Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 103 IA 326



103 Ia 326

53. Extrait de l'arrêt du 23 février 1977 en la cause Léoment contre
Ministère public de la Confédération Regeste

    Auslieferung.

    Zulässigkeit und Prüfung des Einwandes der angeblich fehlenden
Identität des Verhafteten mit dem Verfolgten.

Sachverhalt

    A.- A la suite d'une attaque à main armée à Lutry en octobre
1973, la police a procédé à l'arrestation d'un individu porteur d'une
carte d'identité française établie au nom de Guy-Robert Denis. Ayant
procédé à une vérification des empreintes digitales de cette personne,
le Bureau français d'Interpol a établi qu'elles étaient celles de
Guy-Gabriel Léoment. Celui-ci a été condamné à 11 ans de réclusion
pour sa participation à l'attaque à main armée. Il est actuellement
détenu en Suisse. Le 5 décembre 1974, l'Ambassade de France a demandé
l'extradition de Guy-Gabriel Léoment, du chef de meurtre. Lors de son
audition extraditionnelle, l'individu détenu sous le nom de Léoment a
déclaré se nommer Guy-Robert Denis; niant être la personne réclamée, il
s'est opposé à son extradition. Il a également soulevé d'autres objections,
de telle sorte que le dossier a été transmis au Tribunal fédéral, qui a
rejeté l'opposition.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 3

    3.- a) Le Ministère public de la Confédération soutient que l'objection
tirée d'un prétendu défaut d'identité de l'opposant et de l'individu
réclamé ne rentre pas dans les objections visées à l'art. 23 LExtr.
Il relève que cette opinion est également celle de SCHULTZ, qui affirme que
la contestation de l'identité de la personne réclamée et de la personne
arrêtée ne constitue pas une objection au sens de l'art. 23 LExtr. (Das
schweizerische Auslieferungsrecht, p. 201.)

    Il convient dès lors d'examiner si l'objection tirée d'un prétendu
défaut d'identité entre la personne arrêtée et la personne réclamée est
recevable et, dans l'affirmative, si elle est fondée.

    b) S'il entre en matière sur la demande d'extradition, le Conseil
fédéral prend les mesures pour la recherche et l'arrestation de
l'individu réclamé. Dès que cette dernière est effectuée, il est procédé
à l'interrogatoire de la personne arrêtée. Celle-ci est informée des
conditions de l'extradition, après examen de la question d'identité
(art. 21 LExtr.).

    Selon l'art. 6 al. 2 du Traité franco-suisse sur l'extradition
réciproque des malfaiteurs, du 9 juillet 1869, les pièces jointes à la
demande d'extradition doivent être accompagnées autant que possible du
signalement de l'individu réclamé. De même, aux termes de l'art. 15
al. 2 LExtr., la demande d'extradition sera accompagnée, autant que
possible, du signalement de l'individu réclamé, de renseignements aussi
détaillés que possible sur son identité, sa personne et sa nationalité. Il
incombe ainsi aux autorités de l'Etat requérant d'apporter la preuve de
l'identité de l'individu réclamé, et les autorités de l'Etat requis ont la
compétence et le devoir d'examiner, dans chaque cas particulier, s'il a été
suffisamment satisfait à cette obligation (ATF 7, p. 521 consid. 2). Dans
l'affirmative, ces autorités peuvent et doivent alors s'assurer que la
personne arrêtée est bien celle dont l'extradition est demandée. Elles
doivent se prononcer sur une objection portant précisément sur ce point
et ne sauraient laisser au juge du fond le soin de contrôler l'identité
de l'individu arrêté et extradé.

    Certes, en droit français, le président de la Cour d'assises doit
procéder à la vérification de l'identité de l'individu qui comparaît
devant lui, avant d'ordonner la reprise de la procédure pénale en la
forme ordinaire contre le contumax qui s'est constitué prisonnier ou qui
a été arrêté (voir PIERRE BOUZAT et JEAN PINATEL, Traité de droit pénal
et de criminologie, tome II, 2e éd., Nos 1419 ss, p. 1355 ss; ROGER MERLE
et ANDRÉ VITU, Traité de droit criminel, tome II, 2e éd., Nos 1467 ss,
p. 685 ss; DALLOZ, Répertoire de droit criminel et de procédure pénale,
p. 579, sous "contumace" No 95). On ne saurait cependant en déduire que
la question d'identité doit être assimilée à une question de fait dont
l'examen est de la compétence du juge du fond. Les autorités de l'Etat
saisi d'une demande d'extradition ne peuvent y satisfaire que si elles
arrêtent la personne dont l'extradition est demandée.

    c) Il incombe en premier lieu à l'autorité administrative de se
prononcer sur la question de l'identité de la personne arrêtée. Si cette
question est la seule qui soit litigieuse, son examen est du ressort de
la Division fédérale de police et, sur recours, du Conseil fédéral. En
revanche, rien ne s'oppose à ce que le Tribunal fédéral entre en matière
sur l'objection tirée d'un prétendu défaut d'identité de la personne
arrêtée et de la personne dont l'extradition est demandée, lorsque le
dossier lui est transmis en vertu de l'art. 23 LExtr. Il importe au
contraire que l'autorité judiciaire se prononce sur ce point. Si une telle
objection était fondée, le Tribunal fédéral n'aurait pas à prononcer s'il
y a lieu ou s'il n'y a pas lieu à l'extradition de la personne réclamée.
En revanche, il devrait juger qu'il n'y a pas lieu à extradition de
la personne arrêtée. La demande d'extradition elle-même ne devrait
être rejetée que si les recherches ultérieures de la personne réclamée
demeuraient vaines ou que la personne réclamée et arrêtée ait soulevé des
objections fondées contre son extradition (voir SCHULTZ, op.cit., p. 201).

    Dans la mesure où il n'existe pas de doutes sérieux quant à l'identité
de la personne arrêtée et de celle dont l'extradition est requise,
le Tribunal fédéral doit examiner les autres objections soulevées par
l'opposant et prononcer s'il y a lieu ou s'il n'y a pas lieu à extradition
de la personne réclamée et arrêtée.

    d) En l'espèce, l'opposant prétend s'appeler Guy-Robert Denis et
conteste donc être l'individu réclamé. Toutefois, aucun élément de fait ne
permet d'émettre de sérieux doutes sur l'identité de la personne arrêtée
et de celle dont l'extradition est requise. Par les empreintes digitales
que l'opposant ne conteste pas être siennes, les autorités françaises ont
constaté que l'individu arrêté en Suisse sous le nom de Guy-Robert Denis
pour sa participation à l'attaque à main armée d'une banque de Lutry
est en réalité Guy-Gabriel Léoment, et c'est sous ce nom qu'il a été
poursuivi et condamné en Suisse. Or l'opposant, qui se borne à contester
cette identité refuse expressément de donner tout autre renseignement
sur son prétendu patronyme Denis.

    Dans ces conditions, l'objection tirée d'un prétendu défaut d'identité
doit être écartée. Il convient donc de ne pas entrer en matière sur la
demande de complément d'information que l'opposant a présentée, et l'on
peut laisser indécise la question de savoir quelle aurait dû être la
procédure à suivre si des doutes sérieux sur l'identité de la personne
arrêtée et de la personne réclamée avaient existé.