Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 101 IV 387



101 IV 387

90. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 21 novembre 1975
dans la cause J. contre Ministère public du canton de Vaud Regeste

    Art. 64 StGB. Strafmilderung, achtungswerter Beweggrund.

    1. Der Beweggrund des Täters bildet eines der subjektiven
Tatbestandsmerkmale. Seine Ermittlung gehört zu den tatsächlichen
Feststellungen (Erw. 2a).

    2. Achtungswert ist der Beweggrund nur, wenn er ethisch wertvoll
ist. Die Bewertung ist unabhängig von der Tat vorzunehmen (Erw. 2b).

    3. Beim Vorliegen eines Strafmilderungsgrundes ist der Richter nicht
verpflichtet, von dem nach unten erweiterten Strafrahmen Gebrauch zu
machen; je nach den Umständen des Falles kann er eine Strafmilderung auch
verweigern (Erw. 2c).

    4. Dass der Täter aus politischen Gründen handelte, sagt noch nicht
darüber aus, ob sein Beweggrund achtenswert war.

Sachverhalt

    A.- Le 2 octobre 1973, J., de nationalité espagnole, a participé
activement, avec trois acolytes, à un hold-up perpétré à l'agence de
la Banque cantonale vaudoise à Lutry. Après avoir menacé les employés
de la banque avec des armes, notamment des mitraillettes, les auteurs
de ce coup se sont emparés de plus de 420'000 fr. Durant la nuit, J. a
été arrêté avec deux de ses complices après qu'il eut tiré deux coups de
pistolet en direction d'un inspecteur de police. Le butin a été récupéré
et le quatrième participant arrêté plus tard.

    Les quatre hommes étaient convenus de partager le butin à parts
égales. J. et un autre Espagnol lui aussi, entendaient faire bénéficier
de l'essentiel de leur part un groupe révolutionnaire marxiste-léniniste
espagnol auquel ils appartenaient.

    B.- Le 28 février 1975, le Tribunal criminel du district de Lavaux a
condamné J. pour brigandage qualifié, mise en danger de la vie d'autrui,
contrainte et vol d'usage, à la peine de 11 ans de réclusion et de 15
ans d'expulsion. Le Tribunal a retenu que J. avait agi pour des motifs
politiques et il a considéré qu'il s'agissait d'un mobile honorable au
sens de l'art. 64 CP.

    Le Tribunal cantonal du canton de Vaud, statuant le 7 juillet 1975,
a admis un recours de J. et admis partiellement un recours du Ministère
public. Il a réduit la peine à 9 ans de réclusion, mais il n'a pas retenu
le mobile honorable au sens de l'art. 64 CP.

    C.- J. se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il conclut à la
réduction de la peine.

    Le Procureur général du canton de Vaud propose de rejeter le pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le recourant invoque en premier lieu une violation de l'art. 64 CP
et fait valoir que la qualité de mobile honorable aurait dû être reconnue
aux motifs politiques qui l'ont guidé dans son action. Il reproche en
outre à l'arrêt attaqué d'avoir infligé une peine qui reste excessive et
d'avoir ainsi fait une fausse application de l'art. 63 CP.

Erwägung 2

    2.- a) Les mobiles de l'auteur ne doivent pas être assimilés à ses
convictions. Celles-ci représentent la position que tout être humain adopte
à l'égard de certaines valeurs d'ordre éthique, social voire juridique.
Elles peuvent présenter un caractère durable, profond ou n'être qu'une
réaction devant un cas concret, en relation avec l'infraction (cf. HERREN,
Die Gesinnung im Rahmen der vorsätzlichen Tötungsdelikte insbesondere
beim Mord, Bâle 1966, p. 80 s.; ERBA, Motiv und Gesinnung im Strafrecht,
RPS 64 (1949) p. 257 ss et plus particulièrement p. 266 s.).

    Le mobile est en revanche la cause psychologique d'une manifestation
donnée de volonté. Le plus souvent il représente l'expression de sentiments
conscients ou inconscients, d'impulsions ou de raisonnements qui ont une
incidence médiate ou immédiate sur l'infraction. Les convictions générales
ou particulières de l'individu peuvent avoir une relation étroite avec
ses mobiles, mais ce n'est pas nécessairement le cas.

    La détermination du mobile de l'auteur relève de l'établissement des
faits. Le juge doit pour y procéder prendre en considération toutes les
preuves qui lui paraissent pertinentes. Ainsi des témoignages, des pièces,
les déclarations de l'auteur, ses antécédents et même les circonstances
de l'infraction peuvent servir d'indices pour déterminer le mobile. Mais
il ne faut pas oublier que le mobile, au même titre que l'intention,
constitue l'un des éléments subjectifs de l'infraction et qu'il tient du
domaine de la conscience de l'auteur.

    b) Les mobiles de l'auteur n'ont le cas échéant d'incidences sur
la fixation de la peine que s'ils sont honorables, c'est-à-dire s'ils
reposent sur des convictions dignes d'estime au regard de l'échelle des
valeurs éthiques reconnues par la collectivité dans son ensemble et sans
pour cela avoir nécessairement à respecter l'ordre légal en vigueur dans
la communauté (cf. HAFTER, partie générale p. 361; THORMANN/OVERBECK,
No 5 ad art. 64 CP; RO 97 IV 80). Pour qu'un mobile puisse être qualifié
d'honorable, il ne suffit donc pas qu'il n'attire aucune réprobation ni
qu'il ne soit pas critiquable sur le plan moral. Il faut au contraire qu'il
se situe dans la partie supérieure de l'échelle des valeurs éthiques. Il
doit mériter l'estime, forcer la considération et le respect, être enfin
conforme aux idées d'honneur et de dignité. En revanche et contrairement à
ce qui a pu être dit dans le passé (cf. RO 80 IV 93 consid. 10a notamment)
le caractère honorable du mobile est totalement indépendant de l'acte
commis et par là même de l'adéquation qui peut ou non exister entre cet
acte et le but recherché par l'auteur (RO 97 IV 80; Arrêt du Tribunal
militaire de cassation vol. 7 (1958-1964) No 9 p. 14).

    c) Lorsque le juge admet l'existence d'un mobile honorable,
c'est-à-dire d'une circonstance atténuante au sens de l'art. 64 CP, les
limites dans lesquelles il doit prononcer la peine sont étendues. Il peut
ainsi se limiter à tenir compte du mobile dans le cadre de l'art. 63 et
des peines prévues par la disposition spéciale applicable in casu ou,
s'il estime le minimum fixé par cette dernière trop élevé, descendre
au-dessous de cette limite, conformément à l'art. 65 CP (SCHWANDER, No 389;
LOGOZ, partie générale p. 277 No 3 ad art. 64). Pour se déterminer à cet
égard, il prendra en considération toutes les circonstances de l'espèce,
soit notamment les actes d'exécution de l'infraction, dans la mesure où
ils sont révélateurs de la mentalité de l'auteur, l'objet de l'agression
et le bien juridique protégé (Arrêt du Tribunal militaire de cassation,
vol. 7 (1958-1964), No 9 déjà cité p. 15 ch. 3). Il a même la faculté
de refuser toute atténuation, là où les circonstances condamnables de
l'infraction rejettent complètement dans l'ombre l'honorabilité des
mobiles, par exemple lorsque l'agression vise des biens particulièrement
dignes de protection sur le plan juridique et n'ayant aucune relation avec
les mobiles de l'auteur. Ce sera par exemple le cas en matière de prise
d'otages ou d'attentats à l'explosif contre des victimes indéterminées.

    d) De toute manière, on chercherait en vain dans le code pénal une
disposition qui reconnaîtrait au mobile politique comme tel un caractère
particulier d'honorabilité. C'est d'ailleurs normal, tant il est vrai
que de semblables mobiles ont parfois sur le plan éthique les valeurs
les plus diverses et peuvent aussi bien relever d'un idéalisme altruiste
que de l'égoïsme le plus bas. S'il peut en effet paraître admirable de
prendre des risques pour libérer ses semblables de l'oppression, on ne
saurait souscrire en aucun cas à des actes de violence commis dans le but
de s'installer confortablement à la tète d'un autre régime d'oppression,
ni à la démarche consistant à lutter par les armes contre le gouvernement
d'un Etat où règnent des institutions permettant d'agir par des moyens
démocratiques, pour le seul motif que l'on est incapable de réunir une
majorité.

Erwägung 3

    3.- a) In casu, les premiers juges ont établi que le recourant avait
eu l'intention de financer au moyen de son butin un groupe politique
illégal agissant en Espagne. Ils ont vu là un mobile honorable que
l'autorité cantonale de recours a contesté, estimant que même si le
recourant n'avait pas été poussé par l'égoïsme, son acte ne présentait
pas une adéquation suffisante avec le but politique qu'il poursuit. Ce
faisant, ni l'une ni l'autre des autorités cantonales ne s'est conformée
aux principes exposés ci-dessus. Elles n'ont en effet donné aucun élément
permettant de décider si le recourant avait agi par ambition personnelle,
par soif du pouvoir ou, au contraire, par idéalisme, amour de la liberté
ou conviction humanitaire. Si l'on sait quels étaient ses buts immédiats,
on ignore encore tout de sa motivation profonde et de ses pensées qui
seules comptent au regard de l'art. 64 CP.

    b) Il n'est toutefois pas nécessaire de renvoyer la cause à l'autorité
cantonale pour qu'elle détermine quels étaient en réalité les mobiles
du recourant. En effet, l'autorité cantonale a déclaré expressément que
même si un mobile honorable devait être admis, on ne pouvait reprocher
aux premiers juges de ne pas avoir fait application de l'art. 65 CP. Or
sur ce point on ne saurait lui donner tort. Le recourant a pris part,
de concert avec des truands, à l'attaque à main armée d'une banque qui
n'entretient aucune relation particulière avec l'Espagne ou avec le régime
franquiste. De telles relations n'existent pas non plus en ce qui concerne
les employés de l'établissement sur lesquels ont été braquées des armes
à répétition, l'automobiliste passant par là par hasard et qui sous la
menace d'une arme à feu a dû transporter les agresseurs, ainsi que le
policier sur lequel le recourant a tiré. Ces circonstances démontrent un
tel mépris pour la liberté, l'intégrité corporelle et la vie même d'autrui,
que le refus de toute atténuation de la peine aurait été justifié. On ne
saurait d'autant moins faire un reproche à l'autorité cantonale en ce qui
concerne la fixation de la peine, qu'elle a réduit celle prononcée par les
premiers juges, précisément pour tenir compte, dans le cadre de l'art. 63
CP, de la jeunesse du recourant et du but politique qu'il poursuivait.

Entscheid:

            Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le pourvoi.