Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 101 II 47



101 II 47

12. Arrêt de la IIe Cour civile du 1er mai 1975 dans la cause
Berchtold-Rothenanger et consorts contre Staudhammer. Regeste

    Verantwortlichkeitsklage der Erben gegen einen Testamentsvollstrecker.

    1. Verantwortlichkeitsklage gegen den Willensvollstrecker können die
Erben und die andern vom Erblasser begünstigten Personen erheben. Hingegen
ist der Dritte, der gestützt auf eine Zession der Erben am Nachlass
beteiligt ist, nicht befugt zu klagen (Erw. 1).

    2. Da der Willensvollstrecker eine unabhängige Stellung einnimmt, kann
er die Werte des Nachlasses auch gegen den übereinstimmenden Willen der
Erben verkaufen, sobald der Verkauf in den Rahmen seiner Aufgabe fällt,
z.B. wenn er notwendig ist zur Bezahlung von Erbschaftsschulden (Erw. 2-3).

Sachverhalt

    A.- Emilie Dimier, née Rothenanger, est décédée à Genève le 23
juillet 1967. Par testament public du 7 juillet 1966, elle a institué
comme héritiers en nue-propriété, par parts égales entre eux, sa nièce,
Hulda Berchtold-Rothenanger, ses deux neveux Willi et Fritz Rothenanger
et sa nièce Ruth Giordano, l'usufruit de l'entier de la succession étant
légué, sous réserve de divers autres legs, à sa soeur infirme Berthe-Fanny
Rothenanger, à Genève; elle a désigné comme exécuteur testamentaire Roger
Staudhammer, expert-comptable à Genève, qui s'était occupé avec succès
de la gestion de ses biens depuis plusieurs années, et émis le désir
qu'il soit également désigné comme tuteur de Berthe Rothenanger. Enfin,
le testament contient la clause suivante: "Je désire en outre que mes
héritiers ne vendent pas les actions de l'immeuble avenue Calas 10 et
que ces titres restent en hoirie".

    Roger Staudhammer a accepté sa désignation comme exécuteur
testamentaire. Par ordonnance du 24 août 1967, la Chambre des tutelles
de Genève l'a nommé aux fonctions de curateur de Berthe Rothenanger,
hospitalisée à la clinique Bel-Air depuis septembre 1966, aux fins de
pourvoir à la gestion de ses biens.

    Willi et Fritz Rothenanger, ainsi que Hulda Berchtold ont fait
participer à la succession de leur tante un frère non mentionné dans
le testament, Werner Rothenanger, auquel chacun d'eux a cédé 1/16 de
ses droits.

    B.- Après paiement de divers legs prévus dans le testament, l'actif de
la succession de feu Emilie Dimier ne comprenait, pour l'essentiel, que le
capital-actions, divisé en 200 actions au porteur, d'une valeur nominale de
250 fr., de la S.I. Champel Soleil C, propriétaire d'un immeuble locatif
sis à l'avenue Calas 10. Cet immeuble avait été acquis par Staudhammer,
pour le compte de la défunte, le 5 mars 1959 pour le prix de 1'310'000 fr.

    Le fisc genevois a réclamé aux héritiers institués la somme de
166'962 fr. 10, plus intérêt à 5% du 6 janvier 1968 au titre des droits
de succession en vertu de la loi cantonale ad hoc. Des sommations de payer
leur ont été notifiées le 27 juin 1968. Le fisc a toutefois accordé, à
la demande des héritiers et de l'exécuteur testamentaire, qui cherchait à
sauvegarder les intérêts de sa pupille, des délais successifs de paiement,
mais en bloquant en main du notaire qui les détenait les actions de la
S.I. Champel Soleil C pour garantir ses prétentions.

    De 1968 à janvier 1970, Roger Staudhammer a entrepris de nombreuses
démarches pour résoudre le problème qui se posait à lui pour pouvoir opérer
le partage, savoir celui du paiement des droits successoraux alors que
l'actif successoral ne comprenait que des actions d'une société immobilière
que la défunte souhaitait voir maintenues en hoirie, et cela sans que les
droits de l'usufruitière, sa pupille, fussent compromis. Neuf solutions
furent successivement examinées et étudiées, savoir l'avance des frais
de succession par chacun des héritiers, la vente aux enchères, le dépôt
fiduciaire de 50 actions de dame Giordano, un emprunt de 185'000 fr., un
emprunt de 124'000 fr. augmenté de 50'000 fr. prêtés par l'usufruitière,
le rachat du capital-actions de 1'400'000 fr. par les hoirs Rothenanger,
un emprunt hypothécaire, une rente viagère remplaçant l'usufruit et enfin
une convention entre héritiers mettant à la charge de l'usufruitière
l'impôt anticipé et le droit de timbre. Aucune de ces solutions ne put en
définitive être mise sur pied, soit à la suite de divergences entre les
héritiers, soit à la suite de leur refus de signer les textes auxquels
ils avaient donné leur accord de principe, soit enfin à cause du refus de
la Chambre des tutelles d'approuver une solution défavorable aux intérêts
de l'usufruitière sous curatelle.

    C.- Le 21 janvier 1970, devant l'échec successif des démarches qu'il
avait entreprises pour régler le problème, Staudhammer demanda à la
Chambre des tutelles quelle position il devait adopter. Le 23 janvier
1970, se référant à la doctrine, l'autorité tutélaire lui conseilla de
fixer un délai aux héritiers et de les aviser que, s'ils ne faisaient
pas d'opposition avant l'expiration de ce délai, il serait procédé à
la vente aux enchères publiques du capital-actions, en ajoutant que,
s'ils faisaient opposition, l'affaire serait soumise à la Justice de
paix, autorité de surveillance des exécuteurs testamentaires, laquelle
trancherait. Donnant suite à ce conseil, Staudhammer fixa aux héritiers,
par lettre du 26 janvier 1970, un délai au 10 février 1970, pour former
opposition à sa décision de vendre les actions aux enchères publiques,
opposition qui entraînerait la soumission du dossier à la Justice de paix.

    Cette mise en demeure provoqua la réunion, le 3 février 1970, des
intéressés en l'étude de l'avocat genevois des héritiers. Y assistèrent
Ruth Giordano, assistée de son conseil bernois, Fritz Rothenanger,
accompagné de l'un des collaborateurs de son avocat genevois,
et Staudhammer. Les discussions aboutirent à la signature d'une
convention par laquelle Ruth Giordano et Fritz Rothenanger donnaient
leur "accord irrévocable" pour la vente de gré à gré des actions et
de la créance chirographaire à un prix minimum de 1'600'000 fr., sous
déduction de l'hypothèque réduite à 712'000 fr. et de la commission de
courtier. L'accord porte que Fritz Rothenanger engage ses deux frères Willi
et Werner et sa soeur Hulda Berchtold. Le conseil bernois de dame Giordano
a attesté que Fritz Rothenanger avait signé cet accord devant lui et qu'il
avait formellement déclaré représenter et engager ses frères et soeur.

    Staudhammer remit à Fritz Rothenanger sept copies de cet accord,
munies des signatures de Ruth Giordano et de Fritz Rothenanger, en le
chargeant de les faire contresigner par Willi et Werner Rothenanger et par
Hulda Berchtold. Le même jour, 3 février 1970, il sollicita et obtint du
fisc genevois, en invoquant l'accord intervenu, une ultime prolongation,
à fin mars, du délai imparti aux héritiers pour le paiement de l'impôt
successoral.

    Par la suite, Fritz Rothenanger a signalé à Staudhammer un amateur
éventuel pour l'immeuble et le pria de lui remettre divers documents. De
même, le 11 février 1970, Staudhammer adressa au collaborateur de
l'avocat des héritiers le bilan et compte de profits et pertes de la
société immobilière, ainsi que l'état locatif de l'immeuble.

    Le 16 février 1970, Staudhammer a soumis à la Chambre des tutelles
une offre de la régie Naef, du 13 février 1970, pour l'achat de l'immeuble
au prix de 1'600'000 fr. et en discuta certaines des modalités. Revenant
le 23 février 1970 sur cette offre, il rappela les critiques qu'il avait
faites le 7 octobre 1968 au sujet d'une expertise de l'immeuble qui avait
été confiée à l'architecte Zaugg. Il estimait que les conclusions de
cet expert, qui avait fixé la valeur vénale de l'immeuble à 1'765'000
fr., étaient trop élevées, l'expert ayant tenu compte d'un taux de
capitalisation trop bas et ayant sous-estimé les frais d'entretien de
l'immeuble. La Chambre des tutelles invita alors Staudhammer à faire
procéder à une nouvelle expertise de l'immeuble par l'agent immobilier
Jean-François Dumur, qui déposa son rapport le 18 mars 1970. Cet expert
estime la valeur vénale de l'immeuble à 1'620'000 fr. Après avoir relancé
vainement l'avocat des héritiers pour obtenir la ratification de l'accord
du 3 février par les héritiers qui ne l'avaient pas signé, Staudhammer
exposa la situation, par lettre du 19 mars 1970, au Président de la
Justice de paix, autorité de surveillance des exécuteurs testamentaires,
lui remit le rapport Dumur et lui demanda l'autorisation de vendre le
capital-actions pour le prix de 1'600'000 fr. Par ordonnance motivée
du 31 mars 1970, le Juge de paix a autorisé Staudhammer, en sa qualité
d'exécuteur testamentaire, à vendre au client de Naef et Cie, Ed. Knobel,
les actions de la société immobilière pour le prix indiqué et à verser
à l'ayant droit les dividendes encaissés jusqu'à concurrence de 50'000 fr.

    Le 30 mars 1970, Fritz Rothenanger a téléphoné à Staudhammer pour
lui dire de ne pas vendre, en des termes qui incitèrent l'exécuteur
testamentaire à demander une consultation au notaire Rehfous, notamment
en ce qui concerne l'effet, sur la position de l'héritière Giordano,
de l'avance par ses cohéritiers Rothenanger et Berchtold de la somme
nécessaire au paiement des impôts successoraux. En effet, le conseil des
trois frères Rothenanger et de dame Berchtold avisa Staudhammer le 2 avril,
par téléphone et par lettre, que la somme de 210'000 fr. serait versée par
ses clients sur le compte bancaire du notaire Martin chargé de liquider
la succession; ces versements étaient destinés au paiement des impôts
successoraux et furent effectivement faits. Staudhammer répondit que,
si ce versement intervenait, il surseoirait à la vente jusqu'à ce qu'il
soit en possession de l'avis de droit Rehfous. Dans sa consultation du
3 avril, le notaire Rehfous fit ressortir les risques que représentait
pour dame Giordano l'exercice des droits de recours que ses cohéritiers
feraient valoir contre elle du chef de la créance résultant de l'avance
des droits de succession, notamment en cas de réalisation de la part de
nue-propriété de dame Giordano. Il souligna que la vente envisagée était
conforme à l'intérêt de la pupille de Staudhammer et que, en tout état de
cause, la vente de gré à gré envisagée est une opération normale. Ayant
reçu confirmation de l'avocat de dame Giordano de l'accord de celle-ci
avec la vente aux conditions connues, Staudhammer soumit encore le 3
avril la consultation Rehfous au juge de paix et président de la Chambre
des tutelles, en l'avisant que la signature de la convention de vente
d'actions aurait lieu le 7 avril 1970. L'autorité ne réagit pas à cette
communication et la vente fut signée le 7 avril par Staudhammer aux
conditions prévues. Après paiement des impôts successoraux, chacun des
héritiers institués a reçu 153'000 fr. selon décompte de liquidation
dressé par le notaire Martin le 22 mai 1970, sous réserve de l'usufruit
de dame Berthe Rothenanger.

    D.- Les trois frères Rothenanger et dame Berchtold ont ouvert action
contre Roger Staudhammer par exploit du 4 juin 1971, en concluant à ce
que le défendeur soit condamné à leur payer conjointement la somme de
300'000 fr. avec intérêt à 5% l'an du 2 avril 1971 et, subsidiairement,
à la désignation de trois experts chargés de déterminer la valeur vénale
au 7 avril 1970 de l'immeuble litigieux. Le Tribunal de première instance
les ayant déboutés par jugement du 18 janvier 1973, les recourants ont fait
appel à la Cour de justice de Genève, qui a confirmé le jugement, sauf en
ce qui concerne le montant des dépens, par arrêt du 25 octobre 1974. C'est
contre cet arrêt que les recourants ont déposé un recours en réforme,
qui tend à l'allocation, avec suite de dépens, des conclusions principales
et subsidiaires qu'ils avaient prises devant l'autorité cantonale.

    L'intimé Staudhammer a conclu, avec suite de dépens, au rejet du
recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Les recourants, agissant en leur qualité d'héritiers de feu Emilie
Dimier, réclament à Staudhammer des dommages-intérêts pour le dommage
qu'il leur aurait causé dans l'exécution de sa mission d'exécuteur
testamentaire. Leur action se caractérise donc comme une action en
responsabilité des héritiers contre l'exécuteur testamentaire. Il s'agit de
déterminer en premier lieu si les recourants ont qualité pour intenter une
telle action et, en cas de réponse affirmative à cette première question,
si les conditions de l'action sont réalisées dans le cas concret.

    En principe, l'action en responsabilité contre l'exécuteur
testamentaire appartient aux héritiers et autres personnes gratifiées
par le de cujus (TUOR, Comm., n. 24 ad art. 518 CC; ESCHER, Comm., n. 14
ad art. 518 CC; LOB, Les pouvoirs de l'exécuteur testamentaire en droit
suisse, thèse Lausanne 1952, p. 123).

    Or, si Hulda Berchtold, Willi et Fritz Rothenanger sont sans aucun
doute les héritiers institués de feu Emilie Dimier et ont donc en principe
qualité pour agir, il n'en va pas de même de Werner Rothenanger. Ce
dernier, neveu de la défunte, n'a pas été institué héritier par sa
tante. Il ne participe à la succession que parce que chacun des trois
héritiers prénommés lui a cédé 1/16 de ses droits. Selon l'art. 635
al. 2 CC, il n'avait donc aucun droit d'intervenir au partage. La
cession d'une partie des droits successoraux de trois héritiers ne lui
confère pas un droit direct sur la succession, mais seulement un droit
personnel à la délivrance par l'héritier cédant des biens reçus en partage
(TUOR/PICENONI, n. 22-25 ad art. 635 CC; ESCHER, n. 18 ad art. 635 CC;
BECK, FJS 790 A ch. 2; RO 87 II 218, notamment p. 224 ss). Par voie de
conséquence, la cession partielle des parts successorales des trois autres
recourants ne pouvait pas lui conférer d'autres droits. Elle ne pouvait en
particulier pas lui attribuer la qualité d'héritier, qui est incessible
(RO 89 II 185; BECK, FJS 790 A ch. 1). Pour pouvoir agir personnellement
contre l'exécuteur testamentaire, Werner Rothenanger aurait dû se faire
céder expressément, conformément à l'art. 164 CO, les droits des autres
recourants contre l'exécuteur testamentaire. Rien dans le dossier ne permet
de dire qu'une telle cession existe. L'action de Werner Rothenanger doit
donc être en tout état de cause rejetée, faute de qualité pour agir.

    Quant à Fritz Rothenanger, s'il est bien héritier, il a, par l'acte
du 3 février 1970, donné son "accord irrévocable" à la vente de gré à gré
des actions et de la créance chirographaire aux conditions auxquelles cette
vente a été effectivement faite. Certes, il s'est par la suite opposé à la
vente, mais l'engagement irrévocable qu'il avait pris en toute connaissance
de cause continuait à le lier, si bien que ce changement d'attitude était
inopérant. Dès lors, conformément à la doctrine (TUOR, n. 1 i.f. et 24 ad
art. 518 CC; ESCHER, n. 14 ad art. 518 CC) et comme l'a relevé la cour
cantonale, ayant consenti irrévocablement à la vente, Fritz Rothenanger
a perdu le droit de se plaindre à ce sujet. Cet accord exclut le principe
même d'une responsabilité de l'exécuteur testamentaire à son égard.

    En conséquence, les actions de Werner et Fritz Rothenanger doivent
en tout état de cause et sans plus ample examen être rejetées.

Erwägung 2

    2.- L'exécuteur testamentaire est responsable de ses actes à l'égard
des héritiers. Sa responsabilité s'apprécie comme celle d'un mandataire,
auquel on l'assimile (TUOR, n. 24 ad art. 518 CC; ESCHER, n. 14 ad art. 518
CC; LOB, op.cit., p. 119). L'exécuteur est responsable de la bonne et
fidèle exécution des tâches qui lui sont confiées, selon la règle de
l'art. 398 al. 2 CO. Il appartient donc aux héritiers qui s'estiment lésés
de prouver la violation de ses devoirs par l'exécuteur testamentaire, le
dommage et la relation de causalité entre ces deux faits. S'ils font ces
preuves, la faute de l'exécuteur testamentaire est présumée conformément
à l'art. 97 CO. Il lui appartient alors d'établir qu'il n'a pas commis
de faute pour échapper à sa responsabilité (LOB, op.cit., p. 122).

    a) Les recourants ne prétendent pas que Staudhammer a violé ses devoirs
d'exécuteur en vendant les actions litigieuses. A juste titre, la cour
cantonale a en effet constaté qu'assumant une position indépendante
à l'égard des héritiers (RO 90 II 381; 98 II 279 i.f.) Staudhammer
pouvait décider, même contre l'accord des héritiers, une vente des biens
appartenant à la succession dès l'instant qu'elle entrait dans le cadre de
sa mission, par exemple dans la mesure où elle était nécessaire au paiement
des dettes de la succession (RO 97 II 15 ss; ESCHER, n. 10 ad art. 518 CC).

    Dans le cas particulier, après trois ans de vaines tentatives pour
trouver les sommes nécessaires au paiement des impôts successoraux,
Staudhammer avait le devoir de trouver une solution pour financer le
paiement de ces impôts. Certes, se fondant sur le texte de l'art. 518 CC,
certains auteurs soutiennent que l'exécuteur testamentaire n'a le devoir
de payer que les dettes du défunt et de la succession, à l'exclusion
de celles des héritiers (LOB, op.cit., p. 52; SCHREIBER, FJS 870a p. 3
VIII). Peu importe en l'espèce: en effet, selon les constatations de la
cour cantonale, le droit fiscal genevois oblige l'exécuteur testamentaire
à payer les droits de succession sur les biens de celle-ci et lui interdit,
sous peine d'être personnellement responsable du paiement, de procéder à la
délivrance d'une succession sans s'être préalablement assuré du paiement
de ces droits. Au surplus, le fisc genevois ayant bloqué les actions, qui
constituaient le seul actif de la succession, pour garantir le paiement
de ces droits, l'exécuteur testamentaire ne pouvait procéder au partage,
soit à l'essentiel de sa mission, sans avoir résolu préalablement cette
question. Staudhammer était d'autant plus justifié à agir de la sorte que
le testament prévoyait que tous les legs qu'il avait à exécuter devaient
être délivrés "francs de droit". Il avait donc le devoir de s'assurer
que l'entier des droits de succession avait été payé avant de délivrer
la succession aux nus-propriétaires (TUOR, n. 14 ad art. 518 CC).
   b) Aussi bien les recourants ne reprochent-ils à Staudhammer
que le fait d'avoir vendu les actions le 7 avril 1970 alors même qu'ils
avaient déposé le 2 avril 1970 en main du notaire Martin les sommes
nécessaires au paiement des droits de succession. Selon eux, ce dépôt
permettait de payer les impôts sans recourir à la vente des actions, qui
n'était ainsi plus nécessaire et à laquelle Staudhammer n'aurait dès lors
pas dû procéder, puisqu'elle était contraire aux désirs exprimés par dame
Dimier dans son testament.

    Avant le 2 avril 1970, il ne fait pas de doute que Staudhammer
était fondé à passer outre au désir de la testatrice de voir les actions
litigieuses conservées en hoirie. Il s'agissait en effet 1à d'un simple
voeu, nullement impératif, adressé d'ailleurs plus à ses héritiers qu'à
son exécuteur testamentaire (ESCHER, n. 27 ad art. 482 CC). Ce voeu ne
liait donc pas Staudhammer dans la mesure où il avait essayé, mais en vain,
d'éviter la vente des actions en cherchant à mettre sur pied une solution
permettant de payer les dettes d'impôts autrement. En vertu de son pouvoir
de disposition, l'exécuteur testamentaire pouvait donc en principe vendre
les actions si cela se révélait nécessaire pour remplir une autre de ses
obligations, celle de payer les droits successoraux et de procéder au
partage (ESCHER, n. 10 i.f. ad art. 518 CC). Il le pouvait et le devait
d'autant plus qu'en octobre 1969 une solution permettant d'éviter la vente
et qui avait recueilli l'accord de tous les héritiers avait échoué à la
suite d'une volte-face, au dernier moment, de certains d'entre eux.

    A partir du 2 avril 1970, date à laquelle les recourants avaient mis à
sa disposition les fonds nécessaires au paiement des impôts successoraux,
Staudhammer était placé devant un choix: ou accepter les fonds et renoncer
à la vente; ou poursuivre dans la voie de la vente des actions. Son choix
dépendait de la pesée des intérêts en présence.

    La solution proposée par les recourants avait l'avantage qu'elle
permettait de déférer au voeu de la testatrice en évitant la vente. Mais
elle présentait aussi les inconvénients résultant d'une part de ce
qu'elle était moins favorable à l'usufruitière, à qui elle assurait des
revenus inférieurs, d'autre part de ce qu'elle risquait de placer l'une des
héritières, dame Giordano, dans une situation défavorable par rapport à ses
cohéritiers. A cela s'ajoutait que, comme l'a relevé le notaire Rehfous
dans son avis de droit, sur les cinq personnes intéressées (le notaire
n'avait à juste titre pas tenu compte de Werner Rothenanger), la majorité
avait donné son accord à la solution de la vente de gré à gré. Compte
tenu de la grande liberté dont jouit l'exécuteur testamentaire (LOB,
op.cit., p. 51), Staudhammer n'a pas excédé son pouvoir d'appréciation
en décidant comme il l'a fait de procéder à la vente.

    c) Les recourants ne reprochent pas à l'intimé d'avoir procédé à la
vente des actions de gré à gré et non pas aux enchères. La question se pose
pourtant. En effet, le Tribunal fédéral a jugé (RO 97 II 11, notamment
consid. 2 à 4) que, s'agissant de procédure en partage, l'exécuteur
testamentaire doit appliquer les règles des art. 607 et 610 CC et que,
dans l'hypothèse visée par l'art. 612 al. 2 et 3 CC, il doit procéder à
la vente aux enchères dès l'instant que l'un des héritiers le demande et
qu'il s'agit de biens de la succession qui ne peuvent être partagés sans
subir une diminution notable de leur valeur. Cette règle n'est toutefois
pas applicable en l'espèce, car l'exécuteur testamentaire n'a pas vendu
les actions appartenant à la succession pour procéder à leur partage, qui
pouvait se faire sans la vente par la répartition de 25 actions à chacun
des héritiers, mais bien pour payer la dette d'impôt de la succession.

    En réalité, on se trouve dans l'hypothèse que le Tribunal fédéral a
réservée dans l'arrêt précité (RO 97 II 19 i.f.), où la question est de
savoir si l'exécuteur testamentaire peut procéder à une vente de gré à
gré, contre la volonté des héritiers ou de certains d'entre eux, lorsque
les biens de la succession doivent être vendus pour se procurer les
moyens nécessaires au paiement des dettes du défunt ou pour délivrer les
legs. Pour résoudre cette question, on doit partir du texte de l'art. 518
al. 2 CC, qui donne pour mission à l'exécuteur testamentaire, entre autres,
de payer les dettes et d'acquitter les legs. Dès l'instant que l'exécuteur
testamentaire a l'obligation d'accomplir ces opérations et que la loi,
contrairement à ce qui se passe en matière de partage, ne contient pas de
prescription limitant son pouvoir de disposition et soumettant celui-ci à
des restrictions quant à ses modalités, on doit admettre qu'on ne saurait
le priver des moyens nécessaires pour l'exécution de sa mission, ni la
faire dépendre d'une autorisation des héritiers. On doit au contraire
laisser à l'exécuteur testamentaire un large pouvoir d'appréciation,
limité d'une part par le droit de recours des héritiers à l'autorité de
surveillance, d'autre part par son devoir de diligence sanctionné par sa
responsabilité à leur égard (RO 74 I 424/425; cf. aussi RO 97 II 19/20).

    En l'occurrence, Staudhammer n'a pas violé son devoir de prudence en
choisissant la voie de la vente de gré à gré dans les conditions où il
l'a faite: disposant d'une expertise judiciaire récente pour la valeur
de l'immeuble, il était fondé à procéder à la vente au prix estimé par
l'expert, d'ailleurs supérieur à celui offert quelque temps auparavant
par les héritiers. Compte tenu de l'urgence qu'il y avait à régler les
droits de succession, les mesures qu'il a prises étaient appropriées et
ne sauraient être critiquées.

Erwägung 3

    3.- Supposé même d'ailleurs que ces mesures ne fussent pas adéquates,
Staudhammer pourrait encore soutenir qu'il n'a commis aucune faute.
En effet, comme le relève à juste titre la cour cantonale, alors que les
constants changements d'attitude des héritiers auraient pu lui faire
perdre son sang-froid, Staudhammer ne s'est jamais laissé aller à une
démarche intempestive. Il s'est constamment adressé en sa qualité de
curateur à l'autorité tutélaire puis, lorsque ses tentatives de mettre
sur pied une solution amiable eurent échoué, au Juge de paix, dont il
a suivi point par point les conseils. Il a renseigné ce magistrat avec
précision sur l'évolution de la situation et a obtenu son accord avec
la vente proposée dans la décision du 31 mars. Certes, les recourants
soutiennent que l'exécuteur testamentaire ne peut se prévaloir de cette
décision, ni de l'avis de droit demandé au notaire Rehfous, parce que la
décision du 31 mars et la consultation du 3 avril 1970 ne tiennent pas
compte du dépôt qu'ils avaient opéré le 2 avril. Ces affirmations sont
contredites par les faits de la cause: l'exécuteur testamentaire a informé
l'autorité le 3 avril du versement par certains des héritiers des sommes
nécessaires au paiement des impôts et lui a communiqué la consultation
du notaire Rehfous, ce qui n'a pas incité le Juge de paix à modifier
sa décision du 31 mars. De même, le notaire Rehfous a pu tenir compte,
au moins à titre hypothétique, de tous les éléments de la situation,
puisque la première question posée était de savoir si l'intimé pouvait
accepter que les recourants règlent les charges de la succession, leur
laissant la possibilité de se retourner contre dame Giordano.

    Ayant pris la précaution de s'assurer par une expertise de la valeur
de l'immeuble, de solliciter un avis de droit pour élucider tous les
aspects de la situation et enfin de demander et d'obtenir l'accord de
l'autorité de surveillance aux opérations qu'il envisageait, Staudhammer
ne saurait se voir reprocher une faute. On doit en effet admettre que
l'exécuteur testamentaire qui, placé devant un choix délicat, sollicite
l'accord de l'autorité de surveillance ne commet pas de faute s'il exécute
ponctuellement les instructions de cette autorité (TUOR, n. 29 i.f. ad
art. 518 CC; LOB, op.cit., p. 123 et n. 27).

    Il faut encore relever que, bien qu'avisés assez tôt des intentions
de l'exécuteur testamentaire, qui furent confirmées à leur conseil le 3
avril 1970, les recourants n'ont entrepris aucune démarche quelconque pour
obtenir de l'autorité de surveillance qu'elle interdise à Staudhammer la
vente de gré à gré prévue 4 jours plus tard, ni même seulement pour la
faire différer.

Erwägung 4

    4.- C'est dès lors à juste titre que les premiers juges ont considéré
que Staudhammer n'avait pas violé ses devoirs d'exécuteur testamentaire,
ni commis de faute et, en conséquence, rejeté l'action des recourants dans
la mesure où ils avaient qualité pour agir. C'est de même à bon droit
que la cour cantonale a refusé d'ordonner une expertise sur la valeur
de l'immeuble vendu, dès l'instant qu'en principe la responsabilité
de l'exécuteur testamentaire n'était pas engagée et que les recourants
n'avaient allégué aucun fait qui permette de penser qu'il ait commis une
grossière et fautive erreur d'appréciation en acceptant de vendre les
actions litigieuses au prix de 1'600'000 fr. proposé par l'expert Dumur,
prix d'ailleurs supérieur de 150'000 fr. à 200'000 fr. à celui offert
par les recourants pour le même immeuble quelques mois auparavant. La
responsabilité de Staudhammer n'étant pas engagée en principe, il était
expédient d'éviter les frais d'une expertise que rien dans le dossier
ne justifie.

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours.