Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 106 II 161



106 II 161

31. Arrêt de la Ire Cour civile du 14 juillet 1980 dans la cause UBS c.
V.(recours en réforme) Regeste

    Art. 494 Abs. 3 OR.

    Bürgschaft für eine Schuld zweier Solidarschuldner. Wird der eine
von ihnen befreit und verbleibt der andere als alleiniger Schuldner,
so bedeutet dies eine erhebliche Verminderung der Sicherheiten im Sinne
von Art. 494 Abs. 3 OR. Untergang der Bürgschaft mangels Zustimmung
des Ehegatten.

Sachverhalt

    A.- Le 23 octobre 1973, P. et Z. ont contracté solidairement un prêt
envers l'Union de banques suisses (UBS), qui leur a ouvert un crédit de
10'000 fr. pouvant être augmenté jusqu'à 12'000 fr. Par acte authentique
du même jour, V. s'est constitué caution solidaire à concurrence de 12'000
fr., et sa femme a consenti à ce cautionnement.

    En janvier 1974, les deux emprunteurs et la banque sont convenus de
la libération de P., Z. restant seul débiteur de l'UBS. V. a accepté,
le 30 janvier 1974, de maintenir son engagement malgré la libération de P.

    Z. est tombé en faillite le 10 octobre 1975, alors qu'il devait 10'621
fr. 75 à l'UBS. Celle-ci a obtenu un acte de défaut de biens de ce montant.

    Sommé de payer, V. a invoqué la nullité de l'accord du 30 janvier 1974,
faute du consentement de son épouse exigé par l'art. 494 al. 3 in fine CO.

    L'UBS a ouvert action contre V. en paiement de 10621 fr. avec intérêt
à 5% dès le 30 janvier 1976.

    Le Tribunal cantonal valaisan a rejeté l'action par jugement du 22
mai 1979.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours en réforme déposé par la
demanderesse contre ce jugement.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- La dette contractée envers la demanderesse par les deux débiteurs
solidaires a été reprise par l'un d'eux exclusivement, avec pour effet la
libération du second. Le défendeur, caution, a accepté par écrit cette
modification, conformément à l'exigence de forme posée par l'art. 493
al. 5 CO. Le consentement de son épouse, en revanche, n'a pas été demandé.

    Le Tribunal cantonal et le défendeur considèrent que cette modification
a pour effet de diminuer notablement les sûretés, au sens de l'art. 494
al. 3 CO, et que le consentement du conjoint était partant nécessaire. La
demanderesse soutient au contraire que la libération d'un codébiteur
solidaire par le créancier ne saurait être assimilée à une diminution
de sûretés à l'égard de la caution et que l'art. 494 al. 3 CO est
inapplicable.

Erwägung 2

    2.- a) L'art. 494 CO, relatif au consentement du conjoint, a été
introduit par la loi de 1941, qui a modifié le droit antérieur du
cautionnement. Historiquement, l'al. 3 de cette disposition (art. 493
al. 7 du projet) est le résultat d'un compromis entre les positions
divergentes qu'avaient adoptées les deux Chambres législatives. Alors
que le Conseil national entendait limiter l'exigence du consentement du
conjoint aux seules modifications touchant au montant de la dette et à
la transformation du cautionnement simple en cautionnement solidaire, le
Conseil des Etats voulait que ce consentement fût requis pour toutes les
modifications. La Commission du Conseil national a objecté qu'il ne serait
pas justifié d'exiger le consentement du conjoint même en cas d'allègement
de la situation de la caution. Après une première proposition, où il
était question de toute "aggravation notable" et qui n'a pas été retenue,
elle a proposé au Conseil national l'adjonction finalement adoptée,
visant la diminution notable des sûretés. Cette solution, approuvée
par le Conseil des Etats, a été présentée au Conseil national comme
permettant de tenir compte "de la plupart des modifications qui peuvent
aggraver considérablement la situation de la caution" (AEBY, rapporteur,
Bull. stén. CN 1941 p. 214 s., CE 1941 p. 139 et 175; OSER/SCHÖNENBERGER,
N. 16 in fine ad art. 494 CO; DUFT, Die Zustimmung des Ehegatten als
Gültigkeitserfordemis für die Bürgschaft, thèse Fribourg 1943, p. 44 et
49; FREY, Die Voraussetzungen der Bürgschaft unter dem Gesichtspunkt des
Bürgenschutzes, thèse Zurich 1943, p. 60).

    L'interprétation restrictive proposée par la demanderesse, selon
laquelle le terme de "sûretés", à l'art. 494 al. 3 CO, ne viserait que
les garanties accessoires fournies pour l'exécution d'une obligation,
ne trouve donc aucun appui dans les travaux préparatoires. La volonté
du législateur de couvrir, par la rédaction adoptée, la plupart des
modifications pouvant aggraver considérablement la situation de la caution
plaide en faveur d'une interprétation large de la notion de sûreté (DUFT,
op.cit., p. 49; BECK, Das neue Bürgschaftsrecht, n. 20 ad art. 494).

    b) L'interprétation littérale conduit à la même solution. La loi ne
définit pas la notion de sûretés, mais la jurisprudence et la doctrine
lui ont généralement donné un sens très large, qui ressort notamment des
définitions suivantes (rappelées par NUSSBAUMER, Subrogation et recours
de la caution lors du concours de sûretés personnelles et réelles dans
le nouveau droit du cautionnement, thèse Fribourg 1945, p. 35/36): -
l'ensemble des relations juridiques qui offrent une garantie au créancier
pour le remboursement de sa créance (ATF 26 II 251); - la notion de
sûreté embrasse toutes les garanties réelles ou personnelles procurant au
créancier plus que le droit ordinaire sur l'ensemble des biens du débiteur,
qui forment le "gage commun" de ses créanciers; il faut et il suffit qu'un
droit spécial soit attribué à un créancier particulier pour la couverture
de sa créance cautionnée, de manière que l'exercice de ce droit, dans
lequel la caution doit pouvoir être utilement subrogée, diminue la perte
résultant du fait qu'il a dû payer en lieu et place du débiteur (arrêt
du Tribunal fédéral du 23 janvier 1935 dans la cause UBS c. Vivien et
Henriod, publié in JdT 1935 p. 269); - tous les droits qui améliorent
la position du créancier par rapport aux créanciers ordinaires (BECKER,
Kommentar, n. 4 ad art. 509 CO); - tout droit lié à la créance qui,
abstraction faite de la personne du débiteur, est apte et destiné à la
couvrir (STOSS, in RJB 47 (1911) p. 259).

    Au regard de ces différentes définitions, l'existence d'une créance
contre un codébiteur solidaire doit manifestement être considérée comme
une sûreté. C'est ce qu'admettent d'ailleurs expressément plusieurs
auteurs, soit dans le cadre de l'art. 503 CO (OSER/SCHÖNENBERGER,
n. 12 ad art. 503, p. 1990; GUHL, Das neue Bürgschaftsrecht, p. 81 s.;
NUSSBAUMER, op. cit., p. 41), soit à propos de la solidarité passive,
décrite comme constituant une sûreté (VON BÜREN, Allg. Teil, p. 94, 97;
ENGEL, Traité des obligations, p. 561), soit dans la définition générale
des sûretés personnelles (PICCARD-THILO, Dictionnaire juridique, p. 539).

    Les sûretés visées à l'art. 494 al. 3 CO englobent partant les
codébiteurs solidaires et elles sont notablement diminuées en cas de
libération de l'un d'eux.

    c) Les deux auteurs qui se prononcent sur ce problème particulier
considèrent que la libération d'un débiteur solidaire, dont la dette est
reprise par l'autre, constitue une diminution des sûretés au sens de l'art.

    494 al. 3 CO (SCYBOZ, Traité de droit privé suisse, VII/2, p. 79 n. 11;
FREY, op.cit., p. 60).

    Quant à BECK (Das neue Bürgschaftsrecht, n. 19 ad art. 494), il
estime qu'il y a diminution des sûretés en cas de libération de personnes
coresponsables ("mithaftende Personen").

    La plupart des autres auteurs aboutissent à la même solution à propos
du problème du changement de débiteur et de la forme du consentement
que doit donner la caution à ce changement (art. 493 al. 5, 2e phrase,
CO). Pour eux, la ratio legis exige qu'en cas de reprise de dette et de
changement de débiteur, il y ait non seulement accord écrit de la caution,
mais aussi consentement de son conjoint (GIOVANOLI, n. 45 ad art. 493
et n. 25 ad art. 492; DUFT, op.cit., p. 51 s.; FREY, op.cit., p. 60 s;
GUHL, op.cit., p. 139, à propos des dispositions transitoires).

    Seuls OSER/SCHÖNENBERGER adoptent une position contraire (n. 19 et
23 ad art. 494), tandis que BECK (op.cit., n. 21 ad art. 494) laisse
la question ouverte. Or jurisprudence et doctrine admettent que la
situation de reprise de dette et de changement de débiteur est en tout
cas réalisée lorsque, de deux débiteurs solidaires, l'un est libéré et
l'autre reprend seul la dette (ATF 60 II 332 ss.; OSER/SCHÖNENBERGER,
H. 88 ad art. 493; BECK op.cit. n. 75 ad art. 493; SCYBOZ, op.cit.,
p. 74, n. 62). L'exigence du consentement du conjoint à côté de l'accord
écrit de la caution, s'impose à plus forte raison dans cette situation,
où l'aggravation de la position de la caution est encore plus évidente
qu'en cas de simple changement de débiteur. On peut même considérer
que l'opinion divergente émise par OSER/SCHÖNENBERGER à propos de ce
dernier cas ne s'étend pas à l'hypothèse de la libération de l'un des
deux débiteurs solidaires puisque, comme on l'a vu, ils n'hésitent pas
à assimiler la dette solidaire à une sûreté (n. 12 ad art. 503, p. 1990).

    d) L'art. 494 CO, introduit dans un but de protection de la famille
(GIOVANOLI, n. 1 ad art. 494), vise à exiger le consentement du conjoint
à l'égard de toute modification juridique aggravant la situation de la
caution et portant sur un élément dont l'existence ou l'inexistence aurait
pu déterminer le conjoint à refuser son consentement lors de la création
du cautionnement. La libération d'un débiteur solidaire et la reprise
de la dette par l'autre seul constituent une telle modification, soit
une diminution notable des sûretés au sens de l'art. 494 al. 3 CO. Elle
nécessite dès lors le consentement du conjoint de la caution.

    e) Le consentement du conjoint étant une condition de validité de la
déclaration de volonté de la caution, l'acceptation donnée par celle-ci à
la modification de sa situation n'est pas valable sans ce consentement. La
conséquence en est l'extinction du cautionnement (cf. BECK, op.cit., n. 32
et 33 ad art. 494; DUFT, op.cit., p. 53), qui est expressément prévue
à l'art. 493 al. 5 CO en cas d'absence de consentement de la caution;
l'invalidité du consentement a le même effet extinctif.

    Le cautionnement du défendeur s'étant éteint, il n'est plus obligé
envers la demanderesse. L'action doit donc être rejetée.