Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 102 IB 166



102 Ib 166

27. Arrêt du 26 mars 1976 en la cause Société immobilière R. SA contre
Administration fédérale des contributions Regeste

    Art. 4 Abs. 1 lit. b VStG und 20 Abs. 1 VStV.

    Geldwerte Leistungen einer Immobiliengesellschaft an ihre Aktionäre.
Vermietung einer ihr gehörenden Liegenschaft zu einem Vorzugspreis.

Sachverhalt

    A.- La société immobilière R. S.A. administre et exploite l'immeuble
qu'elle a fait construire à Crans sur Chermignon. Elle loue à ses propres
actionnaires les locaux de ce bâtiment, qui comprend des appartements,
des magasins et des garages.

    L'Administration fédérale des contributions (AFC) a rendu, le 10 août
1972, une décision valant sommation au sens de l'art. 16 al. 2 de la loi
fédérale sur l'impôt anticipé (LIA) et aux termes de laquelle "la société
immobilière R. S.A. doit 21'219 fr. d'impôt anticipé sur des prestations
appréciables en argent faites à ses actionnaires-locataires sous forme
de mise à leur disposition de l'immeuble social pendant les années 1967
à 1970, contre un loyer de faveur", l'impôt devant être transféré à la
charge des bénéficiaires des prestations.

    La réclamation formée par la société a été rejetée le 30 octobre
1974 par l'AFC, dont la décision a été attaquée par la voie du recours
de droit administratif.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Aux termes de l'art. 4 al. 1 lettre b de la loi fédérale sur
l'impôt anticipé, du 13 octobre 1965 (LIA), cette contribution a pour
objet "les intérêts, rentes, participations aux bénéfices et tous autres
rendements des actions, parts sociales et bons de jouissance émis par
des sociétés anonymes, sociétés à responsabilité limitée ou sociétés
coopératives suisses". Selon l'art. 20 al. 1 de l'ordonnance d'exécution
de la LIA, du 19 décembre 1966 (OIA), est un rendement imposable d'actions
toute prestation appréciable en argent faite par la société aux possesseurs
de participation, ou à des tiers les touchant de près, qui ne se présente
pas comme remboursement des parts au capital social versé existant au
moment où la prestation est effectuée (bonis, actions gratuites, excédents
de liquidation, etc.). Font partie des prestations appréciables en argent,
au sens de ces dispositions, les distributions dissimulées de bénéfice aux
actionnaires (PFUND, Verrechnungssteuer, n. 3.24, 3.53 ss ad art. 4 al. 1
lettre b LIA). Ces dernières présentent les trois caractères suivants:
la société ne reçoit pas en retour une prestation équivalente et le compte
d'exploitation en est affecté; le sociétaire ou une personne le touchant
de près bénéficie d'une prestation qui n'aurait pas été accordée, ou du
moins pas dans la même mesure, à une personne étrangère à la société;
enfin, la disproportion entre la prestation octroyée et celle qui a été
faite en retour était reconnaissable pour les organes sociaux (ATF 85
I 255/256; PFUND, op.cit., n. 3.53 ad art. 4 al. 1 lettre b LIA). Peu
importe en revanche que ces derniers aient eu l'intention d'éluder l'impôt
ou qu'un tel dessein ne puisse leur être prêté (ATF 82 I 290/291). Selon
la jurisprudence, la société anonyme immobilière qui perçoit de son
actionnaire et locataire un loyer insuffisant lui accorde une prestation
appréciable en argent au sens des dispositions légales précitées (ATF 85
I 256 consid. 3 et 8; Archives 30, 476).

Erwägung 2

    2.- a) La recourante est une société anonyme immobilière
d'actionnaires-locataires. Elle a été créée afin de réaliser la
propriété par étages ou par appartements, à une époque où celle-ci
n'était pas juridiquement réalisable en Suisse (cf. GUY FLATTET, Les
sociétés immobilières d'actionnaires-locataires, in JdT 1949 I 610 ss;
FORSTMOSER et MEIER-HAYOZ, Einführung in das schweizerische Aktienrecht,
n. 45 p. 314); elle construit, administre et entretient l'immeuble
dont elle est propriétaire dans l'intérêt de ses actionnaires. Ceux-ci
ont le droit de louer les locaux (appartements, magasins, ou garages)
correspondant aux actions qu'ils ont acquises. Ils concluent à cet effet
un contrat de bail avec la société, pour une durée indéterminée. Le loyer
est payé par l'actionnaire-locataire à concurrence de sa participation
aux charges courantes des immeubles, proportionnellement aux actions
qu'il possède. Le solde du loyer est compensé avec l'intérêt dû sur la
créance chirographaire qu'il acquiert contre la société en même temps
que les actions. Si l'actionnaire met en location l'appartement dont il
a la jouissance, la société perçoit du locataire le plein loyer fixé par
le bail, retient la participation de l'actionnaire aux charges courantes
des immeubles et aux frais de location, et lui verse le loyer net qui
constitue le revenu du capital investi.

    b) L'Administration fédérale des contributions (AFC) considère que
toute société anonyme immobilière d'actionnaires-locataires poursuit un
but économique et qu'elle doit ainsi tendre à percevoir des occupants de
l'immeuble des loyers fixés de telle manière qu'ils couvrent les charges
d'exploitation et assurent en outre une rémunération appropriée du capital
social. Si les loyers effectivement perçus ne permettent pas d'atteindre
ces objectifs, on doit alors admettre que leur montant est inférieur à
celui des loyers normalement exigés sur le marché du logement et que
la société accorde à ses actionnaires des prestations appréciables
en argent au sens des art. 4 al. 1 lettre b LIA et 20 al. 1 OIA. Il
en est de même si les loyers sont insuffisants en raison des dépenses
trop élevées engagées lors de l'édification de l'immeuble dans le but de
satisfaire les intérêts et les goûts des actionnaires-locataires, car la
société n'aurait pas consenti à de tels investissements, non rentables,
en faveur de personnes qui lui sont étrangères.

    C'est l'application de ces règles que la recourante conteste en
l'espèce, en faisant valoir essentiellement la situation particulière
dans laquelle se trouveraient les sociétés d'actionnaires-locataires
propriétaires de résidences secondaires sises en région de montagne.

Erwägung 3

    3.- a) La recourante ne prétend pas ne pas avoir un but
économique. Mais elle insiste sur le fait qu'elle dispose de deux sources
de revenus, les loyers versés par les actionnaires-locataires d'une
part, et les bénéfices résultant de l'achat et de la réalisation de ses
immeubles, d'autre part. C'est ainsi à tort que l'autorité fiscale ferait
abstraction de la deuxième des sources de revenus précitées, et qu'elle
exigerait d'elle une rentabilité locative forcée à court terme. Ce grief
n'est pas fondé.

    Le but essentiel de la société immobilière d'actionnaires-locataires
est de réaliser économiquement la propriété par étages ou par
appartements. Pour atteindre cet objectif, la société doit nécessairement
conserver les immeubles loués à ses actionnaires et ne peut donc pas
en principe réaliser à son profit la plus-value des biens immobiliers
dont elle est juridiquement propriétaire. Ce sont au contraire les
actionnaires qui, ayant la faculté de vendre leurs actions à un prix
librement fixé, pourront réaliser ce bénéfice. La recourante insiste
d'ailleurs elle-même sur le fait que, pour l'actionnaire, l'intérêt
d'un placement immobilier sous forme d'acquisition d'actions réside en
particulier dans la perspective de réaliser, par la vente de ses titres,
la plus-value immobilière. L'AFC n'a ainsi nullement méconnu la situation
réelle de la société recourante en considérant que ses seules ressources
étaient les loyers versés par les actionnaires-locataires.

    b) L'AFC considère que la société immobilière
d'actionnaires-locataires, poursuivant un but économique, accorde à ses
sociétaires des prestations appréciables en argent lorsque les recettes
dont elle peut disposer ne suffisent pas à assurer une juste rémunération
du capital social. Elle fixe dès lors les loyers au montant minimum
nécessaire à la couverture des charges courantes de l'immeuble et à une
rémunération de 6% du capital social.

    On ne saurait contester que le but normal d'une société anonyme
est de distribuer des dividendes à ses actionnaires (cf. ATF 100 II 393;
FORSTMOSER et MEIER-HAYOZ, op.cit., p. 241 ss), et ce n'est pas recourir à
une fiction que de partir de telles prémisses, pour exiger de la société
qu'elle fasse tout ce qui est nécessaire pour obtenir, dans la mesure
du possible, une juste rémunération du capital investi (Archives 30,
476). Contrairement à ce que soutient la recourante, l'autorité fiscale
ne cherche pas, en violation du droit fédéral, à l'obliger à faire
du bénéfice; elle se borne à déterminer les conséquences fiscales de
l'absence de bénéfice comptabilisé, en dépit du fait que les actionnaires
ont, en qualité de locataires, la jouissance de l'immeuble.

    La recourante affirme que la valeur locative des immeubles doit être
calculée en dehors de toute considération de rentabilité ou de couverture
des charges "qui sont des questions internes de la société". Mais cette
opinion ne saurait être suivie dès lors qu'il s'agit précisément de
déterminer en l'espèce si et dans quelle mesure la société accorde à ses
actionnaires des prestations appréciables en argent sans contre-prestation
équivalente, ce qui ne peut qu'affecter le compte d'exploitation. Par
ailleurs, les sociétés d'actionnaires-locataires présentent la
particularité de ne pas pouvoir fixer librement les prix de location des
immeubles dont elles sont juridiquement propriétaires. Les fluctuations
du marché du logement ne les touchent en principe pas, et ce marché ne
peut être déterminant pour le calcul du rendement que ces sociétés doivent
retirer de leur activité. En réalité, les actionnaires-locataires fixent
les loyers dans leur propre intérêt, et non dans celui de la société. Ce
sont eux qui peuvent bénéficier des revenus résultant de la location à
des personnes étrangères à la société, et celle-ci n'est pas en mesure
de réaliser un bénéfice en aliénant ses immeubles. Dans ces conditions,
l'AFC n'a pas violé le droit fédéral en fixant les loyers de manière à
ce qu'ils couvrent les charges d'exploitation et assurent en outre une
rémunération appropriée du capital social.

    A cet égard, il convient d'écarter la distinction que fait la
recourante entre sociétés d'actionnaires-locataires, selon que les
immeubles dont elles sont propriétaires, en plaine ou en région de
montagne, servent de résidences principales ou de résidences secondaires
aux sociétaires. Toutes ces sociétés doivent tendre à obtenir, dans
la mesure du possible, une juste rémunération du capital social, et
la situation et l'usage de leurs immeubles n'importent pas de ce point
de vue. Au demeurant, des investissements non rentables opérés par une
société d'actionnaires-locataires dans un immeuble loué à ses sociétaires
constitueraient la preuve qu'elle agit dans l'intérêt de ceux-ci et non
dans le sien, en adoptant un comportement qu'elle n'aurait certainement
pas eu à l'égard de tiers non actionnaires (Archives 30, 476).

    En fixant la rémunération à 6% du capital social, sans prendre en
considération l'ensemble des fonds investis, l'AFC a apprécié la situation
de manière prudente et conforme à l'expérience des affaires. Dans un arrêt
de 1961, le Tribunal fédéral avait d'ailleurs jugé qu'un loyer représentant
le 5% au moins du capital investi était raisonnable (Archives 30, 476),
et la recourante n'avance en l'espèce aucun argument propre à infirmer
le taux retenu par l'autorité fiscale.

    c) La recourante soutient qu'il ne lui est pas possible d'adapter
les loyers à l'augmentation croissante des charges d'exploitation et de
maintenir ainsi une rémunération appropriée du capital social. Dans la
décision attaquée, l'AFC a relevé que la recourante n'avait pas fourni
le moindre indice permettant de conclure que les loyers calculés par
l'autorité fiscale ne correspondaient pas à ceux qui pouvaient alors être
demandés pour des appartements semblables, situés dans la même région. Elle
a souligné que la question pouvait de toute manière rester indécise;
si l'on devait établir l'insuffisance des loyers pouvant effectivement
être perçus, il faudrait alors en conclure que la société a effectué
des investissements non rentables dans l'intérêt de ses actionnaires. Il
y aurait ainsi prestation appréciable en argent, que les loyers perçus
correspondent ou non à ceux qui étaient demandés pour des appartements
semblables à la même époque.

    Dans son recours de droit administratif, la recourante a produit
divers exemples qui tendraient à prouver l'impossibilité de louer des
résidences secondaires en région de montagne pendant une période de
l'année et celle d'augmenter les prix de location proportionnellement
à l'accroissement des charges d'exploitation. Ces exemples concernent
toutefois des sociétés d'actionnaires-locataires qui, à l'instar de
la recourante, sont privées du droit de louer leurs immeubles à des
tiers pour leur propre compte. Par ailleurs, ils ne sont pas de nature
à établir que la recourante a fait tout ce qui était nécessaire pour
obtenir, dans la mesure du possible, une juste rémunération du capital
social et qu'elle s'est trouvée dans l'impossibilité de faire supporter
aux locataires l'augmentation des charges d'exploitation. Au surplus, dans
sa réponse au recours, l'AFC démontre, de manière convaincante, que les
loyers pris en considération par l'autorité fiscale se situent au-dessous
de ce que la société pourrait exiger des actionnaires-locataires, pour la
saison morte, et de tiers qui lui sont étrangers, pour les cinq mois de la
saison touristique. Enfin, il convient de rappeler que la société a mis à
disposition de ses actionnaires, par contrat de location, les appartements,
magasins et garages correspondant à leurs actions, et que ces locataires
se sont ainsi réservé la jouissance des locaux durant l'année entière.

    Les griefs que fait valoir la recourante contre la décision attaquée
sont ainsi dénués de pertinence, et le recours doit être rejeté.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours.