Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 105 IA 51



105 Ia 51

13. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 21 mars 1979
en la cause société X. contre Président de la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud et société Y. (recours
de droit public) Regeste

    Art.4 BV. Kostenvorschuss, Frist; es ist willkürlich, die durch
Einzahlungsschein am Postschalter erfolgte Bezahlung anders zu behandeln
als die an ein Postcheckamt abgesandte Zahlungsanweisung.

Sachverhalt

    A.- Par prononcé du 30 août 1978, le président du Tribunal du district
d'Yverdon a rejeté la requête de mainlevée de l'opposition présentée par
la société X.

    Le mandataire de la société X. a recouru contre ce prononcé auprès de
la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois. Par
lettre du 13 octobre 1978, le greffier de ladite cour a fixé à la
recourante un délai échéant au 23 octobre 1978 pour déposer un mémoire et
faire l'avance de frais. A cette occasion, il l'a avisée que le recours
serait considéré comme non avenu, si cette avance n'était pas versée
dans le délai imparti. Le 23 octobre 1978, le mandataire de la société
poursuivante a fait parvenir à l'Office des chèques postaux de Lausanne
un chèque d'un montant de 390 fr., comprenant l'avance de frais par 70
fr. destinée à la Caisse du Tribunal cantonal.

    Le président de la Cour des poursuites et faillites, par arrêt du 26
octobre 1978, a considéré le recours comme non avenu et a rayé l'affaire
du rôle, motif pris que le coupon relatif à l'avance de frais portait
le sceau postal daté du 24 octobre 1978 et que l'avance n'avait donc pas
été versée dans le délai imparti.

    Par l'intermédiaire du même mandataire, la société X. forme un recours
de droit public fondé sur l'art. 4 Cst., contre l'arrêt cantonal du 26
octobre 1978.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.- Le Tribunal cantonal considère qu'une avance de frais est parvenue
à temps, lorsque le montant est payé dans le délai par bulletin de
versement au guichet postal. Se référant à cette pratique, la recourante
soutient qu'il est inconcevable de ne pas admettre que le paiement a
été effectué en temps utile lorsque le chèque postal, avec l'ordre de
virement, a été remis à la poste dans le délai, mais que le transfert du
montant sur le compte du destinataire n'a été opéré qu'après l'échéance
du délai. A ce sujet, le président de la Cour des poursuites et faillites
déclare que l'ordre de virement n'est pas assimilable à un paiement dans
un bureau de poste.

    a) Dans les cas où le Tribunal fédéral exige lui-même le paiement d'une
avance de frais, il considère que le délai est respecté, si l'ordre de
virement est donné à la poste le dernier jour du délai (ATF 96 I 472). Il
n'est pas exigé que le montant soit également viré dans le délai sur le
compte de chèques postaux du destinataire (voir arrêt non publié du 1er
novembre 1978 en la cause Vonbank). Cette jurisprudence semble correspondre
aujourd'hui à une pratique presque générale des autorités en Suisse.

    Toutefois, la décision attaquée ne peut pas être considérée
comme arbitraire pour le seul motif que le Tribunal fédéral et les
autorités d'autres cantons suivent une autre pratique. En effet, selon la
jurisprudence, une exigence de forme prévue par la loi ou introduite par
la pratique ne viole l'art. 4 Cst. que si elle ne se justifie par aucun
intérêt digne de protection et qu'elle complique sans raison objective
le droit matériel (ATF 101 Ia 114 consid. 4b, 96 I 523 consid. 4 et les
arrêts cités).

    b) L'autorité cantonale interprète différemment le cas du versement
en espèces au guichet postal, de celui où un ordre de virement est envoyé
à l'Office des chèques postaux.

    Il faut d'emblée relever que cette distinction ne tient pas
suffisamment compte du développement pris par le service des chèques
postaux ces dernières années, alors que les paiements sont de plus en plus
fréquemment opérés par virement. De toute manière, en cas de paiement au
guichet postal, comme en cas de virement, il peut très bien s'écouler
un certain laps de temps jusqu'à ce que le compte du destinataire soit
crédité du montant dû. Ce laps de temps pouvant varier suivant le travail
de l'Office des chèques postaux, on ne saurait exiger du débiteur qu'il
prévoie de donner son ordre de virement quelques jours avant l'expiration
du délai fixé pour le paiement. On ne peut pas non plus tirer argument
de l'éventualité d'un compte sans provision pour réduire à néant la
pratique des comptes de chèques postaux, puisque, dans ce cas, l'office
ne fournirait de toute façon pas l'attestation de paiement.

    Il y a lieu surtout de considérer que la distinction entre paiement
matériel et virement risque de créer chez le justiciable une confusion
contraire à la sécurité du droit. En effet, d'après l'art. 33 CPC, il
suffit que les actes écrits soient remis à un bureau de poste suisse le
dernier jour du délai au plus tard. Quand bien même la remise d'un acte
écrit et le paiement d'une avance sont deux choses différentes, il faut
tenir compte du fait que le justiciable, qui paie l'avance de frais au
moyen d'un chèque postal, n'opère pas forcément cette distinction. Il y a
ainsi tout lieu de croire qu'il suffit de remettre l'enveloppe contenant
le chèque et l'ordre de virement à la poste avant l'échéance du délai.

    Ainsi, la pratique de l'autorité cantonale, qui accepte le principe de
la date d'expédition pour les actes judiciaires, mais refuse de l'appliquer
aux avances de frais, n'est pas logique et paraît même contradictoire. Tel
est le cas également de la distinction opérée entre guichet postal et
boîte aux lettres, que le Tribunal fédéral, considérant que l'entreprise
des PTT elle-même admettait qu'un envoi lui était remis dès qu'il était
déposé dans une boîte, avait déjà jugée arbitraire (ATF 98 Ia 249).

    Dans le cas présent, il est établi que le chèque comportant l'avance
de frais a été déposé dans une boîte aux lettres le dernier jour du
délai. L'autorité cantonale est donc tombée dans l'arbitraire en jugeant
que l'avance de frais a été versée tardivement. Il y a lieu dès lors
d'admettre le recours et d'annuler la décision attaquée.