Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 106 IB 297



106 Ib 297

44. Arrêt de la IIe Cour de droit public du 11 juillet 1980 dans la cause
Jaroudi c. Ministère public fédéral et Département fédéral de justice et
police (opposition à une demande d'extradition) Regeste

    Auslieferung. Politische strafbare Handlung.

    1. Da der französisch-schweizerische Staatsvertrag den Begriff der
politischen strafbaren Handlung nicht definiert, wendet die Schweiz
den Begriff an, der sich aus ihrem eigenen Recht ergibt (E. 3); für die
Auslegung von Art. 10 AuslG berücksichtigt sie Art. 3 des Europäischen
Auslieferungsübereinkommens (E. 3c).

    2. Für die Beurteilung, ob eine strafbare Handlung vorwiegend
politischen Charakter hat, kommt dem Umstand, dass sie in einem Drittstaat
begangen wurde, eine gewisse Bedeutung zu (E. 3b).

    3. Begriff der strafbaren Handlung vorwiegend politischen Charakters.

    Vorwiegend politischer Charakter in casu verneint (E. 4).

    4. Auslieferung unter der Bedingung, dass der Auszuliefernde ohne
Zustimmung der Schweiz im Sinne von Art. 8 AuslG und Art. 15 EAUe an
keinen anderen Staat weitergeliefert wird (E. 6).

Sachverhalt

    A.- Le ressortissant libanais Mohsen Jaroudi, soupçonné d'avoir
participé à l'assassinat, à Cannes, d'un ressortissant syrien chef de la
section militaire de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP)
et de la Saïka, mouvement affilié à l'OLP, a été arrêté à Genève à la
requête des autorités françaises, qui ont demandé son extradition. Jaroudi
s'est opposé à l'extradition en contestant les faits et en alléguant que
l'infraction avait un caractère politique. Il a également fait état de
ses craintes d'être réextradé par la France à un autre Etat.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Les conditions de l'extradition sont fixées dans la Convention
franco-suisse du 9 juillet 1869 (RS 0.353.934.9) et par la loi fédérale
sur l'extradition aux Etats étrangers, du 22 janvier 1892 (LExtr) dans
la mesure où cela n'est point contraire à la Convention (ATF 100 Ia 410,
91 I 130).

    L'homicide volontaire, réprimé tant en droit français (art. 295 ss. CP)
qu'en droit suisse (art. 111 ss. CP), est une infraction pour laquelle
la Convention prévoit l'extradition (art. 1 ch. 1 et 5).

    En vertu de la Convention, les parties contractantes s'obligent à
accorder l'extradition aux conditions qui y sont prévues.

    Selon la jurisprudence, les ressortissants d'Etats tiers peuvent
également demander le respect de la Convention (ATF 105 Ib 213, 98 Ia 230).

Erwägung 2

    2.- En vertu d'une jurisprudence constante, la Suisse s'en tient
aux faits mentionnés dans la requête d'extradition et elle ne peut pas
refuser l'extradition au motif que les faits ne seraient pas prouvés; en
effet, il appartient à l'Etat requérant de se prononcer sur la réalité des
faits et la culpabilité du prévenu (ATF 103 Ia 629, 101 Ia 424 consid. 5,
611). Une exception à ce principe ne peut être admise que si les faits
invoqués sont manifestement inexistants ou lorsqu'il y a des lacunes ou
des contradictions dans la requête.

    En l'espèce, l'opposant connaît ces principes; il ne peut donc
prétendre que leur application devrait conduire au rejet de la requête. En
effet, en l'état de la procédure, on ne saurait en tout cas tenir pour
indubitable l'alibi invoqué par certains témoins quant à la présence de
Jaroudi à Juan-les-Pins à l'heure du crime.

Erwägung 3

    3.- Selon son art. 2 al. 1, les crimes et délits politiques sont
exceptés de la Convention. Comme celle-ci ne définit pas le délit
politique, le juge suisse applique à l'art. 2 al. 1 la notion de délit
politique telle qu'elle découle du droit suisse (ATF 90 I 299).

    a) Il résulte du texte de la Convention que celle-ci n'interdit pas
l'extradition en cas de délit politique, mais simplement qu'elle n'oblige
pas, en pareille hypothèse, à extrader selon l'art. 1.

    A supposer qu'il y ait délit politique, une extradition éventuelle
relève donc du droit interne, en l'occurrence de l'art. 10 LExtr.

    b) Le refus d'extrader pour des délits politiques purs ou relatifs
se fonde sur la considération que, dans les relations entre Etats et
spécialement entre Etats n'ayant pas les mêmes régimes politiques, ceux
qui se battent pour leurs idées politiques, fût-ce par la commission
d'infractions, méritent d'être protégés du régime de leurs adversaires
politiques victorieux, compte tenu des mobiles compréhensibles des auteurs.

    Valable dans les rapports entre l'Etat de refuge (ou de séjour) et
l'Etat dont les institutions ont été attaquées par le délit politique,
cette considération n'a plus le même poids lorsque le délit politique a
été commis sur le territoire d'un Etat tiers, qui requiert l'extradition,
comme c'est le cas en l'espèce.

    On peut donc se demander si ou dans quelle mesure, en vertu du droit
conventionnel ou du droit interne, la nature politique d'une infraction
exclut également l'extradition dans cette hypothèse.

    Selon l'arrêt non publié Bodenan du 13 août 1973, citant aussi l'ATF
54 I 213/214, la circonstance que l'Etat requérant est un Etat tiers
n'exclut pas l'application de l'art. 10 LExtr, mais elle a une importance
pour décider si, in casu, il y a délit politique relatif (arrêt cité par
FELCHLIN, Das politische Delikt, thèse Zurich 1979, p. 327). Le Tribunal
fédéral y déclare: "Refuser l'extradition aurait pour conséquence de
permettre aux factions politiques rivales de poursuivre impunément leurs
menées à l'étranger, à la seule condition que les auteurs se réfugient dans
un Etat tiers. La Suisse, qui ne tolère pas que l'on transporte sur son
territoire la lutte qui se livre par des moyens illégaux, ne saurait prêter
la main à de tels actes accomplis dans d'autres pays tiers, en donnant
asile à leurs auteurs (...). (...) l'extradition devrait néanmoins être
refusée, dans des circonstances semblables, si l'Etat requérant et celui
dont le régime est en cause étaient très proches l'un de l'autre, ou au
contraire violemment opposés l'un à l'autre du point de vue politique. Le
risque de voir le procès faussé pour des motifs d'ordre politique serait
alors tel qu'il justifierait le refus de l'extradition, par l'application
analogique de l'art. 3 al. 2 de la Convention européenne d'extradition."

    Il n'y a pas lieu en principe de s'écarter de cette jurisprudence.

    Dès lors, le fait que l'infraction a été commise sur le territoire
d'un Etat tiers qui requiert lui-même l'extradition n'exclut pas en soi
l'application de l'art. 10 LExtr.

    c) Dans l'interprétation de l'art. 10 LExtr relatif au délit politique,
il faut, selon la jurisprudence, prendre en considération l'art. 3 CEExtr
(ATF 99 Ia 555, à propos de l'art. 3 al. 2 CEExtr).

    L'art. 3 al. 3 CEExtr, inspiré par la législation belge et dont
l'insertion dans la Convention européenne a été jugée inopportune par
certains auteurs (SCHULTZ, Principes du droit d'extradition traditionnel,
dans Aspects juridiques de l'extradition entre Etats européens, Conseil
de l'Europe, Strasbourg 1970, p. 16; DUK, Principes fondamentaux de la
Convention européenne d'extradition, même publication, p. 40; FELCHLIN,
op. cit., p. 193 ss., 248), dispose que, "pour l'application de la présente
Convention, l'attentat à la vie d'un chef d'Etat ou d'un membre de sa
famille ne sera pas considéré comme infraction politique". On peut dès
lors se demander si à fortiori, au sens de la Convention, l'attentat à
la vie contre une personne ayant un rang social moins élevé ne doit pas
aussi être considéré comme un délit non politique.

    La Suisse s'est toutefois réservé, à propos de cette disposition, "le
droit de refuser aussi l'extradition en se fondant sur l'art. 3 par. 1,
lorsque celle-ci est demandée pour attentat à la vie d'un chef d'Etat
ou d'un membre de sa famille". Il résulte formellement de cette réserve
que si, en général, l'extradition est refusée en cas de délit politique
(art. 3 par. 1 CEExtr), le refus n'est plus qu'une faculté pour la Suisse
en cas d'attentat à la vie d'un chef d'Etat ou d'un membre de sa famille.

    Cette question n'a cependant pas besoin d'être tranchée dans la
présente espèce, comme on va le voir.

Erwägung 4

    4.- Selon la jurisprudence, il y a délit politique relatif si, en
raison des circonstances, notamment des mobiles et des buts de l'auteur,
les actes commis présentent un caractère politique prépondérant (ATF
101 Ia 64, 425, 605). Ont ce caractère les actes qui s'inscrivent dans
le cadre d'une lutte pour ou contre le pouvoir, ou tendent à soustraire
des personnes à un pouvoir excluant toute opposition; ces actes doivent
être en rapport étroit et direct, clair et net avec le but politique
visé. Il faut également que le mal causé soit proportionné au résultat
recherché, que les intérêts en cause soient suffisamment importants,
sinon pour justifier, du moins pour excuser légalement l'atteinte que
l'auteur a portée à certains biens juridiques (ATF 90 I 299/300). La
proportionnalité n'existe, s'agissant de l'homicide, que si celui-ci est
le seul moyen de sauvegarder les intérêts supérieurs en jeu et d'atteindre
le but politique recherché (ATF 90 I 300, 87 I 137); si les homicides
intervenus dans le cadre d'une guerre civile ou d'un conflit armé ouvert
ont été reconnus comme délits politiques (ATF 50 I 299, 49 I 260), il n'en
a pas été de même d'assassinats opérés à l'étranger contre une personne
subalterne en dehors d'un conflit armé ouvert (ATF 54 I 207); "il faut
que l'auteur du crime... ait pu espérer raisonnablement que son acte
aurait pour conséquence, au-delà du résultat immédiat, une modification
de l'organisation politique ou sociale de l'Etat... L'assassinat peut
ainsi apparaître comme la dernière ressource lorsque la personne visée
incarne pratiquement le système politique de l'Etat, en sorte qu'on puisse
penser que sa disparition entraînera une modification de ce système"
(ATF 90 I 301; cf. à ce sujet FELCHLIN, op. cit., p. 318-321, 337, 343).

    Le Tribunal fédéral examine librement le caractère politique de
l'infraction et, notamment, si les circonstances invoquées à l'appui de
l'opposition peuvent être considérées comme établies (ATF 90 I 299).

    a) On ne saurait dénier à celui qui conteste avoir commis les faits
le droit de soutenir que, s'il devait néanmoins être retenu comme étant
l'auteur de ces faits, le caractère politique de l'infraction devrait
alors exclure l'octroi de l'extradition. Une argumentation subsidiaire de
cet ordre n'est pas contraire en soi au droit de l'extradition. Du reste,
lorsqu'il doit statuer sur une opposition, le Tribunal fédéral examine
d'office si les conditions de l'extradition sont remplies, notamment s'il
y a délit politique.

    Suivant les cas, il peut cependant être difficile de déterminer
les mobiles et les buts de l'auteur supposé, lorsque celui-ci nie toute
participation à l'acte. On ne saurait retenir qu'ils sont politiques,
s'ils ne peuvent être établis ou à tout le moins rendus vraisemblables.

    b) Vu le rôle politique important joué par la victime en Syrie,
au Liban, à la tête de la Saïka et de la section militaire de l'OLP,
il apparaît hautement vraisemblable que son assassinat s'explique par le
désir d'exterminer un adversaire politique ou d'affaiblir le mouvement
à la tête duquel il se trouvait. Il semble donc s'inscrire dans le cadre
d'une lutte pour ou contre le pouvoir.

    c) Il faut cependant rechercher si l'acte a un caractère politique
prépondérant, notamment quant à sa proportionnalité avec le but recherché.

    A cet égard, vu les dénégations de l'opposant et la complexité
des intérêts en cause, le juge de l'extradition en est réduit à des
conjectures, sur la base des hypothèses évoquées par l'opposant.

    aa) Si l'attentat a été inspiré par un Etat étranger (Israël, Egypte)
dont l'auteur a épousé les conceptions, en dehors d'un conflit militaire
ouvert, l'assassinat d'un homme politique d'un Etat étranger - qui n'est
au demeurant pas un chef d'Etat - n'apparaît pas comme un moyen idoine
de mettre fin à un mouvement politique adverse; en ce cas, le caractère
de délit du droit commun apparaît prépondérant.

    bb) Si l'attentat a été provoqué par une faction politique rivale,
au sein du même mouvement politique général, l'appréciation devrait être
la même. En effet, malgré leurs rivalités, ces factions n'étaient pas en
lutte armée ouverte (selon l'opposant, elles n'osaient pas "s'affronter
directement sur le terrain", on s'était efforcé "de donner l'apparence
d'être réconciliés"); éliminer dans ces conditions un adversaire apparaît
un moyen particulièrement cruel, cynique et abject; en outre, il n'était
nullement suffisant pour mettre fin à la faction adverse comme telle
(dans cette hypothèse, il n'y a pas de raisons de penser que l'assassinat
de Mouhsen était propre à supprimer aussi le parti "syrien" au sein de
l'OLP, mais il pouvait tout au plus l'affaiblir).

    cc) Sur la base des indications fournies par l'opposant, et en
particulier des journaux libanais produits par lui, on comprendrait moins
bien le mobile d'un attentat commis par un nationaliste libanais contre
le chef de la Saïka et porte-parole du mouvement pro-syrien au Liban. Il
semble en effet que ces derniers étaient favorables au maintien du Liban
ancien, contrairement au Fath de Yasser Arafat, qui se serait prononcé
en faveur d'une partition du pays entre arabes et chrétiens.

    Dans cette hypothèse, le juge de l'extradition ne serait pas en
mesure, faute d'explications suffisantes, de saisir le mobile de l'auteur
et d'apprécier le rapport existant entre le but poursuivi et le moyen
choisi. Il ne saurait donc pas non plus retenir qu'un tel assassinat
présente un caractère politique prépondérant.

    d) Il résulte de la jurisprudence citée ci-dessus (consid. 3 lettre
b) que, parmi toutes les circonstances à prendre en considération
pour juger du caractère prépondérant de l'infraction politique ou du
délit de droit commun, le juge doit aussi attribuer un certain poids
au fait que l'extradition est requise par un Etat tiers qui n'est ni
particulièrement proche de l'Etat touché, ni particulièrement opposé à
cet Etat. Or, même si la France a joué un rôle important en Syrie et au
Liban, pendant la période dite coloniale, on ne saurait raisonnablement
retenir en l'état actuel qu'elle ait un régime politique particulièrement
proche des pays du Moyen-Orient, ni particulièrement opposé à ces pays.
Aussi, en l'occurrence, le fait que l'extradition est requise par la
France est-il propre à diminuer l'importance relative de la composante
politique de l'infraction, lorsqu'il s'agit de décider si le caractère
politique de l'infraction est prépondérant au point de justifier un refus
de l'extradition.

    Vu l'ensemble des circonstances, on ne saurait donc retenir en l'espèce
que l'infraction reprochée présente un caractère politique prépondérant.

Erwägung 5

    5.- Il résulte des explications de l'opposant qu'il craint, quoique
innocent, d'être la victime en France d'une condamnation dictée par la
raison d'Etat, en raison de la politique de rapprochement entre la France
et les Etats arabes, pratiquée par le président de la République et le
Gouvernement français.

    Il y a lieu d'examiner si l'argument est recevable et, en cas
d'affirmative, s'il est fondé.

    a) Selon l'art. 3 ch. 1 CEExtr, l'extradition n'est pas accordée
lorsqu'elle est considérée par la partie requise comme une infraction
politique ou comme un fait connexe à une telle infraction. Selon l'art. 3
ch. 2 CEExtr, la même règle s'appliquera si la partie requise a des
raisons sérieuses de croire que la demande d'extradition motivée par
une infraction de droit commun a été présentée aux fins de poursuivre
ou de punir un individu pour des considérations de race, de religion, de
nationalité ou d'opinions politiques ou que la situation de cet individu
risque d'être aggravée pour l'une ou l'autre de ces raisons.

    La France n'étant pas partie à la Convention européenne, ces
dispositions ne sont pas directement applicables dans les relations entre
la Suisse et la France. En effet, selon un principe général, appliqué par
le Tribunal fédéral, le droit conventionnel résultant du traité régissant
ces deux pays prime le droit interne.

    Cependant, ledit droit conventionnel ne définit pas le délit politique;
la Convention s'en remet, à ce sujet, à la définition qu'en donne le
droit national (cf. ci-dessus consid. 3).

    En droit interne suisse de l'extradition, la notion de délit politique
résulte de l'art. 10 LExtr. Mais la portée de cette disposition a été
étendue par la jurisprudence depuis l'arrêt Losembe (ATF 99 Ia 554,
556). Selon cet arrêt, la règle de l'art. 3 ch. 2 CEExtr "est conforme à
l'ordre juridique national et doit être respectée dans l'administration de
la justice"; une opposition reposant sur un tel motif "est donc fondée
au regard de l'art. 10 LExtr, tel qu'il doit être interprété depuis
l'approbation de la Convention européenne d'extradition".

    Il y a donc lieu, logiquement, de retenir la même règle, en application
du Traité franco-suisse d'extradition, et de considérer qu'au regard
du droit interne suisse - déterminant - l'infraction politique comprend
également l'hypothèse prévue par l'art. 3 ch. 2 CEExtr. Cette nouvelle
interprétation de l'art. 10 LExtr ne viole pas la Convention d'extradition
franco-suisse, puisque celle-ci s'en remet au droit national du soin de
définir le délit politique, que les différents droits nationaux ont des
règles assez différentes à ce sujet et que, sur le plan européen, la notion
d'"infractions politiques" (cf. titre de l'art. 3 CEExtr) a été étendue
à l'hypothèse de l'art. 3 ch. 2 CEExtr (cf. FELCHLIN, op. cit., p. 248).

    b) Sur le fond, en revanche, le juge suisse de l'extradition ne
saurait, sur la base des preuves fournies par l'opposant, admettre que la
Suisse ait de sérieuses raisons de croire que la situation de l'opposant
soit aggravée devant les juridictions françaises du fait de sa race,
de sa religion, de sa nationalité ou des ses opinions politiques.

    Le seul rapprochement politique de la France à l'égard des pays
arabes et de l'OLP ne permet raisonnablement pas de supposer que
les autorités judiciaires françaises n'appliqueraient pas la loi à un
prévenu et condamneraient un innocent uniquement à des fins politiques. La
conclusion de traités d'extradition repose sur la confiance réciproque que
se témoignent les parties contractantes; la présomption qui en résulte
ne saurait être renversée sans des raisons sérieuses, inexistantes en
l'occurrence. En effet, les conjectures de l'opposant quant à une collusion
de la France avec certains Etats du Moyen-Orient et l'OLP ayant pour objet
d'influencer la justice française dans sa recherche de la vérité et dans
l'application de la loi, ne reposent pas sur des indices suffisants.

Erwägung 6

    6.- L'opposant fait aussi état, notamment dans la lettre de son
mandataire au Tribunal fédéral du 10 juillet 1980, de ses craintes d'être
réextradé par la France à un Etat tiers; il souligne que la Syrie a pris
part à l'enquête et a eu accès au dossier, en Suisse et surtout en France,
et qu'elle a usé de pression.

    a) La Convention franco-suisse de 1869, tout en consacrant le
principe de spécialité (art. 8), ne contient pas de disposition sur la
réextradition, par l'Etat requérant à un Etat tiers, de l'individu livré
par l'Etat requis. Mais il est admis, tant en droit suisse (art. 8 LExtr)
qu'en droit français (art. 27 de la loi de 1927 sur l'extradition),
que la réextradition à un Etat tiers est exclue sans l'assentiment de
l'Etat requis et que ce principe s'applique même dans les cas régis par une
convention qui ne contient pas de clause expresse sur ce point (cf. pour le
droit suisse: ATF 3 p. 110; SCHULTZ, Das schweizerische Auslieferungsrecht,
p. 375, citant la pratique du Conseil fédéral: FF 1914 I 406 No 8;
BURCKHARDT/BOVET, Le droit fédéral suisse, vol. IV N 1804 IV p. 253 s.;
pour le droit français: JURIS-CLASSEUR, Procédure pénale, App. Art. 689-96,
5e cahier Nos 76 ss.). La Convention européenne d'extradition subordonne
aussi la réextradition à l'assentiment de la partie requise (art. 15).

    Ainsi, rien ne s'oppose en principe à ce qu'une réserve soit faite
dans ce sens à propos d'un cas de réextradition soumis à la Convention
franco-suisse de 1869.

    b) On a déjà vu ci-dessus que la notion de délit politique, non
définie par ladite convention, doit être interprétée selon le droit du
pays requis et que la notion suisse du délit politique a été élargie depuis
la ratification par la Suisse de la Convention européenne d'extradition.

    En l'espèce, on peut craindre que si Jaroudi était livré à un Etat
tiers ou à une organisation politique, sa situation pourrait être aggravée
pour des motifs d'ordre politique. Aussi une réserve dans le sens proposé
par l'opposant paraît-elle également justifiée à ce titre.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    1. Rejette l'opposition de Jaroudi et autorise son extradition à
la France.

    2. Charge le Conseil fédéral de faire une réserve pour éviter que
Jaroudi ne soit livré à un Etat tiers sans l'assentiment de la Suisse,
au sens des art. 8 LExtr et 15 CEExtr.