art. 7 h; BÜHLER, Einleitung, n. 33 et 197; JAAC 1974, 38/I, no 35 p.
18, 1980, 44/II, no 45 p. 195).

    Le fait que le ressortissant espagnol ne peut pas ouvrir action en
Suisse en vertu de l'art. 7h LRDC ne fonde pas la compétence des tribunaux
ecclésiastiques en Suisse. Dans un tel cas, le ressortissant étranger doit
être renvoyé à agir dans son propre pays. Lorenza D. n'établit pas qu'elle
n'était pas habilitée à le faire. Une sentence espagnole d'annulation
de mariage, inscrite dans les registres de l'état civil espagnol, aurait
permis le remariage en Suisse. En effet, la réserve de l'ordre public liée
à la norme constitutionnelle de l'art. 58 al. 2 Cst. ne s'étend pas aux
actes de juridiction attribués à l'autorité ecclésiastique par le droit
d'un Etat étranger et exécutés dans ce pays (BECK, n. 66 ad art. 7h LRDC
et n. 130 ad art. 7g LRDC; SCHNITZER, op.cit., I p. 371/372; JAAC 1957,
27, no 70 p. 172/173, 1974, 38/I, no 35 p. 18).

    Au demeurant, rien n'empêcherait Lorenza D. d'ouvrir action en divorce
en Suisse contre G. L'Espagne considérant le mariage comme annulé, il
n'y aurait pas de motif d'exiger de la demanderesse qu'elle établisse que
cet Etat reconnaît le jugement de divorce suisse: la preuve requise par
l'art. 7h LRDC n'aurait plus sa raison d'être (LALIVE, Annuaire suisse de
droit international XXXII/1976 p. 178; BÜHLER, Einleitung, n. 147 et 172;
JAAC 1966-1967, 33, no 45 p. 83).

Erwägung 3

    3.- Les recourants se prévalent vainement d'une jurisprudence de la
Cour de justice du canton de Genève (SJ 1975 p. 495 s., 1976 p. 41 ss.,
1977 p. 337 ss.). Dans la mesure où cette juridiction accorde pleins effets
d'état civil à la décision de séparation d'époux espagnols prononcée par un
tribunal ecclésiastique en Suisse, elle méconnaît le principe consacré par
l'art. 58 al. 2 Cst., ne distinguant pas ce cas de celui de l'exercice, à
l'étranger, d'une compétence ecclésiastique (cf. LALIVE, loc.cit., p. 177).
Quant à la transcription de la sentence dans le registre de l'état civil
espagnol, elle n'a pas de portée constitutive: il s'agit simplement
d'un acte administratif attestant qu'il y a eu décision de l'autorité
ecclésiastique (cf. BJM 1965 p. 299; JAAC 1980, 44/II, no 45 p. 195).