Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 101 IV 359



101 IV 359

85. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 12 novembre 1975
dans la cause F. D. et Cst. contre Ministère public du canton de Vaud.
Regeste

    1. Art. 2 Abs. 2 StGB. Massgeblich für das zur Zeit anwendbare Gesetz
ist der kantonale Entscheid (Erw. 1).

    2. Art. 24 BetMG.

    a) Die Verpflichtung zur Bezahlung des unrechtmässigen
Vermögensvorteils an den Staat betrifft ohne Unterschied alle Täter,
die sich gegen Art. 19-22 BetMG vergangen haben (Erw. 2b).

    b) Diese Verpflichtung besteht auch dort, wo der Täter nicht
gewinnsüchtig gehandelt hat (Erw. 3b).

    c) Unrechtmässiger Vermögensvorteil ist alles, was sich der Täter
durch die begangene Straftat verschafft hat, ohne Abzug der zur Erlangung
der Drogen nötigen Auslagen (Erw. 4b).

Sachverhalt

    A.- En 1973 et 1974, F. D. et J. B. ont acheté diverses quantités
de stupéfiants, qu'ils ont en partie consommés eux-mêmes et en partie
revendus à des tiers. Pour D., il s'agissait principalement de morphine,
et pour B., de morphine, d'héroïne, d'opium et de "brown sugar".

    Le 3 mai 1975, le Tribunal correctionnel du district d'Orbe a condamné
D., pour complicité de vol et infraction à la loi sur les stupéfiants,
à la peine de deux ans d'emprisonnement, sous déduction de 307 jours de
préventive, et à la restitution à l'Etat de 25'000 fr. d'enrichissement
illégitime. Il a condamné B., pour les mêmes infractions, à deux ans
d'emprisonnement, sous déduction de 164 jours de préventive, et à la
restitution à l'Etat de 25'000 fr. d'enrichissement illégitime.

    Le 23 juillet 1975, le Tribunal cantonal du canton de Vaud a
partiellement admis un recours des condamnés et réformé le jugement
du Tribunal de district en ce sens que D. a été condamné à restituer
à l'Etat de Vaud 20'000 fr. et B. 15'000 fr. L'arrêt retient que ces
montants correspondent au prix obtenu par chacun des intéressés lors de
la vente des stupéfiants.

    B.- D. et B. ont interjeté chacun un pourvoi en nullité au Tribunal
fédéral. Ils concluent tous deux à la libération de l'obligation
de restituer un montant quelconque du chef de l'enrichissement
illégitime. D. demande, à titre subsidiaire, que la restitution ne porte
que sur une somme de 8'100 fr.

    Le Procureur général du canton de Vaud conclut au rejet des pourvois.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Les recourants n'attaquent l'arrêt cantonal que dans la mesure
où il les condamne à restituer à l'Etat des sommes respectivement de
20'000 et 15'000 fr. du chef de l'enrichissement illégitime provenant de
la vente des stupéfiants. Cette question sera examinée à la lumière de
la loi sur les stupéfiants du 3 octobre 1951 dans la teneur qui était en
vigueur à la date de l'arrêt cantonal, soit le 23 juillet 1975. L'arrêt
cantonal constitue en effet le prononcé du juge de répression qui fixe
l'application de la loi pénale dans le temps au sens de l'art. 2 al. 2 CP
(cf. RO 97 IV 235, 76 IV 261). C'est ainsi l'ancien texte de la loi sur
les stupéfiants qui sera interprété et appliqué et non pas les dispositions
nouvelles entrées en vigueur le 1er août 1975.

    L'art. 24 de la loi applicable dispose ce qui suit: "Celui qui se
procure un enrichissement illégitime en commettant une infraction au sens
des art. 19 à 22 est condamné à restitution en faveur de l'Etat." Il n'est
ni contesté ni contestable que les ventes de stupéfiants auxquelles se
sont livrés les recourants constituent des infractions à l'art. 19 de la
loi. L'art. 24 peut donc leur être appliqué.

Erwägung 2

    2.- a) Le moyen principal du premier recourant tend à demander une
application différenciée de l'art. 24 de la loi sur les stupéfiants selon
que le vendeur de drogue est ou non également consommateur. Constatant que
la jurisprudence du Tribunal fédéral a laissé ouverte la question de savoir
si la dévolution à l'Etat était obligatoire ou laissée à l'appréciation
du juge (RO 100 IV 107 consid. 4 in fine), le recourant voudrait que
cette question soit tranchée non seulement dans le sens de la liberté
laissée au juge mais également par la fixation de critères destinés à
empêcher toute application de l'art. 24 dans certains cas. Il soutient
que celui qui vend de la drogue parce qu'il est amené à ce commerce pour
se procurer l'argent nécessaire à l'achat de la drogue dont il a lui-même
besoin doit être traité différemment que le trafiquant dont le seul but
est le lucre. Il invoque également l'obstacle à la réadaptation sociale
que peut constituer l'obligation de rembourser une somme importante.

    b) Les moyens et considérations du recourant ne peuvent être
retenus. Il ne ressort ni du texte de la loi ni de son but qu'une
quelconque différence doive être faite, dans le cadre de l'art. 24
s'entend, entre le vendeur de stupéfiants qui agit uniquement pour
s'enrichir et celui qui ne veut que se procurer les moyens d'acquérir
de la drogue pour son usage personnel. S'agissant de la fixation de la
peine, le dessein de lucre - qui peut d'ailleurs parfaitement exister
chez celui qui agit pour se procurer la drogue dont il a lui-même besoin
- constitue certes une circonstance aggravante, de même que les mobiles
peuvent justifier une atténuation, mais l'obligation de restitution de
l'enrichissement illégitime en faveur de l'Etat s'applique sans distinction
à tous les vendeurs ou délinquants tombant sous le coup des art. 19 à 22.

    Cela posé, il n'est pas nécessaire de décider si le juge a ou non
l'obligation impérative de faire application de l'art. 24. En effet,
même si le principe de la restitution était laissé à son appréciation,
on ne saurait en aucune manière considérer comme une violation du droit
fédéral le fait pour le juge d'user de la faculté que l'art. 24 lui
confère en tout cas.

Erwägung 3

    3.- a) Le second recourant invoque les travaux préparatoires de
la loi. Il se fonde en particulier sur le fait qu'une proposition du
texte allemand de l'art. 24 contenait l'expression "aus Gewinnsucht" et
que celle-ci n'a été retranchée du texte définitif que pour des motifs
rédactionnels et pour ne pas alourdir le texte français (Bull.stén. CE
1951 p. 336). Il en conclut que l'intention du législateur était de ne
prévoir la restitution à l'Etat qu'à l'égard des auteurs agissant dans
le dessein de lucre (aus Gewinnsucht).

    b) Ce moyen ne résiste pas à l'examen. Lorsque la loi entend
subordonner l'application d'une disposition légale à l'existence
d'un dessein spécial, elle doit le dire expressément. A défaut de
précision et de mention expresse dans le texte légal, on ne saurait
subordonner l'application d'une disposition à l'existence de conditions
particulières. On peut d'autant moins retenir le moyen du recourant que
le législateur n'a pas manqué de mentionner le dessein de lucre en toutes
lettres lorsqu'il a voulu que le juge en tienne compte (cf. dans cette
même loi à l'art. 19).

    Ainsi, de lege lata, le principe de l'application de l'art. 24 aux
recourants ne peut pas être critiqué.

Erwägung 4

    4.- a) A titre subsidiaire, dans le cadre de l'application de
l'art. 24, les deux recourants soutiennent que, pour fixer le montant
correspondant à leur enrichissement illégitime, on ne doit tenir compte
que du bénéfice qu'ils ont réalisé dans leurs ventes de stupéfiants,
et que l'on doit déduire du produit de celles-ci les sommes dépensées
pour l'acquisition de la marchandise, soit au premier chef le prix d'achat.

    b) La jurisprudence a clairement posé que, dans l'application de
l'art. 24 de la loi sur les stupéfiants, l'enrichissement illégitime est
constitué par tout ce que l'auteur s'est procuré par la commission de
l'infraction, sans que puissent être déduits les montants dépensés pour
devenir détenteur de la drogue (RO 100 IV 266; ATF Münch, 30 janvier
1974; Valseriati, 11 octobre 1974). Le même principe a d'ailleurs été
posé dans l'application de l'art. 59 CP, en ce sens que ce sont tous
les avantages reçus, et non pas seulement le gain net qui sont acquis
à l'Etat (RO 97 IV 252). Pour déterminer l'enrichissement illégitime,
il faut comparer l'état du patrimoine des recourants tel qu'il existait
immédiatement avant et immédiatement après la vente des stupéfiants.
Avant ce moment, leur patrimoine était diminué des frais qu'ils avaient
assumés et du prix d'achat. Comme il leur était interdit de par la loi
de vendre la drogue, leur patrimoine ne s'était pas accru du moindre
actif légitimement négociable; ainsi tout accroissement de ce patrimoine
grâce à une vente illicite effectuée postérieurement constituait bien
un enrichissement illégitime (RO 100 IV 266). Il y a d'autant moins
de raison de revenir sur cette jurisprudence que le nouvel art. 58 CP,
dorénavant applicable aux affaires de stupéfiants, se fonde sur la notion
d'avantage illicite, qui correspond dans son principe à la notion définie
à propos de l'art. 24 précité.

    C'est donc en harmonie avec la jurisprudence que la cour cantonale
a arrêté les montants devant être restitués à l'Etat.

    Les pourvois doivent donc être rejetés.