Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 105 IV 213



105 IV 213

56. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 16 octobre 1979 dans la cause
B. contre Ministère public du canton de Vaud (pourvoi en nullité) Regeste

    Art. 35, 36 und 37 VRV. Besondere Regeln auf Autobahnen, Verbot
des Rückwärtsfahrens und sonstwie ein Hindernis für den Verkehr auf den
Fahrbahnen zu bilden.

Sachverhalt

    A.- Le 10 janvier 1978, vers 21 h.45, un accident de circulation
s'est produit sur l'autoroute Lausanne-Genève, côté Jura, à la jonction de
Coppet. Au moment de l'accident, une nappe de fumée opaque provenant des
gadoues de Divonne-les-Bains s'étendait sur une distance d'environ 200 m.,
annihilant presque totalement la visibilité. Lorsque B. est arrivée à cet
endroit, à une vitesse de 80 km/h environ, elle s'est arrêtée aussitôt
sur la voie droite de l'autoroute. Imaginant que la fumée provenait d'un
véhicule en train de brûler à la suite d'un accident, à quelque distance
de là, elle a entrepris de faire marche arrière pour se garer sur la
bande d'arrêt d'urgence. Elle commençait cette manoeuvre lorsqu'elle
aperçut dans son rétroviseur les feux d'un véhicule se rapprochant. Elle
s'arrêta derechef et engagea la première vitesse dans l'intention de
repartir en marche avant et de se remettre en ligne droite par rapport à la
chaussée. Sa voiture fut alors atteinte par celle de K. qui, comme elle,
roulait en direction de Genève sur la voie normale et avait été surpris
par la nappe de fumée. Le choc ne fut pas violent, si bien que personne ne
fut blessé. B. et la passagère assise à côté d'elle sortirent du véhicule
endommagé et déporté vers la gauche chacune de leur côté, la première vers
la berme centrale de l'autoroute, qui était toute proche, la seconde sur
la voie normale. Alors qu'elles se trouvaient toujours sur les pistes de
circulation, la passagère de B. fut atteinte par le fourgon piloté par
G., lequel, surpris également par la fumée, avait freiné énergiquement,
mais n'avait pas réussi à éviter les deux voitures accidentées, qu'il
avait aperçues au dernier moment. Projetée contre la voiture de B., la
passagère de celle-ci subit des blessures si graves qu'elle est décédée
lors de son admission à l'Hôpital de Nyon. Quelques instants plus tard,
un quatrième véhicule vint emboutir le fourgon de G.

    B.- Le 28 février 1979, le Tribunal correctionnel du district de
Nyon a libéré K. et G. de l'accusation d'homicide par négligence. Il a
en revanche reconnu B. coupable de cette infraction et lui a infligé une
amende de 300 fr. avec délai de radiation d'un an.

    La condamnée ayant recouru, ce jugement a été confirmé par la Cour de
cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois, statuant le 18 juillet 1979.

    C.- B. se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Considérant que la
présence de la fumée sur l'autoroute constituait un cas de force majeure,
elle conteste avoir commis une faute ou avoir fait preuve d'une négligence
en relation de causalité avec la mort de sa passagère. Elle invoque en
outre, à sa décharge, la faute commise par la victime elle-même.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Chaque automobiliste doit savoir aujourd'hui qu'un véhicule ne
doit pas s'arrêter sur les pistes de circulation des autoroutes. Ainsi,
même un véhicule qui ne peut plus rouler à la vitesse de 60 km/h au moins
doit-il sortir de l'autoroute aussitôt que possible (cf. art. 35 al. 1 et
3 OVR) et ceux qui se trouvent dans l'incapacité d'avancer doivent-ils
être conduits immédiatement, pour autant que cela soit possible, sur
les accotements, soit sur la piste d'arrêt d'urgence, voire, en cas de
nécessité, sur la berme centrale, tout contre la glissière (cf. art. 36
al. 3 OCR); tel sera notamment le cas à la suite de pannes de moteur, de
lumière ou d'essence, de crevaisons, de bris de pare-brise, etc., lorsque
le conducteur ou un passager est pris d'un malaise ou lorsqu'un obstacle
interdit tout passage. Il est par ailleurs, pour les mêmes motifs, mais
aussi parce qu'il est interdit de faire route à contresens (cf. art. 37
al. 3 OCR), expressément défendu de faire marche arrière sur une autoroute
(art. 36 al. 1 OCR).

    L'observation de ces règles, qui sont des normes de sécurité, est
d'autant plus importante que l'expérience enseigne que les vitesses élevées
admises sur les autoroutes ne laissent que peu de temps aux usagers pour
réagir devant un obstacle imprévu et que leurs réactions sont souvent
dans ce cas de nature à provoquer des accidents et collisions en série,
en raison de la précipitation et de la trop grande énergie qu'ils mettent à
manoeuvrer (cf. ATF 99 IV 232). Enfin, ce qui vient d'être dit vaut d'une
manière accrue, cela tombe sous le sens, de nuit, lorsque la visibilité
est réduite et à fortiori lorsque ces deux conditions sont réunies et
que la visibilité est presque totalement annihilée, comme en l'espèce.

Erwägung 2

    2.- La recourante a grossièrement violé les règles qui précèdent. Si
l'on peut certes admettre qu'elle a été prise au dépourvu devant
l'épaisseur du nuage de fumée dans lequel elle s'est engouffrée avec son
véhicule - on note toutefois qu'en janvier une nappe de brouillard dense
ne devrait surprendre personne - il reste que si elle estimait devoir
renoncer à poursuivre sa route, il lui fallait obliquer en ralentissant
pour ne s'arrêter qu'une fois sur la piste d'arrêt d'urgence. A supposer
encore qu'elle se soit arrêtée sous le coup de la surprise, elle devait
aussitôt repartir, mais dans son sens de marche, pour mettre son véhicule
à l'abri sur le bord de la chaussée. En revanche, elle ne pouvait à aucun
prix reculer; d'abord parce qu'elle violait ainsi l'art. 36 al. 1 OCR
précité, mais surtout parce qu'elle restait de ce fait plus longtemps
qu'il n'était nécessaire sur les pistes de circulation. Le comportement
de la recourante étant de nature à provoquer des accidents et collisions
en chaîne qui, sur une autoroute, présentent toujours un risque mortel,
on doit admettre qu'il se trouve non seulement en relation de causalité
naturelle mais également en relation de causalité adéquate avec la mort
de la victime.

Erwägung 3

    3.- La recourante soutient, il est vrai, que le nuage de fumée
représentait un cas de force majeure qui interrompait l'enchaînement
des causalités. On relève que l'autorité cantonale a fait justice
de cet argument, mais, de toute façon, celui-ci était dénué de toute
pertinence. En effet, si l'on peut imaginer - et c'est ce qui s'est
vraisemblablement passé lors de la collision du 8 janvier 1978 à laquelle
se réfère la recourante - qu'une nappe de fumée ou de brouillard d'une
densité extrême surprenne par temps clair des automobilistes roulant en
file et qu'il en résulte une collision en chaîne, à la suite du brusque
ralentissement du véhicule de tête, il reste que les circonstances
de l'espèce étaient toutes différentes. La recourante n'était suivie
immédiatement de personne et rien ne l'empêchait de se garer - sans perdre
de temps mais sans hâte excessive - sur la piste d'arrêt d'urgence. Ni la
fumée, ni l'absence de visibilité en tout cas ne l'obligeaient à faire
marche arrière au mépris d'une règle de la circulation. En particulier,
s'il est vrai qu'elle a cru à un incendie, elle n'a vu ni flammes ni
lueur qui auraient pu l'engager à s'éloigner par crainte des risques
d'explosion. On ne saurait donc dire que la recourante a été contrainte
par la force majeure à agir de la façon incohérente qui a été décrite
plus haut.

Erwägung 4

    4.- Quant aux fautes qui pourraient être imputées à des tiers ou à
celle - évidente au regard de l'art. 36 al. 3 OCR - commise par la victime,
elles ne constituent évidemment pas des comportements si imprévisibles et
aberrants qu'elles soient de nature à interrompre le lien de causalité. Par
ailleurs, il n'existe aucune compensation des fautes en droit pénal (ATF
85 IV 91), chacun étant puni pour celles qu'il a commises. Dés lors que la
recourante a violé les règles de la circulation routière d'une manière et
dans des circonstances propres à provoquer mort d'homme et qu'il y a eu
accident mortel, c'est à bon droit qu'elle a été condamnée pour homicide
par négligence.

Erwägung 5

    5.- C'est en vain enfin que la recourante soutient ne plus avoir
été en état de déterminer son orientation dans l'espace. Il s'agit là
en effet d'une version des faits irrecevable en ce qu'elle ne trouve
aucun fondement dans l'arrêt attaqué (art. 277bis al. 1 PPF). De plus,
une telle allégation est invraisemblable dans la mesure où elle est
pertinente. Ce qui est reproché à la recourante, c'est son comportement
avant que son véhicule n'ait été percuté par l'arrière. Or, jusqu'à ce
moment, la recourante ne pouvait ignorer le sens dans lequel elle roulait
sur l'autoroute, soit en direction de Genève, et sa visibilité n'était
pas nulle, puisqu'elle manoeuvrait pour essayer de gagner la piste d'arrêt
d'urgence en marche arrière et qu'elle a pu voir s'approcher les feux de
la voiture qui allait percuter la sienne. Elle ne saurait donc soutenir
qu'en faisant marche arrière elle ne pouvait avoir conscience de rouler
à contresens de la circulation.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le pourvoi.