Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 101 II 31



101 II 31

9. Arrêt de la IIe Cour civile du 22 mai 1975 dans la cause Barthoulot
et consorts contre Barbezat. Regeste

    Eigenhändige letztwillige Verfügung. Datum. Formmangel. Art.
505 Abs. 1, 520 ZGB.

    Das Datum des eigenhändigen Testaments muss die Angabe von Ort, Jahr,
Monat und Tag der Errichtung der Urkunde enthalten. Alle diese Angaben
sind vom Gesetzgeber als gleichwertig betrachtet worden und sind daher
gleicherweise unerlässlich. Es dürfen zwischen ihnen keine Unterschiede
gemacht werden; z. B. darf nicht zugelassen werden, dass die mangelnde
Ortsangabe mittels äusserer Umstände wie die Erwähnung des Wohnortes des
Erblassers im Testament ergänzt werde.

Sachverhalt

    A.- Marie-Antoinette Barthoulot est décédée à La Chaux-de-Fonds le
8 janvier 1972. Ses héritiers sont ses deux frères, René et Armand, sa
soeur Bernadette Barbezat-Barthoulot et les quatre enfants de sa soeur
prédécédée, Madeleine Vacher-Barthoulot.

    Marie-Antoinette Barthoulot a laissé le testament olographe suivant:

    "Moi soussignée Barthoulot M. Ant. née le 14 XI 1909 domiciliée
   au Chauffard, près Le Locle, lègue à mes frères René Barthoulot,

    Armand Barthoulot et à ma nièce M. Jeanne Vacher la forêt que je
   possède.

    A ma soeur Bernadette Barbezat ma maison avec ce qu'elle contient
   et mes terres.

    Ainsi écrit en entier daté et signé de ma main le quatre janvier mil
   neuf cent septante-deux.

    Marie-Antoinette Barthoulot."

    L'acte ne contient pas l'indication du lieu où il a été fait.

    B.- Armand et René Barthoulot, ainsi que les quatre enfants de
Madeleine Vacher-Barthoulot, ont ouvert, le 25 janvier 1973, contre
Bernadette Barbezat-Barthoulot, action en nullité du testament. Ils
ont invoqué le fait que le lieu de confection du testament n'a pas été
indiqué et ont fait valoir que la testatrice était incapable de disposer
au moment de l'acte. Ils ont cependant abandonné ce second moyen dans
leurs dernières conclusions devant la juridiction cantonale.

    Par jugement du 16 décembre 1974, le Tribunal cantonal de Neuchâtel
a rejeté l'action. Il a constaté que le lieu de domicile indiqué dans
l'acte coïncide avec le lieu où l'acte a été rédigé, et il a admis que
par inadvertance la testatrice n'a pas reporté au bas du testament le
lieu de la confection de l'acte, alors qu'on peut supposer qu'elle a
précisément voulu indiquer ce lieu par la mention du lieu de domicile. En
l'espèce, le principe du favor testamenti permet de maintenir la validité
du testament, les indices extrinsèques à l'acte ayant prouvé l'identité
des lieux de domicile et de rédaction. De surcroît, l'annulation pour le
vice de forme invoqué paraît d'autant moins justifiée que l'application
du droit ratione loci n'a, en l'occurrence, aucune importance.

    C.- Les demandeurs, qui ont formé un recours en réforme, reprennent
devant le Tribunal fédéral les conclusions en nullité du testament,
prises en instance cantonale.

    La défenderesse conclut au rejet du recours et à la confirmation du
jugement attaqué.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Seul demeure litigieux le point de savoir si, à défaut d'indication
du lieu où il a été dressé, le testament doit être annulé.

    L'art. 505 al. 1 CC prescrit que le testament olographe doit être écrit
en entier, daté et signé de la main du testateur; la date consiste dans
la mention du lieu, de l'année, du mois et du jour où l'acte a été dressé.

    Lors de l'adoption du code civil, le Conseil des Etats avait supprimé
l'exigence de l'indication du lieu, mais le Conseil national décida de
maintenir cette condition de forme et le Conseil des Etats se rallia
à cette décision (Bull. stén. CN 1907 p. 299 et CE 1906 p. 197 et 1907
p. 305).

    A l'étranger, les droits français (art. 970 CC) et italien (art. 602
CC) n'exigent pas l'indication du lieu de confection du testament. En
droit allemand, au début, selon le par. 2231 BGB, le testament olographe
devait porter l'indication du lieu et du jour; mais le Testamentsgesetz
du 4 août 1938, dont les dispositions ont été incorporées au BGB en 1953,
a allégé ces conditions de forme et l'indication du lieu de confection
n'est plus une condition de validité (par. 2247 BGB).

Erwägung 2

    2.- La jurisprudence du Tribunal fédéral considère l'indication du
lieu, conformément au texte clair et précis de l'art. 505 al. 1 CC, comme
une condition de la validité de l'acte (RO 44 II 354; 49 II 10 consid. 1;
50 II 7; 54 II 358; 57 II 153; 64 II 409 consid. 2; 78 II 121; 95 II 3
consid. 1). C'est le lieu de la confection du testament et non le domicile
au moment de la confection qui doit être indiqué (RO 50 II 8).

    L'indication du lieu complète celle de la date, est de nature à
fournir des éléments et des indices quant à l'authenticité du document
et peut avoir une importance au sujet du droit applicable (RO 64 II
410). Une date inexacte ou incomplète (cette expression comprenant
d'après la terminologie même de la loi aussi bien le lieu que la date où
l'acte a été fait) entraîne l'annulation du testament, à moins qu'elle
ne puisse être rectifiée ou complétée au moyen des éléments fournis par
l'acte lui-même, les éléments extrinsèques ne pouvant tout au plus servir
qu'à interpréter l'indication contenue dans le texte, mais ne pouvant en
aucun cas y suppléer (RO 45 II 152/153; 50 II 7/8; 57 II 153; 73 II 211
consid. 2; 93 II 163).

Erwägung 3

    3.- En l'espèce, le testament contient, après le nom et la date de
naissance de la testatrice, l'indication du domicile de cette dernière.
Le lieu de rédaction de l'acte n'est pas mentionné et il n'est dit
nulle part, dans le texte, que l'acte a été rédigé au domicile de la
testatrice. Il ne s'agit pas d'une indication incertaine ou erronée du
lieu de confection du testament. La testatrice a mentionné le lieu de
domicile et elle l'a fait d'une manière exacte. L'acte lui-même ne fournit
aucun élément intrinsèque susceptible de rectifier l'indication du lieu
de domicile en lieu de rédaction de l'acte, c'est-à-dire d'établir que le
lieu de domicile a été effectivement, en même temps, celui de confection
du testament.

    Selon la cour cantonale, on peut supposer que la testatrice,
par l'indication du lieu de domicile, a voulu indiquer le lieu de la
confection de l'acte, que par inadvertance elle n'a pas reporté au bas
du testament. Ce n'est, cependant, qu'une supposition toute gratuite,
qui ne s'appuie sur aucun élément tiré de l'acte lui-même.

    Certes, le testament contient une indication de lieu et la situation
n'est pas la même que si dans l'acte une pareille indication faisait
totalement défaut. Mais le lieu indiqué est celui du domicile de la
testatrice et, sur ce point, il n'y a ni incertitude ni erreur ni
possibilité ou marge d'interprétation. Aucun élément déduit de l'acte
lui-même ne permet d'affirmer ou de supposer que le domicile coïncide avec
le lieu de rédaction, alors qu'il est loisible au testateur de rédiger
son testament ailleurs qu'à son domicile. Dans le jugement déféré,
l'affirmation de l'identité des deux lieux ne repose que sur des éléments
extrinsèques, alors que, en vertu d'une jurisprudence constante, qu'il
n'y a pas lieu ici de revoir, ces éléments peuvent tout au plus servir à
interpréter, appuyer ou corroborer une indication contenue dans le texte,
mais en aucun cas y suppléer ou la remplacer (RO 45 II 152; 50 II 8; 57
II 153; 64 II 187; 73 II 211). Si tel n'était pas le cas, la possibilité
serait ouverte d'introduire dans une disposition à cause de mort une
manifestation de volonté qui n'y figure pas, que le disposant n'a même
pas envisagée et qui, partant, n'émane pas de lui. Le principe du favor
testamenti (RO 98 II 84), invoqué par la cour cantonale, ne saurait faire
échec à ces principes; ce n'est, d'ailleurs, qu'une règle d'interprétation
(ESCHER, Introduction au titre XIV n. 16), à laquelle on ne peut recourir
que si la volonté du testateur n'est pas clairement exprimée et paraît
susceptible de plusieurs interprétations, mais qui n'est pas destinée à
rectifier une volonté claire ou à compléter une volonté lacuneuse. Les
règles d'interprétation qui sont propres aux actes de dernière volonté
ne peuvent servir qu'à élucider ce qui est déjà contenu, d'une manière
incomplète ou peu claire, dans le texte (RO 83 II 435). Cela vaut aussi
bien pour le contenu matériel que pour les exigences de forme.

    Bien qu'elle s'en défende, la cour cantonale ne s'est pas bornée à
rectifier le testament litigieux et à en interpréter une disposition
incomplète. Elle a complété, au seul moyen d'indices extrinsèques,
la volonté de la disposante, le lieu indiqué dans l'acte étant celui du
domicile, sans que des indices fournis par l'acte lui-même (intrinsèques)
permettent de dire que ce lieu ait été en même temps celui de la
confection.

Erwägung 4

    4.- La cour cantonale affirme que, de l'avis de la doctrine, la
jurisprudence selon laquelle l'indication du domicile ne suffit pas
devrait être assouplie.

    TUOR, n. 20 et 22 à l'art. 505 CC, ne fait cependant que reproduire
les règles posées par la jurisprudence du Tribunal fédéral et ne préconise
un assouplissement que de lege ferenda. ESCHER, n. 26 à l'art. 505 CC,
souhaite qu'une date inexacte puisse être corrigée au moyen d'éléments
extrinsèques (l'indication exacte du lieu et de la date est une condition
de la validité, RO 54 II 357; 64 II 409; 75 II 345; 93 II 163), mais
à la condition que le testament contienne une date correcte quant à
la forme ("...vorausgesetzt, dass immerhin ein formell korrektes Datum
vorliegt"). En l'espèce, cette condition n'est pas remplie, l'indication
du lieu de confection du testament faisant totalement défaut.

    Quant aux deux arrêts cités dans le jugement déféré (RO 93 II 164 et 95
II 5), ils ne font que confirmer le principe selon lequel une inexactitude
provenant d'une inadvertance ne peut être rectifiée que sur la base du
testament lui-même.

Erwägung 5

    5.- En conclusion, la décision du Tribunal cantonal neuchâtelois viole
l'art. 505 al. 1 CC. Le lieu de rédaction n'apparaît pas dans le testament
litigieux, seule l'époque de la confection (la date-temps) y figure. La
sanction d'une telle omission est l'annulation de la disposition pour
cause de mort (art. 520 al. 1 CC).

    Ainsi que le Tribunal fédéral l'a déjà déclaré dans l'arrêt RO 44
II 354 (confirmé par RO 49 II 10 consid. 1 et 50 II 7), le législateur
suisse a pris soin de préciser que "la date consiste dans la mention
du lieu, de l'année, du mois et du jour où l'acte a été dressé", et que
toutes ces mentions sont placées sur le même plan et sont donc indiquées
comme également indispensables. Il est dès lors impossible d'établir des
distinctions entre elles et d'admettre, par exemple, que l'on peut suppléer
à l'absence de l'indication de lieu au moyen de preuves extrinsèques à
l'acte. Il est également vain d'examiner la ratio legis, alors que c'est
en pleine connaissance de cause que l'exigence de l'indication du lieu de
confection de l'acte a été maintenue dans le texte définitivement arrêté
lors de l'élaboration du code.

    Il convient aussi de relever que, jusqu'à la modification législative
de 1938, la jurisprudence allemande adoptait le même point de vue (cf.,
entre autres, SOERGEL/SIEBERT, BGB, 10e éd., vol. 6 par. 2247 n. 29).

Entscheid:

             Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Admet le recours, annule le jugement attaqué et admet l'action,
le testament du 4 janvier 1972 de Marie-Antoinette Barthoulot étant annulé.