Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 100 II 339



100 II 339

51. Arrêt de la Ire Cour civile du 17 décembre 1974 dans la cause Sierro
et consorts contre Follonier Regeste

    Verjährung.

    Art. 60 Abs. 2 OR. Die strafrechtliche Verjährung im Sinne dieser
Bestimmung ist die ordentliche Verjährung des Art. 70 StGB, nicht die
absolute Verjährung des Art. 72 Ziff. 2 Abs. 2 StGB, und der Geschädigte
kann sie nach den Vorschriften des Zivilrechtes unterbrechen (Bestätigung
der Rechtsprechung; Erw. 1).

    Beginn der Verjährungsfrist des Art. 127 OR hinsichtlich einer Klage,
welche die Gesellschafter. gegen den geschäftsführenden Gesellschafter auf
Grund der Art. 549 OR (Erw. 2a), 538 und 540 OR erhoben haben (Erw. 2b).

    Art. 135 Ziff. 2 OR. Voraussetzungen der Verjährungsunterbrechung,
wenn der Gläubiger im Strafverfahren gegen den Schuldner als Zivilpartei
auftritt (Erw. 3).

Sachverhalt

    A.- En 1953, Arthur Sierro, Cyrille Bourdin, Edouard Mayoraz, Louis
Tournier et Marcel Dayer, ainsi que Jean Follonier, ont formé une société
simple. Ils ont chargé ce dernier de la comptabilité. La société a été
dissoute en avril 1956. Le 26 mars de cette année, tous les associés
sauf Dayer s'étaient joints à Edouard Rudaz pour fonder la société
anonyme Entreprise générale SA, à Hérémence, en y apportant le matériel
d'exploitation de la société simple, excepté la part revenant à Dayer.

    Le 6 avril 1956, les associés ont chargé la fiduciaire Lemano SA de
contrôler et de mettre à jour les comptes, Follonier n'ayant pas tenu une
comptabilité claire et exacte de la société. Lemano SA, qui ne recevait
pas toutes les pièces nécessaires, a résilié son mandat en 1958.

    Le 9 octobre 1959, Sierro, Bourdin, Mayoraz et Tournier ont
déposé contre Follonier une plainte pénale pour gestion déloyale
où ils déclaraient en outre se constituer parties civiles. Ils ont
encore invoqué plus tard l'abus de confiance. Le 15 février 1961, le
juge-instructeur d'Hérens-Conthey a décidé l'ouverture d'une enquête
pénale contre Follonier. Entendus le même jour, les plaignants ont
confirmé leur constitution de parties civiles, mais en se réservant de
fixer ultérieurement les montants réclamés au prévenu. Le 20 octobre 1965,
le juge-instructeur a rendu une décision de nonlieu, en considérant que
la prescription absolue de l'action pénale était intervenue sept ans et
demi après le mois d'avril 1956. La décision réservait les droits des
parties civiles. Un appel formé par celles-ci a été déclaré irrecevable
le 16 février 1966.

    B.- Le 2 juin 1967, Sierro, Bourdin, Mayoraz et Tournier ont cité
Follonier en conciliation. Par mémoire du 14 septembre 1967, ils ont
conclu à l'établissement des comptes du consortium, Follonier devant
verser à chacun des demandeurs sa part du bénéfice d'exploitation et de
liquidation, part établie par voie d'expertise. Ils ont ensuite précisé
leurs conclusions en demandant chacun le versement de sommes de l'ordre
de 33 000 ou 42 000 fr., le défendeur étant seul débiteur de toutes autres
dettes de la société, qui était déclarée dissoute.

    Le défendeur a conclu au rejet de l'action, en invoquant la
prescription.

    Le Tribunal cantonal du Valais a débouté les demandeurs par jugement
du 22 mars 1974, dont les motifs sont en bref les suivants:

    Fondée sur les art. 548 et 549 CO, ainsi que sur les art. 538 et 540
CO, l'action est soumise à la prescription de dix ans de l'art. 127 CO,
courant dès l'exigibilité, soit dès fin avril 1956 au plus tard. Selon
l'art. 60 al. 1 CO, la prescription serait également intervenue dès le
1er mai 1966 dans la mesure où la demande reposerait sur les art. 41
ss. CO. L'art. 60 al. 2 CO n'est pas plus favorable aux demandeurs,
les délits de gestion déloyale et d'abus de confiance retenus contre
le défendeur, passibles de l'emprisonnement seulement, se prescrivant
après un délai maximum de sept ans et demi, soit en octobre 1963. Enfin,
ni la constitution de partie civile dans le procès pénal, ni la réserve
des droits civils dans la décision de 1965 n'ont pu interrompre la
prescription, du moment que les demandeurs n'ont pas formulé leurs
prétentions civiles.

    C.- Les demandeurs recourent en réforme au Tribunal fédéral. Ils
concluent à ce qu'il soit prononcé que leurs droits ne sont pas atteints
par la prescription, le dossier étant renvoyé au Tribunal cantonal pour
nouveau jugement dans le sens des considérants.

    Le défendeur propose le rejet du recours.

    Les demandeurs ont également formé un recours de droit public que
le Tribunal fédéral a rejeté en tant qu'il était recevable, par arrêt de
ce jour.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- La créance qu'invoquent les demandeurs est de nature délictuelle
dans la mesure où ils se prétendent victimes d'actes illicites du
défendeur. A ce titre, elle est soumise à la prescription de l'art. 60 CO.

    a) Les actes illicites qu'a pu commettre le défendeur l'ont été
avant le 1er mai 1956, les associés ayant cessé toute activité en avril
1956, et les demandeurs en ont connu d'emblée l'auteur. En revanche,
la connaissance du préjudice telle que l'exige la jurisprudence,
c'est-à-dire des circonstances relatives à son existence, à sa nature
et à ses éléments, propres à fonder et motiver une demande en justice
(RO 93 II 502 s. consid. 2 et les arrêts cités, 96 II 41 consid. 2 a),
fait - encore actuellement - défaut. Le défendeur ne peut dès lors se
prévaloir de la prescription annale de l'art. 60 al. 1 CO. Seule entre
en considération la prescription décennale, qui a commencé à courir à
partir du dernier acte, soit au plus tard le 1er mai 1956, et qui était
donc acquise le 1er mai 1966, sauf interruption ou suspension.

    b) L'art. 60 al. 2 CO déclare applicable à l'action civile la
prescription de plus longue durée prévue par les lois pénales si
les dommages-intérêts dérivent d'un acte pénalement punissable. La
prescription pénale visée par cette disposition est la prescription
ordinaire de l'art. 70 CP, dont la fin des agissements coupables détermine
le point de départ (art. 71 CP) et dont le lésé peut interrompre le cours
selon les règles du droit civil, et non pas la prescription absolue
de l'art. 72 ch. 2 al. 2 CP, qui met fin à toute poursuite pénale en
principe lorsque le délai de prescription ordinaire est dépassé de moitié
(RO 97 II 140 s.). C'est donc à tort que le Tribunal cantonal fait état de
la prescription absolue de sept ans et demi, pour les délits de gestion
déloyale et d'abus de confiance. La prescription pénale subsidiaire de
l'art. 60 al. 2 CO était en l'espèce de cinq ans (art. 70, 140 et 159
CP). Etant de moins longue durée que celle de l'art. 60 al. 1, elle
n'entrait pas en considération (RO 90 II 434 s. consid. 4, 93 II 502).

Erwägung 2

    2.- La créance invoquée est de nature contractuelle, et partant soumise
en principe à la prescription décennale de l'art. 127 CO, dans la mesure
où les demandeurs réclament au défendeur leur part au bénéfice éventuel
en vertu de l'art. 549 CO. Il en va de même en tant qu'ils l'actionnent
en dommages-intérêts pour cause de mauvaise gestion selon les art. 538
et 540 CO.

    a) Pour les recourants, le point de départ du délai de dix ans
coïnciderait non pas avec la dissolution de la société, comme l'admet le
Tribunal cantonal, mais avec la fin de la liquidation, qui ne serait pas
encore intervenue à ce jour.

    Le jugement déféré constate que la société simple, qui n'avait
fait l'objet d'aucun contrat écrit, a été dissoute en avril 1956 par
la volonté unanime des associés et qu'elle a cessé toute activité à
ce moment. Tous les associés, sauf un qui a reçu sa part, ont apporté
le matériel d'exploitation de l'entreprise à une société anonyme dont
le capital-actions était essentiellement constitué par cet apport. Les
demandeurs eux-mêmes ont déclaré en procédure qu'ils avaient dû verser
le solde débiteur des comptes courants de la société simple auprès de
la Banque cantonale du Valais et prendre en charge d'autres dettes
sociales. Par le transfert des avoirs á une nouvelle société et le
règlement des dettes, la liquidation de la société était accomplie; elle
pouvait intervenir par actes concluants tout comme la fondation. L'action
en liquidation était dès lors dénuée d'objet. Le droit des associés à la
liquidation suppose en effet l'existence d'avoirs à partager, ainsi qu'un
intérêt des demandeurs à la liquidation.(SIEGWART, n. 3 ad art. 548-550
CO). L'argument des recourants est ainsi mal fondé.

    b) La prescription décennale de l'art. 127 CO court dès que la créance
est devenue exigible (art. 130). S'agissant de l'obligation de réparer les
conséquences d'une gestion fautive de l'associé gérant, l'exécution pouvait
en être exigée immédiatement (art. 75 CO), c'est-à-dire dès l'achèvement
de chaque acte préjudiciable. Selon la jurisprudence, le droit de réclamer
des dommages-intérêts en raison de l'exécution imparfaite de l'obligation
naît en même temps que le droit de demander l'exécution, la prescription
courant indépendamment de la connaissance du dommage (RO 53 II 342 s.,
87 II 158 ss. consid. 3, 163), sous réserve de causes d'interruption ou
de suspension.

Erwägung 3

    3.- Les recourants soutiennent qu'ils ont interrompu la prescription
"par leur dénonciation pénale du 9 octobre 1959 et la déclaration formelle
de se porter partie civile".

    a) Aux termes de l'art. 135 ch. 2 CO, la prescription est interrompue,
notamment lorsque le créancier fait valoir ses droits par une action
devant un tribunal ou par une citation en conciliation.

    En l'espèce, la citation en conciliation du 2 juin 1967 ne pouvait
interrompre la prescription déjà acquise à cette date, que ce soit en
vertu des art. 60 al. 1 ou 127 CO.

    b) Les recourants considèrent avec raison que la notion de l'ouverture
d'action est une notion de droit fédéral (RO 49 II 41, 59 II 406;
cf. aussi RO 89 II 307 consid. 4) et que le fait de se porter partie
civile au procès pénal suffit en soi à interrompre la prescription (RO 60
II 202 in fine). Selon la jurisprudence, il faut entendre par ouverture
d'action tout acte préparatoire ou introductif d'instance par lequel le
demandeur requiert pour la première fois, dans une forme déterminée,
la protection du juge pour faire valoir son droit (RO 42 II 103, 59
II 406 s.). Comme tout acte d'ouverture d'action, la constitution de
partie civile au procès pénal doit être faite sous une forme déterminée,
qui oblige le juge à procéder (RO 41 III 303, 60 II 202 s., 85 II 509
consid. 3 b). De même que la réserve des droits civils aux débats pénaux,
elle n'interrompt pas la prescription lorsque le demandeur ne conclut
pas devant l'autorité répressive au paiement de l'indemnité à laquelle
il prétend ou à la constatation du fondement juridique de cette indemnité
(RO 91 II 437 consid. 10 b). Le défendeur a en effet un intérêt juridique
digne de protection à connaître la nature et l'importance des créances
invoquées contre lui. En l'espèce, les recourants se sont bornés à annoncer
leur demande en se portant parties civiles et en se réservant de fixer
ultérieurement les montants réclamés au prévenu. Aussi longtemps qu'ils
n'avaient pas fait connaître leurs prétentions, le juge pénal n'était
pas tenu de procéder sur le plan civil. Le Tribunal cantonal n'a dès lors
pas violé le droit fédéral en déniant à la déclaration des demandeurs le
caractère d'un acte introductif d'instance. Le moyen tiré de l'interruption
de la prescription doit ainsi être rejeté.

Erwägung 4

    4.- Les recourants font encore valoir que tant qu'il n'y avait pas
de jugement pénal définitif, ils ne pouvaient pas, sous peine de se voir
opposer une exception de litispendance, introduire une action devant un
tribunal civil; la prescription n'aurait dès lors pas pu courir aussi
longtemps que durait l'action pénale.

    Les recourants invoquent à tort l'art. 31 al. 2 de l'ancien code
de procédure pénale du canton du Valais, du 24 novembre 1848. Le droit
fédéral, soit l'art. 134 CO, régit de façon exhaustive l'empêchement
et la suspension de la prescription. Il n'était nullement impossible aux
demandeurs de faire valoir leur créance devant un tribunal suisse (art. 134
al. 1 ch. 6 CO), puisqu'ils avaient le choix entre deux juridictions
suisses. Il leur était loisible de saisir le juge civil en tout temps, en
renonçant à se porter parties civiles au procès pénal. La prescription de
leur créance n'était dès lors pas suspendue pendant la durée de ce procès.

Entscheid:

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours et confirme le jugement attaqué.