Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 100 IB 101



100 Ib 101

17. Arrêt du 17 mai 1974, dans la cause Vermont-Mon Repos, maison de
repos et de vacances de l'Armée du Salut, contre Département fédéral de
l'économie publique. Regeste

    Art. 100 lit. b Ziff. 3 OG.

    Zulässigkeit der Verwaltungsgerichtsbeschwerde gegen eine Verfügung,
die den Geltungsbereich der eidgenössischen Gesetzgebung über die
Fremdenpolizei zum Gegenstand hat (Erw. 1b).

    BRB vom 6. Juli 1973 über die Begrenzung der Zahl der erwerbstätigen
Ausländer; Art. 1 Abs. 2 der Vollziehungsverordnung.

    1.  Die Vollziehungsverordnung vom 6. Juli 1973 umschreibt den Begriff
der Heime und Anstalten, deren Personal den Begrenzungsmassnahmen nicht
unterstellt ist, enger als die frühere Verordnung. Die neue Umschreibung
hält sich indes im Rahmen der in Art. 25 BRB enthaltenen Delegation
(Erw. 2).

    2.  Die sozialen Institutionen der Heilsarmee in der Schweiz haben
ideale, altruistische und philanthropische Zwecke, doch sind diese so
allgemein, dass sie über den Begriff des Heims im Sinne des BRB und der
Vollziehungsverordnung weit hinausgehen. Daher ist von Fall zu Fall zu
entscheiden, ob die Institutionen dem BRB unterstellt sind (Erw. 3).

    3.  Eine Anstalt gemischten Charakters ist nur dann als Heim
zu betrachten, wenn sie überwiegend Personen aufnimmt, die wegen
Krankheit, Gebrechens oder Alters besonderer Pflege, Hilfe oder Aufsicht
bedürfen. Diese Voraussetzungen sind nicht erfüllt, wenn ein Haus mit 90
Betten nur ein geringes und nicht spezialisiertes Personal beschäftigt
(Erw. 4).

Sachverhalt

    A.- L'Association pour les oeuvres sociales de l'Armée du Salut,
coopérative des art. 828 ss. CO, avec siège à Berne, est propriétaire à
Leysin d'une maison de repos et de vacances appelée "Vermont - Mon Repos"
(ci-après: Vermont). Les personnes que cette maison reçoit en pension
complète sont des convalescents, des handicapés ou des dépressifs pour
un tiers, des personnes âgées pour un autre tiers, et pour le reste des
personnes en vacances; le nombre des pensionnaires est de 90 au maximum,
avec des variations saisonnières. L'institution a un but non lucratif. Elle
est exploitée par la Fondation de l'Armée du Salut en Suisse, à Berne. En
plus de deux ou trois officiers de cette organisation, elle occupe quatre
personnes, dont trois de nationalité étrangère.

    La Direction de Vermont ayant décidé en été 1973 d'engager comme
employée de maison une ressortissante française, Noëlle Andrieu, la Police
fédérale des étrangers demanda à l'Office fédéral de l'industrie, des arts
et métiers et du travail (OFIAMT) si ce cas pouvait être considéré comme
non soumis à l'ACF du 6 juillet 1973 limitant le nombre des étrangers
qui exercent une activité lucrative (ROLF 1973 p. 1098), l'art. 2 al. 1
lit. b de cet arrêté déclarant celui-ci non applicable en principe aux
étrangers occupés dans les hôpitaux, asiles et établissements similaires,
publics ou privés.

    B.- Par décision du 4 octobre 1973, l'OFIAMT prononça que Vermont
était soumis aux mesures de limitation.

    Saisi d'un recours, le Département fédéral de l'économie publique
l'a rejeté le 10 janvier 1974, en ajoutant qu'en cas de difficultés
insurmontables, la recourante avait la faculté de demander à l'autorité
cantonale compétente une attribution de main-d'oeuvre étrangère sur le
contingent cantonal.

    C.- Agissant au nom de la fondation qui exploite Vermont, le
Secrétaire en chef de l'Armée du Salut en Suisse attaque ce prononcé
par recours de droit administratif du 9 février 1974, en demandant une
décision du Tribunal fédéral constatant que toutes les institutions
sociales de l'Armée du Salut ont le caractére d'"hôpitaux, asiles et
établissements similaires, publics ou privés", au sens des prescriptions
fédérales limitant le nombre des étrangers qui exercent une activité
lucrative. Selon le recourant, l'Office cantonal du travail, à Lausanne,
a déclaré ne disposer d'aucune unité, fixe ou saisonnière, à attribuer
à Vermont sur le contingent cantonal.

    Le Département fédéral de l'économie publique conclut au rejet
du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Le recours a été présenté en temps utile et dans les formes
requises par la loi, encore que motivé de façon très sommaire.

    La Fondation pour l'Armée du Salut en Suisse avait qualité pour
recourir. Elle agissait en effet comme employeur, puisque exploitant
Vermont; or, selon l'art. 24 de l'ACF du 6juillet 1973 limitant le
nombre des étrangers qui exercent une activité lucrative (ci-après:
ACF du 6juillet 1973), l'employeur a également le droit de recourir,
si bien qu'on se trouve dans l'hypothèse prévue par l'art. 103 lit. c OJ.

    b) On peut en revanche se demander si, quant à son objet, le recours
est de la compétence du Tribunal fédéral, ou s'il ne relève pas plutôt
du Conseil fédéral. Selon l'art. 100 lit. b ch. 3 OJ, le recours de
droit administratif n'est en effet pas ouvert, en matière de police
des étrangers, contre l'octroi ou le refus d'autorisations auxquelles
le droit fédéral ne confère pas un droit. Or, comme les arrêtés qui
l'ont précédé le 21 avril 1971 (ROLF 1971 p. 471), le 16 mars 1970
(ROLF 1970 p. 309), les 28 février 1968/26 mars 1969 (ROLF 1968 p. 386
et 1969 p. 316) et antérieurement, l'ACF du 6 juillet 1973 a été édicté
en application des art. 16, 18 al. 4 et 25 de la LF sur le séjour
et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20), si bien qu'il fait
partie de la législation fédérale en matière de police des étrangers, son
but particulier étant d'ailleurs expressément prévu par l'art. 16 al. 1
LSEE. L'art. 4 de cette loi dispose que l'autorité statue librement, dans
le cadre des prescriptions légales et des traités avec l'étranger, sur
l'octroi de l'autorisation de séjour; la jurisprudence en a déduit que,
sous réserve de certains traités, il n'y avait pas de droit à l'octroi
ou au renouvellement d'une telle autorisation, et que le recours de droit
administratif n'était par conséquent pas possible en cas de refus (RO 99
Ib 198, 97 I 553). On pourrait considérer que cette jurisprudence vaut
aussi pour les décisions prises en vue de limiter le nombre des étrangers
qui exercent une activité lucrative en Suisse.

    aa) La question, qui n'est pas tranchée par la loi spéciale, a déjà
fait l'objet de trois échanges de vues avec le Conseil fédéral. Lors du
premier, le 10 février 1970, le Tribunal fédéral a admis sa compétence,
mais cela n'est plus décisif, car il s'agissait de l'application de
dispositions spéciales de l'ACF des 28 février 1968/26 mars 1969, qui n'ont
plus leur équivalent dans la réglementation actuelle. La seconde fois,
le 4 juin 1970, le Tribunal fédéral a affirmé que les recours contre les
décisions prises par le Département fédéral de l'économie publique ou par
l'autorité cantonale de dernière instance en application de l'ACF du 16
mars 1970 n'étaient pas de sa compétence; mais il s'agissait d'un échange
de vues de principe, en dehors de tout cas concret. Enfin, le 10 décembre
1971, le Tribunal fédéral a accepté de se saisir des recours qui seraient
formés contre des prononcés du Département fédéral de l'économie publique
revoyant des décisions prises par l'OFIAMT en application de l'art. 16
al. 1 lit. d de l'ACF du 21 avril 1971, c'est-à-dire quant à la question
de savoir si un employeur remplit les conditions permettant d'occuper de
la main-d'oeuvre saisonnière; il a été considéré qu'étant relatives au
champ d'application de l'arrêté du Conseil fédéral, de telles décisions
ne concernaient pas l'autorisation de séjour et de travail à accorder à
une personne déterminée et qu'elles ne tombaient donc pas sous le coup
de l'art. 100 lit. b ch. 3 OJ. Pour le surplus, le Tribunal fédéral a
expressément réservé la position prise le 4 juin 1970.

    Depuis lors, le Tribunal fédéral a jugé par deux fois des affaires où
il s'agissait de se prononcer sur l'applicabilité de l'arrêté du Conseil
fédéral, en général ou dans certaines de ses dispositions particulières
(arrêt non publié Josefheim, du 14 août 1972: qualification d'une
institution comme hôpital, asile ou établissement similaire; arrêt non
publié Dillier AG, du 16 novembre 1973: qualification d'une entreprise
comme entreprise saisonnière). Dans les deux cas, la recevabilité du
recours de droit administratif résultait de ce qui avait été admis le 10
décembre 1971.

    bb) On se trouve ici en présence d'un cas semblable.  Certes, c'est
à l'occasion de l'engagement d'une personne déterminée que l'OFIAMT a
été amené à prendre la décision négative qui est à l'origine du présent
recours. Mais il l'a fait en application de l'art. 17 al. 2 lit. a/aa
de l'ACF du 6 juillet 1973, qui lui donne compétence pour statuer sur
l'assujettissement à cet arrêté. Il s'agissait bien de trancher une
question d'assujettissement, à savoir de décider si le personnel de Vermont
est en principe soumis ou non aux mesures de limitation. Le cas particulier
de Noëlle Andrieu n'était pas directement visé dans la décision prise.

    Il y a lieu de confirmer ce qui a été implicitement admis dans les
deux arrêts précités, sur la base de l'échange de vues de fin 1971. Cette
pratique trouve sa justification en ceci que l'art. 4 LSEE n'accorde un
pouvoir de libre décision à l'autorité que dans le cadre de la législation
fédérale; la question de savoir si celle-ci est applicable dans certaines
circonstances échappe à ce pouvoir de libre décision, et elle doit pouvoir
être portée devant le Tribunal fédéral par la voie du recours de droit
administratif.

    Au surplus, c'est en l'espèce le droit de l'employeur d'occuper
librement du personnel étranger qui est en cause, droit qui découle
en principe de l'art. 31 Cst. et qui est simplement restreint par les
mesures de limitation édictées par le Conseil fédéral; il ne s'agit donc
pas de la faculté pour une personne étrangère d'obtenir une autorisation
de séjour et de travail. Mais la question de la compétence du Tribunal
fédéral doit être entièrement réservée pour l'hypothèse où il s'agirait
d'une telle autorisation en elle-même.

    c) Le recours est ainsi recevable.

    Le Tribunal fédéral ne pourrait intervenir en l'espèce que pour
violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir
d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des
faits pertinents, sans qu'il lui appartienne de revoir d'éventuelles
questions d'opportunité (art. 104 OJ).

    Les faits qui ressortent du dossier ne sont ni contestés ni incomplets,
si bien qu'il y a lieu d'examiner uniquement s'il y a eu violation du
droit fédéral, éventuellement excès ou abus du pouvoir d'appréciation
de l'administration.

Erwägung 2

    2.- Selon l'art. 2 al. 1 lit. b de l'ACF du 6 juillet 1973, cet arrêté
ne s'applique pas aux étrangers exerçant une activité lucrative à l'année
et aux saisonniers occupés dans les hôpitaux, asiles et établissements
similaires publics ou privés, sauf en ce qui concerne les art. 12 à 14,
20 et 22. La même disposition figurait déjà dans les arrêtés précédents.

    A l'art. 1er al. 2 de l'ordonnance d'exécution du 6 juillet 1973 (ROLF
1973 p. 1111), le Département fédéral de l'économie publique a précisé
qu'il devait s'agir "d'asiles et établissements destinés à éduquer,
soigner ou assister des personnes qui, pour des raisons de maladie,
d'infirmité ou d'âge, ont régulièrement besoin de l'assistance de tiers ou,
du fait de leur comportement, doivent être spécialement surveillées et
assistées". Sur trois points, cette définition est plus restrictive que
celle de la précédente ordonnance d'exécution, du 21 avril 1971 (art.
1er al. 2); il n'y est plus question des établissements hébergeant
simplement certaines personnes, ni de l'indigence à côté des raisons
de maladie, d'infirmité, d'âge ou de comportement; en outre, le terme
spécialement a été ajouté avant les mots "surveillées et assistées".

    La légalité de cette définition réglementaire n'est ni contestée ni
d'ailleurs contestable. L'ordonnance d'exécution repose sur une délégation
contenue à l'art. 25 de l'ACF du 6 juillet 1973, dont le texte n'attribue
à vrai dire qu'un pouvoir de haute surveillance au Département fédéral
de l'économie publique, mais dont le titre porte aussi des prescriptions
d'exécution. Or c'est notamment le rôle de telles prescriptions que
de fixer le sens de notions imprécises. La définition de l'asile est
aujourd'hui plus restrictive que naguère, mais cette sévérité accrue
se justifie par le fait que l'ACF du 6 juillet 1973 tend à restreindre
davantage qu'autrefois le nombre des étrangers travaillant en Suisse;
l'art. 1er al. 1 dispose en effet que ce nombre doit être limité d'une
manière efficace (wirksam), alors que l'ACF du 21 avril 1971 parlait
simplement de limiter. S'agissant d'institutions à caractère social plus
ou moins prononcé, il y avait un arbitrage à faire entre les exigences de
la politique sociale, d'une part, et celles de la politique économique et
démographique, d'autre part. Cet arbitrage étant affaire d'opportunité,
le Tribunal fédéral ne pourrait le revoir que s'il y avait été procédé
de façon inconciliable avec la loi; or tel n'est pas le cas à propos de
la notion d'asile.

Erwägung 3

    3.- La recourante voudrait que toutes les institutions sociales de
l'Armée du Salut en Suisse soient considérées comme des asiles ou des
établissements similaires, ce qui aurait pour effet de les soustraire
toutes à l'application de l'ACF du 6 juillet 1973, dans la mesure
prévue à l'art. 2 al. 1 de cet arrêté. Elle demande donc une décision en
constatation de droit, en tant qu'il ne s'agit pas spécialement de Vermont.

    Du point de vue de la procédure, une telle conclusion peut être
tenue pour recevable, en raison d'un intérêt manifeste et actuel de la
recourante (RO 98 Ib 459/460). Mais elle ne peut être admise. Selon les
statuts qui ont été produits, la Fondation de l'Armée du Salut en Suisse
et l'Association pour les oeuvres sociales de l'Armée du Salut ont certes
des buts idéaux, altruistes et philanthropiques. Mais ces buts sont si
généraux qu'ils vont bien au-delà de la notion d'asile telle que définie
de façon restrictive par les dispositions rappelées plus haut. Entrer
dans les vues de la recourante reviendrait à étendre l'application de
ces dispositions à toutes les institutions sociales sans but lucratif,
ce qui n'est évidemment pas possible en l'état actuel du droit. Seuls
le Conseil fédéral et son Département de l'économie publique auraient
pu aller jusque-là, par des prescriptions plus libérales, en admettant
que des considérations de politique sociale l'emportaient sur le souci
de lutter de façon efficace contre la surpopulation étrangère.

    Il faut donc examiner pour lui-même le cas de chaque établissement
en particulier, après en avoir déterminé le caractère réel et spécifique.

Erwägung 4

    4.- La maison de repos et de vacances de Vermont a un caractère mixte.
Selon le recours, ses pensionnaires sont pour un tiers des personnes
convalescentes, handicapées ou dépressives, dont on peut admettre qu'elles
doivent être spécialement surveillées et assistées, voire soignées, au
sens de l'art. 1er al. 2 de l'ordonnance d'exécution du 6 juillet 1973.
Bien qu'étant en partie des personnes âgées, les autres pensionnaires
ne semblent pas être dans cette situation, le directeur de Vermont ayant
luimême écrit le 25 septembre 1973 à l'OFIAMT qu'elles venaient pour un
repos et un renouvellement indispensables, en d'autres termes pour des
vacances. Il y a pour ces personnes simple hébergement, ce qui ne suffit
plus selon la nouvelle ordonnance d'exécution.

    Selon une pratique confirmée par des directives non publiées, l'OFIAMT
fait intervenir dans les cas mixtes de ce genre le critère du caractère
prépondérant de l'établissement. Il faut que celui-ci reçoive en majeure
partie des personnes destinées à être spécialement soignées, assistées ou
surveillées en raison de maladie, d'âge ou d'infirmité, pour qu'on puisse
parler d'un hôpital, d'un asile ou d'un établissement similaire. Ainsi
que le Tribunal fédéral l'a déjà dit dans l'arrêt non publié Josefheim
du 14 août 1972 (consid. 3 i.f.), ce critère raisonnable peut être
retenu. La seule autre solution acceptable consisterait à dire que le
personnel étranger d'un établissement mixte est partiellement soumis et
partiellement soustrait aux mesures limitant le nombre des travailleurs
étrangers; mais les difficultés pratiques seraient considérables et
susciteraient de fréquents litiges, si bien qu'il vaut mieux y renoncer.

    Il s'agit assurément en l'espèce d'un cas limite, au vu du but social
de Vermont, mais cette institution n'a de toute manière pas, pour d'autres
motifs, le caractère d'un asile au sens des dispositions applicables. Selon
ses propres allégations, en effet, elle occupe en dehors de deux à trois
officiers de l'Armée du Salut, dont deux pour la direction, un cuisinier
espagnol, sa femme comme employée de maison, une jeune Anglaise pour un
an et un employé suisse qui était autrefois un cas social; ce personnel
réduit et non spécialisé en ce qui concerne les soins ne permettrait
pas une activité prépondérante d'assistance et de surveillance dans un
établissement de 90 lits. Le recours doit dès lors être rejeté.