Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 102 IV 125



102 IV 125

31. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 27 août 1976 dans la cause
Ministère public du canton de Genève contre Balducci. Regeste

    Art. 19a BetMG. Einzige Bedingung zur Anwendung dieser Bestimmung ist,
dass die Widerhandlungen des Täters in keiner Art und Weise den Konsum
durch Dritte ermöglichen.

Sachverhalt

    A.- Paolo Balducci, ressortissant italien domicilié en Italie, a
acheté à Amsterdam 80 g d'héroïne brown-sugar. Alors qu'il revenait en
avion d'Amsterdam en faisant escale à Genève, le 18 mars 1976, la drogue
a été découverte et il a été arrêté.

    Balducci est un drogué qui a déjà subi en Italie une cure de
désintoxication et qui a rechuté. Les 80 g d'héroïne importés devaient
lui permettre d'assurer sa propre consommation de drogue pendant environ
trois mois, à des conditions plus favorables que celles du marché italien,
étant donné qu'il en était arrivé à se faire des injections de près de 1
g par jour. Il n'a pas été retenu que Balducci ait envisagé de revendre
tout ou partie de la drogue, ni qu'il l'ait importée dans un autre but
que celui d'assurer sa consommation personnelle.

    B.- Par arrêt du 3 juin 1976, la Cour de justice du canton de
Genève, statuant en appel, a annulé un jugement rendu le 27 avril 1976
par le Tribunal de police de Genève, et condamnant Balducci à deux ans
d'emprisonnement et à l'expulsion du territoire suisse pour 10 ans en
application de l'art. 19 de la loi fédérale sur les stupéfiants. La Cour
de justice a appliqué l'art. 19a de la loi et condamné Balducci à trois
mois d'arrêts et 3'000 fr. d'amende, avec sursis durant un an.

    C.- Le Procureur général du canton de Genève se pourvoit en nullité
contre l'arrêt de la Cour de justice.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le Procureur recourant soutient que c'est à tort que la Cour de
justice a refusé d'appliquer l'art. 19 de la loi sur les stupéfiants.
Il fait valoir que l'intimé ne peut pas bénéficier de l'exception prévue à
l'art. 19a de la loi en faveur de celui qui assure sa propre consommation,
et cela en raison de la grande quantité de drogue importée et des buts
visés par l'intimé. Pour le recourant est constitutif de l'infraction
de l'art. 19a de la loi uniquement "l'acte strictement nécessaire pour
satisfaire sa consommation dans un proche avenir, à l'exclusion de tout
autre acte ayant une portée plus vaste". Ainsi la constitution d'un stock
important, même pour sa propre consommation, ne pourrait permettre de
bénéficier de l'application de l'art. 19a. Ne saurait non plus se voir mis
au bénéfice de l'art. 19a celui qui, comme l'intimé, a cherché à réaliser
une "bonne affaire", c'est-à-dire à se procurer un avantage patrimonial
important en allant acheter la drogue à l'étranger plutôt que dans son
propre pays où elle est plus chère; en agissant ainsi, l'intimé visait
d'autres buts et allait au-delà de la stricte consommation personnelle,
de telle sorte que son infraction devrait être sanctionnée par les peines
prévues à l'art. 19 et non pas à l'art. 19a de la loi.

Erwägung 2

    2.- Le point de vue du recourant ne peut être suivi. Il est en effet
étranger au texte et au but de la loi.

    L'intimé a acheté, détenu, transporté, importé ou passé en transit des
stupéfiants. Il a donc ainsi commis une infraction à l'art. 19 de la loi
fédérale sur les stupéfiants. Cette infraction a, selon les constatations
de fait, été commise par l'intimé pour assurer sa propre consommation,
de telle sorte que les conditions d'application de l'art. 19a ch. 1
sont remplies à la lettre. La jurisprudence a certes précisé que si
l'infraction à l'art. 19 devait aboutir en sus à la consommation par des
tiers ou permettre une telle consommation concurremment à la consommation
propre de l'auteur, voire pour faciliter ou pour permettre celle-ci,
le bénéfice de l'application de l'art. 19a ne pourrait pas être accordé
(TF 26 mars 1976 Ray c. Genève; 14 août 1976 Vaud c. Keist); mais telle
n'est pas la situation qui se présente en l'espèce, si l'on s'en tient
aux constatations de fait.

    Rien dans le texte de l'art. 19a ne permet de retenir qu'il se limite à
la consommation immédiate ou du seul proche avenir. Si telle avait été la
volonté du législateur, rien n'aurait en effet été plus aisé pour lui que
de le préciser dans son texte même. Il n'en va pas différemment de la plus
ou moins grande quantité des stupéfiants ou de leur prix d'acquisition; ces
éléments ne sont pas mentionnés à l'art. 19a, de telle sorte qu'ils n'ont
pas à jouer de rôle dans l'application de la disposition. Le législateur
a fort bien su en effet se référer à des notions de temps et de quantité
lorsqu'elles devaient être prises en considération (art. 19b par exemple);
l'absence de référence de cette nature à l'art. 19a ne peut donc être
que voulue.

    Cette interprétation correspond enfin au but de la loi, tel qu'exprimé
clairement dans les travaux préparatoires et par le législateur (Message,
in FF 1973 I 1303 ss; Bull.stén. CE 1973, p. 691 ss, 709 ss, et 1974,
p. 594 ss, CN 1974, p. 1416 ss, 1444 ss, spéc. 1453/1454), et qui tend
à différencier nettement la consommation personnelle et le trafic de la
drogue, c'est-à-dire les actes destinés à la consommation par les tiers.

    En l'espèce, les actes de l'intimé remplissant les conditions
d'application de l'art. 19a, et aucun élément ne permettant à la cour
de céans de retenir que la drogue était destinée même partiellement à la
consommation de tiers, c'est sans violation de la loi que la disposition
précitée a été appliquée à l'intimé.

    Il faut bien concéder au recourant qu'il est difficile de croire qu'un
individu se procure ou importe une quantité aussi importante de drogue
uniquement pour ses besoins personnels. On ne devrait par ailleurs pas
accepter facilement, et seulement sur la base d'éléments très sérieux,
que les provisions faites à long terme par un drogué ne devaient en aucun
cas être remises à des tiers. Mais cela n'autorise nullement la cour de
céans à s'écarter, au mépris de l'art. 277bis al. 1 PPF, des constatations
de l'autorité cantonale, surtout lorsque, comme en l'espèce, elles ne
laissent aucune place à l'équivoque.

    Le pourvoi doit donc être rejeté.