Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 105 II 110



105 II 110

20. Arrêt de la Ire Cour civile du 14 mars 1979 dans la cause Haeberli
contre Weston-Lewis (recours en réforme) Regeste

    Hinterlegung bei Gastwirten (Art. 487-488 OR).

    Haftung des Gastwirtes gegenüber dem Reisenden, der dem Nachtportier
gegen Empfangsschein einen Umschlag mit Geld und weiteren Wertgegenständen
übergibt.

Sachverhalt

    A.- Le 23 novembre 1974 vers 23 h., Anthony Weston-Lewis est descendu
à l'Hôtel Victoria à Lausanne. Il a été reçu par le portier de nuit
Mohamed Haha. Le personnel de la réception avait achevé son travail peu
auparavant et n'était plus présent. Weston-Lewis remit au portier contre
reçu une enveloppe dans laquelle il avait placé en sa présence 275'000
fr. belges, 2 livres sterling et 2 carnets de chèques, pour la déposer
dans le coffre-fort de l'hôtel.

    René Haeberli est le propriétaire de l'Hôtel Victoria. Lorsqu'il
y arriva, le lendemain matin, le chef de la réception l'informa que le
portier de nuit Mohamed Haha avait quitté son travail à 6 h. 30 au lieu
de 7 h. et que le client de la chambre 405 - Weston-Lewis - réclamait
l'enveloppe précitée.

    Mohamed Haha ne devait plus revenir à l'Hôtel Victoria. Haeberli
trouva dans le tiroir du portier de nuit une enveloppe portant le No 405,
ni collée, ni déchirée. Il y récupéra 2 carnets de chèques et 2 livres
sterling, mais aucune monnaie belge.

    Weston-Lewis ouvrit action le 24 mai 1975 contre Haeberli en paiement
de 20900 fr. avec intérêts à 18% dès le 24 novembre 1974. Cette somme
correspond à la valeur des billets de banque belges au jour du dépôt.

    Le 1er novembre 1978, le Tribunal cantonal du canton de Vaud a condamné
Haeberli à payer la somme réclamée en capital, mais avec intérêts à 5%
l'an dès le 24 novembre 1974.

    Haeberli a déposé un recours en réforme; il conclut au rejet de la
demande, éventuellement à la réduction de la somme due.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours et confirmé le jugement
attaqué.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le Tribunal cantonal a tenu pour constant que le demandeur avait
remis diverses valeurs dont 275'000 fr. belges au portier de nuit de
l'hôtel appartenant au défendeur et que cet employé s'était enfui le
lendemain avec cet argent. Il a jugé en droit que le défendeur avait
valablement reçu un dépôt au sens des art. 487 et 488 CO, le portier de
nuit apparaissant aux clients de l'hôtel - en l'absence du personnel de
réception - comme habile à conclure des contrats de dépôt d'hôtellerie
au nom de son employeur.

    Le Tribunal cantonal a considéré qu'il importait peu de savoir
quelles étaient les fonctions et les compétences du portier dans le
cadre de l'organisation interne de l'hôtel. A son avis, seule était
déterminante la qualité en laquelle cet employé apparaissait au client, au
regard des règles de la bonne foi. Or, ce soir-là, Mohamed Haha assurait
seul la réception et faisait office de préposé, ce qui - même vers 23
h. - est normal dans un hôtel situé près de la gare d'une ville comme
Lausanne. C'est Mohamed Haha qui a loué la chambre. Le demandeur n'avait
aucune raison de penser qu'il n'avait affaire qu'à un employé subalterne,
ne disposant d'aucune responsabilité, à l'instar d'un veilleur de nuit
ou d'un nettoyeur.

Erwägung 2

    2.- Le recourant dénie que l'intimé ait pu - du point de vue subjectif
- croire de bonne foi que le portier de nuit était réellement habile à
recevoir en dépôt des objets de valeur pour le compte de l'hôtelier. Selon
lui, dans tout hôtel du rang du Victoria, c'est-à-dire de première classe
d'après les indications affichées à la réception, on devrait distinguer
entre le concierge de jour et de nuit et la réception. La caisse de l
hôtel et le service du coffre-fort sont confiés exclusivement au personnel
administratif de la réception. Quant au portier, il ne serait, pas plus
d'ailleurs que le concierge, habilité à recevoir des dépôts au nom de
l'établissement. Cette organisation était - de l'avis du recourant -
bien connue de l'intimé qui, de par sa profession, est appelé à voyager
beaucoup. En remettant à Mohamed Haha l'enveloppe contenant des billets de
banque et d'autres valeurs, le demandeur n'aurait pas conclu un contrat
de dépôt valable avec l hôtelier et ne saurait dès lors lui demander la
réparation du dommage.

Erwägung 3

    3.- a) L'opinion du Tribunal cantonal n'est nullement contraire
au droit fédéral. L'on ne saurait prétendre que le cas d'espèce est
comparable à celui publié aux ATF 33 II 424. Dans ce précédent, le client
avait oublié des bijoux à l'hôtel et avait donné mandat au portier de
l'hôtel, à la gare au moment de son départ, de les faire suivre. Il ne
s'agissait alors évidemment pas d'un dépôt hôtelier, et le client n'avait
aucune raison de croire qu'il obligeait l'hôtelier en confiant ce mandat
au portier; le comportement de ce portier était d'ailleurs demeuré sans
incidence sur la solution du litige, puisque le portier avait transmis
le mandat à la secrétaire de l'hôtel, laquelle engageait du même coup
la responsabilité de l'hôtelier dans l'exécution de ce contrat. On ne
saurait donc inférer de ce précédent qu'un portier n'est jamais habile
à recevoir un dépôt au nom de son employeur, ni que seule la répartition
objective des charges de l'hôtel sur le plan interne serait déterminante,
à l'exclusion de l'idée subjective que peut s'en faire le client. Peu
importe que le reçu remis par Mohamed Haha ait été écrit d'une main
malhabile, qu'il ait été rédigé dans un style rudimentaire avec des
fautes d'orthographe. Ces circonstances ne suffisaient pas à faire douter
de sa qualité pour recevoir des valeurs en dépôt au nom de l'hôtelier,
et cela même compte tenu de la situation d'espèce, de la réputation de
l'hôtellerie suisse et du rang de l'hôtel Victoria.

    b) En réalité, faute d'avoir clairement dégagé sa responsabilité par
l'apposition d'une pancarte bien visible pour les clients à leur arrivée,
l'hôtelier répond envers la clientèle des éventuels abus de confiance
commis par son portier chargé de la réception nocturne.

    En l'absence d'avertissement explicite et précis, le client n'a
aucune raison de douter que l'employé qui le reçoit et qui a pouvoir de
louer les chambres au nom de l hôtelier n'est pas ipso facto également
habile à prendre en charge les valeurs que le client entend déposer. En
l'occurrence, la pancarte affichée dans la chambre 405 ne contenait aucune
limitation des compétences du portier. Elle indiquait que la direction de
l'hôtel n'était responsable que des valeurs et objets précieux déposés à
la réception contre reçu. C'est à cet avis que le demandeur s'est conformé.

Erwägung 4

    4.- Le Tribunal cantonal a considéré - au surplus - que l'hôtelier
avait l'obligation de donner aux voyageurs la faculté de déposer leurs
valeurs en lieu sûr. Or, lorsque l'intimé est descendu à l'Hôtel Victoria,
il n'y a trouvé qu'une seule personne à laquelle il a pu confier son
argent, le portier de nuit, qui lui a remis son reçu.

    Le recourant reproche au Tribunal cantonal d'avoir exagéré l'étendue
de ses obligations en jugeant que l'hôtelier doit donner aux voyageurs la
possibilité de déposer leurs valeurs à n'importe quelle heure lorsqu'il
loue une chambre. Il estime qu'il y aurait lieu d'assigner une limite
horaire à cette obligation comme le suggère BECKER (n. 3 ad art. 488 CO),
selon lequel le dépôt doit intervenir à un moment où l'hôtelier lui-même
ou son personnel habilité est de service.

    Cette question peut toutefois rester indécise puisque la motivation
principale du Tribunal cantonal résiste à l'examen et ne viole pas la
loi. Rien d'ailleurs n'empêche l'hôtelier de limiter dans le temps les
heures d'ouverture de ses coffres en le précisant clairement lors de la
conclusion du contrat hôtelier.

Erwägung 5

    5.- Dans l'hypothèse où sa responsabilité serait admise, le recourant
conteste devoir des dommages-intérêts, attendu que l'intimé aurait commis
une faute grave en confiant des valeurs au portier de l'hôtel; le lien
de causalité aurait été ainsi rompu.

    Aucun des arguments avancés en défense ne saurait infirmer
l'appréciation selon laquelle le demandeur pouvait de bonne foi penser que
l'employé qui le recevait dans cet hôtel de première classe était habilité
à recevoir un dépôt de valeurs. L'écriteau placardé dans la chambre louée
mentionnait le "dépôt fait auprès de la réception contre reçu". Il n'était
de nature ni à faire douter le demandeur de la validité du dépôt qu'il
venait d'effectuer, ni à l'inciter à le retirer immédiatement, même si
les textes français, italien et allemand de l'écriteau évoquaient un
dépôt fait à la "caisse", et non à la "réception".

Erwägung 6

    6.- Le recourant n'a pas motivé sa conclusion en réduction de
l'indemnité. Ce moyen est néanmoins recevable, du moment que les faits
invoqués à l'appui de la rupture du lien de causalité sont également
propres à justifier une réduction des dommages-intérêts. Il n'y a
toutefois pas lieu d'appliquer les art. 44, 99 al. 3 CO, aucune faute
n'étant imputable au demandeur.