Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 105 IV 124



105 IV 124

33. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 14 juin 1979
dans la cause M. contre Ministère public du canton de Fribourg (pourvoi
en nullité) Regeste

    Qualifizierte Unzucht mit Kindern gemäss Art. 191 StGB.

    Schutzobjekt ist das besondere Vertrauens- und Abhängigkeitsverhältnis
zwischen dem Erwachsenen und dem Kinde. Qualifizierte Unzucht mit einem
Kinde entfällt, wo eine solche Beziehung weder nach Gesetz noch nach
Auffassung von Täter und Opfer gegeben ist.

Sachverhalt

    A.- M. a fait la connaissance, en mai 1978, de D., née le 28 avril
1963, laquelle faisait de l'auto-stop. Il entretint des relations sexuelles
avec elle, notamment au cours de deux week-ends qu'elle vint passer dans
son appartement.

    Désirant vivre ensemble durant les mois d'été, M. et la jeune
fille ont, d'un commun accord, échafaudé une "combine" (sic), soit
préparé un stratagème, pour que les parents de la jeune fille donnent
leur accord. Ils eurent l'idée de faire paraître une annonce dans le
journal, annonce offrant la possibilité à une jeune fille d'apprendre
le français, tout en effectuant quelques travaux de ménage et en gardant
les enfants. La famille de D. a finalement accepté qu'elle se rende chez
M. pour garder les enfants de ce dernier. D. reçut de ses parents l'ordre
de travailler et de demander une rémunération de 400 fr. La jeune fille
a alors séjourné chez M., du 24 juin au 9 août 1978, et entretint avec
lui des relations sexuelles régulières durant cette période. Pendant ce
séjour, elle a également exécuté divers travaux ménagers et s'est occupée
des enfants. Ses parents ont tout ignoré du stratagème de l'annonce,
qui avait été utilisé pour les tromper.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 191 CP, l'attentat à la pudeur des enfants est
puni plus sévèrement, lorsqu'il existe entre l'auteur et la victime
une relation particulièrement étroite, qui donne à l'auteur une
autorité particulière sur l'enfant et place celui-ci dans une certaine
dépendance. Tel est le cas, selon la loi, si la victime est l'élève,
l'apprenti ou le domestique du délinquant ou si elle est son descendant,
son enfant adoptif, l'enfant de son conjoint, son pupille ou un enfant
confié à ses soins. Le législateur considère qu'il est particulièrement
condamnable de profiter d'un tel rapport de confiance et de dépendance
pour commettre sur un enfant des actes contraires à la pudeur, ce qui
l'a amené à se montrer particulièrement sévère pour ce genre de cas.

    Tant dans le cas de l'enfant confié que dans le cas du domestique,
il faut, pour que les dispositions aggravées de l'art. 191 CP soient
applicables, que le rapport de confiance ou le rapport de travail confère
à l'auteur une autorité particulière et crée pour l'enfant une certaine
dépendance (ATF 103 IV 90, 99 IV 158). Et c'est l'abus de la relation
découlant de cette autorité, d'une part, et de cette dépendance, d'autre
part, que répriment ces dispositions (ATF 99 IV 265 consid. 6, 83 IV 73,
82 IV 192/3, 78 IV 158).

    b) Pour que ces conditions soient remplies, il faut tout d'abord,
objectivement, qu'il existe réellement entre l'auteur et la victime un
rapport fondant autorité d'une part et dépendance de l'autre. En outre,
sur le plan subjectif, il faut que l'auteur ait connaissance du rapport de
dépendance visé par la loi (cf. HOFFMANN, Das Abhängigkeitsverhältnis,
thèse Berne 1968, p. 31; WÜRGLER, Unzucht mit Kindern nach Art. 191
StGB, thèse Zurich 1976, p. 100). Cette connaissance, qui fait partie de
l'élément intentionnel de l'infraction, implique que l'auteur connaissait
ou devait connaître l'existence in casu du rapport prévu par la loi
(maître-domestique ou maître-enfant confié), ainsi que la relation
d'autorité et de dépendance qui en découle nécessairement.

    Or, en l'espèce, si l'on se réfère à la "combine" et au stratagème
de l'annonce - qui, en fait, selon la Cour cantonale, a été retenu par
les premiers juges tel qu'il avait été décrit par le recourant et par
la jeune fille - on peut déjà douter qu'il ait réellement existé entre
l'auteur et la victime des rapports du genre de ceux qui sont mentionnés
dans la loi comme condition d'application des dispositions aggravées
de l'art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al. 5 CP. On ne se trouve en effet
pas à proprement parler devant l'hypothèse d'un enfant confié, au sens
de la loi, qui suppose une relation plus étroite que celle résultant
d'un quelconque contrat de travail et plus proche de celle qui lie le
détenteur de la puissance paternelle à ses enfants. C'est en effet
sous l'angle du rapport maître-domestique, également visé par la loi,
qu'il faut se placer. L'autorisation donnée par les parents de la jeune
fille était bien une autorisation de travailler au service du recourant,
contre rémunération, durant les vacances. L'acte des parents consistait
ainsi en une autorisation, pour la jeune fille, de conclure un contrat
de travail avec le recourant. Or, en fait, puisqu'il ne s'agissait ni
pour la jeune fille, ni pour le recourant, de conclure réellement un tel
contrat, mais simplement d'une "combine" et d'un stratagème pour pouvoir
vivre ensemble, on peut sérieusement douter non seulement de la conclusion
d'un véritable contrat de travail, mais encore et surtout de l'existence
du lien de maître à domestique qui aurait pu résulter d'un tel contrat.

    Cette question peut cependant rester sans réponse, car de toute
manière l'élément subjectif touchant à ce lien fait en tout cas défaut
chez le recourant. Du fait que, pour lui - comme pour la jeune fille - il
ne s'agissait pas de créer un véritable lien de maître à domestique, mais
seulement de créer une apparence, de trouver une "combine" ou stratagème
permettant de cacher son intention et celle de sa maîtresse, qui était en
réalité de vivre ensemble durant les vacances, on ne peut ni déceler ni
retenir chez lui aucune connaissance ou conscience de l'autorité et de la
dépendance qui aurait pu résulter d'un rapport de maître à domestique. Le
fait que, durant son séjour chez lui, la jeune fille ait également exécuté
des travaux ménagers et se soit occupée des enfants ne change rien à cette
appréciation subjective, dès lors que de telles activités peuvent tout
aussi bien être liées à la vie en commun qu'à l'existence d'un contrat.

    Ainsi, faute d'élément subjectif et intentionnel touchant à la
relation maître-domestique dans laquelle sa victime aurait pu se trouver
par rapport à lui, on ne peut reprocher au recourant l'abus d'autorité
et de la dépendance de la victime qui est la condition nécessaire de
l'application de l'art. 191 ch. 1 al. 2 CP. Comme par ailleurs c'est
cet abus qui est réprimé par la loi, et non pas celui de la confiance
placée en l'auteur par les détenteurs de la puissance paternelle qui ont
été trompés et comme, ainsi que le relève justement le recourant, ce qui
est décisif, c'est la nature des rapports liant l'auteur à la victime,
et non pas les rapports de ces derniers à l'égard de tierces personnes,
le pourvoi doit être admis sur le premier moyen du recourant, et la cause
renvoyée à la Cour cantonale pour qu'elle ne fasse application que de
l'al. 1 de l'art. 191 ch. 1 CP, à l'exclusion de l'al. 2.