Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 103 IA 462



103 Ia 462

69. Extrait de l'arrêt du 9 février 1977 dans la cause Zefferer contre
Grünig et Valais, Tribunal cantonal Regeste

    Garantie des Wohnsitzrichters; Art. 59 BV, Art. 839 Abs. 3 ZGB.

    Leistet der Eigentümer zur Vermeidung eines gesetzlichen
Bauhandwerkerpfandrechts Sicherheiten (Art. 839 Abs. 3 ZGB), die in einer
einfachen Bankgarantie und nicht in der Hinterlegung eines Betrages
beim Gericht oder einer Drittperson bestehen, so ist die Klage auf
Anerkennung und Bezahlung der Restschuld für die Bauarbeiten am Wohnsitz
des Eigentümers anzubringen.

Sachverhalt

    A.- Jean Zefferer a construit à Nax (VS) un chalet pour les époux
Grünig domiciliés à Commugny (VD). Les parties n'ayant pas pu s'entendre
sur le décompte final des frais de construction, Zefferer a requis du juge
instructeur d'Hérens-Conthey l'inscription provisoire d'une hypothèque
légale au sens de l'art. 837 al. 1 ch. 3 CC, pour un montant de 10'110
fr. Dans leur réponse du 4 mars 1975, les époux Grünig se sont opposés à
cette inscription, alléguant que tous les travaux prévus au contrat avaient
été payés; à toutes fins utiles, ils ont offert une garantie bancaire pour
le solde qui pourrait encore être dû (art. 839 al. 3 CC). A l'audience du
11 mars 1975, le juge instructeur a attiré l'attention d'Ernest Grünig sur
le fait que, si une garantie bancaire de 10'000 fr. n'était pas déposée
le 19 mars au plus tard, l'hypothèque serait inscrite. Le 13 mars 1975,
les époux Grünig ont déposé au greffe du Tribunal d'Hérens-Conthey une
garantie bancaire ainsi rédigée:

    "Nous soussignés, BANQUE POUR LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE (EIGENHEIM

    BANK) nous portons garants du paiement d'une somme de
              Fr. 10'000.- (dix mille cent francs)
   réclamée par M. Jean ZEFFERER, construction de chalets à
   Noes-sur-Sierre, à M. Ernest GRÜNIG-HURNI et son épouse..., tous deux
   domiciliés à Commugny/VD, dans le différend qui les oppose à M. Jean

    ZEFFERER.

    ...

    Bâle, le 13 mars 1975"

    Par décision du 13 mars 1975, le juge instructeur, constatant qu'une
garantie bancaire de 10'000 fr. avait été déposée et qu'il n'y avait
dès lors pas lieu de donner suite à la requête, a "donné acte à la partie
requérante que le montant de 10'100 fr. est consigné au greffe du Tribunal"
et a ordonné notamment:

    "Le montant de 10'100 fr. déposé par la "Banque pour la propriété
   privée" est bloqué au greffe du Tribunal jusqu'à décision définitive
   du cas.

    Cette consignation deviendra cependant caduque si l'action au fond
   n'est pas intentée dans un délai de six mois dès notification de la
   présente décision."

    Le 28 août 1975, Zefferer a ouvert action en paiement contre les époux
Grünig devant le juge instructeur d'Hérens-Conthey, en concluant en outre
à ce que la somme de 10'100 fr. consignée au Tribunal d'Hérens-Conthey par
la Banque pour la propriété privée soit débloquée en sa faveur jusqu'à
due concurrence. Le juge a admis l'exception d'incompétence à raison du
lieu soulevée par les défendeurs et fondée sur l'art. 59 Cst.; il a dès
lors renvoyé le demandeur à mieux agir.

    Saisi d'un recours en appel de Zefferer, le Tribunal cantonal du
Valais a rejeté les conclusions de l'appelant relatives à la compétence
à raison du lieu.

    Zefferer a formé auprès du Tribunal fédéral un recours tendant à
faire annuler la décision du Tribunal cantonal sur la question du for et
reconnaître la compétence du Tribunal d'Hérens-Conthey.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Extrait des motifs:

Erwägung 2

    2.- Il n'est pas contesté que les intimés soient des débiteurs
solvables au sens de l'art. 59 Cst., ni qu'ils aient leur domicile à
Commugny, dans le canton de Vaud. Une dérogation conventionnelle à la
garantie de l'art. 59 Cst. n'est pas alléguée.

    Pour savoir si l'art. 59 Cst. s'applique, c'est la nature juridique
de la prétention litigieuse qui est décisive (ATF 66 II 183 consid. 2, 45
I 307, 41 I 292 consid. 2), nature qui résulte du contenu de la demande,
des conclusions et des motifs qui les justifient (ATF 91 I 122).

    a) Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les actions fondées
sur un contrat - qu'il s'agisse d'actions en exécution, d'actions en
dommages-intérêts pour inexécution ou d'actions en annulation - sont
de nature personnelle, même si le contrat se rapporte à des ouvrages
faits à un immeuble (ATF 92 I 203). Il en va différemment lorsqu'une
créance litigieuse découlant de ce contrat est garantie par un gage,
un droit de rétention ou une annotation au registre foncier, ou encore
lorsque l'action tend à la fois à la reconnaissance d'une créance et à
l'inscription d'une hypothèque légale destinée à garantir l'exécution de
l'obligation personnelle (ATF 95 II 33, 94 I 50, 93 I 551); en pareil cas,
le défendeur ne peut pas se prévaloir du for de son domicile, même si le
gage a une valeur inférieure à la créance litigieuse, sauf cependant si
le droit de gage est revendiqué manifestement en vue d'éluder l'art. 59
Cst. (ATF 81 I 221 s.).

    b) L'art. 839 al. 3 CC dispose que l'hypothèque légale des artisans
et entrepreneurs ne peut pas être requise si le propriétaire fournit des
sûretés suffisantes au créancier.

    Lorsque ces sûretés consistent en la consignation d'un montant en
justice ou en mains tierces, la doctrine et la jurisprudence admettent
que le créancier possède sur le montant consigné un droit de gage,
de sorte que s'il ouvre action pour se faire payer sur un tel montant,
il exerce une action mixte qui n'est pas une réclamation personnelle au
sens de l'art. 59 Cst. (ATF 94 I 50, 93 I 551; cf. aussi, en matière
de droit de rétention du bailleur, ATF 90 III 57 et les arrêts cités;
LEHMANN, Sachenrecht, N. 32 ad art. 839 CC, p. 928; OFTINGER, Das
Fahrnispfand, Syst. Teil, n. 203 ss, 206, 215; VON TUHR/PETER, Allg. Teil
des schweiz. Obligationenrechts, Zurich 1974, vol. I p. 141 n. 13a;
BONNANT, La consignation en droit civil suisse, thèse Genève 1950, p. 78;
BURCKHARDT, Kommentar der Bundesverfassung, 3e éd., p. 553).

    En revanche, lorsque les sûretés consistent non pas en un gage
mobilier mais en un cautionnement ou une garantie bancaire, soit une
garantie fondée simplement sur le droit des obligations, elles n'ont
qu'un caractère personnel et permettent au débiteur recherché en paiement
d'invoquer l'art. 59 Cst. pour contester un autre for que celui de son
domicile (ATF 91 I 123 consid. 6; cf. aussi ATF 93 I 552).

    c) Il est vrai qu'une telle solution ne donne pas pleinement
satisfaction, lorsque la fourniture d'une garantie bancaire en évitation
de l'hypothèque légale ne fait pas l'objet d'un accord avec le créancier,
mais est simplement autorisée par le juge qui, constatant la constitution
des sûretés, rejette la requête d'inscription de l'hypothèque légale. Des
motifs d'économie de procédure ou d'autres considérations d'opportunité
pourraient plaider en faveur du for de situation de la chose pour ce cas
également. D'ailleurs, dans l'arrêt Stalumag (ATF 94 I 51), le Tribunal
fédéral a mis en doute le bien-fondé de la jurisprudence relative aux
garanties bancaires. Mais il n'y a pas lieu de déroger davantage au
principe fondamental de l'art. 59 Cst. (cf. ATF 93 I 37 consid. 7c) ni,
partant, de modifier la jurisprudence en cause, fondée sur la nature
différente des sûretés fournies (cf. VON TUHR/PETER, Allg. Teil des
schweiz. Obligationenrechts, Zurich 1974, vol. I p. 140 s.).

    On pourrait d'ailleurs se demander si la véritable solution au problème
ne consisterait pas à reconnaître au créancier la faculté de contester
le caractère "suffisant" de sûretés qui le privent de la possibilité
d'actionner le propriétaire au lieu de situation de l'immeuble, mais
l'obligent à le rechercher en justice à son domicile (cf., en matière de
sûretés destinées à remplacer les objets soumis au droit de rétention du
bailleur, OFTINGER, op.cit., n. 14 ad art. 898 CC, p. 418).

    d) Ainsi, à défaut de droit de gage constitué par la consignation
d'un montant à titre de sûreté, la cour cantonale a admis avec raison
que l'art. 59 Cst. s'appliquait en l'espèce et que le juge instructeur
d'Hérens-Conthey était incompétent pour se saisir de l'action ouverte
par Zefferer contre les époux Grünig.

    Le recours doit donc être rejeté.

Erwägung 3

    3.- Il est vrai qu'en l'espèce, le dispositif de l'ordonnance
présidentielle du 13 mars 1975 déclarait que "le montant de 10'100
fr. déposé par la Banque ... est bloqué au greffe du Tribunal jusqu'à
décision définitive du cas", ce qui pouvait laisser croire à Zefferer
qu'il bénéficiait d'une sûreté à caractère réel, lui permettant d'ouvrir
au lieu de situation du gage l'action en reconnaissance et en paiement
de sa créance. Mais, dans sa réponse du 4 mars 1975 à la requête en
inscription provisoire, l'avocat des époux Grünig a déclaré qu'"au besoin,
si le Tribunal devait retenir tout de même une possibilité d'inscription,
une garantie bancaire est immédiatement fournie pour le solde qui pourrait
être dû par Mme et M. Grünig après liquidation du litige"; d'autre part,
les considérants de l'ordonnance du 13 mars 1975 précisent que ledit
avocat s'est engagé, en séance du 11 mars, à déposer au Tribunal une
garantie bancaire de 10'000 fr. pour éviter l'inscription provisoire
d'une hypothèque légale et qu'il a déposé au greffe, le 13 mars 1975,
la garantie fournie par la "Banque pour la propriété privée à Bâle".

    Le recourant devait se rendre compte qu'avait été déposé au greffe
non pas le montant de 10'000 fr. qui, consigné à titre de sûreté,
lui aurait permis d'ouvrir à ce for l'action en reconnaissance et en
paiement de sa créance, mais une garantie bancaire à caractère purement
personnel, fondée simplement sur le droit des obligations, qui ne lui
permettait pas de bénéficier, pour cette action, du for de situation de
la chose. S'il avait des doutes sur ce point, en raison de la divergence
entre les termes du dispositif et ceux des considérants de l'ordonnance,
il aurait dû s'informer auprès du greffe, notamment en prenant connaissance
du texte exact de la garantie bancaire, ce qui lui aurait permis de lever
ses doutes; il aurait alors pu, soit demander aux époux Grünig de signer
une clause de prorogation de for, soit éventuellement recourir contre
l'ordonnance pour insuffisance de la sûreté fournie.