Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 103 II 321



103 II 321

52. Arrêt de la IIe Cour civile du 15 décembre 1977 dans la cause Ferré
contre Droz et Obermeier Regeste

    Beerbung einer in Frankreich wohnhaft gewesenen und dort verstorbenen
Genferin. Pflichtteilsrecht der Geschwister und ihrer Nachkommen.
Art. 472 ZGB, Art. 59 Abs. 2 SchlT, Art. 5 des Vertrages zwischen der
Schweiz und Frankreich über den Gerichtsstand und die Vollziehung von
Urteilen in Zivilsachen vom 15. Juni 1869.

    1. Wenn hinsichtlich der Beerbung eines Schweizers mit letztem
Wohnsitz im Ausland das schweizerische Recht anwendbar ist, beurteilt
sich das Pflichtteilsrecht der Geschwister und ihrer Nachkommen gleich
wie bei einem Schweizer, der in einem anderen als seinem Heimatkanton
gewohnt hatte (Bestätigung der Rechtsprechung) (E. 2a und b).

    2. Wenn Art. 5 Abs. 1 des schweizerisch-französischen
Gerichtsstandsvertrages auf den "Heimatort" verweist, schliesst dies
nicht ein, dass hinsichtlich des Pflichtteilsrechtes der Geschwister und
ihrer Nachkommen in Anbetracht von Art. 59 Abs. 2 SchlT das kantonale
Recht anzuwenden wäre (E. 2c, aa); anzuwenden ist das Schweizerische
Zivilgesetzbuch, das allein bestimmt, unter welchen Voraussetzungen die
kantonalrechtlichen Regeln über das Pflichtteilsrecht der Geschwister
und ihrer Nachkommen anwendbar sind (E. 2c, bb).

Sachverhalt

    A.- Joséphine Angélique Héritier, célibataire, ressortissante
suisse originaire de Genève, domiciliée à Paris, est décédée à
Boulogne-Billancourt (banlieue parisienne) le 11 octobre 1974. Elle
laissait deux héritières légales, ses soeurs Madeleine Droz et Germaine
Obermeier.

    Par testament olographe du 27 décembre 1973, Joséphine Héritier avait
institué légataire universelle Elisabeth Ferré. Ce testament ne contenait
pas de professio iuris.

    La succession a été ouverte à Genève et, le 17 avril 1975, le
testament a été communiqué aux héritières légales, qui, le 21 avril 1975,
ont contesté les droits de l'héritière instituée. Le 30 juin 1975, dames
Droz et Obermeier ont ouvert action en réduction, réclamant leur réserve
légale, soit, pour chacune d'elles, le huitième des biens mobiliers de
la succession. Le Tribunal de première instance du canton de Genève a
rejeté l'action le 5 janvier 1976.

    Sur appel des demanderesses, la Cour de justice a, le 24 juin 1977,
réformé ce jugement et accueilli la demande.

    Elisabeth Ferré a recouru en réforme au Tribunal fédéral, concluant
au rejet de la demande.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'art. 5 de la Convention entre la Suisse et la France sur la
compétence judiciaire et l'exécution des jugements en matière civile,
du 15 juin 1869, dispose que toute action relative à la liquidation
d'une succession testamentaire d'un Suisse décédé en France sera portée
devant le tribunal de son lieu d'origine en Suisse. Bien que le texte de
la Convention ne prévoie que la compétence judiciaire, il est unanimement
admis, tant en France qu'en Suisse, qu'il régit également la loi applicable
(ATF 99 II 25; cf. B. SCHNEIDER, Lieu du décès et succession dans le traité
franco-suisse du 15 juin 1869, Revue critique de droit international
privé, 1975, p. 397 et les références citées à la note 2). En l'espèce,
d'ailleurs, les parties ont admis la compétence de la juridiction genevoise
et l'application de la loi nationale.

Erwägung 2

    2.- La loi genevoise d'application du Code civil (art. 43) a supprimé
la réserve des frères et soeurs. Le problème soulevé par le présent
procès est de savoir si la succession mobilière de Joséphine Héritier est
soumise, en cette matière, au droit fédéral, soit à l'art. 471 ch. 3 CC,
ou au droit cantonal genevois.

    a) Aux termes de l'art. 472 CC, la solution est claire: un canton ne
peut déroger au droit fédéral que pour ses ressortissants ayant eu leur
dernier domicile dans le territoire cantonal. Quand une personne n'est pas
domiciliée dans son canton d'origine, le droit commun fédéral s'applique;
il n'y a donc jamais conflit entre la loi cantonale du domicile et la loi
du canton d'origine. Certes, l'art. 59 al. 2 Tit. fin., qui mentionne
les conflits de lois cantonales et renvoie à l'art. 22 LRDC, a amené
certains auteurs à penser que les limites assignées par l'art. 472 CC au
droit cantonal particulier ne seraient plus en vigueur, de sorte que la
succession d'une personne qui, lors de son décès, avait son domicile dans
un autre canton serait soumise de par la loi au droit particulier du canton
d'origine du défunt. Mais, dans l'arrêt Venerabile Arciconfraternità della
Misericordia di Firenze contre Persichelli et consorts, du 16 décembre
1965 (ATF 91 II 457 ss), le Tribunal fédéral, se ralliant à la doctrine
dominante, a donné une autre interprétation du texte légal. Ensuite de
circonstances connues depuis la découverte de documents ayant servi
à l'élaboration du Code civil (cf. O. GAUYE, La genèse de l'art. 59
al. 2 Tit. fin. CC, RDS 1965 p. 127 ss), il apparaît que la rédaction de
l'art. 59 Tit. fin. est maladroite, mais il faut s'en tenir à l'intention
évidente du législateur: l'art. 59 al. 2 Tit. fin. a pour seul objet
de permettre aux personnes non domiciliées dans leur canton d'origine
de déroger par professio iuris au droit commun fédéral, qui les régit
selon l'art. 472 CC, et de soumettre leur succession, en ce qui concerne
la réserve des frères et soeurs, à la loi de leur canton d'origine. Si le
droit suisse est applicable à la succession d'un Suisse dont le dernier
domicile était à l'étranger, la solution, en ce qui a trait à la réserve
des collatéraux, est la même que pour un Suisse domicilié dans un autre
canton que son canton d'origine: sous réserve de la professio iuris,
question non résolue et qui ne se pose pas en l'espèce, sa succession
est régie par le droit fédéral, la double condition d'indigénat et de
domicile posée par l'art. 472 CC n'étant pas réalisée (ATF 91 II 464 ss).

    Au vu de ces principes, la Cour de justice a correctement appliqué
le droit fédéral en l'occurrence.

    b) La recourante entend remettre en cause la jurisprudence
fédérale. Mais elle n'apporte aucun élément nouveau de nature à amener
le Tribunal fédéral à revenir sur un arrêt de principe approuvé par la
doctrine dominante (cf. H. MERZ, RJB 1966, p. 487; P. PIOTET, Droit
successoral, Traité de droit privé suisse IV, pp. 364/365). Elle se fonde
exclusivement sur un article de JACQUES DROIN (La réserve des frères
et soeurs des Suisses de l'étranger, RDS 1967, p. 339 ss), inspiré de
préoccupations d'ordre téléologique et qui se borne, dans l'essentiel,
à reprendre des arguments déjà examinés dans l'arrêt susmentionné (cf. la
réfutation de K. P. HOTZ, Die Rechtswahl im Erbrecht, thèse Zurich 1969,
pp. 40/41, approuvée par PIOTET, op.cit., p. 365 n. 15). L'art. 59 al. 2
Tit. fin., dans son imprécision et vu les circonstances de sa genèse,
ne saurait l'emporter sur le texte formel de l'art. 472 CC.

    c) La recourante fait également état d'une violation de la Convention
franco-suisse de 1869; selon elle, en vertu de l'art. 5 de la Convention,
le rattachement se fait, pour les successions des Suisses décédés en
France, à un domicile fictif au lieu d'origine du défunt. C'est, dit-elle,
l'opinion d'EUGENE HUBER, telle qu'elle résulte de deux avis de droit
publiés par GAUYE (loc.cit., pp. 136/137).

    Cette argumentation n'est pas pertinente.

    aa) Dans ses avis de droit, HUBER estime que la succession du Suisse
domicilié en France est régie par l'art. 472 CC. Cela ressort, dit-il dans
le premier avis, de l'art. 5 de la Convention franco-suisse combiné avec
l'art. 59 al. 2 Tit. fin., selon lequel les règles du droit cantonal sur
la réserve des frères et soeurs sont considérées comme loi d'origine pour
les ressortissants du canton. Dans le second avis, il écrit: "L'art. 59,
al. 2, du titre final indique comment il faut comprendre cette législation
du lieu d'origine."

    Ainsi, l'opinion émise par HUBER revient à dire que le renvoi au "lieu
d'origine", tel que le prévoit la Convention franco-suisse, implique, par
le détour de l'art. 59 al. 2 Tit. fin., l'application du droit cantonal
quant à la réserve des collatéraux. Or, ce point de vue, qui a également
été soutenu par d'autres auteurs, a été examiné et réfuté de façon
circonstanciée par le Tribunal fédéral (ATF 91 II 469 ss consid. 6). Il
n'est donc pas question de revenir sur une controverse désormais tranchée.

    bb) Mais il y a plus. Le conflit d'application du droit cantonal et du
droit fédéral en ce qui concerne la réserve des frères et soeurs est un
conflit interne, dans le cadre du droit suisse. Le traité international
ne fait que fixer la limite de l'application respective des droits des
Etats parties à la convention; il ne détermine pas le contenu de ces
droits respectifs, que chaque Etat est libre de modifier. Le conflit
résultant de la coexistence de dispositions fédérales et cantonales en
matière de successions collatérales n'intéresse en rien l'Etat étranger:
peu importe à la France que la Suisse applique une règle ou une autre
à la succession des Suisses, régie par le droit suisse. Un tel conflit
doit être tranché par la norme contenue dans la législation suisse
(Ch. E. RATHGEB, Professio juris et convention internationale, Recueil
de travaux publié par la Faculté de droit de l'Université de Lausanne à
l'occasion de l'assemblée de la Société suisse des juristes à Lausanne,
du 4 au 6 octobre 1958, Lausanne 1958, pp. 79/80 et les références citées
à la note 2; HOTZ, op.cit., p. 41).

    La Convention franco-suisse renvoie à l'application de la loi du
"lieu d'origine". Or, en Suisse, depuis le 1er janvier 1912, cette loi
est le Code civil suisse. C'est cette loi, et elle seule, qui détermine
à quelles conditions peuvent s'appliquer les règles de droit cantonal sur
la réserve des frères et soeurs. Quand l'art. 472 CC limite l'application
de ces règles aux ressortissants "qui ont eu leur dernier domicile dans
le territoire cantonal", il s'agit de droit interne: c'est le domicile
tel que le définit le Code civil.