Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 104 IV 186



104 IV 186

43. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 2 mai 1978 dans la cause N.
contre Procureur général du canton de Genève Regeste

    1. Begünstigung.

    a) Der Verweisungsbruch ist ein Dauerdelikt, der nicht nur beim
Grenzübertritt, sondern solange begangen wird, als der unberechtigte
Aufenthalt andauert. Der des Landes Verwiesene wird durch jede Handlung,
die ihn während des unerlaubten Aufenthaltes begünstigt, im Sinne des
Art. 305 StGB dem Strafvollzug entzogen (E. 1).

    b) Die Beherbergung eines Verfolgten oder Verurteilten stellt eine
Begünstigung dar, die seine Verhaftung erschwert (E. 2).

    c) Die gerichtliche Landesverweisung ist eine Strafe gemäss Art. 305
StGB, nicht eine Sicherheitsmassnahme (E. 4).
   d) Art. 23 ANAG ist im Verhältnis zu Art. 305 StGB keine Sondernorm
   (E. 5).

    2. Nötigung.

    Wer über soviel Handlungsfreiheit verfügt, dass er sich den angedrohten
Nachteilen entziehen oder von aussen, z. B. der Polizei, Hilfe erlangen
kann, ist das Opfer eines psychischen Zwanges (vis compulsiva), der ein
Verschulden nicht ausschliesst, aber zur Strafmilderung gemäss Art. 64 StGB
(schwere Drohung) führen kann (E. 3).

Sachverhalt

    A.- L. a été condamné le 26 avril 1976 par la Cour correctionnelle
de Genève à un an d'emprisonnement et à 10 ans d'expulsion du territoire
suisse. Le 15 juin 1976, une interdiction d'entrée en Suisse lui a été
notifiée en outre sur l'ordre de la Police fédérale des étrangers.

    Après sa sortie de prison, le 7 juillet 1976, il s'est rendu en Espagne
avec N., sa maîtresse du moment, qui est restée une semaine avec lui dans
ce pays et qui est ensuite retournée le voir.

    Le 27 octobre 1976, L. est venu à Genève, où il a été hébergé
par N. jusqu'au 31 octobre 1976. Il l'a contrainte à l'héberger en se
livrant sur elle à des voies de fait et en la menaçant de tuer son chien,
au cas où elle le dénoncerait à l'occasion d'une sortie pour faire des
courses. N. a pris enfin un billet d'avion pour L., pour lui permettre
de quitter la Suisse. L. a été interpellé par la police le 31 octobre
1976 au bar de l'aéroport de Cointrin, mais il a pu s'échapper.

    B.- Le 24 novembre 1977, le Tribunal de police de Genève a reconnu N.
coupable d'entrave à l'action pénale (art. 305 CP) et l'a condamnée à 10
jours d'emprisonnement.

    Statuant en appel le 23 janvier 1978, la Cour de justice du canton de
Genève a confirmé le jugement du Tribunal de police, mais elle a remplacé
la peine de 10 jours d'emprisonnement par celle de 500 fr. d'amende. Elle
a mis N. au bénéfice de la circonstance atténuante d'avoir agi sous
l'empire d'une menace grave, et elle a en conséquence atténué la peine en
application de l'art. 65 CP; elle a également tenu compte du fait que la
recourante a pris un billet d'avion pour L., afin qu'il quitte la Suisse.

    C.- N. se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Elle conclut
à libération.

    Le Procureur général du canton de Genève propose de rejeter le pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) La recourante se plaint en premier lieu d'une fausse application
de l'art. 305 CP, car il n'y aurait, selon elle, pas de lien de causalité
entre l'acte qui lui est reproché et le résultat; elle ne saurait avoir
soustrait L. à l'exécution d'une peine, dès lors qu'il s'y est soustrait
lui-même en franchissant la frontière, commettant ainsi une rupture de ban
au sens de l'art. 291 CP. Elle n'a donc pas favorisé par un acte positif
l'inexécution de l'expulsion, ni contribué à ce résultat, qui était déjà
acquis au moment où L. franchissait la frontière.

    b) Ainsi que le Tribunal fédéral a eu l'occasion de le préciser encore
récemment, il faut entendre par exécution d'une peine toute décision du
juge portant exécution. On doit donc déjà considérer comme une entrave
à l'action pénale toute obstruction, totale ou partielle, à la décision
du juge portant exécution. A l'exemple des tribunaux allemands, on doit
considérer que l'infraction définie à l'art. 305 CP est consommée lorsque
la personne favorisée a été soustraite à l'exécution de sa peine même
de manière purement temporaire (ATF 99 IV 276/277). Aussi longtemps
qu'il est fait obstruction à la décision du juge, toute aide à cette
obstruction constitue un acte de soustraction. De même qu'en matière de
peine privative de liberté, il y a obstruction aussi longtemps que la
décision d'exécution n'est pas respectée et non pas seulement lorsque
la personne visée s'évade ou franchit le premier pas en se soustrayant
à l'exécution, de même en matière d'expulsion, il y a obstruction aussi
longtemps que la décision d'expulsion n'est pas respectée, et non pas
seulement au moment où l'expulsé commence à séjourner en Suisse ou y
pénètre sans droit. La rupture de ban est en effet un délit continu qui
est réalisé aussi longtemps que dure le séjour illicite en Suisse, et non
pas seulement un délit consommé par le seul passage à la frontière (HAFTER,
Bes. Teil, II, p. 744; STRATENWERTH, Bes. Teil, II, p. 593). Tout acte de
favorisation accompli durant le séjour illicite en Suisse de la personne
frappée d'expulsion constituant une soustraction au sens de l'art. 305 CP,
le premier moyen de la recourante est mal fondé.

Erwägung 2

    2.- a) La recourante soutient ensuite que l'infraction qui lui est
reprochée consisterait en une omission, celle de ne pas avoir dénoncé
L. Or une telle omission ne pourrait être retenue à sa charge que si elle
était tenue juridiquement d'accomplir l'acte omis.

    b) La recourante se méprend sur la nature de l'acte qui lui est
reproché. Il ne s'agit non pas de l'omission consistant à n'avoir pas
dénoncé L., mais de l'acte positif consistant à l'avoir hébergé. Or,
selon une jurisprudence toute récente et qui ne peut être que maintenue,
le Tribunal fédéral a confirmé que l'hébergement d'une personne poursuivie
pénalement (ou faisant l'objet d'une mesure d'exécution) constituait un
acte de soustraction, car l'aide ainsi fournie rend l'arrestation plus
difficile (ATF 103 IV 99/100).

Erwägung 3

    3.- a) La recourante fait valoir aussi qu'elle n'aurait pas agi
intentionnellement, faute d'avoir eu la volonté de commettre l'infraction.
En effet, la cour cantonale a retenu, au vu des circonstances, qu'elle
avait agi sous l'impression d'une menace grave; elle aurait dès lors agi,
selon elle, sous l'empire d'une contrainte la privant totalement de son
libre arbitre.

    b) L'acte accompli sous l'empire d'une contrainte physique ou
morale pose un problème de culpabilité (LOGOZ, Partie générale, 2e éd.,
p. 175/176). Bien qu'aucune disposition légale ne le dise expressément,
il est généralement admis en doctrine qu'aucune culpabilité n'existe
chez celui qui a agi sous l'empire d'une force irrésistible absolue
(vis absoluta), comme la contrainte physique absolue. En revanche, la
culpabilité n'est pas exclue chez celui qui a agi sous l'empire d'une force
simplement contraignante, d'une menace ou d'une violence relativement
irrésistible (vis compulsiva), comme la contrainte psychique. Dans un
tel cas, le Code pénal ne prévoit que l'application d'une circonstance
atténuante de l'art. 64 CP: l'atténuation de peine en faveur de celui qui
a agi sous l'impression d'une menace grave. On doit cependant admettre
que, dans certains cas particuliers de grave contrainte, et compte
tenu de l'âge, de l'état de santé et de la capacité de résistance de la
personne menacée, une vis compulsiva peut être qualifiée d'irrésistible
et permettre ainsi de conclure à l'absence de culpabilité (cf. HAFTER,
Allg. Teil, 2e éd., p. 179/180; SCHULTZ, Allg. Teil, 2e éd., p. 200/201,
et RPS 67 (1952), p. 356 ss.; GERMANN, Das Verbrechen, p. 175; FLURI,
Zur Lehre von der Tatverantwortung, thèse Zurich 1972, p. 173).

    In casu, toutefois, et bien que l'on puisse hésiter, les circonstances
et la nature des menaces ne permettent tout de même pas de dire que la
contrainte dont la recourante a été l'objet était irrésistible. L'autorité
cantonale a en effet constaté, et il n'y a pas à y revenir (art. 273,
al. 1, litt. b, et 277bis, al. 1, PPF), que la recourante avait conservé
une certaine liberté d'action, suffisante pour lui permettre de se
soustraire aux menaces dont elle était l'objet, voire d'obtenir une
aide extérieure, le cas échéant celle de la police. Il n'est dès lors
pas possible de considérer que la vis compulsiva a atteint un degré tel
que ses effets puissent être assimilés à une vis absoluta excluant toute
culpabilité.

    Ce moyen doit donc aussi être rejeté.

Erwägung 4

    4.- a) La recourante fait valoir encore que l'expulsion judiciaire,
dont L. a été l'objet, est une mesure de sûreté. Bien que le Code pénal
la fasse figurer dans les peines accessoires, l'expulsion n'en serait
pas moins, dans son principe, en raison de son but qui est d'éviter la
commission en Suisse de nouveaux délits, une mesure de sûreté. Dès lors,
une telle mesure n'étant pas mentionnée à l'art. 305 CP, cette disposition
ne serait pas applicable en cas de soustraction à une expulsion.

    b) On doit relever que, par "l'exécution d'une peine" (Strafvollzug),
l'art. 305 CP vise aussi bien la peine principale que les peines
accessoires prévues par le Code pénal. Cette interprétation ressort
tant de la systématique du code que des travaux préparatoires et de la
doctrine unanime (Travaux préparatoires, Prot. V, GAUTIER, p. 247/248;
LOGOZ, Partie spéciale, II, p. 717; HAFTER, Bes. Teil, II, p. 742/743;
STRATENWERTH, Bes. Teil, II, p. 620; BRÜHWILER, Die Begünstigung, thèse
Fribourg 1942, p. 48; BETTENHAUSEN, Begünstigung im schweiz. Strafrecht,
thèse Bâle 1970, p. 13). Aucune de ces sources ne réserve une place
particulière à l'expulsion; elles la mentionnent même expressément au
nombre des peines visées par l'art. 305 CP.

    Il importe peu que, techniquement, plusieurs auteurs considèrent
que l'expulsion est, dans son principe, moins une peine qu'une mesure de
sûreté. Ce qui est essentiel, c'est que, systématiquement, le législateur
a délibérément introduit l'expulsion dans les peines accessoires, avec
toutes les conséquences attachées à une telle classification: notamment
l'application des art. 63 et 41 CP (cf. ATF 94 IV 103, consid. 2). Le
fait que les auteurs ne s'accordent pas sur la définition des peines
accessoires et principales (et des mesures de sûreté) est d'ailleurs une
raison supplémentaire de s'en tenir à la classification légale (cf. ATF
86 IV 235).

    L'entrave à l'exécution de l'expulsion judiciaire est donc bien visée
par l'art. 305 CP.

Erwägung 5

    5.- a) La recourante soutient enfin que l'acte d'hébergement qui lui
est reproché est non seulement visé par l'art. 305 CP, mais également
par l'art. 23 de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers
(LSEE). Elle fait valoir alors que la règle spéciale de l'art. 23 LSEE
devrait l'emporter sur celle de l'art. 305 CP. Elle devrait l'emporter
non seulement au titre de loi spéciale, mais également parce qu'elle
constitue une "lex mitior".

    b) Contrairement à ce que pense la recourante, la jurisprudence a
récemment eu l'occasion de se prononcer sur ce point. Il a été jugé en
effet, à propos de la rupture de ban - à savoir l'insoumission du condamné
à une décision d'expulsion prononcée par le juge ou par une autorité
compétente - que l'art. 23 LSEE ne se présente pas comme une disposition
spéciale au regard de l'art. 291 CP. La disposition du Code pénal punit
en effet celui qui ne se conforme pas à une décision d'expulsion, tandis
que l'art. 23, al. 1, LSEE punit d'une manière générale celui qui entre ou
réside illégalement en Suisse. C'est ainsi la disposition de la LSEE qui a
un caractère subsidiaire par rapport aux dispositions du Code pénal en la
matière, et non l'inverse (ATF 100 IV 245/246, consid. 1; cf. TRAUTWETTER,
Die Ausweisung von Ausländern durch den Richter, p. 92/93, n. 1).

    Ce qui vaut pour la rupture de ban imputable à l'expulsé vaut également
pour les actes de favorisation commis par les tiers. Ainsi l'art. 305 CP,
comme l'art. 291 CP, doit être considéré comme lex specialis par rapport
à l'art. 23 LSEE.

    Le dernier moyen de la recourante étant également mal fondé, le
pourvoi doit être rejeté.